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Une Proposition de loi visant à prolonger en 2024 l’utilisation des titres-restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables est en discussion au Parlement. Le texte a pour objet la prorogation stricte du régime dérogatoire établi par l’article 6 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. En pratique, il s’agit de conserver, à près de 5,4 millions de salariés, la faculté d’utiliser les titres-restaurant acquis auprès de leurs employeurs pour l’achat dans les grandes et moyennes surfaces d’articles relevant de l’alimentation du quotidien.
● La reprise de l’inflation que la France subit depuis plus de deux ans se caractérise notamment par une hausse importante du prix des produits alimentaires, qui a tendance à diminuer.
Suivant les dernières statistiques publiées, ces derniers progressaient encore de 7,8 % sur un an en octobre 2023 (contre une augmentation de 9,7 % sur un an en septembre 2023). Entre les mois d’août 2021 et d’août 2023, leur augmentation atteignait 20 %. De fait, l’inflation sur les produits alimentaires constitue l’un des ressorts essentiels de l’inflation globale enregistrée depuis l’été 2021.
Ainsi que le montre le graphique ci-après, le phénomène a connu une brutale accélération entre l’été 2022 et l’été 2023 et connaît à présent une relative diminution progressive, même si le niveau des prix demeure élevé.
Source : Insee, Indice des prix à la consommation – résultats définitifs (IPC)– octobre 2023.
Comme ont pu l’établir de nombreux travaux dont ceux de la commission des affaires économiques ([1]), l’impact de la hausse du prix des produits alimentaires en France doit être appréhendé à l’aune de trois facteurs déterminants :
– premièrement, l’augmentation du prix des intrants (matières premières agricoles et énergie essentiellement) et des coûts de production subie par chaque maillon de la chaîne du secteur agroalimentaire ;
– deuxièmement, l’évolution des taux de marge de l’industrie agroalimentaire et des opérateurs de la grande distribution ;
– troisièmement, la pression de l’inflation générale sur le niveau et la progression du pouvoir d’achat.
● Afin de contrecarrer les effets hautement néfastes de cette conjoncture difficile, les pouvoirs publics ont pris un certain nombre de mesures afin de préserver autant que possible le pouvoir d’achat des ménages. Cette action comporte notamment, depuis juin 2022 :
– une revalorisation des prestations et minima sociaux sur le fondement de la loi précitée du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, avec effet rétroactif au 1er juillet 2022 selon le cas : il en va ainsi pour les pensions de retraite et d’invalidité de base, le revenu de solidarité active (RSA), l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) et la prime d’activité, ainsi que l’aide personnalisée au logement (APL) ;
– l’établissement à titre pérenne de la prime de partage de la valeur (PPV) ([2]), en remplacement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat dite « prime Macron », instaurée en 2019 ;
– une hausse raisonnée du niveau du SMIC et des traitements au sein des trois fonctions publiques (par le biais de deux augmentations du point d’indice en juillet 2022 et juillet 2023, assorties de décisions destinées à améliorer les rémunérations au bas de l’échelle des rémunérations et de mesures catégorielles) ;
– un dispositif incitant les partenaires sociaux à rehausser régulièrement les minima de branche au niveau du SMIC ;
– la facilitation de la résiliation des abonnements et des assurances sur le fondement du dispositif mis en place par la loi précitée sur le pouvoir d’achat ;
– une réforme du cadre et de la périodicité des négociations commerciales (dans le cadre établi par la loi n° 2023-1041 du 17 novembre 2023 portant mesures d’urgence pour lutter contre l’inflation concernant les produits de grande consommation).
● D’abord développée à l’initiative d’entrepreneurs privés, la distribution de titres-restaurant ([3]) constitue une pratique aujourd’hui formalisée dans le cadre hérité de l’ordonnance n° 67-830 du 27 septembre 1967 ([4]). Régis par les articles L. 3262-1 et suivants du code du travail, le titre-restaurant se définit comme « un titre spécial de paiement remis par l’employeur aux salariés pour leur permettre d’acquitter en tout ou en partie le prix du repas consommé au restaurant ou acheté auprès d’une personne ou d’un organisme […] » ([5]). En application de l’article R. 3262-1 du code du travail, il peut être émis sur un support papier ou sous forme dématérialisée, suivant les dispositions prises par les entreprises.
Les émetteurs de titres-restaurant en France
Aux termes de l’article L. 3262-1 du code du travail, les titres-restaurant peuvent être émis soit par l’employeur, soit par une entreprise spécialisée qui les cède à l’employeur moyennant le paiement de leur valeur libératoire et, le cas échéant, d’une commission. On recense aujourd’hui cinq principaux prestataires de service opérant sur le marché des titres-restaurant :
– Edenred (anciennement Accor), qui émet les Tickets Restaurant ;
– Groupe Up (anciennement Chèque Déjeuner), qui émet les Chèques Déjeuner ;
– Natixis Intertitres, qui émet les titres « Bimpli », anciennement « Apetiz » et « Chèque de Table » ;
– Sodexo, qui émet les Chèques restaurant anciennement appelés « Pass Restaurant » ;
– Swile (anciennement Lunchr), qui émet la Swile Card soit des titres restaurants dématérialisés, mais pas de titre papier.
Source : https://www.cse-guide.fr/fiches-pratiques/ticket-restaurant-fonctionnement-comparatif-prix-et-offres/
La distribution des titres-restaurant constitue un avantage social procuré à titre facultatif par l’employeur directement ou par l’intermédiaire du comité social et économique (CSE), à défaut d’une offre de restauration collective interne à l’entreprise.
Il repose sur la relation de travail existant avec les salariés. En conséquence, le bénéfice des titres-restaurant doit être ouvert, pour un même montant et sous des conditions identiques, à l’ensemble des catégories du personnel employé, indépendamment de la nature du contrat de travail, y compris aux stagiaires et aux intérimaires. Toute différence de traitement doit répondre à des motifs objectifs. En outre, le droit reconnu aux employeurs de réserver la fourniture de titres-restaurant à certains salariés demeure conditionné à l’existence d’une indemnité d’une valeur équivalente pour les autres membres du personnel. Sous ces réserves, la valeur des titres-restaurant peut être librement fixée par l’employeur. Par ailleurs, les salariés exerçant leur activité en télétravail peuvent prétendre à la distribution de titres-restaurant.
Le financement des titres-restaurant comporte une contribution des employeurs et/ou du comité social et économique et une participation des salariés bénéficiaires. La prise en charge de l’employeur représente d’ordinaire de 50 % à 60 % de la valeur des titres distribués. Le financement de cette contribution en tout ou partie par le CSE repose nécessairement sur le budget des activités sociales et culturelles. Selon les chiffres recueillis par votre rapporteure, la somme des contributions versées par les employeurs pour les titres-restaurant représentait 4,33 milliards d’euros en 2022.
Sur le fondement de l’article L. 3262-6 du code du travail et dans le cadre défini par l’article 81 du code général des impôts, les titres-restaurant donnent lieu à une exonération d’impôt sur le revenu, ainsi qu’à des exonérations de cotisations sociales. D’après les données communiquées à votre rapporteure pour l’exercice 2021, le montant des exonérations s’élevait à 0,42 milliard d’euros au plan fiscal et à 1,39 milliard d’euros sur le plan des cotisations sociales, soit une dépense pour les finances publiques de l’ordre de 1,5 milliard d’euros.
● Dans le cadre de la loi précitée du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat, le législateur a résolu de faire des titres-restaurant un instrument de soutien au pouvoir d’achat qui pèse sur la consommation des produits alimentaires en étendant de manière provisoire le champ des produits dont ils pouvaient permettre l’achat.
À l’évidence, un tel dispositif dérogatoire se conçoit nécessairement comme une mesure ponctuelle et ciblée. Suivant la remarque formulée au cours de leur audition par des représentants des secteurs de l’hôtellerie-restauration, ainsi que des associations de consommateurs, l’usage des titres-restaurants ne concerne en effet que 5,5 millions de salariés, à raison des critères légaux de leur attribution.
Néanmoins, on ne saurait négliger l’importance de ce complément de rémunération non fiscalisé, tant pour le dynamisme de l’économie nationale que pour le soutien des revenus individuels.
À une échelle macro-économique, il convient en effet de rappeler que les dépenses réalisées au moyens des titres-restaurant atteignaient près de 8,5 milliards d’euros en 2022 (contre 7,87 milliards d’euros en 2021). Il s’agit là d’une ressource en progression régulière, ainsi que le montre le graphique ci-après, et irrigue toute une économie. D’après les éléments dont ont fait état les représentants de la direction générale des entreprises (DGE), les titres-restaurants comptent pour 1 % du chiffre d’affaire des grandes et moyennes surfaces (GMS) et 15 % de celui des restaurants.
ÉVOLUTION DU MARCHÉ DES TITRES-RESTAURANT
(valeur faciale, en milliards d’euros)
Source : commission nationale des titres-restaurants (https://www.cntr.fr/chiffres/)
À une échelle micro-économique, selon les données de la commission nationale des titres restaurants, avec une valeur moyenne de 7,70 euros, le dispositif des titres-restaurant permet un cofinancement des dépenses de restauration exposées par les salariés de l’ordre de 154 euros par mois ([6]). Dès lors, la diversification de l’usage des titres-restaurant conforte la protection du pouvoir d’achat dans une période d’inflation élevée.
