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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 4
ARRET DU 30 Mars 2010
(n° 1 , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S 06/07457
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Janvier 2006 par le conseil de prud’hommes de Paris – section encadrement – RG n° 05/01411
APPELANT
Monsieur [B] [U]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Sylvain ROUMIER, avocat au barreau de PONTOISE
INTIMEE
SA FRANCE TELEVISIONS
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Gérard LLORET, avocat au barreau de PARIS, toque : R 171
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Février 2010, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Charlotte DINTILHAC, président et Anne-Marie DEKINDER, conseiller, chargés d’instruire l’affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Charlotte DINTILHAC, président
Madame Anne-Marie DEKINDER, conseiller
Madame Denise JAFFUEL, conseiller
Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
– signé par Madame Charlotte DINTILHAC, président et par Mademoiselle Séverine GUICHERD, greffier présent lors du prononcé.
La cour est saisie de l’appel interjeté par M. [U] du jugement du Conseil de Prud’hommes de Paris section Encadrement chambre 5 du 4 janvier 2006 qui l’a débouté de ses demandes.
FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
M. [U] a été engagé sous la forme de multiples contrats à durée déterminée en qualité de monteur puis chef monteur entre avril 1978 et mai 2004 et en contrat à durée indéterminée à compter de juin 2004 sans accord de sa part sur les conditions de son intégration opérée par la société France 3 ;
L’entreprise est soumise à la convention collective de la communication et production audiovisuelle ;
M. [U] demande de requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée à compter du 3 avril 1978, de condamner la société France Télévisions à lui payer la somme de 9 445.85 € d’indemnité de requalification, à titre principal par comparaison avec la progression d’autres chefs monteurs à France 3, subsidiairement sur la base de la moyenne de la catégorie autres cadres, plus subsidiairement sur la base du niveau attribué par Rfo en 1988, d’imposer sa qualification selon des groupes et niveaux auxquels il est référé et de fixer le montant de son salaire et de sa prime d’ancienneté sous astreinte de 1000 € par jour de retard, de condamner la société à lui payer diverses sommes à titre de rappels de salaires, primes d’ancienneté, primes de fin d’année, primes de disparité de salaire, primes de sujétion, de majoration des 35H, sur les 5 dernières années précédant la saisine du conseil le 3 février 2005 et les années en cours de procédure, selon des montants auxquels il est référé, la somme de 1 237.68 € de rappel de salaire pour congés pris à noël 2008, 30 000 € de dommages-intérêts au titre de l’article L 1222-1 du code du travail, la remise des bulletins de salaire conformes sous astreinte, avec intérêt légal et anatocisme et celle de 4000 € pour frais irrépétibles,
La société France Télévisions venant aux droits de la société Nationale de Télévision France 3 demande de lui donner acte de l’intégration depuis juin 2004 de M. [U] dans le groupe de qualification B16 en qualité de chef monteur avec reprise d’ancienneté au 1er décembre 1994, de sa proposition d’avenant de qualification B 21-1 au 1er décembre 2004 au salaire mensuel de 2 532.95€ et déclarer satisfactoire, de confirmer le jugement entrepris et de débouter M. [U] de ses demandes.
SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l’audience ;
Sur la demande en requalification du contrat
Il convient d’examiner la demande de requalification au regard des différentes législations applicables successivement pendant le cours du contrat ;
Il n’y avait pas de législation spécifique antérieurement à la loi du 3 janvier 1979 ;
Les périodes ponctuelles d’engagement de trois fois 4 jours entre les 24 avril 1978 et 9 juin 1978 ont fait l’objet de contrats signés les 9 juin et 15 juin 1978 visant des remplacements de collaborateurs, un avenant du 15 juin 1978 vise la journée du 3 avril 1978 qui a fait l’objet d’un bulletin de salaire ; le dernier contrat de l’année signé le 26 juin 2008 pour quatre jours vise le remplacement d’un collaborateur ;
Les relations très ponctuelles sur l’année 1978 représentant 20 jours en cinq séquences, régularisées par des contrats écrits et signés par les parties, même a posteriori, sauf pour la journée du 3 avril 1978, ne sont pas susceptibles d’être requalifiées en contrat à durée indéterminée au regard de la législation alors applicable n’imposant pas de contrat écrit de travail ;
