Promotion immobilière : 19 décembre 2018 Cour de cassation Pourvoi n° 17-23.746

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Promotion immobilière : 19 décembre 2018 Cour de cassation Pourvoi n° 17-23.746

COMM.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 décembre 2018

Rejet non spécialement motivé

Mme MOUILLARD, président

Décision n° 10653 F

Pourvoi n° N 17-23.746

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société Domaine la Forestière, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 31 janvier 2017 par la cour d’appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige l’opposant à la Société générale, société anonyme, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 20 novembre 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. X…, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Y…, avocat général, Mme Labat, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Domaine la Forestière, de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la Société générale ;

Sur le rapport de M. X…, conseiller, l’avis de Mme Y…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Domaine la Forestière aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Société générale la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Domaine la Forestière.

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR limité la condamnation de la Société Générale et d’AVOIR écarté le surplus des demandes de la société Domaine de la Forestière ;

AUX MOTIFS QUE la SARL Domaine de la Forestière entend engager la responsabilité contractuelle de la banque en raison de diverses fautes qu’elle lui reproche et qui ont été examinées successivement avec pertinence par le premier juge ; qu’ainsi, après avoir repris l’historique des faits et décrit le contexte de cette opération d’investissement désastreuse pour les associés de la SARL Domaine de la Forestière, le tribunal a mis en évidence le rôle décisif de Monsieur Christian Z…, alors directeur régional de la Société Générale, qui a notamment mis en contact les gérants et associés de la SARL Domaine de la Forestière avec le responsable d’une agence immobilière, Monsieur Alain A…, pour qu’il donne un avis sur le projet de restructuration de l’immeuble ; que ce dernier, dans une attestation du 11 mai 2010, précise que Monsieur Z… était bien présent sur les lieux lors de sa visite et que c’est lui qui l’a présenté à ses clients, dans le cadre de relations amicales ; que l’ensemble des pièces produites démontre combien Monsieur Z…, intervenant en qualité de représentant de la Société Générale, a été présent dans l’élaboration du projet immobilier alors que Monsieur Jean-Claude B… et Madame Bernadette C…, professionnels de la restauration et anciens gérants d’une brasserie, n’avaient de toute évidence aucune compétence pour mener à bien un tel projet ; que l’examen des documents versés aux débats fait apparaître également que Monsieur Z… est intervenu au cours de la période de commercialisation des appartements, puisque dans un message électronique du 31 mars 2005, il indique avoir reçu une cliente désireuse d’investir dans ce type de projet et il décrit les liens entretenus directement avec l’agent immobilier qui doit affiner le plan de financement en lien avec le représentant de la banque ; que dans un autre document interne à le banque du 7 mars 2005 signé de Monsieur Z…, il mentionne les contacts directs qu’il a eus avec l’agence immobilière chargée de la commercialisation des logements et précise « qu’on voit bien qu’en bradant les prix de vente, on n’aurait pas de difficultés à rentrer dans nos fonds [
] Nous signons corrélativement une CTC de 1.200 M€ car nous attendons +/ – 80 K€ de remboursement de TVA qui serait mandaté […] » et plus loin « normalement, selon l’agence immobilière espagnole, un premier compromis de vente devrait nous parvenir sous 15 jours pour un des grands appartements » ; qu’on voit bien qu’il existe une confusion totale entre les intérêts de la SARL Domaine de la Forestière et celui de la banque qui par l’entremise de Monsieur Z… est très intrusive dans le déploiement du projet ; que dans un autre document du 10 janvier 2005, Monsieur Z… examine l’hypothèse de difficultés pour revendre les appartements et propose dans ce cas que Madame Bernadette C… et Monsieur Jean-Claude B… se portent acquéreurs de certains lots, en utilisant dans cette correspondance le terme « nous », ce qui traduit l’implication particulièrement forte de la banque dans le projet que son représentant, Monsieur