Production Audiovisuelle : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/05784

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Production Audiovisuelle : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/05784
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COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 06 JUILLET 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 18/05784 – N° Portalis DBVK-V-B7C-N4UW

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 22 OCTOBRE 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 14/03049

APPELANTS :

Maître [I] [N]

né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 19]

[Localité 10]

et

Maître [L] [N]

né le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 19]

[Localité 10]

et

SCP [N]-GLODAS COULOT ORMIERES-PECH DE LACLAUSE anciennement dénommée [L] [N] & [I] [N]

[Adresse 19]

[Localité 10]

Représentés par Me Gilles LASRY de la SCP D’AVOCATS BRUGUES – LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur [V] [J]

né le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 17]

de nationalité Française

[Adresse 12]

[Localité 13]

(ordonnance du 11/04/19 de caducité partielle de la déclaration d’appel)

Monsieur [K] [S]

né le [Date naissance 5] 1968 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 16]

[Localité 4]

Représenté par Me Julien SICOT, avocat au barreau de BEZIERS, substitué à l’audience par Me Lola JULIE, avocat au barreau de MONTPELLIER

SCI RAGE

[Adresse 9]

[Localité 11]

(ordonnance du 11/04/19 de caducité partielle de la déclaration d’appel)

Ordonnance de clôture du 22 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 mars 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

M. Fabrice DURAND, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA

en présence de Mme Marine HOF, greffière stagiaire

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour fixée au 25 mai 2023 et prorogée au 06 juillet 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

M. [K] [S] exerce la profession de clerc au sein de l’étude de Me [L] [N], notaire à [Localité 15]

Selon acte reçu le 16 septembre 2002 par Me [L] [N], M. [K] [S] et M. [T] [U] ont constitué la SCI Rage.

Par résolution prise lors de l’assemblée générale du 5 août 2011, la SCI Rage a accepté la démission de son gérant M. [U] au profit de M. [K] [S].

Par acte reçu le 25 octobre 2012 par Me [I] [N], les parents de M. [K] [S], [G] [S] et [H] [W] épouse [S], ont vendu à la SCI Rage un appartement avec cellier et emplacement de parking sis [Adresse 6] (34) au prix de 120 000 euros.

M. [K] [S] représentaient ses parents [G] [S] et [H] [W] épouse [S] lors de la signature de cet acte le 25 octobre 2012 tandis que M. [U] intervenait en qualité de gérant de la SCI Rage.

Par acte sous-seing privé du 1er octobre 2013, M. [K] [S] et M. [U] ont cédé à M. [V] [J] la totalité des parts détenues dans la SCI Rage au prix de 1 600 euros.

Par acte d’huissier du1er août 2014, M. [J] s’est vu signifier un commandement de payer valant saisie par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc (CRCAM du Languedoc) en exécution d’un acte de prêt reçu le 9 octobre 1998 par Me [I] [N] représentant une créance de 11 627,51 euros.

En effet, ce prêt du 9 octobre 1998 a été assorti d’une inscription d’hypothèque conventionnelle prise le 2 décembre 1998 avec effet jusqu’au 5 novembre 2018 grevant l’immeuble acquis le 25 octobre 2012 par la SCI Rage en garantie d’un prêt personnel contracté par M. [K] [S] le 9 octobre 1998 avec la caution de ses parents pour un montant de 76 224,51 euros.

Aux termes d’un protocole conclu le 25 septembre 2014 entre le CRCAM du Languedoc et la SCI Rage, la banque renonçait à la saisie immobilière en contrepartie du paiement par la SCI Rage de la dette de 11 627,51 euros outre la somme de 349,95 euros de frais de saisie.

Par acte d’huissier du 27 octobre 2014, M. [V] [J] et la SCI Rage ont fait assigner Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] devant le tribunal de grande instance de Béziers aux fins de voir engager leur responsabilité civile professionnelle.