C’est la raison pour laquelle la prorogation de la dérogation introduite par la loi précitée du 16 août 2022 peut être jugée opportune à titre temporaire. En revanche, la pérennisation d’un tel dispositif ne va pas de soi sans une réflexion quant à la finalité des titres restaurants et à leur place dans la vie économique et sociale au sens large.
Ainsi que l’ont rappelé les organisations représentatives du secteur de l’hôtellerie restauration, et – à un moindre degré – les associations de consommateurs, les titres-restaurants possèdent depuis l’origine un objet social : ils visent à soutenir les dépenses exposées par les salariés au cours de leur pause déjeuner (historiquement dans des restaurants et commerces de bouche) et participent d’un avantage social. Cette nature justifie la contribution des employeurs à leur financement, de même que la participation des finances publiques sous la forme d’une exonération aux plans fiscal et social. Dans cette optique, transformer les titres-restaurant en moyens de paiement ordinaires pour tout produit de consommation comporte le risque d’en dénaturer l’usage et de mettre en cause sa raison d’être. Votre rapporteure peut partager ce point de vue même si elle estime qu’il convient de prendre toute la mesure de l’évolution des conditions de vie salariale et des habitudes de consommation, en particulier dans le contexte créé par le recours accru au télétravail.
En outre, l’évolution de l’usage des titres-restaurant peut comporter des incidences économiques qu’il reste à mesurer, en particulier sur le plan de la concurrence entre les opérateurs économiques du secteur de la restauration et de l’alimentation.
Ainsi, les dernières statistiques tendent à mettre en lumière un glissement dans la répartition des dépenses réalisées au moyen des titres restaurants des commerces de bouche et de l’hôtellerie-restauration vers les grandes et moyennes surfaces (GMS). D’après les données consolidées par la commission nationale des titres-restaurant pour le troisième trimestre 2023 évoqués par l’ensemble des acteurs auditionnés, les restaurants et commerces de bouche ne représenteraient plus que respectivement 44 % et 27 % du chiffre d’affaires générées par les titres, contre 28 % pour les GMS. La part de ce secteur augmenterait de six points, ce qui représenterait 500 millions d’euros de recettes supplémentaires. Par contraste, les commerces de bouche et les restaurateurs accuseraient des pertes économiques de l’ordre de 280 millions et 200 millions d’euros.
Objectivement, l’évaluation de l’impact de la dérogation autorisée par la loi du 16 août 2022 sur les équilibres de la concurrence ne va pas de soi. Ainsi que l’ont indiqué les représentants de la DGE, les données disponibles ne permettent pas nécessairement d’analyser avec suffisamment de précision les produits alimentaires dont la consommation résulte de l’usage des titres-restaurant depuis août 2022. En outre, rien ne permet de déterminer dans quelle mesure le recul de la part des restaurants et commerces de bouche procède du changement du droit applicable ou si l’assouplissement temporaire de la législation a accentué une évolution des modes de consommation déjà en germe parmi les salariés.
Le constat n’en conduit pas moins à demeurer attentif à la situation des restaurants et des commerces de bouche et à préserver l’équilibre du dispositif temporaire établi dans le cadre d’une loi portant des mesures d’urgence en faveur du pouvoir d’achat. Du point de vue de votre rapporteure, cette prudence n’interdit pas d’envisager, dans le cadre d’un autre véhicule législatif, une réforme plus profonde des titres-restaurants et la mise en place d’instruments qui répondent à d’autres enjeux en matière de pouvoir d’achat et d’amélioration de l’accès à une nourriture de qualité.
— 1 —
COMMENTAIRE DE L’ARTICLE UNIQUE
Adopté par la commission.
L’article unique de la proposition de loi vise à maintenir jusqu’à la fin de l’année 2024 la faculté donnée aux salariés de recourir à des titres-restaurant pour l’achat de tout produit alimentaire, qu’il soit ou non directement consommable. À cet effet, le texte proroge jusqu’au 31 décembre 2024 la dérogation établie par l’article 6 de la loi n° 2022‑1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.
I. L’ÉTAT DU DROIT : DES CONDITIONS D’USAGE DES TITRES-RESTAURANT ÉTENDUES EN VERTU DE DISPOSITIONS TEMPORAIRES
Si la mise en œuvre du dispositif des titres-restaurant s’inscrit dans un cadre juridique stabilisé, fondamentalement régi par les articles L. 3262-1 à L. 3262-7 du code du travail, les règles relatives à leur utilisation font aujourd’hui l’objet d’un assouplissement temporaire. Celui-ci résulte d’une disposition prise dans le cadre de la loi du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat ([7]). Introduite dans le texte en première lecture par la commission des affaires sociales du Sénat ([8]), la mesure consiste à élargir, pendant une période provisoire, la faculté donnée aux salariés de recourir aux titres-restaurant afin de soutenir leur pouvoir d’achat.
1. Un élargissement ponctuel du champ d’utilisation des titres-restaurant
En premier lieu, l’article 6 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 ([9])étend la gamme des produits alimentaires que les salariés peuvent acheter au moyen des titres-restaurant remis par leur employeur. Par l’établissement d’une dérogation partielle à l’article L. 3262-1 du code du travail, cette disposition autonome y intègre « tout produit alimentaire, qu’il soit directement ou non consommable, acheté auprès d’une personne ou d’un organisme mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 3262-3 du même code ».
Entrent potentiellement dans le champ de la dérogation l’ensemble des produits alimentaires, bruts ou transformés exigeant une préparation pour être consommés (à l’exemple des pâtes, du riz, des œufs, de la viande ou de la farine), à l’exclusion toutefois de l’alcool, des confiseries, des produits infantiles et des aliments animaliers. Cette catégorie s’ajoute à celle des repas servis dans les restaurants qui, aux termes de l’article R. 3264-2 du code du travail, peuvent être composés de « préparations alimentaires directement consommables, le cas échéant à réchauffer ou à décongeler, notamment les produits laitiers », ou encore « de fruits et légumes, qu’ils soient ou non directement consommables ».
Dans ce cadre temporaire, les titres-restaurant peuvent être utilisés pour les achats réalisés auprès :
– de restaurateurs et des hôteliers restaurateurs,
– de détaillants en fruits et légumes,
– d’organismes ou entreprises assimilés.
D’après l’exposé des motifs de l’amendement à l’origine de la disposition, la dernière catégorie des « entreprises assimilées » inclurait les détaillants et les supermarchés. En pratique, il convient d’y ajouter les différents commerces de bouche (boucherie, charcuterie, boulangerie, enseignes de fast-food, primeurs).
2. Une mesure dérogatoire applicable jusqu’à la fin de l’année 2023
En second lieu, l’article 6 de la loi précitée n° 2022-1158 du 16 août 2022 donne à l’élargissement du champ d’utilisation des titres-restaurant le caractère d’une adaptation temporaire du droit en vigueur. En l’occurrence, il fixe au 31 décembre 2023 le terme de cette dérogation applicable exclusivement entre l’entrée en vigueur de la loi sur le pouvoir d’achat – soit le 18 août 2022 – et cette date butoir.
On notera que l’extension du champ de l’usage des titres-restaurant n’a donné lieu à aucune évolution des dispositions du code du travail précisant les droits et obligations des salariés et employeurs. Un tel choix peut s’expliquer par deux considérations : d’une part, la nature du dispositif qui pouvait être tenu pour une mesure d’application directe ; d’autre part, la perspective d’un ralentissement de l’inflation sur les produits alimentaires rendant inutiles des développements réglementaires.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE STRICTE PROROGATION EN 2024 DE LA DÉROGATION AUTORISÉE PAR LA LOI À TITRE EXCEPTIONNEL
1. Un prolongement d’une année d’une mesure ponctuelle décidée par le législateur afin de soutenir le pouvoir d’achat des salariés
L’article unique de la proposition de loi vise à maintenir, en 2024, la faculté pour les salariés d’utiliser les titres-restaurant dans le cadre dérogatoire établi par la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022. À cet effet, il propose de reporter d’un an l’échéance à laquelle devait expirer ce dispositif exceptionnel en substituant, à l’article 6 de la loi précitée sur le pouvoir d’achat, la date du « 31 décembre 2024 » à celle du « 31 décembre 2023 ».
Ainsi que l’établit l’exposé des motifs de la proposition de loi, le prolongement de cette dérogation répond avant tout à la nécessité de conforter le pouvoir d’achat des salariés. Dès lors, on peut estimer que l’élargissement des conditions d’usage des titres-restaurant répond à un motif d’intérêt général, à l’instar des modifications temporaires apportées en 2021, dans le contexte exceptionnel de la crise sanitaire provoquée par l’épidémie de Covid-19.
Les modifications apportées aux conditions d’usage des titres-restaurant dans le contexte de la crise Covid-19
Par voie réglementaire ([10]), le Gouvernement a adapté temporairement les conditions dans lesquelles les salariés pouvaient utiliser les titres-restaurant émis en 2020 et 2021 afin de contrecarrer les obstacles crées par la crise sanitaire due à l’épidémie de Covid-19. Les mesures tendaient à préserver l’usage d’un instrument de paiement relevant des acquis sociaux en donnant aux salariés les moyens de surmonter les difficultés inhérentes aux restrictions qui encadraient la circulation des personnes, ainsi que l’ouverture des commerces.
Elles consistaient en pratique à :
– étendre la période d’utilisation des titres-restaurants émis pour l’année civile 2020 jusqu’au 31 août 2021, au-delà des délais prévus par le droit en vigueur ;
– permettre l’échange gratuit des titres non utilisés au cours de cette période et rendus à leur employeur par les salariés bénéficiaires, contre un nombre égal de titres émis pour l’année 2021 ;
– autoriser à titre dérogatoire l’utilisation des titres-restaurant les dimanches et jours fériés, jusqu’au 31 août 2021 puis jusqu’au 28 février 2022, dans les restaurants et hôtels -restaurants ou les débits de boissons assimilés à ceux-ci.
