Production Audiovisuelle : 23 juin 2022 Cour d’appel de Papeete RG n° 21/00003

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Production Audiovisuelle : 23 juin 2022 Cour d’appel de Papeete RG n° 21/00003

N° 60

NT

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Copie exécutoire

délivrée à :

– Me Mestre,

le 23.06.2022.

Copie authentique

délivrée à :

– Me Pasquier-Houssen,

le 23.06.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PAPEETE

Chambre Sociale

Audience du 23 juin 2022

RG 21/00003 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 20/00135, rg F 19/00179 du Tribunal du Travail de Papeete du 2 novembre 2020;

Sur appel formé par déclaration reçue au greffe du Tribunal du Travail de Papeete sous le n° 21/00002 le 5 février 2021, dossier transmis et enregistré au greffe de la Cour d’appel le même jour, rg 21/00003 ;

Appelante :

L’Epic Vanille de Tahiti, n° tahiti 003566 dont le siège social est sis à [Adresse 2] ;

Ayant pour avocat la Selarl Légalis, représentée par Me Astrid PASQUIER-HOUSSEN, avocat au barreau de Papeete ;

Intimée :

Mme [H] [Y] épouse [P], née le 25 août 1979 à [Localité 1],

de nationalité française, demeurant à [Adresse 3] ;

Représentée par Me François MESTRE, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 3 décembre 2021 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 10 fvrier 2022, devant Mme TISSOT, vice-présidente placée auprès du premier président, désigné par l’ordonnance n° 83/OD/PP.CA/21 du Premier Président de la Cour d’Appel de Papeete en date du 15 décembre 2021 pour faire fonction de Président dans le présent dossier Mme BRENGARD, président de chambre, M. RIPOLL, conseiller, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme TISSOT, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

Par contrat à durée indéterminée du 10 juin 2004, Mme [H] [Y] a été engagée par l’EPIC Vanille de Tahiti à compter du même jour, en qualité de chef de projet au département commercialisation, en contrepartie d’un salaire mensuel brut de 400 000 FCP.

Par avenant du 16 novembre 2004, le contrat de Mme [H] [Y] a été suspendu à compter du 16 novembre 2004 pour une durée d’un an.

Par avenant du 30 juin 2005, il a été mis fin à la suspension du contrat de [H] [Y] à compter du 1er juillet 2005. Elle était nommée chef de projet au département contrôle et qualité à compter de la même date.

Par avenant du 31 juillet 2006, le contrat de Mme [H] [Y] a été suspendu à compter du 1er août 2006 pour une durée d’un an.

Par avenant du 10 juillet 2007, le contrat de Mme [H] [Y] a été suspendu à compter du 1er août 2007 pour une durée d’un an.

Par avenant du 21 août 2008, le contrat de Mme [H] [Y] a été suspendu à compter du 1er août 2008 pour une durée d’un an.

Par avenant du 28 juillet 2009, il a été mis fin à la suspension et Mme [H] [Y] a été nommée chargé des marchés et des ressources humaines à compter du 1er août 2009, en contrepartie d’un salaire mensuel brut de 406 000 FCP.

Par avenant du 1er décembre 2010, il a été accordé à Mme [H] [Y] un congé maternité de 16 semaines du 30 décembre 2010 au 21 avril 2011.

Par avenant du 22 avril 2011, il a été mis fin au congé maternité de Mme [H] [Y] à compter du même jour.

Par avenant du 17 novembre 2014, Mme [H] [Y] a été promue directrice par intérim à compter du même jour.

Elle était en arrêt maladie du 27 août au 3 septembre 2018, du 4 au 12 septembre 2018, du 12 novembre au 10 décembre 2018.

Par avenant du 8 octobre 2018, il a été décidé que Mme [H] [Y] réintégrerait son poste de chargée des marchés publics et des ressources humaines à compter du même jour.

Par avenant du 14 décembre 2018, Mme [H] [Y] a été nommée chargée des marchés publics et du recouvrement comptable.

