Production Audiovisuelle : 22 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/15586

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Production Audiovisuelle : 22 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/15586
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUIN 2023

N°2023/125

Rôle N° RG 19/15586 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BE7SY

[W] [Y]

Société HOLDING CDP

Société CARROSSERIE DE PROVENCE

C/

[N] [O]

[U] [B] épouse [O]

[J] [D]

[C] [X]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

SCP TOLLINCHI

Me Joseph MAGNAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de SALON DE PROVENCE en date du 03 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2017/04362.

APPELANTS

Monsieur [W] [Y]

né le [Date naissance 7] 1963 à [Localité 13] (60), demeurant [Adresse 8]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI – CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Renaud PALACCI, avocat au barreau de MARSEILLE

SASU HOLDING CDP représentée par son Président et associé unique Monsieur [W] [Y].

dont le siège est sis [Adresse 6]

représentée par Me Charles TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI – CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Renaud PALACCI, avocat au barreau de MARSEILLE

SAS CARROSSERIE DE PROVENCE prise en la personne re son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 6]

représentée par Me Charles TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI – CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Renaud PALACCI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [N] [O]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 12] (13), demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Joseph MAGNAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Catia BARBOSA, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Madame [U] [B] épouse [O]

née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 12] (13), demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Joseph MAGNAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me Catia BARBOSA, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [J] [D]

né le [Date naissance 4] 1940 à [Localité 11] (13), demeurant [Adresse 10]

représenté par Me Joseph MAGNAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Catia BARBOSA, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE

Maître [C] [X] agissant en sa qualité de mandataire judiciaire et en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés HOLDING CDP et CARROSSERIE DE PROVENCE, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Karine TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI – CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

et assisté de Me Renaud PALACCI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, et Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023, après prorogation du délibéré

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Suivant acte sous seing privé du 24 janvier 2017, la SASU Holding CDP, représentée par son président et associé unique M. [W] [Y], a acquis les 2500 actions constituant le capital de la SAS Carrosserie de Provence, détenues par M. [N] [O] (938 actions), Mme [U] [B] épouse [O] (937 actions) et M. [J] [D] (625 actions), la cession était consentie pour le prix de 594000 euros.

Cet acte faisait suite à une promesse de cession d’actions sous conditions suspensives, une confirmation de la promesse et un avenant signés respectivement les 23 septembre 2016, 28 octobre 2016 et 29 décembre 2016 entre les vendeurs et M. [W] [Y].

Une convention de garantie d’actif et de passif a été régularisée le même jour entre les parties pour une durée de 2 ans avec un plafond de 100000 euros sauf fausse déclaration ou déclaration mensongère.

Le 18 avril 2017, M. [Y] a fait procéder à un constat de l’état du stock par huissier, en présence de M. [N] [O].

Par LRAR de son conseil en date du 30 mai 2017, le cessionnaire a sollicité la mise en oeuvre de la garantie d’actif et de passif pour un montant de 464347,70 euros, invoquant des malversations et fausses déclarations intentionnelles des cédants, en particulier sur le stock.

La Holding CDP et M. [Y] ont par ailleurs fait pratiquer des saisies-conservatoires à l’encontre des cédants, autorisées par ordonnances des 8 juin 2017 et 3 décembre 2018 pour un montant porté à 364012 euros.

Par acte du 29 juin 2017, la SAS Holding CDP, M. [W] [Y] et la SAS Carrosserie de Provence ont fait assigner M et Mme [O] et M. [J] [D] devant le tribunal de commerce de Salon de Provence aux fins d’entendre prononcer la nullité de toutes les délibérations des assemblées générales de la SAS Carrosserie de Provence, Président M. [N] [O], prises à défaut de désignation des commissaires aux comptes pour les exercices 2014 à 2016 et la condamnation solidaire des défendeurs au paiement de :

– la somme de 464347,70 euros correspondant au montant de la réclamation du 30 mai 2017 restée sans réponse des garants pendant plus de 30 jours,

– la somme de 63840 euros au titre d’un redressement fiscal intervenu postérieurement à la cession,

– en tout état de cause, la somme de 678216,63 euros en réparation des préjudices subis, ventilée comme suit :

– 340624 euros de réduction du prix d’acquisition,

– 126500 euros au titre du ‘préjudice affecté à la SAS Carrosserie de Provence, outre facturations CAC pour diligences accomplies missions complémentaires imputables aux cédants’,

– 134175,57 euros au titre de la gestion défaillante en période intermédiaire visée par la garantie d’actif et de passif (facturations ‘Bennes Marrel’ et ‘Marrel SAS’),

– 63040 euros au titre du redressement fiscal ,

– 13077, 06 euros au titre du défaut du client ODMA.

Les cédants s’opposaient aux demandes et sollicitaient reconventionnellement la condamnation des demandeurs :

– à rembourser à M. et Mme [O] la somme de 7009,78 euros au titre de la substitution de M. [Y] dans un engagement de caution,

– à payer à chacun des défendeurs les sommes de 50000 euros pour procédure abusive et 15000 euros pour saisies abusives.