Le recours à une disposition législative s’impose ici à deux titres :
– à raison de l’objet de la dérogation ainsi prorogée, laquelle porte sur la définition même du champ des produits dont le prix peut être acquitté au moyen des titres-restaurant, périmètre fixé par l’article L. 3262-1 du code du travail ;
– par parallélisme des formes, le dispositif prorogé découlant de l’article 6 de la loi précitée du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat.
2. Une reconduction des conditions d’usage des titres-restaurant à titre dérogatoire et pour un délai limité
En dehors du report de l’échéance fixée par l’article 6 de la loi n° 2022- 1158 du 16 août 2022, la proposition de loi n’affecte pas les conditions d’usage des titres-restaurants applicables depuis l’entrée en vigueur de ce texte. Elle se borne à renouveler les termes de la dérogation établie par le législateur dans l’emploi de ces instruments de paiement.
En premier lieu, l’article unique de la proposition de loi ne modifie en rien les dispositions qui définissent leur finalité et le champ des produits alimentaires qu’ils permettent d’acheter dans ce cadre.
Aux termes de la dérogation à l’article L. 3262-1 du code du travail, les salariés pourront ainsi les utiliser afin de régler tout ou partie du prix de « tout produit alimentaire, qu’il soit ou non directement consommable, acheté auprès d’une personne ou d’un organisme mentionné à l’article L. 3263-3 du [code du travail] ». Comme précédemment indiqué, ces catégories comprennent les personnes et organismes exerçant la profession de restaurateur, d’hôtelier- restaurateur ou une activité assimilée, ou la profession de détaillant en fruits et légumes. Ce faisant, la proposition de loi confère aux titres-restaurant le statut de moyen de paiement pouvant avoir un double usage : d’une part, l’acquittement de tout ou partie du prix d’un repas servi dans le cadre d’un service de restauration sur place ou à emporter – ce qui correspond à la finalité assignée en principe par l’article L. 3262-1 du code de travail ; d’autre part et à titre dérogatoire, l’achat de tout produit alimentaire auprès des personnes et organismes mentionnés à l’article L. 3262-3 du code du travail.
En second lieu, l’article unique de la proposition de loi ne remet en cause ni les critères d’attribution, ni les modalités d’utilisation des titres-restaurants. Le texte en préserve ainsi la vocation spécifique, les règles applicables en la matière restant celles énoncées par les dispositions des articles R. 3262-5 à R. 3262‑10 du code du travail.
En effet, seuls continueront à bénéficier de la faculté consacrée par la loi précitée sur le pouvoir d’achat les salariés et assimilés. En l’absence de toute autre modification des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, l’attribution de titres-restaurant demeure suspendue à l’existence d’une relation salariale au sens du droit du travail. En outre, aux termes de l’article R. 3262-7 du code du travail, « un même salarié ne peut recevoir qu’un titre-restaurant par repas compris dans son horaire de travail journalier. » L’article précise que le titre « ne peut être utilisé que par le salarié auquel l’employeur l’a remis ».
La même stabilité juridique prévaut en ce qui concerne la durée de validité des titres-restaurant qui demeurera régie par l’article R. 3262-5 du code du travail. En l’occurrence, l’article pose le principe suivant lequel « [l] es titres restaurants ne peuvent être utilisés en paiement d’un repas à un restaurateur ou à un détaillant en fruits et légumes que pendant l’année civile dont ils font mention et durant une période de deux mois à compter du 1er janvier de l’année suivante. » L’article spécifie de surcroît que « les titres non utilisés au cours de cette période et rendus par les salariés bénéficiaires à leur employeur au plus tard au cours de la quinzaine suivante sont échangés gratuitement contre un nombre égal de titres valables pour la période ultérieure. » Par ailleurs, l’article R. 3262-8 du code du travail exclut l’usage des titres-restaurant les dimanches et jours fériés, « sauf décision contraire de l’employeur au bénéfice exclusif des salariés travaillant pendant ces mêmes jours ».
En dernier lieu, la proposition de loi demeure sans effet sur les dispositions réglementaires du code du travail qui tendent à ce que les avantages procurés par les titres-restaurant conservent le caractère d’un complément de rémunération en rapport avec les conditions d’exercice de l’activité salariale. Il en va ainsi de l’article R. 3262-9 qui prévoit que « les titres‑restaurant ne peuvent être utilisés que dans le département du lieu de travail des salariés bénéficiaires et les départements limitrophes […] » ([11]). Pour sa part, l’article R. 3262-10 fixe un plafond dans l’usage des titres limité à 25 euros par jour (contre 19 euros avant le 1er octobre 2022).
En cela, l’article unique de la proposition de loi ne porte pas de mesure susceptible de banaliser l’usage de cet avantage social ou de le transformer en quasi-monnaie. Par la modification circonscrite apportée à l’article 6 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022, il se borne à proroger à titre temporaire un dispositif avant tout destiné à soutenir le pouvoir d’achat des salariés face à l’inflation qui affecte le prix des produits alimentaires.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
La commission a adopté l’article unique de la proposition de loi sans modification.
— 1 —
Au cours de sa réunion du mardi 21 novembre 2023, la commission des affaires économiques a examiné la proposition de loi visant à prolonger en 2024 l’utilisation des titres-restaurant pour des achats alimentaires non directement consommables (n° 1870) (Mme Anne-Laure Babault, rapporteure).
M. le président Guillaume Kasbarian. Notre commission examine la proposition de loi visant à prolonger en 2024 l’utilisation des titres-restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables.
Dans la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, nous avons voté une mesure dérogatoire permettant d’étendre l’éligibilité des titres‑restaurant à des produits non directement consommables, comme les pâtes ou le riz, mais cette dérogation ne s’applique que jusqu’au 31 décembre 2023.
Si l’inflation des prix des produits alimentaires s’est fortement ralentie depuis, ils demeurent à un niveau élevé et nombre d’entre nous, sur tous les bancs de cette assemblée, ont souhaité prolonger la dérogation en 2024 : cette mesure constitue une aide précieuse pour nombre de salariés et leur famille.
Avec les présidents des groupes Renaissance, Démocrate (MODEM et indépendants) et Horizons et apparentés, j’ai donc déposé la présente proposition de loi. Le calendrier étant très chargé jusqu’à la fin de l’année, j’ai demandé ce matin en conférence des présidents que le texte fasse l’objet d’une procédure d’examen simplifié. Les groupes Rassemblement national et La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale s’y sont opposés. De son côté, le Gouvernement a bien voulu inscrire le texte à l’ordre du jour de cette semaine, tout en mettant en œuvre la procédure accélérée.
Je salue la présence de Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des PME, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, qui a annoncé la semaine dernière qu’elle soutiendrait la mesure.
La rapidité de la procédure impose de désigner dès à présent une rapporteure. Je vous propose de nommer Mme Anne-Laure Babault, du groupe Démocrate.
(Assentiment.)
Mme Anne-Laure Babault est donc nommée rapporteure.
Vingt-six amendements ont été déposés sur le texte. Puisqu’il ne prévoit de modifier que la durée de la dérogation, j’ai déclaré irrecevables, au titre de l’article 45 de la Constitution, dix amendements dépourvus de lien avec ce cadre temporel, comme ceux visant à élargir la liste des produits éligibles ou à modifier les modalités d’utilisation des titres-restaurant. Par ailleurs, deux amendements ont été considérés contraires à l’article 40 de la Constitution. Il reste donc quatorze amendements à examiner.
Il conviendra probablement de redéfinir le champ des titres-restaurant et leurs modalités d’utilisation, et de s’interroger sur leur dénomination. Cependant, nous ne pouvons concevoir une telle réforme sur un coin de table. Les syndicats, les restaurateurs et les commerçants ont manifesté leur intention de s’exprimer. Il faudra mener une concertation pour élaborer des mesures pérennes et éviter de légiférer chaque année sur l’éligibilité des produits alimentaires. J’appelle à mener en 2024 une réflexion approfondie avec tous les acteurs, en vue de refondre le dispositif.
Pour le moment, nous devons légiférer dans l’urgence et à court terme. Soit nous autorisons les 5 millions de bénéficiaires à continuer d’utiliser leurs titres pour des achats alimentaires, soit nous ne votons pas le texte et la dérogation prendra fin le 31 décembre.
Mme Anne-Laure Babault, rapporteure. Nous examinons une proposition de loi visant à proroger le régime dérogatoire qui permet aux 5,5 millions de salariés bénéficiaires de titres-restaurants de les utiliser dans les grandes et moyennes surfaces, en sus des restaurants et des commerces de bouche.
Cette mesure a été votée par le Sénat et définitivement adoptée dans la loi du 16 août 2022, qui prévoyait son extinction fin 2023. À la suite des auditions que nous avons menées, je vous propose de prolonger cette mesure pour l’année 2024.
Tout d’abord, il s’agit de conserver à ces millions de Français une facilité d’utilisation pour leur alimentation du quotidien, dans un contexte d’inflation élevée. En effet, si l’inflation ralentit, que les prix de certaines matières premières commencent à baisser et que nous entrevoyons une baisse potentielle des prix en rayons, l’inflation cumulée depuis plus de deux ans pèse lourdement sur leur pouvoir d’achat.