A compter de la loi du 3 janvier 1979 introduisant une législation spécifique au contrat à durée déterminée, aux articles L 122-1 et suivants du code du travail, le contrat de travail doit être constaté par écrit, et à défaut est présumé conclu pour une durée indéterminée ; Il doit comporter un terme certain, devient à durée indéterminée s’il est poursuivi au-delà de l’échéance ; le contrat conclu pour l’exécution d’une tâche déterminée et non durable, correspondant au remplacement d’un salarié temporairement absent, à un surcroît occasionnel de travail peut être qualifié par les conventions collectives ou défaut la convention des parties, comme contrat à durée déterminée ;
En 1979, M. [U] a été engagé pour une seule période du 9 au 24 avril 1979 au visa de la convention collective selon un contrat daté du 9 avril 1979 signé de l’administrateur régional Yves Pacon produit en original par M. [U] :il en résulte que même non signé par M. [U], le contrat écrit a été mis à la disposition du salarié au commencement du contrat ;
En 1980, M. [U] a été engagé selon contrats signés pour les périodes des 31 mars au 13 avril et des 5 mai au 31 mai 1980 ;
En 1981, M. [U] a été engagé selon contrat signé pour la période du 27 avril 1981 au 3 mai 1981 et il n’est apporté aucune preuve du travail revendiqué dans les conclusions pour la période du 7 au 27 septembre 1981 qui n’est pas retenue ;
Il n’y a pas lieu à requalification pour ces années pour des activités effectivement ponctuelles autorisées par la convention collective et qui ont fait l’objet de contrats écrits mis à disposition ou signés ;
A compter de l’ordonnance du 5 février 1982, il a notamment été ajouté la faculté de recourir à des contrats à durée déterminée en raison de la nature de l’activité exercée ;
En 1982 il a été signé des contrats et il est fourni des bulletins de salaire pour les périodes du 29 mars au 30 avril 1982 et du 27 décembre 1982 au 31 décembre 1982 ; Il n’est pas rapporté la preuve d’une période travaillée entre les 1er mai et 12 mai 1982 revendiquée dans les conclusions qui n’a pas fait l’objet de bulletin de salaire ;
En 1983 M. [U] a été engagé selon contrat de travail signé pour la période du 17 octobre au 30 octobre 1983 ;
Il n’y a pas lieu à requalification pour ces années pour des activités effectivement ponctuelles dans une activité où il est d’usage de recourir à des contrats à durée déterminée selon des contrats signés par les parties ;
Par contre lors de l’année 1984 il n’est pas justifié de contrats de travail écrits pour les périodes figurant sur les bulletins de salaire du 27 février au 29 février 1984, du 1er au 4 mars 1984, du 8 juillet 1984 ;
Il s’en suit que la relation de contrat de travail doit être requalifiée à durée indéterminée à compter du 27 février 1984 à défaut de justification de contrat écrit pour ces périodes salariées pour des jours déterminés, selon la qualification de chef monteur reconnue dans les bulletins de salaire délivrés au salarié depuis l’année 1983 ;
Les premières réclamations amiables de M. [U] visant une requalification due au moins depuis 2001 ne sont pas de nature à faire obstacle à la réclamation judiciaire actuelle sur une période beaucoup plus étendue ;
En raison de l’ancienneté de la requalification et du recours abusif à des contrats de travail à durée déterminée et alors que M. [U] a formé vainement des demandes d’intégration depuis fin 2001, l’indemnité de requalification sera fixée à la somme de 5000 € ;
Sur la qualification de M. [U]
L’intégration de M. [U] en juin 2004 a été faite au groupe B 16 niveau N4 et la proposition d’intégration par France 3 de M. [U] du 10 novembre 2004 au groupe B 16 niveau N5 pour une ancienneté reprise au 1er décembre 1994 équivaut à l’intégration minimum pour 10 ans d’ancienneté qui correspond à celle indiquée par l’appelant aux pages 25 et 26 de ses observations, pour une ancienneté de 10 ans en 1988 sur la base de sa revendication à compter de l’année 1978 ; En juin 2005 la société l’a promu au Groupe B 21-1 niveau 4 et à compter du 1er janvier 2008 au niveau 7 indice 2788;
Ces qualifications ne sont pas satisfaisantes pour une ancienneté remontant à 1984 avec une qualification de B16 attachée aux fonctions de chef monteur reconnue à cette époque sur les bulletins de salaire délivrés ;
Compte tenu de l’ancienneté ainsi reconnue de plus de 10 ans dans le grade B 16 donnant droit automatiquement au grade B21-1 depuis le protocole d’accord d’entreprise du 15 janvier 2002, la cour estime que la qualification de M. [U] doit être fondée sur une reconstitution de carrière améliorée par rapport à l’ancienneté automatique à raison de son expérience professionnelle variée et être fixée au groupe B 21-1 N8 lors de son intégration en juin 2004 à l’indice 2676 et au groupe B 21-1 N9 depuis 2006 et selon l’indice 3055 en 2010, sans pouvoir être utilement comparé, à titre principal à la carrière des meilleurs chef-monteurs sélectionnés par M. [U] et subsidiairement avec la moyenne d’autres cadres, alors que ce sont des salariés permanents ayant exercé exclusivement leurs fonctions au sein de Fr 3 qui ont perçu pendant toute la durée de leurs fonctions des salaires moindres que M. [U] bien mieux rémunéré pendant le temps de ses contrats ponctuels auprès de plusieurs employeurs jusqu’en juin 2004 et du temps très partiel effectué au profit de France Télévisions avant son intégration ;
