→ Résumé de l’affaireMonsieur [L] [D] [M], de nationalité iranienne, a été placé en rétention administrative pour une durée de 48 heures par le Préfet du Pas-de-Calais. Une demande de prolongation de cette rétention pour une durée maximale de 30 jours a été faite. L’intéressé est connu comme demandeur d’asile en Allemagne. Son avocat a demandé des dommages-intérêts et l’article 700. La préfecture a justifié la prolongation en raison de l’impossibilité de transférer l’intéressé en Roumanie en vertu d’un accord de réadmission. L’avocat de la préfecture a souligné que toutes les diligences ont été accomplies et a demandé la prolongation de la rétention. L’avocat de l’intéressé a plaidé en faveur de l’application des accords de réadmission avec la Roumanie. L’audience a été suspendue pour délibération. |
→ L’essentielIrregularité de la procédureSelon l’article L. 742-4 du CESEDA, le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans certains cas spécifiques. Il est important de noter que la régularité du placement en rétention a été examinée par le juge des libertés et de la détention lors de la première demande de prolongation. Attente de documents de voyageM. [D] [M] a été placé en rétention administrative et la mesure a été prolongée par le juge des libertés et de la détention. Cependant, l’administration est toujours dans l’attente de documents de voyage concernant M. [D] [M]. Malgré les relances et les démarches entreprises, les autorités roumaines n’ont pas encore répondu à la demande de réadmission. Nécessité de prorogation de la mesureEu égard aux nécessités invoquées par Monsieur le Préfet, il convient d’accorder la prorogation demandée. Les conditions prévues par l’article L. 742-4 du CESEDA sont réunies, notamment en raison de l’absence de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière. En l’absence de démonstration d’une faute de Monsieur le préfet, la demande de dommages-intérêts sera rejetée. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Au nom du Peuple Français
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER
ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION
MINUTE: 24/1170
Appel des causes le 26 Juillet 2024 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 24/03434 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-755VS
Nous, Madame Pascale METTEAU, Premier Vice-Président au Tribunal Judiciaire de BOULOGNE SUR MER, Juge des Libertés et de la Détention, assistée de Mme CHAIB Samira, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile ;
En présence de Maître Antoine PATINIER représentant de M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS ;
Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;
Monsieur [L] [D] [M]
de nationalité Iranienne
né le 04 Août 1996 à [Localité 2] (IRAN), a fait l’objet :
d’un arrêté ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quarante-huit heures, prononcé le 26 juin 2024 par M. PREFET DU PAS-DE-CALAIS , qui lui a été notifié le 26 juin 2024 à 17h10 .
L’intéressé est connu au système européen EURODAC en qualité de demandeur d’asile en ALLEMAGNE.
Par requête du 25 Juillet 2024, arrivée par courrier électronique à 15h45 M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de 48 heures, prolongé par un délai de VINGT-HUIT JOURS selon l’ordonnance du 28 juin 2024, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de TRENTE JOURS maximum.
En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Guillaume BAILLARD, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations
L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté de Maître BAILLARD. Ma femme et mon enfant sont à l’hôtel depuis un mois. Je ne comprends pas pourquoi je dois rester ici en plus mon enfant est malade.
Me Guillaume BAILLARD entendu en ses observations à l’appui des conclusions écrites déposées ; Je vous confirme que c’est bien un passeport que j’ai produit qui permet de voyager partout sauf en Iran. L’interprète me le confirme. Je demande des dommages-intérèts et l’article 700.
L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé. Monsieur avait déclaré qu’il retournerait en Allemagne et non en Roumanie. Je ne sais pas si l’accord a été ratifié. Les autorités roumaines ont des obligations dans cet accord mais pas les autorités françaises. L’administration a fait ses diligences. Ils ont demandé à l’Allemagne la réadmission qui a été refusée. L’administration a ensuite pris attache avec la Roumanie. La préfecture fait des relances. Elle ne peut rien faire de plus que des relances. Il existe un principe de non ingérence. L’autorité française ne peut pas prendre autorisation sur un Etat étranger pour pouvoir édicter une décision de transfert. L’Etat français ne peut imposer de prendre cet arrêté dans tel ou tel délai.