L’extension du périmètre du titre-restaurant n’est qu’un des outils utilisés pour soutenir ce dernier, avec notamment l’instauration d’une prime de partage de la valeur (PPV), la revalorisation des prestations et minima sociaux et une hausse du Smic.
J’insiste sur l’aspect conjoncturel de la mesure, également liée au renforcement du télétravail. Lors des auditions, tous les acteurs se sont accordés à dire qu’il ne fallait pas dénaturer l’objet social du titre-restaurant. Cofinancé par l’employeur et le salarié, il a pour seul objet de réduire le coût de l’alimentation quotidienne du salarié sur son temps de travail, en palliant l’absence de restauration collective. En aucun cas il ne s’agit d’un chèque alimentaire ou d’une aide à la consommation.
Par conséquent, cette proposition de loi vise à proroger la dérogation, non à réformer partiellement le titre-restaurant. Elle doit nous donner le temps d’examiner, au cours de l’année 2024, les questions du périmètre et de l’évolution du dispositif. Je pense notamment à la simplification des procédures par la dématérialisation et à la faculté de soutenir les associations par des dons de titres.
Par ailleurs, la Commission nationale des titres-restaurants (CNTR) estime que la mesure aurait détourné 500 millions d’euros des restaurants et des commerces de bouche vers la grande distribution, sur un volume global de 9 milliards. Cet effet de bord va à l’encontre de notre volonté commune de défendre les très petites, les petites et les moyennes entreprises (TPE et PME). Il ne serait donc pas opportun de pérenniser le dispositif.
Nous devons prendre le temps de débattre par ailleurs du soutien alimentaire, parce que les Françaises et les Français les plus modestes en ont besoin, pour privilégier une alimentation de qualité pour tous, saine pour la santé et pour l’environnement. Cela concerne également l’agriculture : le changement des modes de consommation permettra d’entamer la transition agroécologique. Le Gouvernement a déjà créé des dispositifs en ce sens.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme. Je vous remercie de m’accueillir ! Il me semblait nécessaire de venir éclairer la position du Gouvernement et contribuer au débat sur le titre-restaurant, objet social cher aux Français.
Cet avantage social a 67 ans. Il vise à contribuer au repas des salariés qui ne disposent pas d’une cantine ou d’un local aménagé à proximité du lieu de travail. La participation de l’employeur est exonérée de cotisations sociales et la part du salarié d’impôt sur le revenu – l’État contribue donc à l’effort, à hauteur de 1,5 milliard par an.
Le titre-restaurant est utilisé par 5 millions de salariés – et par leur famille. Son usage a beaucoup évolué, avec une liberté consentie – on peut le donner à son enfant. L’assouplissement de la loi fait débat. Il s’est beaucoup adapté pendant les crises des dernières années : le confinement a conduit au doublement du plafond quotidien d’utilisation, passé de 19 à 38 euros ; ramené à 19 euros après la pandémie, il a été ajusté à 25 euros, de manière pérenne. L’été dernier, vous avez voté l’assouplissement exceptionnel de son utilisation, après l’adoption d’un amendement de la sénatrice Frédérique Puissat, visant à élargir à des denrées non directement consommables la liste des produits éligibles, jusqu’au 31 décembre 2023. Ce coup de pouce a été utile, notamment en raison de l’inflation. De nombreux Français ont ainsi pu cuisiner chez eux des plats pour les emporter sur leur lieu de travail.
La semaine dernière, j’ai publiquement annoncé la volonté du Gouvernement de prolonger le dispositif. Notre résolution de protéger les Français pendant cette période d’inflation est intacte et notre objectif est clair : proroger d’un an une mesure que des millions d’entre eux plébiscitent. Nous voulons laisser à leur disposition cet outil de défense du pouvoir d’achat, et d’autres. Ne rien faire eût été aller contre les Français qui se sont émus de l’extinction de la mesure, dont beaucoup ignoraient qu’elle était temporaire. Le Gouvernement soutient donc pleinement la présente proposition de loi.
Si aucune voix politique ne s’est élevée contre le prolongement d’un an du dispositif, certaines se sont opposées à la pérennisation. Sur toutes les évolutions structurelles, j’invite à prendre le temps de la concertation. On a clairement, parfois légitimement, reproché à notre majorité de ne pas suffisamment écouter les corps intermédiaires ; s’agissant d’un sujet qui relève du dialogue social, il convient de les faire participer à l’élaboration d’une réforme structurante. J’ai annoncé une telle réforme le 2 octobre. J’en avais averti les représentants des secteurs de l’hôtellerie, de la restauration et du commerce et les partenaires sociaux. Pour ces derniers, il faudra nécessairement consulter, au sein de la CNTR, le Medef, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), l’Union des entreprises de proximité (U2P) côté employeur et FO, la CFTC, la CGT, la CFDT et la Confédération française de l’encadrement‑Confédération générale des cadres (CFE-CGC) côté salariés. Ce sont eux qui financent le dispositif, avec l’État. Décider sans eux reviendrait à décider contre eux.
L’opportunité de pérenniser la mesure qui nous occupe sera examinée dans le cadre de la réforme, comme la dématérialisation – que j’ai annoncée – et le développement des dons aux associations d’aide alimentaire. L’urgence est mauvaise conseillère. Des échanges nourris seront nécessaires, avec les représentants des employeurs, qui financent 60 % du dispositif, et des salariés, qui en financent 40 %.
Je souhaite que la présente proposition de loi ne prévoie qu’un élargissement temporaire, que justifient des raisons exceptionnelles, et que le débat relatif à sa pérennisation soit réservé aux travaux que j’ai lancés pour élaborer une réforme structurante des titres-restaurant, que je présenterai au premier semestre 2024.
M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Pascal Lavergne (RE). Plus de 5 millions de salariés bénéficient du titre‑restaurant. À l’été 2022, l’inflation s’est accélérée, atteignant 6,8 % en juillet ; les parlementaires ont voté la loi dite pouvoir d’achat, qui assouplit provisoirement ses conditions d’utilisation, en autorisant l’achat de tout type de produit alimentaire, y compris des aliments bruts.
Si l’inflation commence à refluer, elle reste supérieure au niveau qu’elle avait atteint lors de l’adoption du projet de loi « pouvoir d’achat ». Les parlementaires de la majorité souhaitent donc proroger la disposition d’un an.
J’ai pris connaissance des amendements déposés par plusieurs groupes d’opposition. Certains visent à pérenniser la disposition. J’y suis très défavorable ! En 2019, les titres-restaurant représentaient 15 % du chiffre d’affaires de la restauration. Rendre la mesure durable condamnerait un secteur déjà fortement éprouvé par la crise liée au covid et les changements d’habitude qui s’en sont suivis, et qui souffre d’une moindre fréquentation en raison de la perte de pouvoir d’achat des Français.
Le titre-restaurant est un avantage fiscal issu du dialogue social entre les salariés et les employeurs qui le financent, avec une contribution significative de l’État. Une éventuelle pérennisation doit être concertée avec les partenaires sociaux, et non hâtivement décidée.
D’autres amendements tendent à prolonger la mesure de deux ans. J’en comprends la logique – peut-être certains veulent-ils éviter de revenir l’année prochaine examiner un texte similaire. Toutefois, la ministre déléguée s’est engagée à organiser un débat sur la dématérialisation des titres. La réforme annoncée devra également envisager les moyens d’inciter à consommer des produits bio et en circuit court. La logique qui consiste à privilégier l’achat de produits transformés au détriment des produits bruts est néfaste. Il faut faire l’inverse, tout en impliquant les restaurateurs dans la réflexion.
J’appelle enfin à réfléchir à l’utilisation des titres-restaurant en milieu rural. Les petites communes n’ont pas toujours de restaurant mais on y trouve parfois des petits producteurs et des épiceries locales qui mériteraient de bénéficier du système.
M. Nicolas Meizonnet (RN). Au fil des semaines et des mois, nous ramenons de nos circonscriptions les requêtes de Français toujours plus nombreux à peiner pour remplir leur frigo et vivre dignement. Pour ceux qui ne peuvent compter sur le soutien de leurs proches ou d’associations, c’est l’heure des privations. Quand on a déjà renoncé à ses loisirs et à partir en vacances, on en vient à réduire les dépenses vitales. Sauter des repas et se passer de produits d’hygiène nécessaire fait désormais partie du quotidien de beaucoup de nos compatriotes. Bien au-delà des plus modestes, cette situation affecte les Français des classes moyennes, y compris les actifs, qui travaillent dur. Or, tout le poids de notre système repose sur cette France laborieuse, courageuse mais discrète. Après deux années d’inflation record, nous en sommes toujours à légiférer sur des mesures d’exception ou des mesurettes, comme l’avance des négociations commerciales, alors qu’il est urgent de s’attaquer au fond du problème.
Vous persistez à rester sourds à nos propositions visant à rendre du pouvoir d’achat aux Français pour longtemps : taxer les superprofits, encadrer temporairement les marges des industriels et de la grande distribution, supprimer la TVA sur les produits de première nécessité et l’abaisser de 20 à 5,5 % sur les énergies. Votre entêtement est lourdement préjudiciable.
S’agissant des titres-restaurant, nous soutiendrons toutes les mesures d’assouplissement des règles d’utilisation. Des stagiaires, des apprentis et nombre de salariés sont à l’euro près : ils accueilleraient une réforme avec enthousiasme. On devrait pouvoir utiliser les titres tous les jours de l’année, pour un plus grand nombre de produits. Nous avions déposé des amendements dans ce sens mais, hélas, ils ont été jugés irrecevables – encore une fois.