Par ailleurs les pièces versées par M. [U] relativement à des emplois auprès de Rfo ne justifient pas la reconnaissance de la qualification de B16 N13 faite selon lui par la société Rfo en 1988, les mentions de qualification portées sur les seuls contrats des mois de juillet et septembre 1987 indiquant un groupe de qualification B 16- 0, les autres documents émanant de Rfo ne portant aucune mention de groupe et niveau ;
Sur les demandes de rappel
Il résulte du tableau fait à la page 36 des conclusions de M. [U] que dans la limite de la prescription, il reconnaît avoir perçu au titre des rémunérations en contrats à durée déterminée, un salaire supérieur au salaire minimum sur les années 2000 à juin 2004 ; La cour estime que de même les diverses primes d’ancienneté, de fin d’année, de disparité, de majoration 35H, de sujétion réclamées sur cette période ne sont pas fondées au regard des salaires et primes alors perçus pour un montant supérieur au titre de ses missions en contrat à durée déterminée effectuées sur un temps partiel au profit de Fr 3 ;
Sur la période à partir de juin 2004, au regard de l’intégration faite à un niveau B16 N4 au lieu de B21-1 N8 et de la progression ultérieure retardée, il est établi pour la période de juin 2004 au 28 février 2010 une perte de salaire de 20 990.97 € outre congés payés afférents ;
Il est établi un rappel de prime d’ancienneté de juin 2004 à fin février 2010 d’un montant de 19 546.85 € outre congés payés afférents à raison de l’application pour une ancienneté reconnue début 1984, d’un taux de prime de 0.8% par année d’ancienneté pendant 20 ans et de 0.5% par année supplémentaire et déterminant pour l’année 2010 une prime d’ancienneté de 504.42 € ;
Sur la même période, il n’est pas établi de rappels pour la prime de sujétion dont le montant est très variable et qui a été en tout état de cause réglée à compter de l’admission de M. [U] au niveau B21-1 en juin 2005, ni pour majoration pour les 35H alors qu’il a été rémunéré à compter de son intégration en juin 2004 avec la prise en compte de l’accord de majoration des 35 heures intervenu selon l’accord du 28 février 2000 ;
M. [U] n’ayant pas obtenu d’autorisation écrite à sa demande de congé faite le 9 décembre 2008 pour la période du 22 décembre 2008 au 1er janvier 2009, et s’étant par ailleurs absenté du 23 au 26 décembre 2008 et du 29 décembre 2008 au 4 janvier 2009, pour des périodes différentes de sa demande, est mal fondé à contester la retenue de salaire faite pour cette absence non autorisée ;
Le refus pour la période du 24 au 27 décembre 2009 de la demande faite le 18 août 2009 de congés pour la période du 24 décembre 2009 au 4 janvier 2010 qui couvrait les deux réveillons de fin d’année n’apparaît pas injustifiée du fait des activités télévisuelles à cette époque de l’année ;
Il sera alloué une somme de 5000 € de dommages-intérêts pour l’intégration de M. [U] faite dans des conditions déloyales à un niveau notoirement insuffisant ;
Les intérêts légaux courront sur les créances de nature salariale à compter des conclusions du 22 février 2010 en formant la demande actualisée et les dommages-intérêts porteront intérêt légal à dater du présent arrêt qui en fixe le montant, outre capitalisation dans les conditions de l’article 1154 du code civil ;
Il n’y a pas lieu aux astreintes demandées .
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement et statuant à nouveau :
Requalifie le contrat de travail de M. [U] en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 27 février 1984 ;
Condamne la société France Télévisions à appliquer à M. [U] en juin 2004 le groupe B-21 niveau N8 indice 2676 et en 2010 le niveau N9 indice 3 055 au salaire de 2 654.86 € avec une prime d’ancienneté mensuelle de 504.42€.
Condamne la société France Télévisons à payer à M. [U] les sommes de 20 990.97 € de rappels de salaires et 2099.09 € de congés payés afférents, 19 546.85 € de rappel de prime d’ancienneté et 1 954.68 € de congés payés afférents avec intérêt légal à dater du 22 février 2010, la somme de 5000€ d’indemnité de requalification, la somme de 5 000 € de dommages-intérêts pour application déloyale du contrat de travail, avec intérêt légal à dater de l’arrêt, outre capitalisation dans les conditions de l’article 1154 du code civil, et la somme de 2000 € pour frais irrépétibles.
Ordonne la remise des documents conformes ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société France Telévisions aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT