Promotion immobilière : 25 février 2019 Cour d’appel de Versailles RG n° 17/01377

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Promotion immobilière : 25 février 2019 Cour d’appel de Versailles RG n° 17/01377

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 54Z

4e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 FEVRIER 2019

N° RG 17/01377

N° Portalis

DBV3-V-B7B-RKIK

AFFAIRE :

SA AGB

C/

SAS LAFARGEHOLCIM BETONS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Février 2017 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° chambre : 2

N° Section :

N° RG : 2014F00592

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Agathe ROGER

Me Laurence

BENITEZ-DE-LUGO,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT CINQ FEVRIER DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SA AGB

[…]

Représentant : Me Agathe ROGER, Postulant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 260

Représentant : Me Yann DEBRAY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0888

APPELANTE

****************

SAS LAFARGEHOLCIM BETONS, anciennement dénommée LAFARGE BETONS FRANCE

[…]

Représentant : Me Laurence BENITEZ-DE-LUGO, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 128 – N° du dossier 14000494

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 10 Décembre 2018, Madame Anna MANES, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Brigitte AZOGUI-CHOKRON, président,

Madame Anna MANES, président,

Madame Isabelle DE MERSSEMAN, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN

La société SFB, sous-traitant de la société AGB, a commandé du béton à la société Lafarge Bétons France, nouvellement dénommée Lafargeholcim Béton (ci-après, la société Lafargeholcim Bétons) pour deux chantiers.

Afin de garantir le paiement des livraisons, les parties ont conclu deux délégations de paiement ; la société SFB étant le délégant, la société AGB, le délégué, et la société Lafargeholcim Bétons, le délégataire.

La société SFB et la société AGB ont, par la suite, rompu leurs relations commerciales, mais la société Lafargeholcim Bétons a poursuivi ses livraisons de béton.

La société SFB a été placée en liquidation judiciaire le 26 février 2015 par jugement du tribunal de commerce de Bobigny.

La société Lafargeholcim Bétons a réclamé, en vain, à la société AGB, en sa qualité de délégué des deux délégations de paiement, le règlement de factures.

Dans ces circonstances, par acte introductif d’instance délivré le 13 août 2014, la société Lafargeholcim Bétons a fait assigner la société AGB à comparaître devant le tribunal de commerce de Pontoise aux fins de la voir condamner, in solidum avec la société SFB, à lui régler diverses sommes au titre du solde des factures impayées, pénalités de retard et clause pénale.

Le tribunal de commerce de Pontoise, par jugement contradictoire du 3 février 2017, a :

– Donné acte à la société Lafarge Bétons France de son désistement d’instance et d’action à l’encontre de la société SFB.

– Constaté l’extinction de l’instance et de l’action par l’effet dudit désistement à l’encontre de la société SFB.

– Déclaré la société Lafarge Bétons France partiellement fondée en ses demandes.

– Condamné la société AGB à payer à la société Lafarge Bétons France les sommes de :

* 55.501,09 euros en principal avec intérêts de retard au taux de 0,04 % à compter du 5 juin 2014 et jusqu’à parfait paiement,

* des pénalités de retard au taux de 11,50 % s élevant à 7 645,82 euros au jour de l’assignation et jusqu’à parfait paiement,

* 360 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement,

* 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– Débouté la société Lafarge Bétons France de sa demande de paiement de la somme de 8.929,46 euros au titre de la clause pénale.

– Déclaré la société AGB mal fondée en ses demandes reconventionnelles, l’en a déboutée.

– Condamné la société AGB aux dépens de l’instance ainsi qu’aux frais d’acte et de procédure d’exécution, s’il y a lieu.

Par déclaration du 17 février 2017 2017, la société AGB a interjeté appel de ce jugement à l’encontre de la société Lafarge Bétons France.