Par jugement du 3 octobre 2019, le tribunal de commerce de Salon de Provence a :

– dit que l’action intentée par la SASU Holding CDP représentée par son président M. [W] [Y] est recevable,

– donné acte à la société SAS Carrosserie de Provence de son intervention volontaire,

– dit que la SASU Holding CDP, M. [W] [Y] et la SAS Carrosserie de Provence ne rapportent pas la preuve d’une surélévation artificielle et intentionnelle du stock 2015/2016,

– dit que la SASU Holding CDP, M. [W] [Y] et la SAS Carrosserie de Provence ne rapportent pas la preuve d’un vice de consentement affectant la cession d’actions du 24 janvier 2017,

– dit qu’il n’y a pas lieu de remettre en cause la garantie d’actif et de passif attachée à cette cession,

– dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’application de son plafond d’indemnisation,

– dit qu’il n’y a pas lieu de prononcer la nullité de toutes les délibérations des assemblées générales de la SAS Carrosserie de Provence et son Président M. [N] [O], prises à défaut de désignation des commissaires aux comptes pour les exercices 2014 à 2016,

– condamné in solidum M. [N] [O], Mme [U] [O] née [B] et M. [J] [D] à payer à la SASU Holding CDP, dans le cadre de la garantie de passif, la somme de 3275 euros au titre des pénalités de retard sur la TVA et de l’impôt société,

– condamné la SASU Holding CDP à payer à M. [N] [O], Mme [U] [O] née [B] la somme de 2680,34 euros au titre des échéances impayées du prêt n°25185609,

– débouté les parties de leurs autres demandes,

– ordonné la compensation des paiements,

– condamné la SASU Holding CDP à payer à M. [N] [O], Mme [U] [O] née [B] et M. [J] [D] la somme de 1000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit qu’il n’y a pas lieu à ordonner le paiement des frais d’huissier en cas d’exécution forcée,

– dit qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire du jugement,

– condamné la SAS Holding CDP en tous les dépens.

La SAS Holding CDP, M. [W] [Y] et la SAS Carrosserie de Provence ont interjeté appel de cette décision le 8 octobre 2019.

Les sociétés Carrosserie de Provence et Holding CDP ont été placées en redressement judiciaire par jugements du 17 octobre 2019 puis en liquidation judiciaire par jugements des 31 mars et 23 avril 2021.

Maître [C] [X] est intervenu volontairement à l’instance en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire des deux sociétés.

Par conclusions déposées et notifiées le 24 février 2023, Maître [C] [X] ès qualités et M. [W] [Y] demandent à la cour de :

Dire et juger recevables et bien fondées les interventions volontaires en cause d’appel de Me [C] [X], en sa qualité de mandataire judiciaire puis de liquidateur judiciaire des sociétés Holding CDP et SAS Carrosserie de Provence,

Débouter les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] de tous leurs moyens d’irrecevabilité ou de nullité.

Dire et juger qu’il existe un doute légitime pesant sur l’impartialité de la juridiction commerciale salonnaise,

Prononcer en conséquence la nullité du jugement RG 2017 0004362

À défaut le réformer en intégralité,

Réformer en toutes ses dispositions le jugement RG 2017 0004362,

Prononcer la nullité de toutes les délibérations des assemblées générales de la SAS Carrosserie de Provence, président Monsieur [N] [O], prises à défaut de désignation des commissaires de comptes pour les exercices comptables 2015 à 2016 en cause,

Dire et juger acquise la garantie d’actif et de passif attachée à cette cession viciée ;

Écarter l’application de son plafond d’indemnisation ;

En conséquence, condamner solidairement les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] à payer à Maître [X] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SASU Holding CDP et de la SAS Carrosserie de Provence la somme de 464347,70 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, outre intérêts au taux légal à compter des mises en demeure (soit le 30 mai 2017) augmentée de 5 % par année à compter de cette même date (stipulations GAP) et la somme complémentaire de 63 840 euros,

En tout état de cause,

Condamner solidairement les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] à payer à Maître [X] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SASU Holding CDP et de la SAS Carrosserie de Provence et à Monsieur [W] [Y] la somme de 678 216, 63 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, outre intérêts au taux légal à compter des mises en demeure, selon ventilation ci après :

– la réduction du prix d’acquisition s’établit dès lors à la somme de 340 624 euros, préjudice subi pour la SAS Holding CDP et Monsieur [Y] (prix acquisition – dépréciation), dont 234 977, 18 euros revenant à Monsieur [Y];

– faute de gestion et préjudice affecté à la SAS Carrosserie de Provence, outre facturations CAC pour diligences accomplies missions complémentaires, imputables aux cédants soit 126 500 euros (imputation 20 % du prix de cession soit 118 800 euros),

– au titre de la gestion défaillante en période intermédiaire visée par la garantie d’actif et de passif : 134 175, 57 euros (facturation ‘bennes Marrel’, pour un montant de 54 600 euros et ‘Marrel SAS’ pour un montant de 79 575, 57 euros)

– redressement fiscal (63 040 euros) ;

– défaut client ODMA (13 077, 06 euros):

Réserver les droits des bénéficiaires de la garantie d’actif et de passif attachés à la cession viciée du 24 janvier 2017 liés aux conséquences financières complémentaires de toutes natures qui découleraient des malversations commises par les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] au détriment de monsieur [W] [Y] et de la SASU Holding CDP, notamment fiscales, sociales, pénales ou découlant de l’intervention de tous tiers, comme les autorités pénales, l’administration fiscale ou un mandataire de justice ;

