Promotion immobilière : 25 mars 2019 Cour d’appel de Versailles RG n° 17/04328

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Promotion immobilière : 25 mars 2019 Cour d’appel de Versailles RG n° 17/04328

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 54F

4e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 MARS 2019

N° RG 17/04328 – N° Portalis DBV3-V-B7B-RTHM

AFFAIRE :

Société RIDORET MENUISERIE

C/

Société PARIS CHARENTON

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Mai 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 7ème

N° RG : 15/12625

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS

Me Michèle DE KERCKHOVE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT CINQ MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Société RIDORET MENUISERIE

N° Siret 302 001 797 R.C.S. La Rochelle

Ayant son siège […]

[…]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant, du barreau de VERSAILLES – N° du dossier 1757816 – vestiaire : 625

Représentant : Maître Catherine CIBOT-DEGOMMIER, avocat plaidant, du barreau de LA ROCHELLE – Case 28

APPELANTE

****************

Société PARIS CHARENTON

N° Siret : 528 741 499 R.C.S. Nanterre

Ayant son siège […]

[…]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant, du barreau de VERSAILLES – N° du dossier 17718272 – vestiaire : C.26

Représentant : Maître Julien LAMPE de l’AARPI FRECHE ET ASSOCIES, avocat plaidant, du barreau de PARIS – Vestiaire R 211

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 7 Janvier 2019, Madame Isabelle DE MERSSEMAN, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Brigitte AZOGUI-CHOKRON, Président,

Madame Anna MANES, Président,

Madame Isabelle DE MERSSEMAN, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

FAITS ET PROCEDURE,

En 2013, la société PARIS CHARENTON a entrepris la construction d’un ensemble immobilier de 58 logements et trois commerces à Charenton-le-Pont dans le Val de Marne, sous la maîtrise d”uvre d’exécution de la société A2M Conseil.

La société PARIS CHARENTON a confié à la société RIDORET MENUISERIE, selon marchés du 1er février 2013, les lots :

– 10 menuiseries extérieures aluminium pour un prix forfaitaire de 313.352 euros T.T.C.,

– 11 menuiseries extérieures PVC et occultations pour un prix de 303.784 euros T.T.C,

– 13 menuiseries intérieures pour un prix de 290.628 euros T.T.C..

Selon le contrat, les travaux devaient débuter le 1er février 2013 et s’achever le 30 décembre 2013 (incluant 30 jours d’intempéries).

Des travaux supplémentaires et moins-values sur les lots n° 10 et 13 ont été prévus entre les parties, suivant ordres de services subséquents.

Les travaux ont été réceptionnés le 26 juin 2014, avec réserves.

La société RIDORET MENUISERIE a adressé au maître d”uvre de l’opération, la société Alexandre Horde Architecte missionnée en remplacement de la société A2M Conseil, et au maître d’ouvrage, ses mémoires en vue de l’établissement du décompte général définitif permettant le paiement :

– le 28 novembre 2014, concernant les lots 10 pour 326.240,35 euros T.T.C. et 13 pour 319.805,07 euros T.T.C. ,

– le 30 janvier 2015, concernant le lot 11 pour 137.448,77 euros T.T.C. .

Malgré plusieurs mises en demeure adressées à la société PARIS CHARENTON le 30 mars, 10 avril, 22 mai 2015, la société RIDORET MENUISERIE n’a pas reçu en retour ses décomptes généraux définitifs.

Son conseil a adressé une nouvelle mise en demeure le 31 juillet 2015, restée infructueuse.

Par acte du 2 septembre 2015, la société RIDORET MENUISERIE a assigné la société PARIS CHARENTON devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre afin de voir ordonner la délivrance d’une garantie de paiement. La société RIDORET MENUISERIE ayant obtenu satisfaction, le juge des référés a ordonné le retrait du rôle de l’affaire par ordonnance du 17 novembre 2015.

Par acte du 30 septembre 2015, la société RIDORET MENUISERIE a assigné la société PARIS CHARENTON en paiement du solde de ses travaux devant le tribunal de grande instance de Nanterre.

Les projets de décomptes généraux ont été adressés par le maître d”uvre à la société RIDORET MENUISERIE les 20 et 23 novembre 2015 et notifiés par le maître de l’ouvrage le 29 août 2016, en cours de procédure.