Enfin, j’appelle votre attention sur la distorsion de concurrence qu’imposent les quatre principaux acteurs de la filière, en situation d’oligopole, à leurs concurrents. À terme, cela pourrait mettre à mal un modèle conçu pour servir les salariés.
M. Hadrien Clouet (LFI-NUPES). Nous sommes réunis en urgence pour débattre de l’utilisation des titres-restaurant parce que vous vous êtes rappelé un mois et demi avant qu’une mesure adoptée en 2022 arrivait à expiration le 31 décembre. Peut-être les membres du Gouvernement avaient-ils laissé leur téléphone en mode avion depuis l’été dernier.
Récapitulons : en 2022, nous avons examiné un projet de loi visant à préserver le pouvoir d’achat, sans augmenter les salaires ni bloquer les prix. Comme il ne restait plus beaucoup de solutions, vous avez eu l’idée d’élargir le périmètre des titres-restaurant aux produits non directement consommables, afin que les salariés puissent préparer leur repas à la maison. Cela d’ailleurs ne contrevient aucunement à l’objet du titre, qui vise seulement à suppléer une carence de restauration collective.
Vous étant rappelé il y a quelques semaines que la mesure expirait le 31 décembre, il fallait une solution rapide. Vous nous proposez de prolonger la dérogation d’un an et de nous redonner rendez-vous à ce moment-là, sans doute dans les mêmes conditions. Il y aurait pourtant beaucoup d’autres possibilités. Nous avons déposé des amendements pour les défendre, mais très peu ont été jugés recevables, ce qui soulève des questions – M. le président Kasbarian a-t-il lui-même examiné la recevabilité des amendements déposés sur son propre texte ?
La pérennisation offre une première piste. Le problème n’est pas conjoncturel : la crise inflationniste sur les produits alimentaires est désormais structurelle. Les gens ont des raisons sociales et sanitaires de ne pas vouloir acheter une salade emballée bourrée de produits chimiques, peut-être même de glyphosate – qui sait ? – et de préférer apporter leur propre popote sur leur lieu de travail.
Les titres-restaurant profitent à de grands monopoles privés. On peut ainsi payer avec toutes les plateformes « ubérisées » : c’est un problème.
Les quatre grands du secteur procèdent à des ententes illicites et imposent 5 % de commission aux commerçants qui acceptent les titres-restaurant. Vous voulez préserver les marges de ces derniers ? Tapez sur la commission de 5 %.
Nous ne pouvons attendre d’avoir chaque année un débat d’une heure et demie qui ne débouche sur aucune vraie mesure. Aujourd’hui même, le groupe La France insoumise a déposé une proposition de loi relative aux titres-restaurant. Nous espérons l’examiner l’année prochaine pour adopter une solution pérenne à un problème que vous nous proposez de résoudre pour quelques semaines.
M. le président Guillaume Kasbarian. C’est en effet moi qui décide de la recevabilité des amendements, sur la base des propositions faites par les administrateurs. Certains groupes ont été reçus, à leur demande, par les services qui leur ont expliqué quels étaient les critères retenus pour l’appréciation de la recevabilité au titre de l’article 45.
J’ai déposé cette proposition de loi avec les trois autres présidents de groupe de la majorité – et les députés de la majorité – mais je n’en suis pas le rapporteur. J’ai examiné la recevabilité des amendements avec le sérieux, l’impartialité et la constance que vous me connaissez – certains diront la sévérité, mais je suis sûr que personne ne souhaite voter un cavalier législatif sur un texte pareil.
J’espère vous avoir rassuré.
M. Julien Dive (LR). Je voudrais dire à notre collègue que s’il achète des salades au glyphosate, c’est qu’elles sont certainement génétiquement modifiées, et donc pas françaises – sinon, elles seraient complètement grillées.
Je vous avoue que la semaine dernière, j’étais un peu chafouin après avoir entendu à la radio le ministre de l’économie rejeter la faute de l’arrêt de ce dispositif au 31 décembre 2023 sur les sénateurs Les Républicains. C’est fort de café, puisque c’est précisément grâce aux sénateurs LR que cette mesure a été intégrée à la loi du 16 août 2022 ! Quand un outil fonctionne bien, tout le monde en revendique la paternité ou la maternité – je le sais bien – mais il faut aussi savoir se souvenir de ce qui s’est passé.
La situation a échappé à tout le monde. Notre collègue Pierre Vatin a interrogé le Gouvernement à ce sujet la semaine dernière. Dans un monde parlementaire idéal, nous aurions débattu du projet de loi de finances et des amendements auraient pu être déposés pour proroger ce dispositif mais cela n’a pas été le cas. Nous nous retrouvons donc en urgence.
Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi : il est indispensable de proroger cette mesure. Le texte devra être adopté conforme afin que la loi entre en vigueur rapidement. Cela ne nous empêche pas de proposer des amendements et de débattre de certains points.
Nous devons d’abord nous demander s’il faut pérenniser le dispositif. Un an et demi après le premier vote, nous voulons tous le proroger : faudra-t-il y revenir dès l’année prochaine ?
On peut aussi s’interroger sur l’élargissement du champ d’utilisation des tickets-restaurant – et peut-être faudrait-il alors changer ce nom. Je pense notamment aux produits d’hygiène, par exemple les couches pour enfant, qui sont très onéreux pour beaucoup de nos concitoyens.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Une petite précision : même s’il n’y avait pas eu d’article 49.3 sur le budget, les amendements relatifs aux titres-restaurant auraient été irrecevables. Croyez bien que l’idée m’a traversé l’esprit…
M. Éric Martineau (Dem). Les titres-restaurant visaient initialement à contribuer aux repas des salariés dont l’entreprise ne disposait ni d’une cantine, ni d’un local aménagé à proximité de son lieu de travail. La hausse des prix des produits alimentaires – due à la fois à la vive reprise économique qui a suivi l’épidémie de coronavirus et à la guerre menée contre l’Ukraine – nous a amenés à faire évoluer ce dispositif. Grâce à une initiative du Sénat, les titres-restaurant permettent d’acheter des denrées alimentaires non directement consommables, à préparer et à cuisiner. Cette extension prend toutefois fin le 31 décembre 2023.
Le groupe Démocrate soutient cette proposition de loi.
Si l’inflation diminue progressivement, elle reste supérieure aux hausses de salaires constatées. Par ailleurs, le développement et la pérennisation du télétravail facilitent l’utilisation des titres-restaurant pour cuisiner chez soi, par exemple lors de la plage horaire du déjeuner : des millions de salariés sont concernés. Cuisiner chez soi est essentiel pour préserver notre patrimoine gastronomique et pour la qualité nutritionnelle de nos assiettes – l’alimentation moins transformée est bien meilleure pour la santé – autant que pour faire baisser le prix du caddie de courses.
Nous estimons toutefois que cette disposition ne peut pas être pérennisée. Nous devons réfléchir aux meilleurs moyens de soutenir le pouvoir d’achat de nos concitoyens sans porter à terme préjudice aux restaurants, poumons économiques mais aussi culturels de nos villes et de nos villages, et importants lieux de socialisation.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Ne nous y trompons pas ! Si nous sommes réunis pour débattre de cette proposition de loi, c’est pour rectifier une négligence qui aurait, dans le contexte d’inflation que nous connaissons, envoyé un signal désastreux aux Français, et plus particulièrement aux 5,4 millions de bénéficiaires des titres-restaurant.
Si je me réjouis que l’appel d’associations de consommateurs et de nombreux parlementaires de tous bords politiques ait été entendu par le Gouvernement – après quelques hésitations –, je ne peux que regretter le caractère tardif de votre action et la confusion qu’elle a entraînée chez bon nombre de nos concitoyens. Les circonstances économiques qui ont motivé cette mesure n’ont pas changé : nombre de Français ont vu leur pouvoir d’achat diminuer et observent encore aujourd’hui des prix bien supérieurs à ceux qui avaient cours lorsque ce dispositif temporaire a été voté, en août 2022. Il apparaît donc pertinent de maintenir une grande liberté d’utilisation des titres-restaurant. C’est un coup de pouce attendu à l’heure où les volumes d’achats alimentaires sont en chute libre et où bien des salariés doivent recourir à l’aide alimentaire, signe que le travail ne protège plus de la précarité.
Nous défendrons une prorogation de deux ans. C’est un délai qui permettrait au Gouvernement de mener à bien la réforme annoncée par Mme la ministre déléguée. Pour faire évoluer le dispositif, il faudra de la concertation et du dialogue. Deux années offriraient davantage de visibilité aux acteurs du secteur comme aux ménages. Nous nous éviterions de reprendre ce même débat à l’automne 2024. Évidemment, si un texte venait revoir le dispositif, nous pourrions revenir sur notre vote d’aujourd’hui.
Nous devons nous attaquer à la question des salaires et de la préservation du pouvoir d’achat des ménages. Je regrette que la dernière discussion budgétaire n’ait pas permis de dialogue constructif sur ces questions, alors que c’est là la première préoccupation de nos concitoyens.
Ce texte ne répondra pas aux inquiétudes croissantes des Françaises et des Français, mais il permet de colmater une brèche et, face à l’urgence, chaque mesure compte. Nous voterons donc cette proposition de loi.
M. Xavier Albertini (HOR). Cette proposition de loi doit permettre aux Français de continuer à accéder à une plus large gamme de produits alimentaires à un moment où l’inflation, même si elle reflue, reste supérieure à celle que nous connaissions à l’été 2022 : 7,7 % en octobre 2023, quasiment 21 % en un an et demi.