Monsieur n’a pas présenté de passeport en cours de validité. Il dit lui-même que son passeport a été perdu en Belgique. Toutes les diligences ont été accomplies. Je vous demande de prolonger la rétention administrative.
Me BAILLARD : Monsieur comptait retourner en Allemagne dans un premier temps car il comptait récupérer sa voiture en Allemagne pour repartir en Roumanie. L’accord est d’application depuis 1994. On demande d’appliquer les accords. La Roumanie, dans cet accord, s’engage à reprendre ses ressortissants sans formalité. Monsieur a remis son passeport le lendemain de son placement en rétention.
Audience suspendue et mise en délibéré.
Selon l’article L. 742-4 du CESEDA, le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;
2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;
b) de l’absence de moyens de transport.
L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours.
M. [D] [M] a été placé en rétention administrative le 26 juin 2024. la mesure a été prolongée par le juge des libertés et de la détention le 28 juin 2024 (décision confirmée par la cour d’appel de Douai).
L’Allemagne a refusé la demande de remise concernant M. [D] [M] (dont les empreintes figuraient à la brone EURODAC) le 28 juin 2024.
Une demande de reprise en charge a été adressée aux autorités roumaines alors que M. [D] [M] a produit un titre de séjour dans ce pays. Malgré plusieurs relances des 2, 11 et 24 juillet 2024, l’administration reste dans l’attente d’une réponse de ce pays.
Si Monsieur [D] [M] prétend qu’il faisait du tourisme en France et qu’il dispose notamment d’un passeport, force est de constater qu’il n’était pas en possession de ce document lors de son contrôle et qu’en tout état de cause, la régularité du placement en rétention a été examinée par le juge des libertés et de la détention lors de la première demande de prolongation.
Par ailleurs, si l’accord liant la France et la Roumanie prévoit la réadmission sans formalité d’une personne ayant un passeport ou même un titre de séjour, les autorités roumaines ont été saisies d’une demande de réadmission à laquelle elles n’ont pas répondu malgré les relances. Elles ont uniquement indiqué que la demande concernant Monsieur [D] [M] était prise en charge sans donner leur accord pour la réadmission, faisant état que le dossier est en cours de traitement.
L’accord entre les deux Etats impose à l’Etat requis d’organiser une audition. Cependant, la France ne dispose d’aucun moyen de contrainte pour imposer une telle audition à l’Etat roumain, lequel a été relancé à plusieurs reprises.
Il n’est donc démontré aucun défaut de diligences, étant rappelé qu’il ne peut être invoqué lors d’une deuxième prolongation le caractère infondé du placement en rétention administrative.
Les conditions prévues par l’article L. 742-4 du CESEDA sont réunies alors que l’administration est dans l’attente de documents de voyage cocernant M. [D] [M].
L’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.
Eu égard aux nécessités invoquées par Monsieur le Préfet, il convient d’accorder la prorogation demandée.
En l’absence de démonstration d’une faute de Monsieur le préfet, la demande de dommages-intérêts, qui au surplus ne relève pas de la compétence du juge des libertés et de la détention, sera rejetée et de même il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du CPC.
Autorisons l’autorité administrative à retenir Monsieur [L] [D] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de TRENTE JOURS à compter du 26 Juillet 2024
REJETONS la demande de dommages-intérêts présentée et la demande sur le fondement de l’article 700 du CPC.
NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 3] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01].) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.
L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,
En visio
décision rendue à 10h46
Ordonnance transmise ce jour à M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 24/03434 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-755VS
Décision notifiée à …h…
L’intéressé, L’interprète,