Débouter les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner solidairement les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] à payer à Maître [X] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SASU Holding CDP et de la SAS Carrosserie de Provence et à Monsieur [W] [Y] la somme de 12 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, distraits au bénéfice de la société d’avocats Tollinchi Perret-Vigneron Bujoli-Tollinchi sur son affirmation de droit ;

Par conclusions déposées et notifiées le 9 février 2023, M et Mme [O] et M. [D] demandent à la cour de :

In limine litis :

Déclarer nulle la déclaration d’appel formée le 8 octobre 2019 par les appelants ; Déclarer irrecevable et à tout le moins infondé l’appel interjeté à l’encontre du jugement rendu le 3 octobre 2019 par le Tribunal de commerce de Salon de Provence,

Prononcer l’irrecevabilité des demandes non visées dans la déclaration d’appel ;

Prononcer l’irrecevabilité des demandes nouvelles formulées par les appelants en cause d’appel au visa de l’article 564 du CPC, à savoir :

‘Constater le doute légitime pesant sur l’impartialité de la juridiction commerciale Salonnaise,

Prononcer en conséquence la nullité du jugement RG 2017 0004362 (‘)

Constater l’aveu judiciaire et /ou extrajudiciaire de Monsieur [N][O] recueilli par Maître [P] Huissier de Justice dans son constat dressé aux contradictoires des parties en date du 18 avril 2017 valant reconnaissance des irrégularités commises aux préjudices des appelants; En conséquence, (‘)

Constater l’absence d’objection notifiée par l’intégralité des garants à l’un quelconque des bénéficiaires dans un délai de 30 jours à compter de la réception par l’un d’entre eux de la première réclamation du 30 juin 2017 pour un montant de 464 347, 70 euros,

Constater que l’indemnisation ici réclamée est en conséquence acceptée et due par les garants solidaires à hauteur de 464 347, 70 euros, (‘)

En conséquence, Condamner solidairement les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] au paiement à la SASU Holding CDP, la SAS Carrosserie de Provence de la somme de 464 347, 70 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, outre intérêts au taux légal à compter des mises en demeure (soit le 30 mai 2017)

Constater encore que le contrôle fiscal intervenu postérieurement à la cession viciée a concerné les exercices comptables 2014 à 2016 de la SAS Carrosserie de Provence, sous gestion et direction de Monsieur [O] alors Président et garant solidaire et qu’il a abouti à un redressement de 63 840 euros,

En conséquence, Condamner solidairement les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] au paiement à la SAS Carrosserie de Provence de la somme complémentaire de 63 840 euros,’

Prononcer l’irrecevabilité des moyens nouveaux soulevés par les appelants en cause d’appel au visa du principe de concentration, dont :

– l’article 1356 du code civil pour juger que le constat d’huissier du 18 avril 2017, non contradictoire, constituerait un aveu,

– les articles 1350, 1351-1, 1376 et 2298 du code civil pour faire échec à l’engagement de Monsieur [W] [Y] à garantir et relever Monsieur [O] du paiement des échéances du prêt professionnel n°25185609 en cas de carence de la SAS Carrosserie de Provence, en violation des dispositions de l’acte de cession de titres,

Déclarer les demandes de ‘Constater’ et ‘dire et juger’ et ‘réserver’ irrecevables ;

À titre principal :

Prendre acte de l’intervention volontaire de Maître [C] [X], agissant en sa qualité de Mandataire Judicaire de la société Holding CDP et de la société Carrosserie de Provence susdénommées,

Confirmer le jugement rendu le 3 octobre 2019 par le Tribunal de commerce de Salon de Provence en ce qu’il a débouté les sociétés Carrosserie de Provence et Monsieur [W] [Y] de l’ensemble de leurs demandes, sauf en ce qu’il a condamné Madame et Monsieur [O] et Monsieur [D] à 3275 euros au titre des pénalités de retard sur la TVA et de l’impôt sur les sociétés,

Débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Juger que Monsieur [Y] et la SAS Carrosserie de Provence n’ont pas qualité à agir, ni intérêt à agir ;

Juger que l’action de Monsieur [Y] et la SAS Carrosserie de Provence est irrecevable sur le fondement de l’article 122 du code de procédure civile, pour défaut de qualité et intérêt à agir, et non fondée ;

Juger que l’action en garantie de passif et d’actif est irrecevable et non fondée ;

Débouter les appelants de leur demande d’allocation de dommages-intérêts à hauteur de 678 216,63 euros, et de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

À titre reconventionnel :

Vu l’article 1240 du Code civil (ancien 1382),

Juger que Monsieur [Y] s’est substitué dans l’engagement de caution personnelle et solidaire de Madame et Monsieur [O] concernant le contrat de financement des enrobés conclu avec le CIC d'[Localité 12],

En conséquence :

Condamner Monsieur [Y] à rembourser à Monsieur et Madame [O] la somme de 6892,35 euros au titre des échéances impayées du prêt professionnel n°25185609 portant sur les enrobés, à parfaire en cours de procédure,

Condamner Monsieur [Y] à rembourser le solde restant dû du prêt professionnel n°25185609,

Condamner solidairement les appelants à payer chacun à chacun des défendeurs la somme de 50000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamner solidairement les appelants à payer chacun à chacun des défendeurs la 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour saisies conservatoires abusives et excessives sur les comptes bancaires des défendeurs,