Nous sommes tous conscients des difficultés que rencontrent les restaurateurs et j’entends les arguments du chef Thierry Marx, nouveau président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih). Tous, nous avons vu dans nos circonscriptions des fermetures de commerces, en particulier de restaurants, faute de reprise d’une activité normale après la crise sanitaire. La prolongation du dispositif élargi en 2024 est donc une mesure qui n’est pas simple : les restaurateurs doivent retrouver les flux de consommation antérieurs à la crise sanitaire. Mais ne laissons pas croire que cette mesure soit seule à l’origine des difficultés du secteur : celles-ci sont multiples, liées à de nouvelles façons de travailler mais aussi de consommer.
Nous devons aussi prendre en considération l’aspiration à davantage de flexibilité pour les Françaises et les Français, qui rencontrent des difficultés financières, notamment dans le contexte d’inflation actuel, mais souhaitent aussi mieux maîtriser leur alimentation. Préparer sa gamelle n’est plus exceptionnel.
Cette mesure doit être adoptée rapidement afin que les supermarchés ne soient pas contraints de refuser les tickets-restaurant dès le 1er janvier 2024. Nous devons aussi travailler, comme l’a annoncé Mme la ministre déléguée, à l’évolution du dispositif.
Le groupe Horizons et apparentés est favorable à cette proposition de loi.
Mme Julie Laernoes (Écolo-NUPES). Un Français sur deux se prive occasionnellement ou régulièrement d’un repas. Alors que nous subissons toujours une forte inflation, en particulier sur les denrées alimentaires, il nous semble essentiel de permettre aux Françaises et aux Français de payer une partie de leurs dépenses alimentaires avec des titres-restaurant. Nous soutiendrons donc la prolongation de leur utilisation pour les courses alimentaires.
Nous plaiderons pour une prorogation plus longue, au moins deux ans. Tout laisse à penser que l’inflation ne s’arrêtera pas dans les douze mois à venir. Elle ralentit, mais les prix vont continuer à augmenter.
Nous nous inquiétons de la procédure d’examen de ce texte, au demeurant symptomatique de votre manière de gérer les crises. Considérez-vous comme normal qu’un texte soit présenté en moins d’une semaine, avec un délai de dépôt des amendements qui se compte en heures, avec une consultation minimale de la société civile ? C’est loin d’être la première fois, malheureusement, que vous légiférez ainsi au doigt mouillé sur des sujets qui ont pourtant des conséquences très concrètes sur la vie quotidienne.
Vous ne vous attaquez pas aux problèmes structurels du modèle agricole et du système alimentaire, construits sur une doctrine libérale au cours des soixante dernières années. Après la modification des échéances des négociations commerciales, il est urgent de construire une réflexion sur l’accès équitable à une alimentation saine et durable, abordable, de qualité, qui rémunère justement les agricultrices et les agriculteurs tout en respectant l’eau, l’air, les sols et le vivant – et cela ne doit pas concerner seulement les salariés, mais aussi les chômeurs et les étudiants. Les écologistes, avec de nombreuses organisations, réfléchissent depuis longtemps à une sécurité sociale de l’alimentation : il serait plus que temps de vous saisir de ces idées.
Enfin, le télétravail bouscule le dispositif des titres-restaurant. Il faut intégrer cette donnée nouvelle à la réflexion.
Le groupe Écologiste votera cette proposition de loi. Mais nous appelons à nouveau le Gouvernement et la majorité à se saisir, de façon urgente, de la question de l’accès à l’alimentation, grande oubliée des politiques publiques. Nous observons une véritable ségrégation alimentaire dans la société française. Il est temps d’y remédier !
M. Max Mathiasin (LIOT). Visiblement, Madame la ministre déléguée, vous avez quelques difficultés à anticiper… Vous n’avez pas vu venir la fin du bouclier loyer en juin 2023 ! Quelques mois plus tard, vous semblez découvrir que si rien n’est fait, il ne sera plus possible d’utiliser des tickets-restaurant pour acheter des produits alimentaires non directement consommables après le 31 décembre 2023. Cette échéance était pourtant annoncée depuis le vote de la loi sur le pouvoir d’achat, en 2022…
Ce texte avait permis, grâce à quelques mesures d’urgence, de limiter la terrible perte de pouvoir d’achat de nos concitoyens – de façon insuffisante, certes, mais réelle. Le contexte s’est-il amélioré et peut-on mettre fin aux trop rares mesures de soutien ? Non, à l’évidence. L’urgence alimentaire est bien présente, dans l’Hexagone comme dans les outre-mer. Le nombre de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté alors qu’elles travaillent ne cesse d’augmenter. L’inflation alimentaire est peut-être moins forte, mais les prix continuent de progresser. Même si nous aurions préféré une prolongation de deux ans, accorder pour une année supplémentaire la possibilité de payer ses courses au supermarché avec des titres‑restaurant est donc une mesure de défense du pouvoir d’achat et une mesure de justice sociale. L’urgence est toujours là.
Qui peut se permettre de déjeuner tous les jours au restaurant ? Où peut-on, d’ailleurs, payer un plat du jour avec un seul ticket-restaurant ? Cette mesure évitera à certains de venir grossir les rangs des bénéficiaires des Restos du cœur ou des banques alimentaires, qui ont déjà bien du mal à faire face à l’explosion des demandes.
Le groupe LIOT votera cette proposition de loi.
Mme Anne-Laure Babault, rapporteure. C’est en effet le Sénat qui a été à l’origine de cette mesure, en 2022. On ne peut que s’en féliciter.
Nous sommes tous attentifs à la question du pouvoir d’achat et c’est pour cette raison que nous proposons cette prorogation d’un an.
En ce qui concerne l’élargissement aux produits d’hygiène, il me semble qu’il ne faut pas dénaturer le titre-restaurant. Ce dispositif est financé par les entreprises pour que les salariés se restaurent à midi lorsqu’ils travaillent ; il ne vise pas à soutenir l’achat de parfum ou de gel douche. Ce n’est ni un chèque alimentaire, ni un chèque inflation.
J’ajoute que le titre-restaurant sert l’ensemble des Français, y compris des cadres supérieurs dont les besoins ne sont pas les mêmes que ceux de salariés au Smic. Si nous devons soutenir le pouvoir d’achat, ce dispositif ne me paraît pas la bonne voie à suivre.
En ce qui concerne la distorsion de concurrence, nous sommes nombreux à défendre les TPE et les PME – les très petites, petites et moyennes entreprises. Les auditions ont montré que les restaurateurs, comme les commerces de bouche, ont été pénalisés par l’élargissement de la mesure, au profit des grandes et moyennes surfaces.
S’agissant enfin de l’éventuelle pérennisation, Mme la ministre déléguée s’est engagée à travailler dès 2024 à une refonte du dispositif. Faisons-lui confiance.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Cette mesure a – je le confirme –, été votée en août 2022 grâce à un amendement de la sénatrice LR de l’Isère, avec le soutien du Gouvernement. Elle devait prendre fin dix-huit mois plus tard, le 31 décembre 2023.
J’ai annoncé le 2 octobre dernier une refonte du dispositif des titres-restaurant, accompagnée d’une nécessaire concertation qui sera menée au premier semestre 2024. La condamnation de quatre émetteurs par la cour d’appel de Paris ne m’a échappé.
Je me suis exprimée, le 14 novembre – soit six semaines avant l’échéance – sur la prorogation du dispositif. Le temps restant est suffisant pour prendre cette mesure simple.
La plupart des dispositions d’encadrement du titre-restaurant remontent à 1967. Depuis, les modes de consommation ont changé. Les entreprises ont évolué : de plus en plus d’entre elles disposent de cantines ou d’endroits pour déjeuner. C’est pourquoi je veux mener une réforme structurelle.
Différents sujets devront être traités. Le premier, c’est celui des frais de gestion, mentionné par plusieurs intervenants. Ils sont élevés pour les restaurateurs qui utilisent le titre sous sa forme papier. C’est en réalité la coexistence des titres papier et des titres dématérialisés qui a fait augmenter les commissions pour des restaurateurs, des commerçants et des entreprises. Par ailleurs, la dématérialisation doit permettre à de nouveaux acteurs de rentrer plus facilement sur le marché : c’est sur ce point que la cour d’appel a condamné les émetteurs.
Nous ne devrons oublier ni la liberté laissée au salarié de partager son ticket‑restaurant, même dématérialisé, avec des membres de sa famille, ni la liberté de faire don des tickets‑restaurants aux plus fragiles, notamment par l’intermédiaire d’associations.
Nous devrons sécuriser les titres, en luttant contre les fraudes – il existe des faux en circulation.
Il faudra accompagner toutes les entreprises vers la dématérialisation, car certaines n’ont pas encore engagé cette démarche.
La concertation avec les acteurs du CNTR mais aussi avec l’ensemble des représentants des salariés et des employeurs sera menée au premier semestre 2024. Je suis évidemment ouverte à la discussion avec les parlementaires qui souhaiteraient être associés à ce processus.
Le deuxième élément que je soumets à votre réflexion porte sur la nécessité d’organiser une concertation sur le sujet. J’ai été sollicité par des organisations syndicales – je ne parle pas ici de restaurateurs ni d’organisations
professionnelles –, qui ont affirmé que toute pérennisation de la mesure exige une concertation. J’ai proposé à Madame la ministre déléguée d’ouvrir ces discussions, car les syndicats sont tous parties prenantes.