Z…, considère comme commun à la banque et aux dirigeants de la SARL Domaine de la Forestière ; que l’ensemble de ces faits objectifs conforte l’analyse du tribunal qui a considéré à juste titre que la Société Générale, par l’intermédiaire de son préposé, a bien commis des actes d’immixtion fautive dans la gestion des intérêts de sa cliente, la SARL Domaine de la Forestière ; que, par ailleurs, le banquier doit certes accompagner son client dans ses projets mais, dans le cadre de son obligation de conseil, le dissuader de réaliser une opération qui peut s’avérer ruineuse ; que les obligations de conseil et de mise en garde du banquier sont d’autant plus lourdes que son client apparaît non averti ; que l’appréciation des compétences de l’emprunteur doit se faire en fonction de l’opération spécifique projetée et des risque encourus ; qu’il convient en effet d’évaluer sa capacité à mesurer la portée de son engagement ; qu’en l’espèce, si le projet initial s’inscrivait bien dans la poursuite des activités de restauration de Monsieur B… et Madame C…, qui bénéficiaient d’une expérience ancienne dans ce domaine professionnel et avaient fait leur preuve, en revanche le choix de la modification de ce projet, dont les raisons demeurent particulièrement obscures, vers une promotion immobilière d’envergure, consistant à diviser un hôtel restaurant en 13 appartements haut de gamme, projet qui était totalement étranger à leur champ de compétence, aurait dû conduire la Société Générale à les alerter sur les risques encourus et le cas échéant à leur refuser les financements sollicités ; que, dans ce cadre, la banque avait l’obligation d’exiger de sa cliente une étude préalable précise et circonstanciée comprenant notamment un prévisionnel et une étude de marché ; qu’en n’exigeant aucun justificatif de cette sorte, la Société Générale a indéniablement manqué à son obligation de mise en garde, alors qu’il est constant que la proportionnalité de l’engagement ne peut s’apprécier au regard du profit escompté de l’activité financée ; qu’alors que le projet initial était particulièrement raisonnable en termes de coût et d’activité (réouverture d’un hôtel-restaurant et souscription d’un prêt hypothécaire classique d’un montant de 310 000 €), le changement d’orientation quelques mois plus tard dans un domaine dans lequel les gérants et associés de la SARL Domaine de la Forestière étaient totalement novices, les a conduits à accepter des modes de financement ruineux non seulement parce qu’ils ont engendré un endettement de 1 200 000 €, soit 4 fois plus que le coût initialement envisagé, mais également parce que la banque leur a proposé un mode de financement totalement inadapté, prenant en outre la précaution de faire souscrire à Monsieur B… et Madame C… des engagements de caution sans commune mesure avec leurs revenus et patrimoine ; que le montage juridique et financier qui a été proposé s’est mis en place dans une grande précipitation et confusion ; que ceci est démontré par le fait que les cautionnements de Monsieur B… et Madame C… ont été donnés par anticipation pour couvrir les engagements de la SARL Domaine de la Forestière pour des montants respectifs de 260 000 € et 520 000 € alors que la convention de trésorerie courante souscrite à l’époque n’était que de 100 000 € le 14 mai 2004 ; qu’il était prévu dans l’avenant n° 1 du 29 juin 2004, qui portait l’autorisation à 600 000 €, une prise d’hypothèque sur l’immeuble qui était à cette date la propriété de la SCI Domaine de la Forestière et non de la SARL Domaine de la Forestière, qui n’en a fait l’acquisition que postérieurement le 12 juillet 2004, aux termes d’actes notariés qui ont été signés à l’agence de la Société Générale, représentée par Monsieur Z… ; qu’en outre, le coût de ce mode de financement à court terme n’était supportable par l’entreprise que dans l’hypothèse d’une vente très rapide des lots, ce qui aboutissait à faire prendre à la société, profane dans ce domaine de la spéculation, des risques inconsidérés ; que la SARL Domaine de la Forestière a payé comptant la somme de 313 000 € à la SCI pour le rachat du domaine portant le découvert en compte de 196 000 € début juillet 2004 à 597 000 € au 31 juillet 2004 ; que, de toute évidence, le prix payé par la SARL Domaine de la Forestière a permis de solder le prêt souscrit auprès de la Société Générale par la SCI et a concrètement abouti à mettre à la charge de la SARL Domaine de la Forestière la totalité des engagements financiers souscrits par la SCI, et ce même