La rupture d’un projet de partenariat avorté n’est pas nécessairement fautive. La fin de la collaboration entre deux sociétés, au regard des 8 mois d’échanges entre les parties, n’a pas été qualifiée de brutale et/ou abusive. Aucun préjudice n’était établi du fait de la perte de temps passée en pourparlers.
Si la longueur des pourparlers entre les deux sociétés était d’une certaine importance, cela était toutefois insuffisant pour qualifier de brutale ou déloyale la rupture intervenue, étant observé qu’aucune clause contractuelle n’interdisait à la partie à l’origine de la rupture de s’intéresser à des applications mobiles concurrentes de celle de son partenaire.
Pour rappel, il résulte de l’article 1145 du code civil, dans sa version applicable au litige, que si l’obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention.
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
12e chambre
ARRET DU 01 JUILLET 2021
N° RG 19/03559 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TGSA
AFFAIRE :
SA IMUSIC SCHOOL
C/
SAS A B GROUP
…
Y Z, ès-qualités de mandataire judiciaire, puis de commissaire à l’exécution du plan de la société IMUSIC SCHOOL suivant jugement du Tribunal de commerce de Bastia du 05 Novembre 2019 et du 12 Novembre 2020.
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 08 Février 2019 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
LE UN JUILLET DEUX MILLE VINGT ET UN,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
SA IMUSIC SCHOOL
N° SIRET : 499 41 1 6 84
[…]
[…]
Représentant : Me Audrey ALLAIN,avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 344 – N° du dossier 20190504
APPELANTE
****************
SAS A B GROUP
N° SIRET : 750 220 980
[…]
[…]
Représentant : Me Cédric COFFY de la SELARL CABINET DE L’ORANGERIE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 559
SAS A B
N° SIRET : 445 363 518
[…]
[…]
Représentant : Me Cédric COFFY de la SELARL CABINET DE L’ORANGERIE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 559
INTIMEES
****************
Maître Y Z, ès-qualités de mandataire judiciaire, puis de commissaire à l’exécution du plan de la société IMUSIC SCHOOL suivant jugement du Tribunal de commerce de Bastia du 05 Novembre 2019 et du 12 Novembre 2020.
né en à
de nationalité Française
[…]
[…]
Représentant : Me Audrey ALLAIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 344 – N° du dossier 20190504
Maître D X ès-qualités de mandataire judiciaire de la société IMUSIC SCHOOL puis de commissaire à l’exécution du plan de la société IMUSIC SCHOOL suivant jugement du Tribunal de commerce de Bastia du 05 Novembre 2019 et du 12 Novembre 2020.
né en à
de nationalité Française
[…]
[…]
Représentant : Me Audrey ALLAIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 344 – N° du dossier 20190504
PARTIES INTERVENANTES
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 11 Mai 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique MULLER, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur François THOMAS, Président,
Mme Véronique MULLER, Conseiller,
Monsieur Bruno NUT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,
EXPOSE DU LITIGE
La société Imusic School (ci-après société I Music) dispense des cours de musique, de type ‘e-learning’ par le biais d’un site internet dédié.
La société A B est une société de manufacture d’instruments à vent. La société A B Group, qui détient la société A B, s’est rapprochée de la société Imusic en juin 2015 pour étudier la possibilité d’un partenariat. Le 9 juin 2015, les parties ont signé un accord de confidentialité pour un projet de ‘développement et commercialisation de contenus audio-visuels pédagogiques et d’outils de type ‘e-learning’ musical’. Cet accord portait principalement sur les conditions selon lesquelles les informations confidentielles de la société Imusic pouvaient être protégées.
Différentes discussions et rencontres ont eu lieu au cours de l’année 2015.
Le 6 janvier 2016 la société A B Group a indiqué ne pas vouloir poursuivre les échanges, et a
informé la société IMusic qu’elle avait fait l’acquisition d’une plateforme internet dénommée ‘Playwind’ auprès d’une société anglaise.