Par jugement contradictoire du 23 mai 2017, le tribunal de grande instance de Nanterre a, au visa des articles 1134, 1147 et 1153 anciens du code civil, débouté la société RIDORET MENUISERIE de sa demande en paiement du solde des travaux et de sa demande de dommages et intérêts présentée contre la société PARIS CHARENTON, l’a condamnée aux dépens de l’instance, ainsi qu’au paiement à la société PARIS CHARENTON de la somme de 3 000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles. Il a également dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 7 juin 2017, la société RIDORET MENUISERIE a interjeté appel de ce jugement à l’encontre de la SCI PARIS CHARENTON.

Par dernières conclusions signifiées le 20 novembre 2018, la société RIDORET MENUISERIE (SA), appelante, demande à la cour de :

-Déclarer recevable et bien fondé son appel à l’encontre du jugement déféré et réformer en toutes ses dispositions la décision entreprise,

Statuant à nouveau au visa des articles 1134,1153 du code civil et 1171 nouveau du code civil et L.441-6 et L. 442-6 du code de commerce ;

-Dire et juger que les articles 83 et 84 du cahier des charges générales (CCG) OGIC applicables au marché sont abusifs et les déclarer nuls et non écrits,

En conséquence, dire et juger que par application des bonnes pratiques et usages commerciaux la société PARIS CHARENTON n’est pas recevable à contester les mémoires de travaux qui lui ont été notifiés,

Subsidiairement,

-Constater que la société PARIS CHARENTON ne justifie pas des délais contractuels et des retards qu’elle impute à la société RIDORET MENUISERIE,

-Constater que la convention de compte prorata n’a pas été signée par le société RIDORET MENUISERIE et qu’elle lui est donc inopposable alors qu’aucun décompte n’est produit,

-Constater qu’aucun constat contradictoire n’a été établi constatant les dépenses du compte inter-entreprises,

-Constater que la société PARIS CHARENTON n’est pas fondée à pratiquer des retenues de garantie, la société RIDORET MENUISERIE ayant fourni cautions et par application de l’article 2 de la loi du 16/07/1971 et 85 du CCG,

En conséquence de ce qui précède,

-Dire et juger irrecevables et mal fondées les contestations de la société PARIS CHARENTON et valider ses mémoires,

-Condamner la société PARIS CHARENTON à lui payer :

-la somme principale de 102 308.12 euros TTC avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter du 28 janvier 2015 sur la somme de 79 915.45 euros et du 31 mars 2015 sur la somme de 22 392.67 euros,

-la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

-la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamner la société PARIS CHARENTON aux entiers dépens de la procédure.

Par dernières conclusions signifiées le 19 octobre 2018, la société PARIS CHARENTON (SCI) demande à la cour de :

Sur la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande en paiement de la société RIDORET MENUISERIE au titre du solde de ses marchés,

-Constater que la norme AFNOR n’est pas applicable au marché signé entre les parties ;

-Dire et Juger que les mémoires de la société RIDORET MENUISERIE ne revêtent pas de caractère définitif;

-Dire et juger que les articles 84 et 84 (sic) du CCG relatifs à la procédure de règlement des comptes sont valides ;

-Constater que la société RIDORET MENUISERIE a exécuté avec retard les travaux qui lui ont été confiés, qu’elle n’a pas procédé à la levée des réserves dans les délais impartis par le CCG et qu’elle ne justifie pas avoir procédé à la levée des réserves dans leur intégralité,

-Dire et juger que la société PARIS CHARENTON est bien fondée à soulever une exception d’inexécution compte tenu des manquements de la société RIDORET MENUISERIE,

-Dire et juger que la société PARIS CHARENTON ne peut pas se libérer des sommes qui resteraient à devoir au titre des marchés dès lors que la société RIDORET MENUISERIE n’a pas remis les quitus relatifs au compte prorata, le contrat d’entretien des ouvrages réalisés, la justification des primes d’assurance correspondant aux travaux exécutés, le procès-verbal des levées de réserves,

-Dire et juger, en tout état de cause, que seuls les décomptes définitifs versés au débat par la société PARIS CHARENTON peuvent servir de base à la détermination des sommes qui resteraient dues à la société RIDORET MENUISERIE ;

En conséquence :

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande en paiement formée par la société RIDORET MENUISERIE à hauteur de la somme de 102.308,12 euros ;

Sur la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande en dommages-intérêts pour résistance abusive de la société RIDORET MENUISERIE :

-Constater que la société RIDORET MENUISERIE ne justifie et ne rapporte ni la preuve d’un préjudice ni la preuve d’un abus de la part de la société PARIS CHARENTON ;

-Dire et juger que la résistance abusive alléguée par la société RIDORET MENUISERIE à l’encontre de la société PARIS CHARENTON n’est pas établie ;

En conséquence :

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande en dommages-intérêts pour résistance abusive à hauteur de 10.000 euros,

-Condamner la société RIDORET MENUISERIE à lui verser la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 18 décembre 2018.