si le taux appliqué après l’avenant du 29 juin 2004 a été baissé de manière significative à 5,5 % ; que, dès la fin juillet 2004, le maximum de l’autorisation de découvert était donc atteint et lors de la souscription du second avenant le 9 mars 2005, le découvert était de plus de 1 000 000 € ; que chaque avenant avait en réalité vocation à couvrir un dépassement démesuré de l’autorisation de découvert alors que la SARL Domaine de la Forestière n’avait aucune activité réelle et ne recevait que peu de fonds ; que, même si l’on peut considérer que le projet de restructuration de l’immeuble était viable sur la base d’un investissement de 600 000 €, ainsi que cela résulte de l’étude succincte faite le 10 mai 2004, et qu’il était proportionné à la valeur de l’immeuble en cause, rien ne peut justifier le dérapage ultérieur qui a abouti à un solde débiteur deux fois plus élevé ; qu’en effet, la Société Générale a laissé perdurer un découvert de près d’un million d’euros pendant plusieurs mois sans attirer l’attention de sa cliente sur le coût que représentait cette situation bancaire anormale, ce qui caractérise un soutient manifestement abusif de la banque et un manquement à son obligation de mise en garde ; que, par la suite, la banque n’a pas géré le dossier de manière rigoureuse ; qu’en effet, elle a mis fin brutalement aux concours accordés sans respecter de délai de préavis et elle n’a pas donné suite aux différentes propositions de la SARL Domaine de la Forestière tendant à la vente de l’immeuble à différents promoteurs, ce qui aurait permis une réduction significative de la dette, préférant laisser la situation s’enliser au risque que le bien soit dégradé au fil du temps et perde toute valeur ; qu’en revanche, aucune faute ne peut être imputée à la Société Générale au titre de l’absence de souscription d’une assurance dommage-ouvrage, cette assurance étant hors du champ de son intervention et relevant de la seul responsabilité du promoteur ; que l’ensemble de ces manquements constituent des fautes contractuelles imputables à la Société Générale, qui doit dès lors être condamnée au paiement de dommages et intérêts à raison de l’inexécution des obligations qui lui incombaient ; que le préjudice résultant pour la SARL Domaine de la Forestière de l’attitude fautive de la Société Générale doit s’analyser comme la perte d’une chance de réduire son endettement ou de ne contracter que de manière raisonnable ; que ce préjudice ne saurait être équivalent au solde débiteur du compte de la société, puisque les fonds prêtés ont permis au moins pour partie d’accroître la valeur de son patrimoine immobilier; que, par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu’il a fixé le préjudice de la SARL Domaine de la Forestière à une somme de 200 000 € et a ordonné la compensation ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE sur l’immixtion du banquier dans l’opération poursuivie par la demanderesse ; la SARL Domaine de la Forestière reproche tout d’abord à la Société Générale de s’être immiscée dans le projet immobilier et commercial qui était le sien ; qu’ainsi qu’il résulte des éléments de la cause, Jean-Claude B… et Bernadette C…, qui exploitaient une activité de restaurant-brasserie à Brive, sous l’enseigne « Brasserie du Théâtre », par l’intermédiaire d’une société à responsabilité limitée portant le même nom, et qui était cliente de la Société Générale, ont constitué une société civile immobilière dénommée SCI Domaine de la Forestière laquelle a procédé à l’acquisition, par acte authentique en date du 30 décembre 2003, d’un ensemble immobilier comprenant notamment un bâtiment à usage d’hôtel-restaurant et d’autres bâtiments édifiés sur un parc d’une superficie d’un peu plus de 3 ha, situé […] , moyennant le prix de 251 542 € ; que, dans ce contexte, la Société Générale a accordé à celle-ci un prêt d’un montant de 310 000 €, remboursable en 10 ans moyennant un taux d’intérêt de 4,55 % ; qu’en effet, les intéressés, qui avait procédé à la cession du fonds de brasserie restaurant exploité à Brive avait envisagé de poursuivre dans l’immeuble dont il s’agit une activité d’hôtel restaurant, par l’intermédiaire d’une société à responsabilité limitée dénommée SARL Domaine de la Forestière ; que des avances de trésorerie ont dès lors été accordées par la Société Générale à la SARL Domaine de la Forestière, mais que, notamment à raison d’ennuis de santé rencontrés par Jean-Claude B…, le projet d’exploitation d’un hôtel-restaurant n’a pu être poursuivi, même s’il apparaît