Le 22 novembre 2016, la société IMusic a fait part de son étonnement, estimant que les sociétés A B avaient manqué à leurs obligations résultant de l’accord de confidentialité.
Par acte du 20 février 2018, la société IMusic School a assigné les sociétés A B Group et A
B devant le tribunal de commerce de Versailles aux fins de les voir condamner au paiement d’une somme de 221.031,82 euros à titre de dommages et intérêts et de voir ordonner à la société A B Group de communiquer, sous astreinte, les échanges intervenus avec le concepteur de sa plateforme.
Par jugement du 8 février 2019, le tribunal de commerce de Versailles a :
— Débouté les sociétés A B et A B Group de leur exception d’irrecevabilité (sic) ;
— Débouté la société IMusic School de l’ensemble de ses demandes;
— Débouté les sociétés A B et A B Group de leurs demandes reconventionnelles;
— Condamné la société IMusic School à payer aux sociétés A B Group et à A B
chacune la somme de 2 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
— Condamné la société IMusic School aux dépens.
Par déclaration du 16 mai 2019, la société IMusic School a interjeté appel du jugement.
Par jugement du 5 novembre 2019, le tribunal de commerce de Bastia a placé la société IMusic en redressement judiciaire, désignant MaîtreTorelli et Maître X en qualité de mandataires judiciaires.
Par jugement du 10 novembre 2020, le tribunal de commerce de Bastia a prononcé l’adoption du plan de redressement de la société IMusic, Maître Z et X étant désignés comme commissaires à l’exécution du plan.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 16 février 2021, la société IMusic demande à la cour de :
— Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Versailles du 8 février 2019 ;
— Dire et juger que la société la A B Group a violé les obligations de l’accord de confidentialité ;
— Dire et juger que la société A B Group a manqué à son obligation de ne pas faire;
— Dire et juger que la société A B a engagé sa responsabilité délictuelle ;
— Dire et juger que la société A B Group a manqué à son obligation de loyauté ;
— Condamner la société A B Group à payer la somme de 50.000 euros à la société IMusic School à titre de dommages et intérêts ;
— Condamner la société A B à payer la somme de 50.000 euros à la société IMusic School à titre de dommages et intérêts ;
— Condamner la société A B Group à payer la somme de 171.031,82 euros à la société IMusic School à titre de dommages et intérêts ;
— Ordonner aux sociétés A B Group et A B de communiquer le certificat d’enregistrement du nom de domaine Playwind.com ;
A défaut,
— Autoriser la société IMusic School à interroger le bureau d’enregistrement enom.com ;
— Ordonner aux sociétés A B Group et A B de communiquer le certificat d’enregistrement du nom de domaine Playwind.com ;
— Ordonner à la société A B Group de communiquer les échanges intervenus avec le concepteur de
sa plateforme sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
Subsidiairement,
— Dire et juger que les sociétés A B et A B Group ont commis des actes parasitaires ;
— Dire et juger que les sociétés A B et A B Group ont engagé leur responsabilité
délictuelle ;
— Condamner solidairement les sociétés A B et A B Group à payer la somme de
50.000 euros à la société IMusic School ;
Sur la demande incidente,
— Dire irrecevables les demandes de A B Group et A B tendant au paiement d’une
indemnité de 30.000 euros et de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de
procédure civile suite à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société IMusic School ;
Subsidiairement,
— Débouter les sociétés A B Group et A B de leurs demandes indemnitaires tendant au
paiement de la somme de 30.000 euros ;
— Débouter les sociétés A B Group et A B de ses demandes au titre de l’article 700 du
code de procédure civile ;
— Condamner les sociétés A B Group et A B à payer la somme de 5.000 euros à la
société IMusic School sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
— Condamner la société A B Group et A B aux entiers dépens de l’instance.