Par acte d’huissier du 6 mai 2015, les défendeurs ont appelé en garantie M. [K] [S] ainsi que ses parents en leur qualité de caution.

Le juge de la mise en état a joint les deux affaires par ordonnance du 7 janvier 2016.

[H] [W] est décédée à [Localité 14] le [Date décès 7] 2017 et [G] [S] est décédé à [Localité 14] le [Date décès 8] 2017. Les deux décès n’ont pas été notifiés conformément à l’article 370 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 22 octobre 2018, le tribunal de grande instance de Béziers a :

‘ condamné solidairement Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] à payer à la SCI Rage :

– la somme de 12 102,46 euros avec les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 septembre 2014 ;

– les intérêts selon décompte à produire par la CRCAM du Languedoc lors du règlement de la dixième et dernière échéance résultant de l’accord transactionnel intervenu entre M. [V] [J] et la banque ;

– le coût de la radiation hypothécaire ;

– 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ condamné solidairement Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] à payer à M. [J] la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

‘ déclaré irrecevable l’action en garantie dirigée contre M. [G] [S] et Mme [H] [W] épouse [S] ;

‘ rejeté l’action en garantie dirigée contre M. [K] [S];

‘ rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

‘ ordonné 1’exécution provisoire de la présente décision ;

‘ condamné solidairement Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] à payer 1 500 euros à M. [G] [S] et Mme [H] [W] épouse [S] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile :

‘ autorisé la distraction des dépens par application de l’article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe du 20 novembre 2018, Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] ont relevé appel de ce jugement à l’encontre de M. [V] [J], de la SCI Rage et de M. [K] [S].

Par ordonnance de référé du 23 janvier 2019, Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] ont été autorisés à effectuer une consignation, avant le 15 mars 2019, sur le compte séquestre du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Montpellier de la somme de 16 332,68 euros, objet de l’exécution provisoire, dans l’attente de l’arrêt de la cour à intervenir.

Par ordonnance du 11 avril 2019, le conseiller chargé de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d’appel à l’égard de M. [V] [J] et de la SCI Rage.

Vu les dernières conclusions de Me [L] [N], de Me [I] [N] et de la SCP [N] remises au greffe le 24 juillet 2020 ;

Vu les dernières conclusions de M. [K] [S] remises au greffe le 15 avril 2019 ;

La clôture de la procédure a été prononcée au 22 février 2023.

MOTIFS DE L’ARRET

Le jugement est définitif en ce qu’il a condamné Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] à payer :

‘ 12 102,46 euros ainsi que les intérêts à la SCI Rage ;

‘ 1 000 euros à M. [J] en réparation de son préjudice moral.

Ces condamnations ont été prononcées en réparation du dommage causé par le notaire ayant reçu l’acte de vente du 25 octobre 2012 alors que l’immeuble vendu était grevé d’une hypothèque conventionnelle publiée le 2 décembre 1998 avec effet jusqu’au 5 novembre 2018.

Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] concluent à l’infirmation du jugement seulement en ce qu’il les a déboutés de leur appel en garantie contre M. [K] [S].

Les appelants soutiennent :

‘ à titre principal que M. [S] a agi hors ses fonctions, sans autorisation et à des fins personnelles et qu’il a commis un abus de fonction au préjudice de son employeur au sens de l’article 1384 ancien, devenu article 1242 alinéa 5 du code civil ;

‘ à titre subsidiaire que M. [S] a commis une faute civile à l’encontre du notaire engageant sa responsabilité sur le fondement de l’article 1382 ancien, devenu 1240 du code civil.

S’agissant du fondement principal de la demande, la cour rappelle que la démonstration d’un abus de fonction du préposé exonère le commettant de sa responsabilité de plein droit du fait de son préposé.

Toutefois, le jugement est devenu définitif en ses dispositions ayant condamné le notaire à indemniser la SCI Rage et M. [J]. De surcroît, l’existence d’un éventuel abus de fonction serait insuffisante pour faire droit à l’action récursoire de l’employeur contre son préposé.

