Production musicale : 3 juin 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 19-15.250

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Production musicale : 3 juin 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 19-15.250

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 juin 2021

Cassation partielle
sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 531 FS-D

Pourvoi n° U 19-15.250

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 JUIN 2021

1°/ la société Calliphora, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ M. [O] [R], domicilié [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° U 19-15.250 contre l’arrêt rendu le 15 février 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 12), dans le litige les opposant :

1°/ à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) [Localité 1], dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à l’Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, dont le siège est [Adresse 4],

3°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Calliphora et de M. [R], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) [Localité 1], et l’avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l’audience publique du 14 avril 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Taillandier-Thomas, Coutou, Renault-Malignac, Cassignard, M. Leblanc, conseillers, Mme Le Fischer, M. Gauthier, Mmes Vigneras, Dudit, conseillers référendaires, M. Gaillardot, premier avocat général, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 15 février 2019), rendu sur renvoi après cassation ( 2° Civ., 12 mars 2015, n°1412851), à la suite d’un contrôle opéré par l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales de Paris et région parisienne, aux droits de laquelle vient l’URSSAF [Localité 1] (l’URSSAF), portant sur les années 2002 à 2004, la société Calliphora (la société) a fait l’objet d’un redressement de cotisations relatif aux « royalties » versées à son président directeur général, M. [R], dans l’exécution d’un contrat de réalisateur artistique conclu entre eux pour la conception et l’enregistrement de l’album « Innamoramento » de [Z] [Y]. Mise en demeure, le 2 janvier 2006, de payer une certaine somme à ce titre, la société a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale, devant laquelle est intervenu notamment M. [R].

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La société et M. [R] font grief à l’arrêt de valider le redressement pour les cotisations des années 2003 et 2004, alors :

« 1°/ que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre effectivement à l’assujetti d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation, afin de pouvoir exercer ses droits et, le cas échéant, contester utilement le redressement objet de la mise en demeure; qu’à cette fin, il importe que cette mise en demeure précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice ; que la lettre de mise en demeure qui mentionne à la rubrique « nature des cotisations », « régime général », est insuffisante en ce qu’il n’est pas précisé la nature exacte des sommes réclamées ; qu’en énonçant en l’espèce que « la mise en demeure litigieuse comportait le numéro du cotisant et le service qui l’a émis, l’objet de la mise en recouvrement, la période du contrôle et le montant correspondant à celui figurant sur la lettre d’observations notifiée à la société ainsi que les majorations de retard, qu’elle était accompagnée, d’une part, d’une copie de l’état du redressement, adressé le 22 décembre 2005 au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception et, d’autre part, du décompte récapitulatif portant le détail des années redressées et le cadre du redressement soit « le régime général », qu’elle faisait référence au courrier détaillé et argumenté adressé par la société le 14 décembre 2005 en réponse à la lettre d’observations notifiée par l’Urssaf le 14 novembre 2005, indiquant clairement le motif du redressement à savoir la réintégration, dans l’assiette des cotisations des royalties versées à M. [R] au titre du contrat de réalisateur artistique, les raisons précises de cette réintégration avec le relevé des bases de calcul, du montant de la régularisation et du support textuel et juridique de celle-ci », cependant qu’il résultait de ses propres constatations que le décompte récapitulatif annexé à la lettre de mise en demeure mentionnait à la rubrique « nature des cotisations », « régime général », de sorte qu’elle était insuffisante en ce qu’il n’y était pas précisé la nature exacte des sommes réclamées, et que les indications figurant sur ces documents ne permettaient pas à l’assujetti de connaître la cause, la nature et l’étendue de son obligation, la cour d’appel de renvoi a violé les articles L. 244-2 et R. 244-1 et R. 243-59 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre effectivement à l’assujetti d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation, afin de pouvoir exercer ses droits et, le cas échéant, contester utilement le redressement objet de la mise en demeure ; qu’à cette fin, il importe que cette mise en demeure précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice ; que la société invoquait devant la cour d’appel le moyen tiré de ce que, alors que le redressement litigieux tendait en réalité à assujettir les royalties afférents à plusieurs contrats différents, le contrat de réalisateur artistique du 1er juillet 1998, dont l’Urssaf prétendait qu’il était seul concerné par le redressement, n’était pas même visé dans la rubrique des documents consultés de la lettre d’observations (cf. conclusions d’appel n° 3 devant la cour d’appel de renvoi de la société (p.7, productions) ; qu’en statuant comme elle l’a fait, sans répondre à ce moyen déterminant de l’exposante, de nature à établir l’irrégularité du redressement, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu’il résulte de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007, applicable au contrôle litigieux, que l’organisme de recouvrement doit, à peine de nullité des opérations de contrôle, mettre à même l’employeur ou le travailleur indépendant d’accéder à la charte du cotisant contrôlé avant l’ouverture de celles-ci; qu’en s’abstenant de vérifier si la société avait été à même d’accéder à la charte du cotisant contrôlé avant le début des opérations de contrôle, la cour d’appel de renvoi a violé l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007, applicable au litige. »