Par dernières conclusions notifiées le 16 février 2021, M. Y Z et M. D X ès
qualités de commissaires à l’exécution du plan de la société IMusic School, intervenants volontaires
demandent à la cour de :
— Accueillir l’intervention volontaire de M. Y Z et M. D X, ès qualités de
mandataires judiciaires puis de commissaires à l’exécution du plan de la société IMusic School ;
— Dire irrecevable la demande indemnitaire des sociétés A B Group et A B tendant au
paiement de la somme de 30.000 euros suite à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la
société IMusic School ;
— Dire irrecevable la demande indemnitaire des sociétés A B Group et A B tendant au
paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile suite à l’ouverture
de la procédure de redressement judiciaire de la société IMusic School;
— Dire irrecevable la demande des sociétés A B Group et A B tendant à la
condamnation de la société IMusic School aux dépens de l’instance suite à l’ouverture de la procédure de
redressement judiciaire de la société IMusic School ;
— Statuer ce que de droit quant aux dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 17 février 2021, les sociétés A B et A B
Group demandent à la cour de :
A titre principal :
— confirmer la décision du tribunal en ce qu’il a débouté la société IMusic School de l’ensemble de ses
demandes,
— Infirmer la décision du tribunal en ce qu’il a rejeté la demande des sociétés A B Group et A
B relative à la procédure abusive, et, statuant à nouveau :
— Condamner la société IMusic School au paiement de la somme de 30.000 € en réparation des préjudices
causés par la procédure abusive,
— Condamner la société IMusic School au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code
de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 1er avril 2021.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux
écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les sociétés A B ne contestent plus la recevabilité des demandes de la société IMusic, de sorte
que le jugement sera confirmé en ce qu’il les a déboutées de leur fin de non-recevoir.
La société IMusic recherche, d’une part la responsabilité contractuelle de la société A B group,
d’autre part la responsabilité délictuelle de la société A B, invoquant également leur manquement
à l’obligation de loyauté, et subsidiairement des actes de parasitisme. Il convient de revenir sur ces différents points.
1- sur la responsabilité contractuelle de la société A B Group (ci-après société BCG)
La société IMusic fait valoir qu’elle a travaillé durant 8 mois entre juin 2015 et janvier 2016 sur le projet de rapprochement avec la société BCG, ce qui lui a occasionné plus de 200 heures de travail valorisées à hauteur de 41.284 euros. Elle ajoute avoir suspendu certains de ses projets (saxophone) pour se consacrer au projet A B. Elle indique avoir transmis de nombreuses informations confidentielles à la société BCG sur le plan comptable et technique, affirmant que ces informations : ‘ont permis à A B de faire développer par un tiers un service identique de cours de musique en ligne. D’ailleurs, les visuels des cours Playwind reprennent les choix de IMusic School, en effet les cours sont filmés sur un fond noir alors que les principaux concurrents ont fait le choix de visuels différents’. Elle reproche ainsi à la société BCG d’avoir violé – en développant ‘indirectement’ un service identique à celui qu’elle propose – les termes de l’accord de confidentialité lui prescrivant de ne pas exploiter ni utiliser les informations confidentielles transmises.
La société BCG affirme ne jamais avoir agi en violation de ses engagements. Elle affirme avoir gardé strictement confidentielles les informations reçues de la société IMusic et ne pas avoir utilisé ni exploité ces informations. Elle indique avoir simplement acquis, d’une société tierce, une application déjà existante qui n’est pas du tout identique, ni même similaire, de celle de la société IMusic.
****
Il résulte de l’article 1145 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, que si l’obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention.
Il résulte de l’article 3 de l’accord de confidentialité du 9 juin 2015 que le destinataire (société BCG) : ‘s’engage à ne pas exploiter les informations confidentielles, directement ou indirectement, sans signature préalable d’un accord écrit spécifique avec le titulaire, et à ne pas utiliser ces informations confidentielles pour développer, directement ou indirectement, des informations, du savoir-faire, une ou plusieurs inventions, un ou plusieurs produits ou services identiques’.
Il n’est pas contesté que la société IMusic a transmis de nombreuses informations confidentielles à la société BCG.