par ailleurs que ces difficultés propres à l’un des associés ne pouvaient constituer le motif essentiel de ce changement, puisque, dans le même temps, la banque lui apportait son concours financier pour démarrer une activité de traiteur à Brive ; qu’en tout état de cause, c’est dans ce contexte que, par le biais de Christian Z…, alors directeur régional de la Société Générale qu’Alain A…, alors responsable d’une agence immobilière, a été amené à venir au sein de l’ensemble immobilier de Louvie-Juzon pour fournir un avis sur le projet de restructuration immobilière susceptible d’y être mené ; que ce dernier, dans une attestation manuscrite en date du 11 mai 2010, régulièrement produite, précise que c’est Christian Z… qui lui a indiqué que « sur les conseils de la Société Générale » des logements à usage d’habitation allaient être réalisés dans le bâtiment ; qu’il précise que sa visite sur place s’est faite en compagnie de Christian Z… et que ce n’est qu’après être arrivé sur place qu’il a fait la connaissance des associés de la SCI Domaine de la Forestière et de la SARL Domaine de la Forestière, ce qui est de nature à établir que ce ne sont pas ces derniers qui étaient à l’origine de l’intervention d’Alain A… et que c’est donc bien sur l’initiative du directeur d’agence de la banque que l’intervention de ce dernier se situait ; qu’en outre, il s’évince de la relation faite par Alain A… dans son attestation que la Société Générale est bien intervenue pour conseiller à ses emprunteurs un projet immobilier précis ; qu’en outre, il est permis raisonnablement de douter que Jean-Claude B… et Bernadette C…, en leur qualité d’associés tant au sein de la SCI Domaine de la Forestière qu’au sein de la SARL Domaine de la Forestière, aient pu concevoir par eux-mêmes la réorganisation de leur projet initial, compte tenu de leurs compétences professionnelles qu’ils n’avaient jusqu’ici exercées que dans le cadre d’une activité de gestion d’une brasserie restaurant ; que, par ailleurs, les actes d’immixtion qui sont reprochées à la banque ressortent également de nombreuses pièces que celle-ci verse elle-même au débat ; qu’ainsi, dans un courriel en date du 31 mars 2005, Christian Z… fait état de ce qu’il a reçu une personne intéressée par l’acquisition d’appartements au sein de l’ensemble immobilier restructuré et de ce que l’agent immobilier chargé de la vente doit venir le voir, ce qui est de nature à établir l’existence d’une initiative directe du directeur de la banque au stade de la commercialisation des appartements ; que, de la même façon, dans un document établi par le même Christian Z… le 10 janvier 2005, celui-ci indique que, pour le cas où des promesses de vente n’auraient pu être signées dans un certain délai qu’il évoque, « nous envisageons » une vente d’un certain nombre d’appartements de la SARL Domaine de la Forestière au profit de Bernadette C…, le terme « nous » désignant à l’évidence une sorte de société de fait ou de groupement informel réunissant la Société Générale et ses débiteurs ; qu’enfin, dans un document rédigé et signé toujours par Christian Z… en sa qualité de directeur régional de la banque le 7 mars 2005, celui-ci fait état de contacts directs qu’il a pu avoir avec l’agence immobilière chargée de la commercialisation des appartements et évoque de manière précise les conditions financières de ces ventes ; qu’il se déduit donc des éléments factuels ci-dessus évoqués que la Société Générale s’est bien immiscée dans la gestion des affaires de son emprunteur et notamment dans les projets immobiliers qu’il pouvait alors nourrir ; que, sur la mise en place de concours bancaires inadaptés et excessifs, ainsi qu’on le sait, la Société Générale a consenti à la SARL Domaine de la Forestière une première convention de trésorerie courante en date du 14 mai 2004 à hauteur d’une somme de 100 000 €, dont les conditions particulières de la convention indiquaient que cette autorisation prendrait fin le 31 juillet 2004 ; qu’en garantie de cette ouverture de crédit, Bernadette C…, gérante de la SARL Domaine de la Forestière, intervenait comme caution à hauteur d’une somme de 520 000 € tandis que Jean-Claude B… intervenait également en tant que caution à hauteur d’une somme de 260 000 € ; que la disproportion évidente entre les garanties ainsi souscrites au profit de la banque et le montant de son concours financier constitue un premier élément de suspicion à l’égard de celle-ci qui n’a manifestement pas adopté en l’espèce un comportement loyal vis-à-vis de ses