À titre subsidiaire,

si par impossible la Cour prononçait une condamnation à l’encontre des vendeurs,

Appliquer le plafond de la garantie d’un montant maximal de 100000 euros ;

Juger que la somme de 10000 viendra en déduction des sommes éventuellement réclamées,

Ordonner la compensation entre les sommes auxquelles seraient éventuellement condamnées les intimés et celles dues par les appelants,

En tout état de cause y ajouter:

Débouter Monsieur [Y], la SAS Carrosserie de Provence, la SASU Holding CDP et Me [X] de toutes leurs demandes , fins et conclusions,

Condamner solidairement les appelants à payer chacun à chacun des intimés la somme de 12000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner solidairement les appelants aux entiers dépens de l’instance, distraits au profit de Me Joseph Magnan, Avocat aux offres de droit.

Les dispositifs des conclusions respectives des parties ainsi reproduits ont été expurgés des ‘constater’ et ‘juger que’ qui ne sont que des rappels de faits ou de moyens.

La procédure a été clôturée le 28 mars 2023.

MOTIFS :

Sur les exceptions de nullité et fins de non-recevoir soulevées par les intimés :

Les intimés demandent à la cour de déclarer nulle la déclaration d’appel formée le 8 octobre 2019 par les appelants, au visa des articles 901 et 542 du code de procédure civile, faisant valoir que la déclaration d’appel ne mentionne pas l’objet de l’appel, à savoir la réformation ou l’annulation du jugement, alors que cette mention est prescrite à peine de nullité de forme.

C’est à juste titre que les appelants opposent l’irrecevabilité, devant la cour, de cette exception, qui relevait de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état conformément aux articles 789 et 907 du code de procédure civile.

Les intimés ne développent aucun moyen à l’appui de leur demande tendant à faire déclarer l’appel irrecevable. Cette demande ne peut en conséquence prospérer.

Ni l’article 901 du code de procédure civile ni aucun autre texte ne fait obligation à l’appelant de mentionner ses demandes dans la déclaration d’appel.

Le moyen tiré de l’irrecevabilité des ‘demandes non visées dans la déclaration d’appel’ sera en conséquence rejeté.

L’interdiction faite aux parties, par l’article 564 du code de procédure civile, de soumettre à la cour de nouvelles prétentions ne s’applique précisément qu’aux seules prétentions.

Les intimés contestent la recevabilité, au regard de l’article 564 précité, d’une liste de chefs du dispositif des conclusions des appelants.

Parmi cette liste, seules constituent des prétentions les demandes suivantes :

– condamner solidairement les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] au paiement à la SASU Holding CDP, la SAS Carrosserie de Provence de la somme de 464347, 70 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, outre intérêts au taux légal à compter des mises en demeure (soit le 30 mai 2017)

– condamner solidairement les époux [N] et [U] [O] et Monsieur [J] [D] au paiement à la SAS Carrosserie de Provence de la somme complémentaire de 63 840 euros.

Les autres chefs ne sont pas des prétentions mais le rappel de moyens ou arguments énoncés au soutien des prétentions.

Ces demandes de condamnations ayant déjà été formulées devant les premiers juges, aucune irrecevabilité n’est encourue sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile.

Aux termes de l’article 563 du code de procédure civile, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux pour justifier en appel les prétentions qu’elles avaient soumises au premier juge.

Le principe de concentration des moyens invoqués par les intimés, qui découle de l’autorité de la chose jugée, n’est pas applicable au cours d’une même procédure, entre l’instance suivie devant le premier juge et l’instance d’appel.

La demande des intimés tendant à faire prononcer l’irrecevabilité des moyens nouveaux soulevés par les appelants en cause d’appel sera rejetée.

Les intimés demandent enfin à la cour de déclarer les demandes de ‘constater’ et ‘dire et juger’ et ‘réserver’ irrecevables, comme ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile.

La cour relève que les intimés ont eux-mêmes rédigé le dispositif de leurs conclusions sur six pages, dont quatre constituées de ‘juger que’ qui ne sont que le rappel de faits ou d’arguments.

L’article 954 du code de procédure civile dispose :

‘Les conclusions d’appel (…) doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation (…).

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions (…).

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion (…)’;

Le non-respect des dispositions précitées n’est pas sanctionné par l’irrecevabilité des chefs de dispositif qui ne sont pas des prétentions.

Conformément à ces dispositions, la cour statuera sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions en examinant les moyens invoqués dans la discussion, y compris ceux rappelés de manière surabondante au dispositif.

Sur la demande d’annulation du jugement :

Les appelants mettent en doute ‘l’impartialité de la juridiction commerciale salonnaise’ en exposant :

– que M. [R] [D], qui était l’expert-comptable des cédants, puis pendant un temps, celui des cessionnaires, est directement impliqué dans les malversations commises par les cédants au préjudice des appelants et a participé à la défense des cédants en attestant à leur profit,

– qu’à l’occasion de l’ouverture du redressement judiciaire des sociétés Carrosserie de Provence et Holding CDP, les cessionnaires ont découvert que M. [R] [D] était magistrat consulaire en activité au tribunal de commerce de Salon de Provence, élu ou réélu en 2017 en même temps que M. [Z] [A], membre de la composition ayant rendu la décision dont appel, et avec lequel il avait déjà siégé notamment en 2016, et en même temps que M. [K] [S], siégeant dans la formation de jugement des procédures collectives, tous trois étant membres de l’UP13 ,

– que M. [R] [D] fournissait des informations favorables aux intimés à la juridiction consulaire, le jugement de redressement judiciaire de la société Carrosserie de Provence faisant ainsi référence à un litige avec l’ancien bailleur la SCI des époux [O], qui n’avait pas été évoqué à l’audience ni dans la déclaration de cessation des paiements par le dirigeant,

– que M. [D] a retardé le prononcé du redressement judiciaire en se déportant à la dernière minute.