La société BCG produit aux débats le contrat qu’elle a signé, en mai 2016, avec la société Digital Fan Club, exerçant sous le nom commercial Trellyz, pour l’acquisition d’une licence d’utilisation d’une plateforme digitale lui permettant d’utiliser une application ‘playwind’. Elle produit également la facture d’acquisition de cette application, datée du 27 mai 2016, pour un montant de 10.500 livres anglaises.
La société IMusic indique qu’il ‘semble que le nom de domaine Playwind.com, inutilisé depuis 2014, ait fait l’objet d’une action (sic) en date du 10 janvier 2016″, ce qui démontrerait selon elle que la société BCG a pris l’initiative de créer sa propre application à cette date. L’extrait du site Waybackmachine reproduit dans les conclusions de la société IMusic est insuffisant pour caractériser une absence d’utilisation du nom de domaine ‘playwind’ entre 2014 et janvier 2016, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’enjoindre à la société A B Group de communiquer tant le certificat d’enregistrement du nom de domaine Playwind. Com, que les
échanges qu’elle a pu avoir avec le concepteur de la plateforme.
Il ressort du contrat et de la facture produits par la société BCG que celle-ci a bien acquis l’application Playwind en mai 2016 auprès d’une société extérieure.
Il n’est nullement établi que cette application – acquise auprès d’une société tierce et non pas développée par la société A B Group – utilise des informations confidentielles ou un savoir-faire préalablement transmis par la société IMusic. Le seul fait que les cours ou tutoriels soient filmés sur fond noir dans les deux applications IMusic et Playwind correspond à un détail de décor qui n’est nullement significatif, et ne peut en tout état de cause caractériser l’exploitation d’une information confidentielle par la société A B Group.
Les seules affirmations de la société IMusic selon lesquelles l’application Playwind serait identique à la sienne ne permettent pas de conclure à une telle identité dès lors que la société IMusic se contente d’une description très sommaire de son application, sans préciser les éventuelles caractéristiques identiques des deux applications, et sans contester l’argumentation contraire de la société A B Group qui décrit quant à elle les différences majeures. Ainsi, l’application Playwind, qui est gratuite, permet la diffusion de tutoriels vidéos de musiciens permettant de prolonger les apprentissages, et non pas de cours en ligne comme le propose la société IMusic sur son site payant. De même, les vidéos Playwind ne concernent que des instruments à vent, alors que tous les instruments sont présents chez IMusic, à l’exception de certains instruments à vent.
Outre l’absence de démonstration d’une quelconque similitude entre les deux applications, la société IMusic n’invoque en réalité aucune information confidentielle qui aurait été utilisée par la société A B Group, en contravention des stipulations contractuelles, de sorte qu’il n’est justifié d’aucun manquement de cette dernière à ses obligations. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de la société IMusic à l’encontre de la société A B Group.
2 – sur la responsabilité délictuelle de la société A B
La société IMusic reprend, à l’encontre de la société A B ses arguments déjà exposés contre la
société A B Group, lui reprochant d’avoir mis en ligne une application de cours de musique
similaire à la sienne.
Force est toutefois de constater, qu’outre le fait que l’application ‘Playwind’ a été acquise auprès d’un tiers, et non pas développée par la société A B, la seule reprise du fond noir pour les visuels des cours de musique est un simple élément de décoration sans aucune originalité, totalement insuffisant à démontrer la similitude des applications, ainsi qu’il vient d’être démontré.
Aucune responsabilité délictuelle n’est ainsi établie à l’encontre de la société A B.
3 – sur le manquement à l’obligation de loyauté
La société IMusic soutient que la société A B Group a manqué à son obligation de loyauté dans l’exécution de l’accord de confidentialité signé entre les parties. Elle soutient que la fin de la collaboration doit être qualifiée de brutale et abusive au regard des 8 mois d’échanges entre les parties. Elle rappelle le préjudice subi du fait de la perte de temps passée en pourparlers, la rupture l’ayant obligée à rechercher de nouveaux investisseurs.