Une fois ces deux points clarifiés, c’est à la commission de décider ce qu’elle souhaite faire.
Article unique (article 6 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat) : Prolongement en 2024 de l’utilisation des titres-restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables
Amendements CE12 de M. Hadrien Clouet et CE17 de M. Hervé de Lépinau (discussion commune)
Mme Sophia Chikirou. L’amendement CE12 vise à pérenniser le dispositif au-delà de 2024. La période de forte inflation a commencé en 2020. Contrairement à ce que l’on entend, elle ne baisse pas actuellement, elle progresse moins vite. L’augmentation des prix des produits alimentaires persiste, par exemple. Aucune des mesures qui aurait pu mettre un terme immédiat à cette croissance des prix n’a été prise. La France insoumise a défendu le blocage des prix, notamment ceux des produits alimentaires. Nous avons milité pour la hausse des salaires et pour l’indexation de ceux-ci sur l’inflation. Ces dispositions auraient pu arrêter l’inflation. Vous avez choisi de la laisser filer ! Les prix des produits alimentaires ont ainsi crû de manière exponentielle, au point qu’une grande partie de la population de notre pays est plongée dans la détresse alimentaire ; des millions de gens ne sont pas en mesure de se nourrir tous les jours.
Dans cette partie de la population, il n’y a pas que des personnes au chômage : il y a aussi des travailleurs, qui ne peuvent pas déjeuner sur leur lieu de travail ou à proximité de celui-ci. Avec un titre-restaurant à 7,70 euros en moyenne, on ne peut pas aller au restaurant ; on peut au mieux manger un sandwich et on mange mal. Il faut deux titres-restaurant par jour pour manger correctement.
M. Hervé de Lépinau. Puisque les possibilités d’amender le texte sont limitées, nous allons jouer sur la date. Il ne faut pas enfermer la reconduction du dispositif dans un délai aussi court. Nous sommes en effet tous d’accord pour reconnaître que l’inflation va durer et qu’un coup de pouce au pouvoir d’achat est absolument nécessaire.
En tant que député d’une zone rurale, je tiens à appeler votre attention sur le fait que tous les salariés n’ont pas accès à un restaurant. M. Thierry Marx a évoqué une baisse du chiffre d’affaires de la restauration de 200 millions d’euros. Mais là où j’habite, il n’y a pas de restaurant du tout. Plutôt que d’acheter un sandwich qui n’a pas forcément les qualités nutritives essentielles à un bon équilibre alimentaire, il faudrait permettre aux salariés d’acheter des denrées de base et de cuisiner. Je renvoie la balle à Thierry Marx : il est plutôt vertueux que les Français se remettent à la cuisine car c’est le meilleur moyen de manger des plats équilibrés et savoureux tout en préservant le pouvoir d’achat.
Je reviens aux propos de notre collègue Chikirou : à condition de compter un restaurant dans son environnement proche, il faut bien deux titres-restaurant pour avoir un repas normal ; or ces deux titres-restaurant représentent pour certains un effort financier qui dépasse les capacités du budget familial.
L’amendement vise donc à pérenniser l’utilisation de titres-restaurant pour acheter des produits alimentaires non directement consommables.
Mme Anne-Laure Babault, rapporteure. Madame Chikirou, nous sommes tous attentifs au pouvoir d’achat, notamment celui des plus modestes. Le titre-restaurant n’aide pas que cette population, il profite également aux cadres supérieurs. Son manque de ciblage n’en fait pas un bon dispositif.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Ce n’est pas à l’État seul de décider d’un droit social. Il nous faut échanger avec ceux qui financent à 60 % le titre-restaurant, à savoir les employeurs, et avec ceux qui en bénéficient, les employés, qui le soutiennent à hauteur de 40 %. Le temps de la concertation est incompressible ; nous devons dialoguer avec l’ensemble des acteurs paritaires, à savoir le Medef, la CPME, l’U2P, FO, la CFTC, la CGT, la CFDT et la CFE-CGC. L’avis est donc défavorable.
Mme Sophia Chikirou. Vous dites que comme les classes supérieures reçoivent des titres-restaurant, ce dispositif ne serait pas social. En réalité, ce sont essentiellement les personnes percevant un salaire moyen qui en bénéficient / les cadres supérieurs n’en ont pas besoin et ne se nourrissent pas grâce au titre-restaurant. Je ne dis pas qu’ils n’en ont pas. Je dis qu’ils n’en dépendent pas pour déjeuner. Sur les 5 millions de salariés, la très large majorité des utilisateurs est constituée de personnes touchant des salaires modestes ou moyens : eux ont besoin des titres-restaurant.
Pérenniser cette mesure est opportun puisque l’inflation soutenue est appelée à perdurer. Si nous ne l’avons pas votée l’année dernière, nous avions sûrement de très bonnes raisons de ne pas le faire. Les titres-restaurant sont entrés dans le quotidien des salariés et des travailleurs.
Mme Julie Laernoes. Le groupe Écologiste-NUPES ne votera pas en faveur de ces amendements car nous ne soutenons pas la pérennisation du dispositif. Nous constatons tous le développement de la précarité alimentaire dans notre pays. Les titres-restaurant ne bénéficient qu’à une partie des salariés. Il est important de proroger la mesure de pouvoir d’achat – nous proposons 2025 comme date de sortie –, mais il faut traiter la question de fond de la précarité alimentaire.
Il faut donner accès à une alimentation saine à toute la population, pas seulement à celles et ceux qui travaillent mais également aux chômeurs, aux étudiants et aux personnes âgées. Des négociations sont en effet nécessaires, Madame la ministre déléguée : pour une fois que vous acceptez de négocier avec l’ensemble des syndicats, je ne peux que soutenir votre position.
Nous avons entendu parler au début de la législature d’un chèque alimentation, mais cette idée semble avoir été abandonnée. Il y a lieu de travailler cette question en profondeur, raison pour laquelle nous ne voterons pas en faveur de ces amendements.
La commission rejette successivement les amendements CE12 et CE17.
Amendements CE18 de M. Hervé de Lépinau et identiques CE1 de M. Stéphane Delautrette, CE6 de M. Julien Dive, CE21 de Mme Julie Laernoes et CE23 de Mme Aurélie Trouvé (discussion commune)
M. Hervé de Lépinau. Madame la ministre déléguée, ce n’est pas l’État qui décide, c’est le Parlement ! Vous avez dit que les partenaires sociaux ne comprendraient pas que l’État décide, mais c’est le Parlement qui va le faire.
Je ne peux pas imaginer que les partenaires sociaux ne soutiennent pas cette mesure. Pour les employeurs, notamment dans les très petites entreprises, le titre-restaurant représente un moyen de gratifier les salariés d’un coup de pouce ; dans les plus petites entreprises, il n’y a parfois qu’un seul salarié – la secrétaire d’un cabinet médical ou d’un cabinet d’avocat en province, par exemple.
Les syndicats sont demandeurs de moyens pour valoriser le pouvoir d’achat. Donc il me semble inutile d’organiser des assises du titre-restaurant pour connaître leur position sur le sujet !
Comme vous avez rejeté la pérennisation du mécanisme, cet amendement de repli propose de reconduire la mesure jusqu’en 2028, afin de nous éviter d’avoir à traiter cette question chaque année. Si les partenaires sociaux critiquent cette disposition, vous pourrez saisir à nouveau le Parlement, mais je doute qu’ils le fassent car une mesure qui fait gagner du pouvoir d’achat aux salariés pendant quatre ans devrait faire l’unanimité.
M. le président Guillaume Kasbarian. Monsieur de Lépinau, je vous certifie que certains syndicats m’ont interpellé et m’ont dit qu’ils n’étaient pas favorables à une pérennisation du dispositif. Vous ne pouvez pas dire que tout le monde est d’accord.
M. Hervé de Lépinau. La date butoir est le 31 décembre. Vous auriez très bien pu lancer des consultations.
M. Stéphane Delautrette. Nous proposons de prolonger le dispositif non pas jusqu’au 31 décembre 2024, mais jusqu’au 31 décembre 2025. Cela permettrait d’organiser la concertation avec l’ensemble des acteurs qu’a évoquée Mme la ministre déléguée.
Le sujet, comme l’a dit Mme Laernoes, renvoie à celui de fond, de la précarité alimentaire. Une réflexion sur une refonte du titre-restaurant conduirait à des discussions au sein de l’Assemblée nationale sur la manière de procéder. Je ne suis pas convaincu que nous parvenions à trouver un consensus en 2024. Voilà pourquoi il me paraît plus prudent de prolonger le dispositif jusqu’au 31 décembre 2025 – d’autant que cela nous épargnerait un débat similaire l’année prochaine à la même période. Si une loi, issue de la concertation, faisait évoluer la situation, la mesure dérogatoire n’aurait plus lieu d’être.
M. Julien Dive. Nous avons débattu des chèques alimentaires dans la précédente législature et nous discutons aujourd’hui des titres-restaurant. la récurrence de ces échanges traduit la difficile situation dans laquelle se trouvent beaucoup de nos compatriotes – il suffit d’écouter les responsables des Restos du cœur, qui ont du mal à faire face à l’importance de la demande. Nous n’échapperons pas à un débat sur les moyens d’accompagner au mieux nos concitoyens les plus précaires.
Le dispositif du titre-restaurant a pu être dévoyé, mais sa prolongation répond à une urgence, qui ne sera probablement pas éteinte le 31 décembre 2024. Voilà pourquoi nous souhaitons étendre cette prorogation au 31 décembre 2025 – nous pourrions également la lier à la situation de l’inflation. J’ai cru comprendre des propos de l’orateur du groupe majoritaire que lui-même était assez ouvert à une prorogation de deux ans du dispositif.