SUR CE,

Sur les limites de l’appel,

Le jugement est critiqué en toutes ses dispositions par la société RIDORET MENUISERIE.

La société PARIS CHARENTON sollicite sa confirmation.

Sur l’appel principal de la société RIDORET MENUISERIE :

La société RIDORET MENUISERIE sollicite l’infirmation du jugement qui a déclaré la contestation de la société PARIS CHARENTON recevable et bien fondée et qui l’a déboutée de ses demandes en paiement du solde de ses travaux et en paiement de dommages et intérêts pour abus de puissance économique.

-Sur la demande d’application de la norme NF P 03 001 et la demande d’annulation des articles 83 et 84 du cahier des charges générales :

Le jugement a relevé que le cahier des charges générales (CCG) accepté par la société RIDORET MENUISERIE ne prévoit aucun délai à la charge du maître d”uvre ou du maître de l’ouvrage pour adresser à l’entreprise son décompte général définitif et n’a pas appliqué la norme NF P 03 001 considérant que les parties avaient entendu y déroger.

La société RIDORET MENUISERIE soutient que la société PARIS CHARENTON n’est pas recevable à contester les mémoires de travaux. Elle reproche au jugement d’avoir écarté sa demande d’application de la norme NF P 03 001 justifiée par le caractère abusif des clauses 83 et 84 du CCG et de l’avoir déboutée de sa demande en paiement en raison d’un défaut de justification de la levée des réserves à la réception. Elle soutient que le jugement a méconnu les règles applicables en la matière omettant de répondre à une partie de son argumentation.

La société RIDORET MENUISERIE soutient que les article 83 et 84 du CCG sont abusifs au sens de l’article L. 441-6 du code de commerce en ce qu’ils prévoient des délais très courts imposés aux entreprises, assortis de sanctions, pour adresser les mémoires et faire valoir leurs observations, délais très inférieurs aux délais de la norme professionnelle NF P03-001 (20 jours contre 30 jours dans la norme pour permettre à l’entrepreneur de faire valoir ses observation) alors qu’à l’inverse aucun délai de vérification des mémoires par le maître d”uvre et par le maître de l’ouvrage n’est prévu, ni aucune sanction, si bien que le maître de l’ouvrage règle quand il le décide, sans frais. Elle fait valoir que ce CCG est un contrat d’adhésion proposé par le groupe de promotion immobilière OGIC, associé de la société PARIS CHARENTON, avec la société BNP Paribas dont le caractère abusif doit conduire à voir annuler ces deux articles, à les déclarer non écrits et à appliquer la norme NF P 03 001. Elle considère en conséquence que la société PARIS CHARENTON doit être présumée avoir accepté son mémoire définitif en application de l’article 19-6-2 de la norme susvisée qui prévoit une acceptation tacite du mémoire définitif par le maître de l’ouvrage en l’absence de transmission du décompte dans un délai de 45 jours à compter de la réception du mémoire définitif.

Elle soutient en effet, qu’à défaut de contestation par le maître de l’ouvrage dans le délai de 30 jours de la notification de son mémoire définitif des 28 novembre 2014 et 30 janvier 2015, le décompte est devenu définitif et qu’elle est en droit de réclamer la condamnation de la société PARIS CHARENTON à lui verser la somme de 102 308,12 euros toutes taxes comprises.

La société PARIS CHARENTON sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il écarte la présomption d’acceptation du mémoire définitif prévu par la norme NF P 03 001. Elle conclut à la recevabilité de sa contestation en application du CCG qui déroge selon elle, expressément à la norme, et au rejet de la demande d’annulation de la clause.

Elle fait valoir principalement que la société RIDORET MENUISERIE ne peut se prévaloir des dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce puisqu’elle n’est pas un partenaire économique, ni de l’article 1171 du code civil issu de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrat qui pose le caractère non écrit des clauses créant un déséquilibre significatif entre les parties, qui n’est pas applicable au contrat conclu antérieurement au 1er octobre 2016 (article 9 de ladite ordonnance).