La société A B Group conteste toute brutalité dans l’arrêt des pourparlers, et s’étonne du temps de réaction de la société IMusic après le courriel du 6 janvier 2016 mettant fin aux relations. Elle estime que les parties sont restées libres dans leurs échanges.
****
Dans son courriel du 6 janvier 2016, la société A B Group écrivait à la société IMusic en ces
termes : ‘Pour ce qui concerne notre collaboration I Music/ A, nous avons décidé pour le moment d’avancer avec une plateforme pour instruments à vent utilisant une technologie nouvelle que nous ferons indépendamment d’IMusic. Cela nous permettra d’avancer à notre rythme sans viser trop gros pour le moment et de tester un peu le marché, surtout à l’international. Toutefois, nous ne voulons pas fermer les portes, car l’évolution de ce secteur peut nous amener à collaborer de façons différentes, et nous avons surtout apprécié ton soutien, ton écoute, ta disponibilité et ton professionnalisme ces derniers mois. En te souhaitant bon vent, je reste disponible pour toutes questions éventuelles et pour discuter de nos avancées respectives.’
La société IMusic n’a pas répondu à ce courriel, ce qui tend à démontrer qu’elle ne jugeait pas la rupture des pourparlers comme brutale et déloyale. Ce n’est que le 22 novembre 2016 qu’elle a repris contact avec la société A B Group en lui reprochant de lui faire concurrence avec l’application Playwind.
De plus, si la longueur des pourparlers entre les deux sociétés – de juin 2015 au 6 janvier 2016 – est d’une certaine importance, cela est toutefois insuffisant pour qualifier de brutale ou déloyale la rupture intervenue, étant observé qu’aucune clause contractuelle n’interdisait à la société A B Group de s’intéresser à des applications concurrentes de celle d’IMusic, et notamment à l’application ‘Playwind’ développée par une société tierce.
4 – subsidiairement, sur le parasitisme
Comme le soutient la société IMusic, le parasitisme se définit comme l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir faire.
La société IMusic soutient que les sociétés A B ont profité des informations qu’elle leur a
transmises pour mettre en place l’application Playwind moyennant un ‘coût dérisoire’. Elle affirme l’identité de service entre les deux applications.
Outre le fait que l’identité de service n’est nullement démontrée, la société IMusic ne démontre pas non plus le contenu du savoir-faire qu’elle prétend avoir transmis, ni l’utilisation de ce savoir-faire par l’application Playwind, dont il convient à nouveau de rappeler qu’elle appartient à une société tierce, et qu’il n’est pas démontré que la société A B Group ait participé, de quelque manière que ce soit, à son développement. La seule mise en ligne par la société A B Group d’une application achetée à un tiers ne peut constituer un acte de parasitisme, de sorte que la société IMusic sera déboutée de ses demandes à ce titre. Le jugement sera confirmé de ce chef.
5 – sur la demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive
La société A B Group sollicite paiement d’une somme de 30.000 euros à titre de dommages et
intérêts pour procédure abusive, au motif que les demandes formées par la société IMusic ne reposent sur aucun fondement sérieux, ni preuves.
La société IMusic étant de nouveau in bonis depuis le jugement adoptant son plan de redressement, la demande ainsi formée est recevable.
Toutefois, l’exercice d’une action en justice est un droit qui ne dégénère en abus qu’à condition, pour celui qui l’invoque, de rapporter la preuve d’une faute caractérisée dans l’exercice de ce droit. L’absence de sérieux d’un fondement juridique, à le supposer établi, est insuffisant à caractériser un tel abus, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de la société A B Group à ce titre.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
La société IMusic qui succombe, sera condamnée aux dépens exposés en cause d’appel, aucune irrecevabilité ne pouvant être accueillie à ce titre.
Il n’y a pas lieu à paiement de frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Versailles du 8 février 2019,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne la société IMusic aux dépens de la procédure d’appel.
prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
signé par Monsieur François THOMAS, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président