Mme Julie Laernoes. Même cause, même effet : si la concertation n’aboutit pas, nous risquons de devoir nous retrouver dans un an pour discuter d’une autre prorogation. Plutôt qu’une nouvelle discussion conduite dans l’urgence, nous préférons nous donner deux ans pour réfléchir à l’évolution du titre-restaurant, par exemple à la question des personnes qui télétravaillent : il serait opportun que celles-ci puissent se nourrir de produits sains qu’elles peuvent cuisiner à leur domicile. Je laisse de côté la question du chèque alimentaire sur laquelle il faut également se pencher, car tout le monde ne bénéficie pas du titre-restaurant.
Mme Aurélie Trouvé. De très nombreux groupes parlementaires demandent, à défaut de sa pérennisation, la prorogation de deux ans du dispositif. La faim galope dans ce pays : selon le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc), 16 % des Français déclarent avoir faim contre 9 % il y a quelques années. Contrairement à ce que nous dit Bruno Le Maire, nous ne sommes pas sortis de la crise inflationniste, puisque si le taux décroît, les prix continuent d’augmenter : en deux ans, les prix des produits alimentaires ont progressé de 20 %.
Le problème est que vous ne faites rien ! Nous vous avons proposé, dans le projet de loi de finances pour 2024, d’octroyer des moyens supplémentaires, ne serait-ce qu’aux associations d’aide alimentaire mais vous n’avez donné aucune suite à cette demande. Vous nous promettez depuis de nombreux mois le déploiement d’un chèque alimentaire. Dans le rapport du groupe de travail sur le suivi de l’inflation, que j’ai rédigé avec mon collègue Xavier Albertini, nous suggérions au Gouvernement de mettre en place un chèque alimentaire, mais rien n’a été fait ! Notre collègue Francesca Pasquini a déposé une proposition de loi ayant le même objet dans la niche parlementaire du groupe Écologiste-NUPES, mais elle n’a pas été retenue. Nous pourrions dire à notre tour : « Anne, Ma sœur Anne ! Ne vois-tu rien venir ? car nous ne voyons effectivement rien venir. Proroger le dispositif du titre-restaurant est donc le minimum à accomplir.
Enfin, Madame la rapporteure, le maintien de cette mesure bénéficiera avant tout aux ménages aux revenus les plus modestes. Qui dépense les titres-restaurant dans les supermarchés plutôt qu’au restaurant ? Ce sont évidemment les classes populaires, qui utilisent ces titres pour acquérir des produits de base.
Mme Anne-Laure Babault, rapporteure. L’avis est défavorable sur les amendements.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Pour les raisons que j’ai déjà exposées tout à l’heure, l’avis est également défavorable. (Mme Aurélie Trouvé s’exclame.)
M. Fabien Di Filippo. Les amendements proviennent de groupes très divers car tout le monde sait qu’il sera impossible de revenir en arrière. Les titres-restaurant constituent un avantage social très important pour les salariés. De la même manière que vous ne pouvez pas contrôler le fait qu’ils l’utilisent dans des restaurants pendant leur temps de travail, vous ne pourrez pas restreindre la liste des produits alimentaires réglés avec ce moyen de paiement.
En effet, dans un contexte d’inflation très forte, de plus en plus de salariés cuisinent chez eux et emportent leur repas sur leur lieu de travail. Le Gouvernement a été pris au piège en voulant revenir en arrière. Il a dû rétropédaler, parce que nous ne reviendrons jamais en arrière sur l’utilisation des titres-restaurant, surtout dans la conjoncture économique et sociale actuelle.
Faisons œuvre utile en avançant un peu plus vite sur le sujet, de manière à pouvoir passer à autre chose.
M. Pascal Lavergne (RE). Nous voterons contre l’adoption de ces amendements. Vous n’avez qu’à organiser un référendum d’initiative citoyenne (RIC) sur le sujet, puisque vous pensez que les forces politiques défendent des positions convergentes sur la question ; en attendant, les trois groupes de la majorité sont opposés à ces amendements, que la commission va donc repousser.
La commission rejette successivement les amendements CE18, CE1, CE6, CE21 et CE23.
L’amendement CE5 de M. Julien Dive est retiré.
La commission adopte l’article unique ainsi non modifié.
Titre
Les amendements CE2 et CE22 tombent.
Amendement CE3 de M. Julien Dive
M. Julien Dive. Il vise à rappeler que la proposition de loi est issue d’une initiative sénatoriale. Il s’agit de rendre à César ce qui lui appartient.
Mme Anne-Laure Babault, rapporteure. Nous reconnaissons tout à fait l’initiative du Sénat, mais il est inopportun de l’inscrire dans le titre de la loi.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Même avis.
Mme Sophia Chikirou. Madame la ministre déléguée, vous avez cru bon d’imiter ma collègue Aurélie Trouvé dans votre réponse à son intervention. À mon tour de vous imiter et de vous dire que certaines personnes peuvent parler fort pour diverses raisons, par exemple parce qu’elles sont malentendantes, mais peut-être n’en avez-vous jamais côtoyé dans votre vie. Notre collègue Lavergne parle fort lui aussi, mais curieusement, vous ne l’avez pas imité. Respectez les parlementaires ! Plusieurs députés ont un accent, certains parlent fort ou doucement, d’autres ont du mal à trouver leurs mots. Mais ils doivent tous être considérés. Voilà, c’est comme cela et avec votre timbre de voix, que je voulais dire les choses (sourires)
La commission rejette l’amendement CE3.
L’ensemble de la proposition de loi est ainsi adopté.
— 1 —
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Audition conjointe des organisations représentatives de l’Hôtellerie‑restauration :
Union des métiers des industries de l’hôtellerie (UMIH)
M. Franck Chaumes, président UMIH Restauration
M. Renaud Damesin, directeur attractivité, étude
M. Vincent Dollé, directeur fiscal et affaires économiques *
Groupement des hôtelleries et restaurations de France (GHR)
M. Franck Trouet, délégué général
M. Romain Vidal, élu du GHR, référent titres restaurant
Mme Émilie Bono, directrice du département économique juridique et fiscal *
Table ronde des associations de consommateurs :
Association Force ouvrière consommateurs (AFOC)
M. David Rousset, secrétaire général
Union fédérale des consommateurs (UFC) « Que Choisir ? »
M. Antoine Autier, responsable du service études et Lobby *
M. Benjamin Recher, chargé des relations institutionnelles France
Union nationale des Associations familiales (UNAF)
Mme Morgane Lenain, administratrice de l’Unaf en charge de la consommation
Audition des représentants de la direction générale des entreprises (ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique)
Mme Marie de Boissieu, sous-directrice du commerce, de l’artisanat et de la restauration
Mme Florine Haghighat-Lagardere, directrice du projet Artisanat et restauration
Table ronde des émetteurs spécialisés de titres-restaurants :
Edenred France
M. Ilan Ouanounou, directeur général
M. Stanislas Bosch-Chomont, directeur des affaires publiques
Coup de pousse
Mme Sophia Akhmatova, co-fondatrice
Resto Flash
M. David Contour, co-fondateur
Benefiz
M. Christophe Triquet
Pluxee France
Mme Céline Guillotin, responsable des affaires publiques
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.
([1]) Voir la communication du 14 décembre 2022 établie par M. Xavier Albertini et Mme Aurélie Trouvé en conclusion du groupe de travail sur l’inflation des prix (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/organes/commissions-permanentes/affaires-economiques/missions-de-la-commission/gt-inflation).
([2]) La prime de partage de la valeur (PPV) constitue un complément de salaire dont le versement demeure à la discrétion de l’employeur.
([3]) Si on en trouve des traces dès le XIXème siècle en Angleterre, la généralisation du concept de titres-restaurant remonte au début des années 1950, avec l’initiative prise par le docteur Winchendron de mettre à la disposition des infirmières de son hôpital des bons repas pouvant être utilisés dans les restaurants voisins. L’expression « tickets-restaurant » constitue un usage impropre : le terme désigne en réalité un titre dont la marque a été déposée par la société Jacques Borel en 1963 et qui correspond à la commercialisation de bons repas sur le modèle déjà adopté par la société Le Crédit-Repas (en 1957). L’idée est reprise par la société Le Chèque-Restaurant (en 1962) et par la société Chèque Coopératif Restaurant (à l’origine du Chèque Déjeuner en 1964).
([4]) Articles 19 à 28 de l’ordonnance n° 67-830 du 27 septembre 1967 relative à l’aménagement des conditions du travail en ce qui concerne le régime des conventions collectives, le travail des jeunes et les titres-restaurant.
([5]) Article L. 3262-1 du code du travail.
([6]) Sous l’hypothèse d’une moyenne de 20 jours travaillés dans un mois.
([7]) Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.
([8]) Amendement n° COM-177 de Mme Frédérique Puissat, rapporteure.
([9]) Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.
([10]) Cf. décret n° 2021-104 du 2 février 2021 portant dérogations temporaires aux conditions d’utilisation des titres-restaurant et décret n° 2021-1368 du 20 octobre 2021 portant dérogations temporaires aux conditions d’utilisation des titres-restaurant.
([11]) L’article R. 3262-9 du code du travail admet une exception « au bénéfice exclusif de ceux des salariés qui sont, du fait de leurs fonctions, appelés à des déplacements à longue distance ».