Par lettre du 25 avril 2019 remise en main propre le même jour, Mme [H] [Y] était convoquée à entretien préalable à licenciement de nature personnelle, fixé le 2 mai 2019.

Par lettre du 21 mai 2019 remise en main propre le même jour, Mme [H] [Y] a été licenciée pour faute, avec dispense de préavis de quatre mois ; il lui était reproché :

– l’absence de passation de dossiers,

– un conflit d’intérêt pour avoir siégé dans les commissions et voté en faveur de son frère dans l’attribution du marché public n°06/2018,

– des manquements graves dans le montage et le suivi des installations des ombrières pilotes aux Marquises et Tuamotu-Gambier,

– de ne pas avoir demandé le remboursement de la somme de 1 652 000 FCP du fait de la non livraison des revues en 2016 et 2017,

– d’avoir cédé deux véhicules de l’EVT, sans exiger le paiement du prix de cession de 300 000 FCP et sans document de livraison ou de réception.

Par requête du 17 octobre 2019 enregistrée le 5 novembre 2019 sous le numéro 19/00179 et à laquelle se sont substituées des conclusions récapitulatives déposées le 12 mai 2020, Mme [H] [Y] a saisi le tribunal du travail aux fins de voir :

– constater l’absence de tout manquement de sa part dans l’exécution de la relation de travail ;

– constater que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, ainsi qu’abusif ;

– condamner l’EPIC Vanille au paiement des sommes de :

546 340 XPF à titre d’indemnité de licenciement,

8.432.010 XPF à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

500.000 XPF à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir sur l’ensemble des sommes allouées ;

– appliquer l’anatocisme sur l’ensemble des sommes allouées, outre l’intérêt de droit à compter de la présente requête ;

– condamner l’EPIC Vanille au paiement de la somme de 300.000 XPF en application des dispositions de l’article 407 du code de Procédure Civile de la Polynésie française, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par jugement du 2 novembre 2020 auquel il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits et de la procédure,leTribunal du Travail de Papeete, a :

– dit le licenciement de [H] [Y] épouse [P] par l’EPIC VANILLE DE TAHITI sans cause réelle et sérieuse mais non abusif ;

– condamné l’EPIC VANILLE DE TAHITI au paiement à [H] [Y] épouse [P] des sommes de :

546 664 FCP d’indemnité légale de licenciement,

8 184 960 FCP d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du jugement, avec anatocisme ;

– rappelé que la condamnation à paiement de l’indemnité légale de licenciement est exécutoire par provision ;

– assortit la condamnation à paiement de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de l’exécution provisoire dans la limite de 5 000 000 FCP ;

– condamné l’EPIC VANILLE DE TAHITI aux entiers dépens de l’instance et au paiement d’une somme de 200 000 FCP sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Suivant requête d’appel enregistrée le 5 février 2021 et conclusions transmises au greffe le 4 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et arguments de l’appelant, l’EPIC VANILLE DE TAHITI demande à la cour de :

-infirmer le jugement n° 20/00155 rendu par le tribunal du travail le 2 novembre 2020 en toutes ses dispositions, excepté en ce qu’il a dit le licenciement non abusif,

Jugeant à nouveau,

-constater l’absence de prescription des faits fautifs,

-dire et juger le licenciement de Madame [H] [Y] épouse [P] par l’EPIC VANILLE DE TAHITI fondé sur une cause réelle et sérieuse et non abusif,

-dire et juger que l’indemnité de licenciement a été régulièrement réglée

débouter Madame [H] [Y] épouse [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

-condamner Madame [H] [Y] épouse [P] à verser à l’EPIC VANILLE DE TAHITI la somme de 350 000 CFP au titre des frais irrépétibles par application des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Suivant dernières conclusions déposées au greffe le 2 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et arguments de l’intimé, Mme [H] [Y] épouse [P] demande à la cour de :