A titre subsidiaire, la société PARIS CHARENTON conclut au rejet de la demande en paiement opposant une exception d’inexécution tirée de l’absence de présentation d’un quitus de levée des réserves. Elle soutient enfin que les décomptes généraux permettent de fixer le solde restant dû à la somme de 55 355,72 euros.

***

Les relations entre les parties sont régies par le cahier des charges générales (CCG) et les marchés particuliers. Ces pièces constituent le contrat qui fait la loi des parties en application de l’article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.

L’article 4 du CCG mentionne que «sont applicables de plein droit au marché :

-4.1 Les lois, décrets, arrêtés, circulaires et autres règlements ainsi que les DTU, REEF et Normes Françaises et Européennes en vigueur lors de la conclusion du marché,

-4.2 Par dérogation à ce qui précède, ne sont pas applicables au marché les normes NF P 03 001 et plus généralement celles établissant un cahier des clauses générales ou des dispositions contraires au présent CCG. »

L’article 83 du CCG impose à l’entrepreneur d’adresser son mémoire définitif ainsi que les pièces justificatives au maître d”uvre dans un délai de 40 jours suivant sa demande et ce, à peine de forclusion, afin que ce dernier l’examine. Aucun délai n’est prévu pour cette vérification.

L’article 84.1 du CCG prévoit que le maître d”uvre établit le décompte définitif qui fait ressortir le montant du solde des comptes de chaque entrepreneur, qu’il l’adresse au maître d’ouvrage afin qu’il soit notifié à chaque entreprise. Aucun délai n’est mentionné ni pour la vérification, ni pour la notification du décompte général définitif (DGD).

L’article 84.2 mentionne un délai de contestation du DGD de 20 jours pour l’entrepreneur, à peine de forclusion.

L’article 84.3 prévoit que le paiement du solde intervient «à 60 jours» après la signature du procès-verbal de levée de réserve.

Force est de constater que le CCG ne prévoit aucun délai s’imposant au maître d”uvre et au maître de l’ouvrage pour l’établissement du DGD et sa notification à l’entreprise, conditions préalables au paiement du solde des travaux. Faute de précision des délais applicables pour la réalisation de ces formalités, il convient d’appliquer les délais prévus par la norme supplétive NF P 03 001. En effet, les parties ont entendu à l’article 4 du CCG se référer à la norme à défaut de mention contraire du contrat.

Dès lors que la norme supplétive est applicable de plein droit en application des dispositions du contrat, il n’est pas nécessaire d’examiner le caractère abusif des articles 83 et 84 au regard de l’article L. 441-6 IV du code de commerce.

La Norme Afnor P 03001, dans sa version de décembre 2000, prévoit la procédure d’établissement du décompte général définitif suivante :

-article 19.6.1 : le maître d’oeuvre analyse le mémoire définitif adressé par l’entreprise et remet le décompte au maître de l’ouvrage.

-article 19.6.2 : le maître de l’ouvrage notifie à l’entrepreneur ce décompte définitif dans un délai de 45 jours à dater de la réception du mémoire définitif par le maître d’oeuvre. Ce délai est porté à 4 mois à dater de la réception des travaux dans le cas d’application du paragraphe 19.5.4 . Si le décompte n’est pas notifié dans ce délai, le maître de l’ouvrage est réputé avoir accepté le mémoire définitif remis au maître d’oeuvre après mise en demeure restée infructueuse pendant 15 jours (article 19.6.2, alinéa 2). La mise en demeure est adressée par l’entrepreneur au maître d’ouvrage avec copie au maître d’oeuvre (article 19.6.2, alinéa 3).

– article 19.6.3 : l’entrepreneur dispose de 30 jours à compter de la notification pour présenter, par écrit, ses observations éventuelles au maître d’oeuvre et pour en aviser simultanément le maître de l’ouvrage; Passé ce délai, il est réputé avoir accepté le décompte définitif.

