Prolongation de la rétention pour menace à l’ordre public

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Prolongation de la rétention pour menace à l’ordre public

Résumé de l’affaire

M. [U] [M], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative par décision administrative le 27 mai 2024. Cette rétention a été prolongée par le juge des libertés et de la détention le 29 mai 2024 et le 26 juin 2024. Une nouvelle demande de prolongation de quinze jours a été faite par l’autorité administrative le 25 juillet 2024. Le conseil de M. [U] [M] conteste cette prolongation en invoquant l’absence de preuve de délivrance à bref délai du laissez-passer.

L’essentiel

Irrecevabilité de la demande de prolongation de la rétention

L’article L742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit les conditions dans lesquelles le juge des libertés et de la détention peut être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue. Ces conditions sont notamment liées à des situations exceptionnelles telles que l’obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement, la présentation de demandes de protection contre l’éloignement ou d’asile dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement, ou encore le défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat.

En l’espèce, la préfecture invoque l’absence de garanties de représentation de l’intéressé, qui a volontairement dissimulé sa véritable identité et présente un risque de fuite. De plus, sa présence en France est considérée comme constituant un trouble à l’ordre public en raison de ses nombreuses condamnations et incidents en détention.

Il ressort de la procédure que l’intéressé a refusé la prise de clichés photographiques et un relevé de ses empreintes lors de son audition par les services de gendarmerie, et qu’il a été récemment incarcéré pour diverses infractions. De plus, malgré une demande de rendez-vous consulaire sous une nouvelle identité, aucune réponse n’a été reçue.

Caractérisation de la menace pour l’ordre public

En rappelant les condamnations et incidents en détention de l’intéressé, l’autorité préfectorale a suffisamment caractérisé la menace à l’ordre public. La rétention de l’étranger est donc justifiée au regard de ces éléments et de la nécessité de prévenir tout risque de fuite ou de trouble à l’ordre public.

Validation de la demande de prolongation de la rétention

Indépendamment de la notion de bref délai, les critères de l’article 742-5 étant alternatifs et non cumulatifs, il convient de faire droit à la requête du préfet qui a suffisamment caractérisé la menace pour l’ordre public. La prolongation de la rétention de l’étranger est donc justifiée dans ce contexte.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 juillet 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG
24/01599
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
___________________

Le Juge des Libertés et de la Détention

NOTE D’AUDIENCE
Articles L.614-1, L.614-13, L.741-10, L.743-5, L.743-20 du CESEDA

Audience publique

DATE D’AUDIENCE : 26 Juillet 2024

DOSSIER : N° RG 24/01599 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YTAI – Mme LA PREFETE DE L’OISE / M. [U] [M]

MAGISTRAT : Joelle SPAGNOL

GREFFIER : Damien COUVREUR

DEMANDEUR :
Mme LA PREFETE DE L’OISE
Représenté par M. [W] [B]

DEFENDEUR :
M. [U] [M]
Assisté de Maître Jérôme BRASSART, avocat commis d’office
En présence de Mme [G] [O], interprète en langue arabe ,
__________________________________________________________________________
DEROULEMENT DES DEBATS

L’intéressé déclare : “Je souhaite être libéré, je regrette tout ce que j’ai fait. Ce sont les djiins qui vont m’envoyer en enfer. J’ai vu un médecin au CRA.”

Le représentant de l’administration, entendu en ses observations ;

L’avocat soulève les moyens suivants : – Absence de perspective d’éloignement à bref délai ;
– Absence de caractérisation du trouble à l’Ordre Public ; – Absence de demande de routing, défaut de diligence ;

Le représentant de l’administration répond à l’avocat ;

L’intéressé entendu en dernier déclare : “J’en ai marre, j’ai fait plein de prison, pour rien. Je veux être libéré aujourd’hui car j’ai plein de problèmes à Lesquin. Je quitte la France dès que je sors, j’ai les papiers en Espagne.”
DECISION

Sur la demande de maintien en rétention :
o RECEVABLE o IRRECEVABLE
o PROROGATION EXCEPTIONNELLE o REJET o ASSIGNATION A RÉSIDENCE

Le greffier Le juge des libertés et de la détention

Damien COUVREUR Joelle SPAGNOL

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
──────────
LE JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION
────
Dossier n° N° RG 24/01599 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YTAI

ORDONNANCE STATUANT SUR LA PROROGATION EXCEPTIONNELLE D’UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE
Articles L.614-1, L.614-13, L.741-10, L.743-5, L.743-20 du CESEDA

Nous, Joelle SPAGNOL, Vice Président, juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de LILLE, assisté de Damien COUVREUR, greffier ;

Vu les dispositions des articles suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) :
– L.614-1, L.614-13, L.741-10, L.743-5, L.743-20
– L. 741-1, L.741-4, L.741-5, L.741-7, L.744-1, L.751-9, L.751-10
– L. 743-14, L.743-15, L.743-17
– L. 743-19, L. 743-25
– R. 741-3
– R.742-1, R. 743-1 à R. 743-8, R. 743-21

Vu la décision de placement en rétention administrative prise le 27/05/2024 par Mme LA PREFETE DE L’OISE ;

Vu l’ordonnance de maintien en rétention rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de LILLE, le 29/05/2024 ;

Vu l’ordonnance de prorogation rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de LILLE en date du 26/06/2024 et prononçant la prorogation de la rétention pour une durée de trente jours ;

Vu la requête en prorogation exceptionnelle de l’autorité administrative en date du 25/07/2024 reçue et enregistrée le 25/07/2024 à 09H10 (cf. Timbre du greffe) tendant à la prorogation de la rétention de M. [U] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de quinze jours ;

Vu l’extrait individualisé du registre prévu à l’article L.744-2 du CESEDA émargé par l’intéressé ;

PARTIES

AUTORITE ADMINISTRATIVE QUI A ORDONNE LE PLACEMENT EN RETENTION

Mme LA PREFETE DE L’OISE
préalablement avisé, représenté par Monsieur [W] [B], représentant de l’administration

PERSONNE RETENUE

M. [U] [M]
né le 15 Février 2003 à ALGERIE (99352)
de nationalité Algérienne
actuellement maintenu en rétention administrative
préalablement avisé et présent à l’audience,
assisté de Maître Jérôme BRASSART, avocat commis d’office,
en présence de Mme [G] [O], interprète en langue arabe,

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE, préalablement avisé n’est pas présent à l’audience.

DEROULEMENT DES DEBATS

A l’audience publique, le juge des libertés et de la détention a procédé au rappel de l’identité des parties ;

Après avoir rappelé à la personne retenue les droits qui lui sont reconnus par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pendant sa rétention et l’avoir informée des possibilités et des délais de recours contre toutes décisions le concernant ;

L’intéressé a été entendu en ses explications ;

Le représentant du préfet a été entendu en ses observations ;

L’avocat a été entendu en sa plaidoirie ;

Le représentant du préfet ayant répondu à l’avocat ;

L’étranger ayant eu la parole en dernier ;

EXPOSE DU LITIGE

Par décision en date du 27 mai 2024 notifiée le même jour à 9 heures 30, l’autorité administrative a ordonné le placement de M. [U] [M] né le 15 février 2003 en Algérie de nationalité algérienne en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.

Par décision rendue le 29 mai 2024, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de la rétention administrative de M.[U] [M] pour une durée maximale de vingt-huit jours.

Par décision rendue le 26 juin 2024, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de la rétention administrative de M.[U] [M] pour une durée maximale de trente jours.

Par requête en date du 25 juillet 2024, reçue à 9 heures 10, l’autorité administrative a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée supplémentaire de quinze jours.