Par ses dernières conclusions signifiées le 19 octobre 2018, la société AGB demande à la cour, au fondement des articles1134 et suivants, 1162 et 1235 du code civil, de :

– Infirmer le jugement rendu le 3 février 2017 par le tribunal de commerce de Pontoise sauf en ce qu’il déboute la société Lafarge Bétons France, devenue la société Lafargeholcim Bétons, de sa demande en paiement relative à la clause pénale.

Statuant à nouveau,

– Prendre acte de la nouvelle dénomination de la société Lafarge Bétons France, devenue la société Lafargeholcim Bétons.

Sur les demandes de la société Lafargeholcim Bétons

A titre principal,

– Dire et juger que les délégations de paiement l’obligent à payer à la société Lafargeholcim Bétons uniquement le béton commandé par SFB et livré à SFB.

– Constater que la société SFB a été remplacée par la société TPTR à compter de février 2013 et ne peut pas avoir reçu livraison du béton litigieux.

– Dire et juger qu’elle ne peut être tenue au paiement de béton qui n’a pas été commandé dans le cadre des délégations de paiement.

En conséquence,

– Débouter la société Lafargeholcim Bétons de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement,

– Dire et juger que chacune des délégations de paiement contient deux plafonds alternatifs qui sont le prix et le cubage.

– Constater que chacun des deux plafonds alternatifs contenus dans la délégation en paiement relative au chantier des Ulis est atteint.

En conséquence,

– Débouter la société Lafargeholcim Bétons de sa demande en paiement de la somme de la somme de 9.149,61 euros toutes taxes comprises correspondant à de prétendues factures impayées émises en exécution de la délégation de paiement relative au chantier des Ulis.

– Constater que le « plafond cubage » contenu dans la délégation en paiement relative au chantier de Port-Marly est atteint.

En conséquence,

– Débouter la société Lafargeholcim Betons de sa demande en paiement de la somme de la somme de 47.380,14 euros toutes taxes comprises correspondant à de prétendues factures impayées émises en exécution de la délégation de paiement relative au chantier de Port-Marly.

A titre reconventionnel, sur ses demandes

– Condamner la société Lafargeholcim Betons à lui payer à la société AGB les sommes de :

*15.227,27 euros toutes taxes comprises, sauf à parfaire, indûment perçue au titre de la délégation de paiement relative au chantier des Ulis, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2015, date de notification de ses premières conclusions,

* 69.904,51 euros toutes taxes comprises, sauf à parfaire, indûment perçue au titre de la délégation de paiement relative au chantier de Port-marly, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2015, date de notification de ses premières conclusions.

En tout état de cause,

– Débouter la société Lafargeholcim Betons de ses demandes accessoires au titre de la clause pénale, de l’indemnité forfaitaire de recouvrement et des pénalités de retard.

– Condamner la société Lafargeholcim Betons à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions signifiées le 22 octobre 2018, la société Lafargeholcim Bétons, anciennement Lafarge Bétons France, demande à la cour de :

– Déclarer la société AGB recevable mais mal fondée en son appel, et la débouter de l’ensemble de ses demandes.

– Confirmer partiellement le jugement rendu par le tribunal de commerce de Pontoise en date du 3 février 2017 en ce qu’il acondamné la société AGB à payer à la société Lafargeholcim Betons les sommes de :

* 55.501,09 euros en principal, avec intérêts de retard au taux de 0,04 % à compter du 5 juin 2014 et jusqu’à parfait achèvement,

* les pénalités de retard au taux de 11,50 % s’élevant à 7.645,82 € au jour de l’assignation et jusqu’à parfait paiement,

* 360 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement,

– Condamner la société AGB à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 4 décembre 2018.

SUR CE,

A titre liminaire

La dénomination de la société Lafarge Bétons France ayant été modifiée, celle-ci étant désormais dénommée la société Lafargeholcim Bétons, il convient d’en prendre acte.

Sur les limites de l’appel

Les dispositions du jugement relatives au désistement d’instance et d’action de la société Lafargeholcim Bétons à l’encontre de la société SFB ne sont pas querellées.