Il résulte ainsi de la lecture combinée de ces textes que, s’agissant de l’approbation du mémoire définitif transmis par l’entreprise au maître d’oeuvre, la procédure qui s’impose aux parties est la suivante :

1.Le maître d”uvre vérifie le décompte définitif envoyé par l’entreprise et l’adresse au maître d’ouvrage;

2. Le maître d’ouvrage notifie à l’entrepreneur le décompte définitif dans un délai de 45 jours à dater de la réception du mémoire définitif par le maître d’oeuvre par application de l’article 19.6.2 de la norme NF 03 001 ;

3. Si le décompte n’est pas notifié dans ce délai, le maître de l’ouvrage est réputé avoir accepté le mémoire définitif remis au maître d’oeuvre après mise en demeure restée infructueuse pendant 15 jours (article 19.6.2, alinéa 2) ; la mise en demeure est adressée par l’entrepreneur au maître d’ouvrage avec copie au maître d’oeuvre (article 19.6.2, alinéa 3).

La société RIDORET MENUISERIE justifie avoir adressé ses mémoires définitifs les 28 novembre 2014 et 30 janvier 2015 au maître d”uvre par courriers recommandés dont les avis de réception ont été retournés signés les 8 décembre 2014 et 18 février 2015. Le délai de 45 jours pour notifier le DGD court à compter de cette date. Passé ce délai, la norme prévoit que le maître de l’ouvrage est réputé avoir accepté le mémoire définitif remis au maître d’oeuvre après mise en demeure restée infructueuse pendant 15 jours conformément à l’article 19.6.2, alinéa 2 de la norme susvisée.

La société RIDORET MENUISERIE justifie également avoir adressé des mises en demeure au maître d’ouvrage les 30 mars 2015 pour les 2 premiers lots et le 10 avril 2015 pour le dernier lot, par courriers recommandés dont les avis de réception ont été retournés signés les 7 avril 2015 et 14 avril 2015. A l’expiration du délai de 15 jours suivant ces deux mises en demeure, les mémoires définitifs de la société RIDORET MENUISERIE ont été réputés acceptés par le maître d’ouvrage qui n’est donc plus recevable à former des contestations.

Les projets de DGD adressés par le maître d’oeuvre au-delà de ce délai, les 20 et 23 novembre 2015 et notifiés par le maître de l’ouvrage le 29 août 2016, sont tardifs.

Le jugement sera par voie de conséquence infirmé en ce qu’il a débouté la société RIDORET MENUISERIE de sa demande en paiement du solde des travaux et la société PARIS CHARENTON condamnée à lui payer la somme de 102 308,12 euros toutes taxes comprises, au titre du solde des travaux effectués outre les intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter du 28 janvier 2015 sur la somme de 79 915.45 euros et du 31 mars 2015 sur la somme de 22 392.67 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour abus de puissance économique

La société RIDORET MENUISERIE, qui sollicite la condamnation de la société PARIS CHARENTON à lui verser 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation d’un abus de puissance économique, n’établit nullement le préjudice particulier financier non réparé par les intérêts de retard déjà alloués, de sorte que cette demande ne saurait être accueillie.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l’appel de la société PARIS CHARENTON

La présomption d’acceptation par la société PARIS CHARENTON étant acquise, les demandes au titre des comptes à faire entre les parties (retenue de garantie, erreurs, pénalités de retard, compte prorata) ou le moyen avancé par l’intimé tiré de l’exception d’inexécution pour défaut de levée de toutes les réserves formulées à la réception, deviennent sans portée.

Sur les autres demandes

Le sens de la décision conduit à réformer le jugement en ce qu’il a condamné la société RIDORET MENUISERIE à verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance.

L’équité commande de condamner la société PARIS CHARENTON à verser la somme de 8.000 euros à la société RIDORET MENUISERIE pour les frais qu’elle a dû engager en première instance comme en appel pour assurer sa représentation en justice.

La société PARIS CHARENTON sera en outre condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant contradictoirement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par la société RIDORET MENUISERIE ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que la norme supplétive NF P 03 001 s’applique aux relations entre les parties en ses dispositions relatives aux délais de vérification et de notification du DGD, faute de mention contraire dans le cahier des charges général ;

Dit que la société PARIS CHARENTON est réputée avoir accepté le mémoire définitif de la société RIDORET MENUISERIE ;

Condamne la société PARIS CHARENTON à payer à la société RIDORET MENUISERIE la somme de

102 308,12 euros toutes taxes comprises, au titre du solde des travaux effectués outre les intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter du 28 janvier 2015 sur la somme de 79 915.45 euros et du 31 mars 2015 sur la somme de 22 392.67 euros ;

Y ajoutant,

Condamne la société PARIS CHARENTON à verser à la société RIDORET MENUISERIE la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la société PARIS CHARENTON aux dépens de première instance et d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Brigitte AZOGUI-CHOKRON, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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