clients ; qu’un avenant à cette convention a été régularisé le 29 juin 2004, portant à la somme de 600 000 € l’ouverture de crédit, les mêmes garanties étant maintenues au titre des engagements de caution que dans l’acte de du 14 août 2004 ; que, manifestement, les engagements de cautions exigés en mai 2004 correspondaient, eu égard à leur montant, à garantir une dette qui n’existera que quelques mois après, point sur lequel la banque ne fournit aucune explication, sauf à supposer qu’elle avait dès la souscription de la première ouverture de crédit la conviction de son inadéquation aux besoins réels de l’emprunteur ; que cette attitude n’apparaît pas davantage loyale ; que, par ailleurs, aucune de ces deux conventions n’exprime les raisons pour lesquelles elles ont été souscrites en dehors d’un besoin évident de financement rencontré par la SARL Domaine de la Forestière mais dont on peut toutefois s’étonner qu’elle ait été amené à les souscrire dans la mesure où elle n’exerçait alors manifestement pas d’activités commerciales puisque les travaux de transformation hôtelière de l’immeuble de la SCI Domaine de la Forestière n’étaient pas achevés ; qu’on peut d’autant plus s’en étonner que la convention emportant avenant en date du 29 juin 2004 ajoute, au titre des garanties, une hypothèque en premier rang sur un immeuble situé […] qui n’est autre que celui appartenant à la SCI Domaine de la Forestière et qu’à l’évidence la SARL Domaine de la Forestière qui ne détenait aucun droit sur celui-ci ne pouvait offrir à titre de garantie hypothécaire ; qu’en réalité, à l’image de l’engagement de caution ci-dessus évoqué, cet acte ne faisait que précéder une opération de vente qui s’est concrétisée le 12 juillet 2004, de manière à tout le moins surprenante et inhabituelle, dans les locaux mêmes de la Société Générale, […] , dans le contexte de laquelle la SCI Domaine de la Forestière a vendu à la SARL Domaine de la Forestière l’ensemble immobilier qui lui appartenait à Louvie-Juzon et dans le contexte duquel ce tout nouvel acquéreur a aussitôt consenti une hypothèque sur ce bien au profit de la Société Générale ; que tout ceci est d’ailleurs confirmé par une correspondance de Christian Z… en date du 29 octobre 2010 ; que, par ailleurs, il n’est pas inutile de relever que la convention d’ouverture de trésorerie en date du 14 mai 2004 prévoyait un taux effectif global de 10,51 % l’an porté à 10,80 % l’an en cas de dépassement de la ligne de crédit et que la convention du 29 juin 2004 évoquait un taux effectif global de 5,20 % l’an porté à 5,50 % en cas de dépassement de l’ouverture de crédit autorisé ; qu’eu égard aux éléments ci-dessus, il ne peut être contesté que les engagements financiers proposés par la Société Générale à sa cliente et qu’elle a fait souscrire à celle-ci étaient manifestement inadaptés à ses besoins ; qu’outre le fait que ces ouvertures de crédit ne mentionnent aucunement les raisons pour lesquelles il a pu y être recouru, il est évident qu’elles s’inscrivaient dans le cadre d’un projet d’investissement immobilier et que, dans cette perspective, il aurait dû être recouru à un autre type de crédit sur du long terme et moyennant un taux d’intérêt moins élevé ; qu’en se comportant ainsi, la banque n’a manifestement pas respecté le devoir de loyauté contractuelle auquel elle est tenue envers son client ainsi qu’il ressort du caractère ruineux ou à tout le moins désavantageux des crédits qu’elle lui a proposés et fait souscrire ; que, par ailleurs, la Société Générale ne saurait davantage contester qu’elle a nécessairement admis que se concrétise l’opération qui s’est déroulée en ses locaux le 12 juillet 2004 et qui consistait à faire passer du patrimoine de la SCI Domaine de la Forestière vers celui de la SARL Domaine de la Forestière les biens immobiliers qui avaient été acquis par la première à Louvie-Juzon ; qu’en effet, et ainsi qu’il ressort des pièces produites au débat, la banque y voyait pour premier avantage la reprise par la SARL Domaine de la Forestière du prêt souscrit par la SCI Domaine de la Forestière lors de l’acquisition de l’ensemble immobilier litigieux le 30 décembre 2003 ; que cela implique nécessairement une participation à tout le moins tacite de la banque à une opération inutile voire néfaste aux intérêts de ses clients, ainsi que le souligne Patrice D…, expert-comptable de la SARL Domaine de la Forestière, dans une attestation qui est produite au débat par la demanderesse ; que, sur le manquement au devoir de mise en garde ; que les deux