S’agissant du fondement subsidiaire de la demande, la cour partage l’analyse du premier juge qui a relevé que le nom du clerc rédacteur n’était pas mentionné dans l’acte de vente présenté comme établi sous la seule responsabilité du notaire instrumentaire et que M. [K] [S] n’apparaissait dans cet acte qu’en qualité de représentant des vendeurs.

Aucune pièce versée aux débats n’établit que M. [K] [S] aurait été chargé de préparer l’acte de vente litigieux du 25 octobre 2012, la seule mention apposée « REFERENCE JCG » sur la première page de cet acte étant insuffisante pour constituer cette preuve.

Par ailleurs, M. [K] [S] ne reconnaît formellement dans ses écritures ni avoir entièrement rédigé l’acte litigieux ni avoir participé à la préparation de cet acte.

Au regard des circonstances particulièrement imprécises de l’éventuelle participation de M. [K] [S] à la rédaction ou à la préparation de l’acte, il n’est pas établi que le clerc a agi en dehors des limites de la mission que lui avait impartie le notaire commettant.

Le fait que M. [K] [S] ait signé l’acte en qualité de mandataire de ses parents est inopérant quant à l’appréciation de son éventuelle participation à la préparation de l’acte en sa qualité de clerc, étant précisé que le notaire était parfaitement informé du risque de conflit d’intérêt qu’une telle situation pouvait engendrer.

L’employeur-commettant qui a indemnisé la victime d’un dommage provoqué par son salarié-préposé, en application des dispositions de l’article 1384 alinéa 5 ancien du code civil, ne dispose d’aucune action récursoire contre ce salarié devant la juridiction de droit commun dès lors qu’il ne peut se prévaloir d’une subrogation dans les droits de la victime, laquelle ne dispose d’aucune action contre le préposé qui a agi dans les limites de la mission qui lui était impartie, hors le cas où le préjudice de la victime résulte d’une infraction pénale ou d’une faute intentionnelle.

En l’espèce, le préjudice subi par la SCI Rage ne résulte pas d’une infraction pénale, étant précisé que le jugement rendu le 13 décembre 2019 par le tribunal correctionnel de Béziers ne vise pas les faits constituant l’objet du présent litige.

Aucune faute intentionnelle n’est par ailleurs établie contre M. [K] [S] par son employeur.

En effet, il n’est pas établi que M. [K] [S] « a rédigé l’acte de vente au bénéfice de la SCI Rage en omettant volontairement de mentionner l’existence de l’inscription de la caisse régionale de crédit agricole » cette faute volontaire n’étant pas démontrée mais seulement présumée par les appelants dans leurs écritures d’appel au regard du contexte général de l’opération.

Enfin, le courrier de démission établi le 11 juillet 2013 par M. [K] [S] pour son employeur ne vise pas expressément l’acte de vente litigieux reçu le 25 octobre 2012 par Me [L] [N].

Dès lors, en l’absence de preuve d’une faute pénale ou d’une faute civile intentionnelle commise par M. [K] [S], l’action récursoire présentement exercée par Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] sur le fondement de l’article 1382 ancien du code civil ne peut qu’être rejetée.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté l’action récursoire du notaire exercée contre M. [K] [S] sur le fondement des article 1382 et 1384 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.

Sur les demandes accessoires,

Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] succombent totalement en appel et devront donc supporter les entiers dépens d’appel.

L’équité commande en l’espèce de débouter toutes les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

En l’absence d’appel formé contre les héritiers de [G] [S] et [H] [W] épouse [S], les appelants ne sont pas fondés à soutenir que « le décès rend sans objet la condamnation au bénéfice de l’article 700 du code de procédure civile ». Cette condamnation prononcée par le jugement déféré contre les appelants à hauteur de 1 500 euros est donc devenue définitive.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit que Me [L] [N], Me [I] [N] et la SCP [N] supporteront in solidum les entiers dépens d’appel ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le greffier, Le président,

 


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