Réponse de la Cour

3. L’arrêt retient que la mise en demeure litigieuse comportait le numéro du cotisant et le service qui l’a émis, l’objet de la mise en recouvrement, la période du contrôle et le montant correspondant à celui figurant sur la lettre d’observations notifiée à la société ainsi que les majorations de retard, qu’elle était accompagnée, d’une part, d’une copie de l’état du redressement, adressé le 22 décembre 2005 au cotisant par lettre recommandée avec accusé de réception, et d’autre part, du décompte récapitulatif portant le détail des années redressées et le cadre du redressement soit « le régime général. »

4. Il ajoute qu’elle faisait référence au courrier détaillé et argumenté adressé par la société le 14 décembre 2005 en réponse à la lettre d’observations notifiée par l’Urssaf le 14 novembre 2005, indiquant clairement le motif du redressement à savoir la réintégration, dans l’assiette des cotisations des « royalties » versées à M. [R] au titre du contrat de réalisateur artistique, les raisons précises de cette réintégration avec le relevé des bases de calcul, du montant de la régularisation et du support textuel et juridique de celle-ci.

5. De ces constatations, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, en a déduit à bon droit que, la mise en demeure permettant à la société de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation, les opérations de contrôle et de redressement étaient régulières.

6. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le second moyen pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

La société et M. [R] font grief à l’arrêt de condamner la société à payer à l’Urssaf la somme de 44 200 euros au titre de cotisations et de renvoyer l’Urssaf à procéder à un nouveau calcul des majorations de retard, alors :

« 1°/ que la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement ; qu’à cet égard, l’artiste réalisant un album musical, dont l’élaboration lui est confiée en toute liberté, accomplit bien une prestation artistique nonobstant le fait que les chansons enregistrées sont interprétées par un autre artiste-interprète ; qu’en affirmant dès lors que le versement des royalties est sans rapport avec l’exploitation de l’enregistrement d’une prestation personnelle de M. [R], qu’elle concerne exclusivement l’exploitation de l’enregistrement de la prestation personnelle de [Z] [Y], et qu’elle n’est qu’un complément du versement octroyé par la société Monkey Stuffed à la société dont M. [R] est le dirigeant en contrepartie du travail d’enregistrement accompli dans le cadre du contrat commercial du 23 juin 1998, de sorte que si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité et qu’en conséquence, la présomption de l’article L. 762-1 précité s’applique de sorte que les sommes versées à M. [R], qualifiées de royalties, doivent être requalifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations » cependant qu’elle avait constaté que M. [R] relevait de la catégorie d’artiste de spectacle et qu’il était constant, suivant le contrat, que le versement des avances de redevances était fonction du produit de la vente et du produit de l’exploitation de l’enregistrement de l’album qu’il avait réalisé, la cour d’appel de renvoi a violé l’article L. 7121-8 du code du travail ;

2°/ que la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation, exécution ou présentation par l’employeur ou tout autre utilisateur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement ; qu’en énonçant que « si M. [R] relève de la catégorie d’artiste de spectacle, en revanche, la redevance qui lui est versée en contrepartie de son travail de réalisateur artistique ne constitue pas une rémunération à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation personnelle au sens des dispositions de l’article L. 762-2 précité et qu’en conséquence, la présomption de l’article L. 762-1 précité s’applique de sorte que les sommes versées à M. [R], qualifiées de royalties, doivent être requalifiées en salaire et réintégrées dans l’assiette des cotisations » cependant que la présence physique de M. [R], dont elle avait retenu qu’il relevait de la catégorie d’artiste, n’était plus requise pour exploiter cet enregistrement, la cour d’appel de renvoi a violé l’article L. 7121-8 du code du travail. »

 


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