Ils prétendent que sont ainsi révélés la collusion existant entre les magistrats de la juridiction salonnaise visant à couvrir l’un des leurs au détriment des appelants, à tout le moins à protéger les cédants pour que ceux-ci ne se retournent pas contre leur ancien expert-comptable, et en tout état de cause le doute légitime pesant sur l’impartialité de la juridiction, qu’elle soit objective ou subjective, comme l’absence d’objectivité du tribunal de commerce et le conflit d’intérêt, privant les appelants d’un procès équitable.

Il ressort de ces explications que M. [R] [D] ne faisait pas partie de la formation de jugement ayant rendu la décision dont appel.

Les appelants ne démontrent aucune collusion entre M. [R] [D] et un membre de la formation de jugement ayant rendu la décision dont appel, la circonstance que M. [R] [D] et M. [Z] [A] ont tous deux été élus en 2017 sur la liste de la même organisation patronale étant insuffisante à démontrer une telle collusion.

Les circonstances dans lesquelles ont été rendus les jugements d’ouverture du redressement judiciaire des sociétés Carrosserie de Provence et Holding CDP, postérieurement au jugement dont appel, ne caractérisent pas un manque d’impartialité du tribunal, M. [R] [D], dont il n’est pas démontré qu’il aurait fourni des informations au tribunal, s’étant déporté. Elles ne sont en tout état de cause pas susceptibles de mettre en doute l’impartialité de la composition, différente, ayant rendu le jugement dont appel.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, les premiers juges ne se sont pas bornés à reproduire dans leurs motifs les conclusions des cédants mais ont développé leur propre motivation, sans que le fait qu’ils aient pu reprendre à leur compte certains arguments développés par les cédants ne permette de mettre en doute leur impartialité.

La demande d’annulation du jugement sera en conséquence rejetée.

Sur l’intérêt à agir de M. [Y] et de la société Carrosserie de Provence :

Les appelants fondent leur action principalement sur la convention de garantie d’actif et de passif du 24 janvier 2017.

Aux termes de cet acte la convention est conclue entre d’une part, les époux [O] et M. [J] [D], dénommés ensemble les garants, agissant avec solidarité entre eux et d’autre part M. [W] [Y] et la SASU Holding CDP, désignés comme bénéficiaires solidaires.

D’autre part, la convention définit en son article 2.1, intitulé ‘étendue de l’indemnisation’, les préjudices indemnisables comme étant notamment des préjudices encourus ou subis par la société cédée.

M. [Y] et la société Carrosserie de Provence justifient en conséquence d’un intérêt à agir contrairement à ce que soutiennent les intimés.

Sur la demande en annulation de délibérations d’assemblées générales :

Les appelants demandent à la cour de prononcer la nullité de toutes les délibérations des assemblées générales de la SAS Carrosserie de Provence, président Monsieur [N] [O], prises à défaut de désignation des commissaires de comptes pour les exercices comptables 2015 à 2016.

Ainsi que mentionné en page 2 de l’acte de cession des titres de la SAS Carrosserie de Provence, il a été mis fin au mandat des commissaires aux comptes par procès-verbal du 27 juin 2014 statuant sur les comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2013.

Les appelants font valoir que selon courriel adressé le 24 octobre 2018 par le commissaire aux comptes désigné postérieurement à la cession, la SAS Carrosserie de Provence aurait dû à nouveau désigner un commissaire aux comptes à l’occasion de l’assemblée générale constatant le dépassement des seuils visés aux articles L.227-9-1 et R.227-1 du code de commerce au titre de l’exercice 2014, soit au plus tard pour la certification des comptes 2015 et suivants.

Ils invoquent les dispositions de l’article L.820-3-1 du code de commerce dont il résulte que les délibérations de l’assemblée générale prises à défaut de désignations régulières de commissaires aux comptes sont nulles, l’action en nullité étant éteinte si ces délibérations sont expressément confirmées par l’organe compétent sur le rapport de commissaires aux comptes régulièrement désignés.

La demande est imprécise quant aux délibérations visées, aucun procès-verbal d’assemblée générale n’étant produit ni même cité.

S’agissant des comptes de l’exercice 2016, il résulte du procès-verbal de décision de l’associé unique du 31 janvier 2019 que tant les comptes annuels initialement établis par l’ancien dirigeant, démissionnaire au 24 janvier 2017, que les comptes rectificatifs établis par le nouveau dirigeant, n’ont été soumis à l’associé unique que le 31 janvier 2019 et sur rapport du commissaire aux comptes désigné dès le 24 janvier 2017, de sorte qu’aucune nullité n’est encourue sur le fondement de l’article L.820-3-1.

S’agissant des comptes de l’exercice 2015, aucune décision d’assemblée générale n’est versée aux débats ni précisément désignée, de sorte qu’aucune nullité ne peut être prononcée.