-confirmer le jugement rendu par le Tribunal du travail de Papeete en date du 02 novembre 2020 qui a :

o dit le licenciement de [H] [Y] épouse [P] par l’EPIC VANILLE DE TAHITI sans cause réelle et sérieuse ;

o condamné l’EPIC VANILLE DE TAHITI au paiement à [H] [Y] épouse [P] des sommes de 546.664 F CFP d’indemnité légale de licenciement et 8.184.960 F CFP d’indemnité pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

o dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du jugement, avec anatocisme ;

o rappelé que la condamnation à paiement de l’indemnité légale de licenciement est exécutoire par provision ;

o assorti la condamnation à paiement de l’indemnité légale de licenciement sans cause réelle et sérieuse de l’exécution provisoire dans la limite de 3.000.000 F CFP ;

o condamné l’EPIC VANILLE DE TAHITI aux entiers dépens de l’instance et au paiement d’une somme de 200.000 F CFP en application de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

-infirmer le jugement entrepris parte in qua en ce qu’il a dit le licenciement de [H] [Y] épouse [P] par LEPIC VANILLE DE TAHITI non abusif ;

Statuant à nouveau de ce seul chef, condamner l’EPIC VANILLE DE TAHITI à payer à [K] [Y] épouse [P] une indemnité d’un montant de 500.000 F CFP à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

-débouter PEPIC Vanille de l’intégralité de ses moyens et prétentions;

-condamner PEPIC Vanille à payer à Madame [Y]-[P] la somme de 350.000 XPF en application des dispositions de l’article 407 du code de Procédure Civile de la Polynésie française ainsi qu’aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 décembre 2021.

Motifs de la décision :

Sur la recevabilité de l’appel :

Attendu que la recevabilité de l’appel n’est pas discutée et aucun élément de la procédure ne permet à la cour d’en relever d’office l’irrégularité.

Sur le licenciement :

Attendu que l’article Lp. 1225-1 du code du travail de la Polynésie française dispose que :

« En cas de litige, le juge à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et, au besoin, après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié ». ;

Que l’article Lp 1323-1 du code du travail dispose qu’: ‘aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu, dans le même délai, à l’exercice de poursuites pénales” ;

Qu’il est constant que le délai de deux mois ne court que lorsque l’employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salariés ;

Que la lettre de licenciement du 21 ami 2019 qui fixe les termes du litige est ainsi rédigée :

‘ Je rappelle que vous avez été recrutée sous contrat de travail à durée indéterminée par L’EPIC VANILLE DE TAHITI à partir du 10 juin 2014 en qualité de Chef de projet au Département ” commercialisation “.

Suivant avenant à votre contrat de travail, vous avez été promue, à compter du 17 novembre 2014, au poste de Directrice par intérim puis comme directrice à compter du 6 mai 2015.

Suivant arrêté CM du 3 octobre 2018, il a été mis fin à votre nomination en qualité de directrice de L’EPIC VANILLE DE TAHITI.

Vous avez ainsi été remplacée par Mme [V] [E] et avez repris à compter du 14 décembre 2018 les fonctions de Chargée des marchés publics et du recouvrement comptable.

Vous avez été placée en arrêt maladie à partir du 25 octobre au 02 novembre 2018 puis du 12 novembre au 10 décembre 2018 et enfin du 31 janvier au 20 février 2019.

Durant votre absence et après ma prise de fonction, j’ai adressé au ministère de tutelle en février 2019, un premier signalement concernant trois dossiers qui me semblaient suspects.

La direction générale de L’EPIC VANILLE DE TAHITI a ensuite confié à un cabinet externe le soin d’effectuer un audit afférent à ces trois dossiers visant à faire apparaître d’éventuels manquements ainsi que les risques encourus par L’EPIC.

Ledit rapport m’a été remis le 22 mars dernier et conclut à 3 manquements qui vous sont directement et personnellement imputables :

L’absence de passation de dossiers.

Dès lors qu’il a été mis fin à vos fonctions de Directrice, force est de constater que vous avez négligé de procéder à la passation des dossiers en cours auprès de la nouvelle directrice par intérim la plaçant ainsi dans une position difficile pour assurer le suivi de dossiers majeurs pour la stratégie et le développement de la filière vanille.

De surcroît, le climat conflictuel que vous avez entretenu au sein de la direction vous a inévitablement isolée et a participé tant à une absence de diffusion de l’information qu’à une gestion d’équipe peu participative rendant ainsi impossible toute assistance de la nouvelle directrice.

A ce premier grief, vous avez répondu qu’il appartenait à la Directrice de réclamer la passation des dossiers alors même qu’il vous appartenait, au terme de votre fonction de Directrice, de laisser chaque dossier rangé et complet, ce qui n’a nullement été le cas.

Conflit d’intérêts : Marché public n°06/2018.

Dans le cadre du programme d’installation de 300 ombrières sur les années 2018 à 2020 nécessaires au développement de la filière Vanille, L’EPIC VANILLE a lancé en mai 2018 un appel d’offres afférent aux travaux de montage.

Parmi les entreprises ayant répondu à cet appel d’offres, nous avons découvert, après la tenue de la commission d’appel d’offres qui s’est réunie le 8 octobre 2018, que figuraient parmi les entreprises candidates celle d’un membre de votre famille, information capitale que vous avez manifestement cherché à dissimuler.

Au cours de l’entretien préalable, vous avez indiqué qu’au jour de la réunion de la commission chargée d’ouvrir les candidatures, vous ignoriez que votre frère avait soumissionné et que les membres de la commission avaient refusé que vous sortiez de la commission.

jll s’avère en réalité que vous avez siégé dans les 3 commissions (ouverture, analyse et attribution) et que vous avez participé au vote en faveur de votre frère, qui s’est vu attribué le marché n° 06/2018 (Tahiti).

Ce grief revêt un degré de gravité important puisqu’au-delà du conflit d’intérêt, il est constitutif du délit de favoritisme réprimé par le code pénal et qui consiste en l’atteinte à la liberté d’accès et à Légalité de candidats dans les marchés publics et les délégations de service public.

Cette faute est susceptible d’engager votre responsabilité pénale mais également d’entraîner l’annulation du marché litigieux.

Ombrières pilotes aux Marquises etTuamotu-Gambier

La délibération n°14/EVT/2017 du 27 juillet 2017 prévoit l’installation de 11 ombrières pilotes dans les archipels des Tuamotu et des Marquises pour un coût total de 32 millions. Le nombre d’ombrières pilote a finalement été porté à 15 en 2018.

Nous avons relevé de graves manquements tant au niveau du montage du dossier qu’au niveau du suivi des installations dont se sont plaints nos partenaires (absence de suivi et retour de L’EPIC VANILLE DE TAHITI…).

De surcroît, nous vous reprochons d’avoir autorisé l’installation d’ombrières dans 7 communes en négligeant de vous assurer de la signature des conventions de partenariat avec les communes destinataires du projet.

Au cours de l’entretien préalable, vous avez indiqué ne pas avoir à vérifier que le maire de chaque commune recevant le projet avait dûment été autorisé par son conseil municipal à conclure une convention.

S’agissant des conventions, vous avez prétendu qu’elles ont bien toutes été signées.

Suite à l’entretien préalable, et par courrier du 16 mai 2019 remis en main propre J’ai sollicité de votre part la communication, sous 48 heures, de l’emplacement exact desdites conventions signées que nous ne parvenons pas à retrouver.

Vous n’avez pas jugé utile de répondre à cette demande dans les délais impartis.

Dans le bref courriel que vous nous avez finalement adressé le 20 mai, une fois encore vous tentez de vous exonérer de toute responsabilité en indiquant “que l’enregistrement et l’archivage des conventions n’entrent pas dans les attributions d’une directrice mais dans celui du secrétariat.”

Vos explications sont bien loin d’être satisfaisantes d’autant que les maires contactés nous ont majoritairement confirmé n’avoir rien signé, ce qui n’est pas sans poser de graves difficultés à notre établissement pour la gestion de ses ombrières.

Par ailleurs, il vous est reproché d’autres griefs que nous venons plus récemment de découvrir et qui constituent de graves négligences préjudiciables à notre établissement :

Ainsi, il vous est reproché d’avoir autorisé sur les années 2016 et 2017 le règlement total d’une commande de revues ” prestige ” dont 5 pages sur la Vanille de Tahiti pour un montant de 1 652 000 CFP.

Or, les revues prévues dans le cadre de la convention n° 23/2016/EVT du 19 août 2016, n’ont jamais été livrées sans que vous n’ayez jamais engagé la moindre action en remboursement de cette somme déboursée à tort.

Au cours de l’entretien vous avez prétendu ne pas être responsable de ce dossier puisque vous n’étiez pas en charge de la communication à l’époque des faits.

Il vous est reproché également d’avoir cédé deux véhicules de l’EVT sans exiger le paiement du prix de cession pour un montant total de 300 000 F CFP.

Non seulement, l’acquéreur n’a jamais réglé sa créance mais de surcroît, il n’y a eu aucun document de livraison ou de réception des véhicules entre l’EVT et l’acquéreur mais seulement le document nécessaire au changement de titulaire de la carte grise.

Enfin, vous n’avez jamais engagé la moindre procédure de recouvrement.

Au cours de l’entretien, vous vous êtes défendue en soutenant qu’il appartient au comptable de procéder au recouvrement d’une créance et qu’il appartenait au conseil d’administration de délibérer sur la créance irrécouvrable.

Les explications que vous avez fournies n’ont malheureusement pas modifié ma perception des fautes qui vous sont reprochées. Je note que pour chaque grief, vous rejetez la responsabilité sur un tiers au mépris des responsabilités qui étaient les vôtres en qualité de directrice de l’EVT.

Les fautes commises génèrent de graves répercussions sur le fonctionnement de notre établissement et portent atteinte à la crédibilité de ses actions.

De sorte que je n’ai pas d’autre choix que de prononcer votre licenciement pour fautes.

Votre préavis contractuel de 3 mois, augmenté d’un mois supplémentaire au titre de votre ancienneté supérieure à 5 années, débutera au premier jour ouvrable suivant la notification du présent courrier de licenciement.

Cependant vous serez dispensée de l’exécuter et percevrez mensuellement une indemnité compensatrice de préavis. Au terme du contrat de travail, il vous sera remis un certificat de travail ainsi qu’un solde de tout compte’ ;

Que les difficultés dont fait état la lettre de licenciement relatives au remboursement de revues en 2016 et 2017et à la cession litigieuse de deux véhicules en 2017 sont prescrits en application de l’article Lp 1323-1 du code du travail susvisé ;

Que le retard à effectuer la transmission des dossiers à la nouvelle direction l’est également au titre du même fondement ;

Que l’EPIC soutient que la prescription n’était pas acquise pour le surplus puisque que ce n’est qu’à compter de la transmission du rapport d’audit effectué à la demande de l’employeur le 22 mars 2019 par la CGC CONSULTANTS qu’il a été informé de la situation;

Que toutefois il est constaté qu’était versé aux débats un ‘rapport d’étonnement’ du 19 février 2019 adressé au Ministre de l’Économie verte et du Domaine, par la nouvelle directrice par lequel celle-ci dénonçait une problématique relative au marché public n°06/2018 et au dossier des ombrières pilotes aux Marquises et Tuamotu-Gambier;

Qu’il ressort par ailleurs de la procédure qu’afin de rédiger ledit rapport d’étonnement, Mme [V] [E] avait consulté le conseil de l’établissement ; que Me [J] lui avait adressé de fait une consultation au préalable telle que mentionnée en page 2 du rapport ;

Qu’il s’ensuit que la directrice était informée de la difficulté liée à un possible conflits d’intérêts lors de la passation du marché public litigieux ; qu’elle avait effectué par ailleurs préalablement une enquête également sur le projet querellé des ombrières ;

Que n’était donc pas justifié de l’intérêt à ce stade, d’une étude plus approfondie relative à ces dossiers litigieux par un prestataire afin de vérifier la pertinence de l’engagement d’une procédure disciplinaire étant observé qu’au surplus le rapport d’audit ne fait état d’aucune autre précision complétive utile ;

Que c’est donc par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a retenu que, compte tenu de son fondement sur des faits prescrits en totalité, le licenciement était invalide et donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur l’indemnité de licenciement :

Attendu qu’il y a lieu de confirmer la somme retenue au titre de l’indemnité de licenciement qui ne fait pas l’objet de contestations utiles et que l’employeur justifie avoir versé postérieurement à la decision de première instance sur un compte CARPA.

Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Attendu que l’article Lp 1225-4 du code du travail dispose que : “lorsque le licenciement a été prononcé en l’absence de motif réel et sérieux, le tribunal peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise dans les conditions précédentes d’exécution du contrat de travail.

En cas de refus par l’une ou l’autre des parties, le tribunal octroie au salarié ayant douze mois d’ancienneté dans l’entreprise, une indemnité.

Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois précédant la rupture.

Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité prévue par l’article Lp. 1224-7” ;

Qu’il est opposé en appel, sans contestation utile, l’article Lp. 1212-2 du code du travail qui dispose que :’La suspension est considérée comme temps de travail effectif pour la détermination de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.

Toutefois en cas d’absence autorisée par l’employeur prévue au 7 de l’article Lp. 1212 1, l’ancienneté prise en compte ne pourra excéder six mois, dans le cas où la période d’absence serait supérieure à cette durée ;

Qu’il est soutenu que le dernier bulletin fourni par l’employeur mentionne par ailleurs une ancienneté de 12 années, sur laquelle il n’a pas été conclu ;

Qu’il y a lieu par suite, dans les circonstances de l’espèce de faire droit à la demande de Mme [Y], mais à hauteur de la somme de 6 366 080 FCP (454 720 x 14 ) .

Sur le licenciement abusif :

Attendu que l’article Lp. 1225-5 du code du travail dispose que : ‘La rupture d’un contrat de travail à durée indéterminée par le salarié ou par l’employeur ouvre droit à des dommages et intérêts si elle est abusive.’;

Qu’il est constant que le salarié doit démontrer une faute de l’employeur ayant rendu les circonstances de la rupture brutale ou vexatoire et entraînant un préjudice distinct de celui de la rupture, pour ouvrir droit a des dommages et intérêts au titre d’un licenciement abusif ;

Que les circonstances de nature à entraîner l’indemnisation du salarié par leur caractère brutal ou vexatoire ne peuvent résulter des simples motifs du licenciement ni de la procédure disciplinaire choisie ;

Que pas davantage en appel il n’est justifié par des éléments probants d’un abus de l’employeur à ce titre.

Sur l’article 407 du code de procédure civile de Polynésie française :

Attendu qu’il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacun la charge des frais irrépetibles.

Sur les dépens :

Attendu qu’en application de l’article 406 du code de procédure civile , chacune des parties ayant partiellement succombé sur ses demandes supportera ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort ;

Déclare l’appel recevable ;

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné l’EPIC VANILLE DE TAHITI au paiement à [H] [Y] épouse [P] de la sommes de 8.184.960 F CFP au titre de l’indemnité pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau de ce chef

Condamne l’EPIC VANILLE DE TAHITI au paiement à Mme [H] [Y] épouse [P] de la somme de 6 366 080 F CFP au titre de l’indemnité pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant :

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Laisse à chacune des parties ses propres dépens.

Prononcé à Papeete, le 23 juin 2022.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVEROsigné : N. TISSOT

 


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