De même, le jugement en ce qu’il déboute la société Lafargeholcim Bétons de sa demande en paiement de la somme de 8.929,46 euros au titre de la clause pénale n’est pas critiquée.

Le jugement sera dès lors confirmé de ces chefs et déclaré irrévocable.

Sur l’appel de la société AGB

* La nécessité de justifier de commandes de la part de la société SFB

La société AGB conteste devoir la somme de 55.501,09 euros, au principal, à la société Lafargeholcim Bétons au titre de factures impayées alors que la société SFB n’a pas passé les commandes, objet des factures dont elle se prévaut, ayant été remplacée par un autre sous-traitant avec lequel aucune délégation de paiement n’a été régularisée.

Elle en conclut que l’action de la société Lafargeholcim Bétons, fondée sur les délégations de paiement de la société SFB, est injustifiée.

Elle relève que les factures litigieuses ont toutes été émises entre mars et juin 2013, soit postérieurement au départ de la société SFB des chantiers de Port-Marly et des Ulis, alors que le nouveau sous-traitant, la société TPTR, l’avait remplacée, sans délégation de paiement.

Elle soutient que la société SFB n’a pas passé les commandes correspondant aux factures litigieuses à la société Lafargeholcim Bétons de sorte qu’elle-même ne peut être tenue par d’autres commandes.

Elle fait valoir que c’est de façon inopérante que le tribunal relève que la société Lafargeholcim Bétons a livré du béton sur ces chantiers car la seule question pertinente à résoudre est de savoir si la société SFB a passé ces commandes et les a réceptionnées dans le cadre de la délégation de paiement.

Elle prétend que, dans ces conditions, il revient à la société Lafargeholcim Bétons de rapporter la preuve que le béton, objet des factures litigieuses, a été commandé par la société SFB et lui a été livré.

Selon elle, défaillante dans l’administration de cette preuve, son action, fondée sur les dispositions de l’article 1275 et suivants du code civil, la société Lafargeholcim Bétons ne pourra qu’être rejetée.

La société Lafargeholcim Bétons rétorque que, dans le milieu du BTP, il n’existe quasiment jamais de bon de commande qui soit régularisé dans le cadre de chantiers concernant notamment la promotion immobilière comme, en l’espèce, s’agissant d’une vente en l’état futur d’achèvement.

Elle prétend que, contrairement à ce que soutient la société AGB, la société SFB, qui était le donneur d’ordre, a commandé du béton qui lui a été livré jusqu’au 3 mai 2013 et, postérieurement, qui l’a été à la société AGB directement.

Ainsi, selon elle, sur la marché des Ulis, elle a livré et facturé à la société SFB, donneur d’ordre, du béton jusqu’au 31 mai 2013 inclus, étant précisé que les bons de livraison sont, pour les plus contemporains, datés du 3 mai 2013.

S’agissant du chantier de Port Marly, les bons de livraisons et les factures sont établis à la société SFB qui a donné l’ordre de livrer du béton jusqu’au 14 mai 2013 pour les livraisons les plus récentes.

Elle relève que la société AGB est dans l’incapacité de produire un seul bon de commande régularisé dans le cadre des différents marchés visés dans la présente instance, mais également dans le cadre d’une relation directe entre les parties à la présente instance pour la livraison de béton. Elle observe que, pour autant, la société AGB n’a pas manqué de réceptionner la marchandise validée et payer des factures correspondant à une prestation effectuée.

Elle soutient n’avoir eu connaissance de la rupture des relations commerciales entre la société AGB et la société SFB qu’en octobre 2013, soit plus de huit mois après le décompte général définitif daté du 20 février 2013 argué par la société AGB pour démontrer la rupture de ces relations commerciales entre le délégué, la société AGB, et le délégant, la société SFB.

Elle fait valoir que la délégation de paiement régularisée dans cette affaire stipule expressément que ‘la société AGB, déléguée, s’interdit d’opposer à la société Lafargeholcim Bétons … dans le cadre de la présente délégation, toute exception et difficulté pouvant notamment l’opposer à la société SFB’. Or, selon elle, en refusant de procéder au règlement des factures émises par la société Lafargeholcim Bétons à l’attention de la société SFB pour les chantiers relatifs aux délégations de paiement signées par les parties, aux motifs que d’une part la société SFB n’a pas pu passer les commandes correspondances en raison de la rupture de leurs relations commerciales, elle oppose bien une exception d’inexécution ou une difficulté qui lui est cependant inopposable.

Elle ajoute qu’elle ne pouvait pas imaginer que, sur la période précitée, soit entre le 20 février 2013 et le 15 mai 2013, comme en attestent les bons de livraison émargés, elle ne livrait plus le béton pour la société SFB, mais à une entreprise tierce.

Se fondant sur la relation commerciale antérieure, les usages en matière de BTP, la loyauté et la bonne foi qui doivent conduire l’exécution dans le cadre de contrats de BTP, elle sollicite donc le règlement des factures restées impayées et la confirmation du jugement.

L’article 1275 du code civil dispose que la délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s’oblige envers le créancier, n’opère point de novation, si le créancier n’a expressément déclaré qu’il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation.

L’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, précise que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

La délégation de créance implique le consentement des parties à la convention : le délégant, le délégué et le délégataire.

Le délégué accepte ainsi de s’engager envers un créancier dont il n’est pas le débiteur, tandis que le délégataire accepte l’engagement du délégué. Ce triple engagement distingue clairement la délégation de la simple indication de paiement définie par l’article 1277 du code civil.

Le délégué n’est pas le représentant du délégant. Il s’oblige personnellement envers le délégataire; en d’autres termes, il le reconnaît comme étant désormais son créancier.

Le délégué n’est pas le mandataire du délégant et n’agit ni au nom ni pour le compte de celui-ci.

Cette absence de représentation du délégant par le délégué distingue la délégation de l’indication de payement prévue par l’article 1277, alinéa 1er, du code civil, qui n’est qu’une sorte de mandat.

* La délégation de paiement au titre du chantier situé aux Ulis

Le 7 juin 2012 a été signé un acte intitulé ‘Délégation de paiement’ entre la société Lafarge Bétons Vallée de Seine, dénommée ‘le délégataire’, la société SFB, dénommée ‘le délégant’, et la société AGB, dénommée ‘le délégué’, qui énonce, en préambule, ce qui suit (les mentions rayées figurent telles quelles dans le contrat, celles soulignées le sont par la cour) :

‘La société SFB a passé commande à la société Lafarge Bétons Vallée de Seine de béton prêt à l’emploi et prestations annexes pour une quantité approximative de 3.500 m3 pouvant varier à la hausse de 25%, le tout pour un prix d’environ 372.000 euros hors taxe, ledit prix étant à ajuster en fonction des quantités de béton et de services annexes effectivement fournis et réalisés.

Cette commande est destinée à la construction d’un ensemble immobilier pour le compte de AGB sur un chantier sis à Avenue du Berry rue des bergères aux Ulis 91940′.

Par avenant du 3 décembre 2012, les parties ont convenu que le montant de la délégation de paiement établi le 7 juin 2012, pour le chantier des Ulis, était porté de 372.000 euros HT à 420.000 euros HT, les autres termes de la délégation demeurant inchangés.

L’article 1er de la convention précise son objet et stipule (souligné par la cour) ‘Afin d’assurer à la société Lafarge Bétons Vallée de la Seine le paiement des sommes en principal, intérêts, frais et accessoires qui lui sont dues en raison de la commande susvisée, la société SFB lui délègue la société AGB laquelle, intervenant à l’acte, déclare accepter la présente délégation et se reconnaître en conséquence désormais tenue personnellement et directement envers la société Lafarge Bétons Vallée de la Seine du règlement de cette commande.’

L’article 2 de la convention concerne les modalités de paiement et indique ce qui suit (souligné par la cour) :

‘Le paiement s’effectuera sur présentation par la société Lafarge Bétons Vallée de Seine des factures faisant suite à ses livraisons.

La société AGB s’engage à effectuer tous ces paiements, par Traite à 45 jours, directement auprès de la société Lafarge Bétons Vallée de la Seine. Le non respect du délai de paiement pourrait entraîner de plein droit, la suspension de nos livraisons.

Tout versement ainsi effectué libérera la société AGB à due concurrence à l’égard de la société SFB.’

L’article 4 de la convention précise que ‘la présente délégation est souscrite en application des dispositions des article 1275 et suivants du code civil.

La société AGB, déléguée, s’interdit d’opposer à la société Lafarge Bétons Vallée de la Seine, dans le cadre de la présente délégation, toutes exceptions et difficultés pouvant notamment l’opposer à la société SFB’.

L’article 5 de cette convention stipule que ‘la présente délégation n’entraîne pas novation aux obligations contractées par SFB envers la société Lafarge Bétons Vallée de la Seine au titre du contrat de fourniture de béton et prestations annexes mentionné sous l’exposé préalable, la société SFB restant, en toute hypothèse, tenue de toutes ses obligations envers la société Lafarge Bétons Vallée de la Seine’.

Le 26 juin 2012, les mêmes sociétés, sous les mêmes qualités, dans les mêmes termes, sous réserve des aménagements ci-après exposés, signaient une seconde délégation de paiement concernant un chantier situé […] , portant sur une ‘commande passée par SFB à la société Lafarge de béton prêt à l’emploi et prestations annexes pour une quantité approximative de 600 m3′, ‘le tout pour un prix de 70.000 euros ht’. Les mentions, dans les mêmes termes, figuraient, rayées, au contrat.

Par deux avenants du 3 décembre 2012, les parties ont convenu que le montant de la délégation de paiement établi le 26 juin 2012, pour le chantier de Port Marly, était porté de 70.000 euros HT à 140.000 euros HT, puis de 140.000 euros HT à 200.000 euros HT, les autres termes de la délégation demeurant inchangés.

Il résulte ainsi expressément des termes des délégations que les trois parties admettaient, d’une part, le principe de l’existence de commandes préalables passées par la société SFB auprès de la société Lafargeholcim Bétons, pour des quantités approximatives, mais pour un prix égal à 420.000 euros HT pour le chantier des Ulis et à 200.000 euros HT pour le chantier de Port Marly, et, d’autre part, celui selon lequel la société AGB s’engageait à régler cette dernière directement sur simple présentation des factures faisant suite aux livraisons de bétons.

C’est donc à tort que la société AGB fait valoir qu’il revenait à la société Lafargeholcim Bétons de rapporter la preuve de la commande pour obtenir paiement.

Aux termes de ces délégations, la société AGB se reconnaissait en outre tenue personnellement et directement envers la société Lafarge du règlement de ces commandes et s’engageait à hauteur des prix ainsi fixés sans pouvoir opposer à la société Lafarge toutes exceptions et difficultés pouvant notamment l’opposer à la société SFB, sur présentation des factures correspondant aux livraisons de béton.

Il revient donc seulement à la société Lafargeholcim Bétons de démontrer avoir livré le béton commandé par la société SFB pour obtenir paiement sans que la société AGB puisse valablement lui opposer que ses relations avec la société SFB ayant cessé, elle n’était plus tenue de payer au titre des commandes et dans les limites de son engagement.

En outre, il sera relevé que la société AGB ne justifie ni avoir informé la société Lafargeholcim Bétons de la rupture de ses relations commerciales avec la société SFB ni renégocié les termes de son engagement qui la liait au délégataire à la suite de cet événement de sorte qu’elle est tenue d’honorer ses engagements dans les termes clairement convenus en 2012 entre les trois parties.

C’est donc exactement que le tribunal retient que :

* la quantité de béton estimée pour les chantiers des Ulis et de Port Marly ne peut être considérée comme un plafond rendant la délégation inapplicable pour toute quantité supérieure,

* ces délégations obligent la société AGB pour un plafond financier prédéfini,

* la société Lafargeholcim Bétons doit seulement démontrer avoir livré le béton sur ces deux chantiers conformément aux accords ainsi constatés dans les délégations de paiement.

* Le montant de la créance de la société Lafargeholcim Bétons

La société AGB critique le jugement qui la condamne à verser, au titre du solde des factures, pour la livraison de béton sur les chantiers des Ulis et de Port Marly, à la société Lafargeholcim Bétons, respectivement, les sommes de 9.149,61 euros et de 47.380,14 euros toutes taxes comprises, alors que les limites des plafonds, tant en volumes qu’en prix, étaient dépassées dès le 31 mars 2013, pour le premier chantier, et le 20 décembre 2012, pour le second et que la preuve des livraisons et des factures payées et impayées n’étaient pas produites par son adversaire.

La société Lafargeholcim Bétons sollicite la confirmation du jugement de ce chef et rétorque que la société AGB entretient délibérément la confusion entre le double plafond des délégations de paiement.

Comme le relève la société Lafargeholcim Bétons, la production des factures payées et qui ne font pas partie du litige n’apparaît pas pertinente de sorte que c’est à tort que la société AGB fait grief à la société Lafargeholcim Bétons de ne pas les produire.

En outre, comme indiqué précédemment, les termes des délégations de paiement sont dénués de toute ambiguïté en ce que la seule limite fixée par les parties à l’engagement de la société AGB au paiement des factures de la société Lafargeholcim Bétons à l’encontre de SFB consiste en un plafond financier prédéfini. Contrairement aux allégations de la société AGB, aucune quantité maximale de béton n’a en revanche été fixée.

C’est en outre exactement, par des motifs exempts de critiques, adoptés par cette cour, que les premiers juges ont retenu que la société AGB était redevable de la somme de 9.149,61 euros en principal au titre du chantier des Ulis et 47.380,14 euros au titre du chantier de Port Marly et l’ont condamnée à payer à la société Lafargeholcim Bétons la somme de 55.501,09 euros (56.629,75 euros – 1.228,66 euros, montant correspondant au trop versé par la société AGB pour le chantier des Ulis ; en effet, le montant des factures présentées par la société Lafargeholcim Bétons au titre de ce chantier dépassant de 1.228,66 euros le plafond maximum financier fixé par la délégation).

C’est également par d’exacts motifs que cette cour adopte, que le premier juge ont rejeté les moyens soulevés par la société AGB pour s’opposer aux demandes accessoires de la société Lafargeholcim Bétons, au titre des pénalités de retard et de l’indemnité forfaitaire de recouvrement, et l’ont condamnée à payer à la société Lafargeholcim Bétons, respectivement, les sommes de 7.645,82 euros et de 360 euros.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

* La demande reconventionnelle de la société AGB

Pour les raisons pertinentes et circonstanciées que cette cour adopte, c’est exactement que les premiers juges ont rejeté la demande en répétition de l’indû de la société AGB.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes

Le sens du présent arrêt commande de confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

Il apparaît équitable en cause d’appel d’allouer la somme supplémentaire de 4.000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à la seule société Lafargeholcim Bétons.

La société AGB sera condamnée au paiement de cette somme.

La société AGB, partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

Statuant contradictoirement,

Dans les limites de l’appel,

Prend acte de la nouvelle dénomination de la société Lafarge Bétons France devenue la société Lafargeholcim Bétons.

Confirme le jugement.

Condamne la société AGB à payer à la société Lafargeholcim Bétons la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette toutes autres demandes.

Condamne la société AGB aux dépens d’appel.

Dit qu’ils seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Brigitte AZOGUI-CHOKRON, Président et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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