Sur la mise en oeuvre formelle de la garantie d’actif et de passif :

Par LRAR de leur conseil, Maître Renaud Palacci, en date du 30 mai 2017, adressée aux époux [O] et à M. [J] [D], les sociétés Holding CDP, Carrosserie de Provence et M. [W] [Y] ont reproché aux cédants des malversations et fausses déclarations concernant les éléments comptables des exercices 2016 et 2015, destinées à dissimuler la situation réelle de la société et la valeur des titres cédés.

Il y est précisé que ce courrier constitue réclamation et mise en oeuvre de la garantie d’actif et de passif attachée à la cession, notamment quant au stock ou à la période de gestion intermédiaire, et que les fausses déclarations faites par les cédants écartent l’application de son plafond.

Aux termes de ce courrier, faisant référence au constat d’huissier du 18 avril 2017 mentionné en pièce jointe, il est reproché aux cédants une surévaluation artificielle et intentionnelle du stock de 168172 euros pour l’exercice 2016 et de 132000 euros pour l’exercice 2015, à l’origine des pertes abyssales de la société au 31 décembre 2016, ainsi que la création d’une dette fournisseurs pendant la période de gestion intermédiaire, en particulier à l’égard de ‘Bennes Marrel’ pour un montant de 54600 euros et de ‘Marrel SAS’ pour un montant de 79575,57 euros.

Il est ainsi réclamé aux cédants au titre de la garantie d’actif et de passif la somme de 464347,70 euros, correspondant au montant minimum du préjudice subi au jour de la réclamation, incluant un apport en compte courant de 30000 euros versé par le cessionnaire pour renflouer les comptes de la société cédée.

La réclamation ainsi formulée comporte bien, conformément à l’article 2.6 de la garantie d’actif et de passif, la description de la réclamation et du préjudice ainsi qu’une évaluation des préjudices correspondants.

D’autre part, aucune clause de la garantie d’actif et de passif n’interdit aux bénéficiaires de faire notifier la réclamation par mandataire.

L’existence du mandat étant confirmée par les bénéficiaires, la réclamation notifiée par Maître [L] est régulière.

Les appelants se prévalent de l’article 2.4 (c) de la convention de garantie d’actif et de passif, aux termes duquel en l’absence d’objection notifiée par l’intégralité des garants à l’un quelconque des bénéficiaires dans un délai de 30 jours à compter de la réception par l’un d’entre eux d’une réclamation susmentionnée, l’indemnisation réclamée sera réputée acceptée et due.

Cette clause institue une présomption d’acceptation en cas de silence des garants pendant les 30 jours suivant la réception de la réclamation, non stipulée comme étant irréfragable.

Aux termes d’un courrier officiel adressé le 26 septembre 2017 au conseil des cédants, faisant suite à une correspondance officielle de ce dernier en date du 22 septembre 2017, le conseil de M. [Y] et de la Holding CDP fait référence à un courriel du conseil des cédants en date du 14 juin 2017 lié à la notification du 30 mai 2017, courriel dont il précise qu’il ‘est et restera confidentiel.’

Cette référence à un courriel du conseil des intimés intervenu dans le délai de 30 jours, corrobore l’affirmation des garants selon laquelle ils ont présenté des objections par l’intermédiaire de leur conseil et est suffisante pour combattre la présomption d’acceptation par les garants du principe et du montant d’une réclamation écartant, au surplus, l’application du plafond conventionnel de garantie.

La demande de condamnation fondée sur l’application de l’article 2.4 (c) de la convention sera en conséquence rejetée.

Sur le bien fondé des réclamations des appelants :

– sur les réclamations découlant d’une surévaluation du stock :

Les appelants affirment que le constat d’huissier établi le 18 avril 2017 en présence de M. [N] [O], et qui comporterait un ‘aveu judiciaire ou extrajudiciaire’ de ce dernier, démontrerait que les stocks de la société cédée ont été sciemment surévalués a minima en 2015 et 2016.

Les déclarations recueillies par un huissier de justice lors d’un constat ne peuvent constituer qu’un aveu extrajudiciaire et non un aveu judiciaire.

Il ressort de ce constat :

– qu’interpellé par M. [Y] sur l’inexactitude du stock de 368000 euros mentionné sur la situation comptable au 31 août 2016 remise lors de la cession, M. [O] s’est installé à l’ordinateur se trouvant dans le bureau de la direction et a édité un état du stock au 31 septembre 2016 sous forme de tableau de type Excel comportant une liste sans total, qu’il en a calculé le total pour un montant de 199941 euros ;

– qu’interrogé sur la discordance entre le montant ressortant de ce document et le stock figurant au bilan M. [O] a déclaré ‘y a des trucs qui vont pas’, ‘j’ai dû acheter du matériel entre le 31 septembre et le 31 décembre’ et n’a pu donner d’autre explication ;

– que M. [Y] a exhibé un document manuscrit présenté comme étant un inventaire du stock établi par M. [O] pour l’année 2015 et reconnu comme tel par ce dernier ;

– qu’interpellé par M. [Y] sur un écart de 132000 euros entre ce document et le stock mentionné au bilan 2015, M. [O] a répondu ‘[D] à trop parlé, tous les ans il me faisait le coup avec le stock, il est pas bon’, M. [Y] précisant que M. [D] était l’expert-comptable ayant dressé les bilans concernés ;

– que les parties ont ensuite procédé à un inventaire des matériels présents sur le site.