Le conseil de M.[U] [M] sollicite le rejet de la prolongation de la rétention sur le moyen: absence de preuve de délivrance à bref délai du laissez-passer.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’article L742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose :
“A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.”

En l’espèce la préfecture invoque à l’appui de sa requête l’absence de garanties de représentation rappelant que l’intéressé a volontairement dissimulé sa véritable identité en produisant une copie d’un passeport sous le nom de M. [Y] [C] et a ainsi volontairement retardé son identification et présente un risque de fuite. Elle relève enfin que sa présence en France constitue un trouble à l’ordre public au regard de ses nombreuses condamnations.

Il ressort de la procédure :
– que M. [U] [M] a refusé la prise de clichés photographiques ainsi qu’un relevé de ses empreintes lors de son audition par les services de gendarmerie.
– qu’il a été écroué du 30 juin 2021 au 27 mai 2024 en exécution d’une peine de 2 mois d’emprisonnement prononcée par le tribunal pour enfants de Paris le 14 septembre 2020, une peine de 3 ans d’emprisonnement prononcée par le tribunal correctionnel de Paris le 29 juin 2021 des chefs de violences aggravées en récidive légale, une peine de 3 mois d’emprisonnement prononcée par le tribunal correctionnel de Paris le 8 mars 2021 du chef de vol aggravé, une peine de 2 mois d’emprisonnement prononcée par le tribunal pour enfants de Bobigny du chef de violences. La lecture de sa fiche pénale atteste que la détention a été émaillée d’incidents et qu’il a été sanctionnés de nombreux retraits de crédits de réduction de peine.

En rappelant ces condamnations sanctionnées par une incarcération récente, l’autorité préfectorale a suffisamment caractérisé la menace à l’ordre public.

Un rendez-vous consulaire a été sollicité le 28 juin 2024 sous cette nouvelle identité. Une relance est intervenue le 24 Juillet 2024.

En conséquence et indépendamment de la notion de bref délai, les critères de l’article 742-5 étant alternatifs et non cumulatifs, il convient de faire droit à la requête du préfet qui a suffisamment caractérisé la menace pour l’ordre public .

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement en premier ressort, par décision assortie de l’exécution provisoire,

DÉCLARONS recevable la requête en prorogation de la rétention administrative

ORDONNONS LA PROROGATION EXCEPTIONNELLE DE LA RETENTION de M. [U] [M] pour une durée de quinze jours à compter du 26/07/2024 à 09H30 ;

Fait à LILLE, le 26 Juillet 2024

Notifié ce jour à h mn

LE GREFFIER LE JUGE DES LIBERTES ET DE LA DETENTION

NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE AUX PARTIES

DOSSIER : N° RG 24/01599 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YTAI
Mme LA PREFETE DE L’OISE / M. [U] [M]
DATE DE L’ORDONNANCE : 26 Juillet 2024

NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance aux parties, qui en émargeant ci-après, attestent en avoir reçu copie et les avisons de la possibilité de faire appel, devant le Premier président de la cour d’appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt-quatre heures de son prononcé ; les informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [email protected]; leur indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier président de la cour d’appel ou son délégué.

Information est donnée à M. [U] [M] qu’il est maintenu à disposition de la justice pendant un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République, lorsqu’il est mis fin à sa rétention ou lors d’une assignation à résidence. Durant cette période, l’intéressé peut, s’il le souhaite, contacter son avocat et un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.

Traduction orale faite par l’interprète.

AU REPRÉSENTANT DU PRÉFET À L’INTERESSE
Par courrier électronique Par Visio-Conférence
Le Greffier Le Greffier

L’INTERPRETE LE GREFFIER

À L’AVOCAT
Par courrier électronique
Le Greffier

______________________________________________________________________________

RÉCÉPISSÉ

M. [U] [M]

retenu au Centre de Rétention de LESQUIN

reconnait avoir reçu notification de ladite ordonnance en date du 26 Juillet 2024

date de remise de l’ordonnance :
le :

signature de l’intéressé


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