associés de la SCI Domaine de la Forestière également associés de la SARL Domaine de la Forestière n’avaient manifestement pas de connaissances spécifiques en matière de crédits bancaires et, à tout le moins, les connaissances qu’ils pouvaient avoir ne les mettaient pas à même d’appréhender dans sa globalité une opération immobilière et financière telle que celle à laquelle ils ont participé ; que la banque ne démontre pas par ailleurs les compétences qu’elle leur attribue en ce domaine ; qu’en effet, ceux-ci, qui n’avaient jusqu’à présent exercé d’activités professionnelles que dans le domaine de la restauration, se sont transformés quasiment en promoteurs immobiliers, à la suite de l’immixtion de la banque dans leurs affaires ainsi que rappelé ci-dessus ; que le projet immobilier dont il s’agit était d’une certaine envergure puisqu’il portait sur la division du vaste ensemble immobilier de Louvie-Juzon en 12 appartements d’un certain standing ; que, dans ce contexte, des investissements considérables ont été réalisés puisque, ainsi qu’on le sait, très rapidement, le découvert autorisé de 600 000 € accordé par la Société Générale le 29 juin 2004 va passer à plus de 662 000 € dès le mois d’août 2004 pour un excéder le million d’euros en mars 2005, sans qu’à ce moment-là la banque ne se manifeste de quelque manière que ce soit pour s’en inquiéter et attirer l’attention de ses clients sur l’endettement manifestement excessif dans lequel ils s’étaient plongés ; qu’à l’évidence, la banque devait assumer à l’égard de ses clients qui ne disposaient d’aucune expérience professionnelle dans le domaine de la promotion immobilière son obligation de conseil, ce qu’elle n’a pas fait ; qu’en outre, celle-ci ne justifie d’aucune étude préalable précise et circonstanciée de l’opération à laquelle elle a prêté son concours financier ; qu’enfin, il n’est pas contesté que celle-ci, pour assurer le règlement des factures qui lui étaient présentées, bien au-delà de la limite de l’ouverture de crédit autorisé, ne s’est à aucun moment préoccupée de solliciter le moindre justificatif alors qu’elle devait manifestement faire preuve d’une vigilance toute particulière eu égard d’une part au profil de ses clients et d’autre part à l’importance des fonds investis ; que, sur les conditions de clôture du compte, après avoir laissé ses clients dériver sur l’océan d’un compte débiteur quasiment à hauteur du double de l’autorisation de découvert, la Société Générale, après avoir écarté un certain nombre de propositions de règlement amiable qui lui avaient été suggérés par sa cliente, ce qui souligne d’autant son immixtion dans les affaires de celle-ci, a brutalement réagi en sollicitant le règlement d’une somme de plus de plus 1 239 000 €, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 mai 2006, en adressant dans le même temps à chacune des cautions une même et semblable mise en demeure ; que la tardiveté tout autant que la brutalité de la réaction de la banque sont également révélatrices d’une attitude fautive de sa part ; que, sur le préjudice causé, les manquements ci-dessus relevés à l’égard de la banque constituent tout autant de fautes contractuelles, impliquant qu’il soit fait application des dispositions de l’article 1147 qui prévoit la condamnation du débiteur au paiement de dommages-intérêts à raison notamment de l’inexécution d’une obligation qui lui incombait ; qu’il est constant, en droit, que le préjudice né du manquement par un établissement de crédit à son obligation de mise en garde s’analyse en la perte d’une chance de ne pas contracter ; qu’en l’espèce, l’attitude fautive de la banque a amené la SARL Domaine de la Forestière à souscrire des engagements particulièrement importants, au-delà de la possibilité pour elle de les rembourser ; que néanmoins, il n’en demeure pas moins que les concours financiers dont elle a bénéficié de la part de la Société Générale lui ont permis de réaliser des investissements dans un bien immobilier lui appartenant, valorisant ainsi d’autant son propre patrimoine ; que, dès lors, il n’est pas possible de chiffrer son préjudice à hauteur de la somme revendiquée par celle-ci dans ses écritures ; que la détermination du préjudice de la demanderesse doit s’apprécier au regard des difficultés de tous ordres qu’elle a rencontrées en ne pouvant refuser de s’engager financièrement face aux initiatives que la banque la contraignait de prendre ; que celui-ci, eu égard aux éléments de l’espèce, doit être quantifié à hauteur d’une somme de 200 000 € ;

1° ALORS QUE le dommage dont il est certain qu’il ne se serait pas produit en l’absence de la faute retenue doit être intégralement réparé et ne peut, en l’absence de tout aléa, s’analyser en une perte de chance ; qu’en retenant, en l’espèce, que le préjudice subi par la SARL Domaine de la Forestière par l’effet de la faute imputée à la Société Générale consistait en une simple perte de chance de réduire son endettement ou de ne contracter que de manière raisonnable, bien qu’il ait résulté de ses propres constatations que la banque était, seule, à l’origine du projet immobilier dont elle avait eu l’initiative, de sorte que, sans sa faute, la société emprunteuse, qui n’aurait jamais envisagé un tel projet, n’aurait subi aucun dommage, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2° ALORS QUE manque à son devoir d’information et de conseil la banque qui, conseillant à son client une opération de promotion immobilière et l’accompagnant à tous les stades de sa mise en oeuvre, ne l’informe pas de la nécessité de souscrire une assurance dommage ouvrage ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la Société Générale, qui avait eu l’initiative de l’opération de promotion immobilière qu’elle avait conseillée à l’exposante, en avait activement organisé la mise en oeuvre, excédant ainsi largement sa mission de prêteuse de deniers ; qu’en retenant, pour juger que la banque n’avait pas commis de faute en n’informant pas la SARL Domaine de la Forestière de la nécessité de souscrire une assurance dommage-ouvrage, que « cette assurance éta[it] hors du champ de son intervention et releva[it] de la seule responsabilité du promoteur » (arrêt, p. 10, al. 1er), la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3° ALORS QU’en toute hypothèse, c’est à celui qui se prétend libéré de prouver le fait qui a produit sa libération ; qu’en retenant, en l’espèce, que l’opération dommageable avait permis à l’exposante de bénéficier d’un accroissement de son patrimoine immobilier, quand un tel accroissement, expressément contesté par l’emprunteuse, n’était pas même invoqué par la banque, la cour d’appel qui n’a nullement justifié de l’importance de cet enrichissement qu’il appartenait à la défenderesse à l’acte d’établir a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1315 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

 


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