M. [N] [O] expose, sans être contredit sur ce point, avoir été invité téléphoniquement par M. [Y] à se présenter au siège de la société le 18 avril 2017 sans être averti sur les motifs précis de cette rencontre ni sur la présence d’un huissier de justice.

Contrairement à ce qu’affirment les appelants, les déclarations retranscrites par l’huissier, par lesquelles M. [O] exprime sa perplexité et recherche des explications sur les discordances existant entre les bilans et des documents présentés comme étant ses propres inventaires, ne constituent pas un aveu des malversations qui lui sont reprochées.

C’est à juste titre que les intimés, comme l’ont fait les premiers juges, contestent le caractère probant du constat d’huissier du 18 avril 2017 s’agissant de l’allégation de surévaluation des stocks, dès lors que:

– l’huissier, qui relate que M. [O] s’est installé à l’ordinateur et a édité un état du stock au 31 septembre 2016, ne précise ni l’origine ni les propriétés du document, dont l’intégrité ne peut être garantie puisqu’alors que M. [O] avait quitté la société depuis le 24 janvier 2017, M. [Y] avait depuis cette date la maîtrise de l’informatique et notamment du ficher de suivi des stocks ;

– la liste manuscrite présentée comme étant l’état du stock au 31 décembre 2015 établi par M. [O], annexée au procès-verbal, est établie sur dix feuilles volantes non numérotées et le montant total de 358440 porté sur le dernier feuillet est d’une écriture et d’une couleur différente, M. [O] déniant en être l’auteur, l’intégrité de ce document n’est là encore aucunement garantie,

– M. [O] a été convoqué et interrogé dans des conditions ne lui permettant pas d’effectuer des vérifications comptables et de fournir des explications utiles.

Les premiers juges ont également relevé de façon pertinente que M. [Y] avait été présent dans l’établissement pendant les trois mois précédant la cession, dans le cadre de la passation des fonctions de dirigeant, que son expérience passée de responsable commercial dans une entreprise spécialisée dans la fabrication de carrosseries et remorques lui donnaient la qualification de professionnel averti.

M. [Y], qui avait ainsi, pendant les trois mois précédant la cession, accès au stock et aux informations comptables le concernant, n’a pas estimé nécessaire de solliciter l’établissement d’un inventaire contradictoire à la date de la cession.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté M. [Y] et les sociétés Holding CDP et Carrosserie de Provence de leurs demandes d’indemnisation, au titre de la mise en oeuvre de la garantie d’actif et de passif déplafonnée et/ou d’un vice du consentement, fondées sur une falsification volontaire de l’état des stocks par les cédants et de l’incidence de la prétendue surévaluation des stocks sur la marge globale et le prix de cession.

Sera également rejetée la demande portant sur le paiement des factures des commissaires aux comptes désignés postérieurement à la cession par le nouveau dirigeant de la société cédée, pour leurs rapports sur les comptes de l’exercice 2016, intervenant nécessairement au cours de l’année suivante à la charge de la société cédée, aucune facture n’étant produite concernant des travaux portant sur les comptes de l’exercice 2015.

– sur les réclamations fondées sur une augmentation du passif en période intermédiaire :

La garantie d’actif et de passif est stipulée en considération des comptes annuels de la société au 31 décembre 2015 et d’une situation comptable arrêtée au 31 août 2016.

La convention évoque également la situation de la société pendant la période écoulée entre le 21 septembre 2016, date de la promesse de vente, et la date de la cession, qualifiée de période intermédiaire de gestion.

Les cédants déclarent géré la société pendant cette période ‘dans le cours normal des affaires et en bon père de famille’, et affirment que la société n’a subi pendant cette période aucun changement notable dans sa situation juridique et financière ni aucun événement susceptible d’entraîner des conséquences dommageables.

Les appelants demandent la condamnation des garants au paiement des sommes de 54600 euros et 79575,57 euros correspondant à des factures émises contre la société cédée par les sociétés Bennes Marrel et Marrel SAS, dont la date d’échéance était antérieure à la cession et qui n’ont pas été payées par les cédants.

Les intimés exposent que la société Carrosserie de Provence procédait, pour des vendeurs de véhicules poids lourds tels que les concessionnaires Scania, man, Renault ou la société Corse poids lourds, à l’équipement de véhicules commandés par des clients, en y intégrant des bennes ou des dispositifs hydrauliques de levage qu’elle commandait auprès des sociétés Bennes Marrel et Marrel SAS avec lesquelles elle était liée par un partenariat ancien.

Ils indiquent que selon un usage existant depuis l’origine de cette relation, la société Carrosserie de Provence ne réglait les pièces acquises auprès des sociétés Marrel que lorsque le concessionnaire, après livraison du véhicule au client et encaissement du prix, lui avait réglé sa propre facture, comportant le coût des pièces fournies par Marrel, de sorte qu’il y avait un décalage entre l’émission de la facture par la société Marrel et son règlement.

La poursuite d’un usage ancien avec un partenaire relève d’une gestion ‘dans le cours normal des affaires et en bon père de famille’.

Les appelants ne démontrent pas que s’agissant des factures dont elle demande le paiement par les garants, la société Carrosserie de Provence avait encaissé avant la cession le montant de la facture correspondante émise par elle-même contre le concessionnaire.

La mise en oeuvre de la garantie d’actif et de passif n’est en conséquence pas justifiée.

Les appelants sollicitent également le remboursement d’une somme de 13077,06 euros au titre d’une facture de réparations émise le 27 janvier 2017 contre une société ODMA TP, dont le chèque de règlement a été rejeté pour défaut de provision.

Elle n’établit pas en quoi cet impayé engagerait la responsabilité des cédants au titre de la garantie d’actif et de passif.

Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a rejeté ce chef de demande.

Les appelants sollicitent enfin le paiement d’une somme de 63840 euros au titre d’un redressement consécutif à un contrôle fiscal diligenté par la DGFP PACA le 17 novembre 2017 et portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

Selon les termes d’un courrier du contrôleur des finances publiques en date du 16 janvier 2018, la somme de 63840 euros correspond à 60697 euros de droits et 3143 euros de pénalités, sans aucune précision sur la nature et l’origine de la dette, la proposition de rectification du 17 novembre 2017 mentionnant des montants différents.

Interrogé par le conseil des intimés par courrier du 26 janvier 2018 sur cette réclamation de 63840 euros, le contrôleur des finances du PRS d'[Localité 9] a répondu par mail du 5 février 2018 qu’il n’y avait pas de dette antérieure au 31 décembre 2016 et qu’il s’agissait de déclarations de TVA sans paiement de juillet, août et septembre 2017.

Les appelants versent aux débats un bordereau de situation fiscale adressé à la société Carrosserie de Provence le 19 février 2018, comportant l’état détaillé des créances du Trésor public sur la société, pour un montant total de 98991 euros dû sur la période de 2014 à 2017.

Ce courrier précise la société Carrosserie de Provence ‘recevr[a] prochainement les avis de mise en recouvrement correspondant aux résultats du contrôle fiscal externe sur la TVA de l’année 2016 pour un montant de 64067 euros et l’IS 2014 à 2016 pour un montant de 575 euros.’

Les appelants ne produisent cependant aucun avis de mise en recouvrement ni déclaration de créance du pôle de recouvrement à la procédure collective de la société Carrosserie de Provence, établissant le recouvrement effectif de ces sommes, les intimés soutenant au contraire qu’aucune somme n’a été réclamée à la société cédée au titre du redressement de TVA 2016.

Il résulte des termes de la proposition de rectification du 17 novembre 2017 que l’inspecteur des finances a reproché à la société Carrosserie de Provence, qui a une activité mixte de vente et de prestation de services, d’avoir appliqué le régime de la TVA sur les encaissements pour les deux types d’opérations alors que sur les ventes, la TVA est exigible lors de la facturation.

Le redressement correspondant s’élève à 61367 euros de droits outre 2700 euros de pénalités pour la TVA et 534 euros d’incidence sur l’impôt sur les sociétés outre 41 euros de pénalités.

L’irrégularité ne consistant que dans un décalage dans la date de reversement de la TVA, les intimés affirment que la situation a été régularisée avant même le contrôle fiscal, par les reversements effectués sur les encaissements reçus début 2017, ainsi que le confirme M. [R] [D], expert-comptable, par courrier du 6 mai 2019.

S’agissant des pénalités calculées sur le décalage de TVA et l’incidence sur l’impôt sur les sociétés, ces sommes doivent être mises à la charge des cédants à la condition qu’elles aient été effectivement mises en recouvrement.

La preuve de cette mise en recouvrement n’étant pas apportée, les appelants seront déboutés de l’ensemble de leurs demandes formées au titre du contrôle fiscal externe, le jugement étant réformé en ce qu’il a condamné in solidum M. [N] [O], Mme [U] [O] née [B] et M. [J] [D] à payer à la SASU Holding CDP, dans le cadre de la garantie de passif, la somme de 3275 euros au titre des pénalités de retard sur la TVA et de l’impôt société.

Sur les demandes reconventionnelles des cédants :

Aux termes de l’acte de cession du 24 janvier 2017, M. [W] [Y] s’est engagé à se substituer aux époux [O] en qualité de caution du contrat de financement des enrobés conclu avec la banque CIC d'[Localité 12].

M. [Y] ne conteste pas n’avoir effectué aucune démarche en ce sens.

M. et Mme [O] sont donc fondés dans le recours en garantie contre M. [Y] au titre des sommes qu’ils justifient avoir payé au titre de l’engagement de caution dans lequel ils devaient être substitués.

C’est à tort que M. [Y] soutient qu’en payant les sommes réclamées par la banque, les époux [O] auraient renoncé à la substitution de caution et l’auraient privé de la faculté de discuter la dette.

La substitution stipulée à l’acte de cession étant inopposable aux tiers, les époux [O] ne pouvaient s’en prévaloir auprès de la banque, du fait du non-respect par M. [Y] de son engagement de la mettre en oeuvre, lui-même se privant ainsi de la faculté de contester la dette.

M. [O] justifie avoir été mis en demeure, en sa qualité de caution du prêt dont s’agit, par LRAR du 7 novembre 2017, de payer la somme de 2680,34 euros au titre des échéances impayées d’octobre et novembre 2017 et par LRAR du 29 avril 2019, de payer la somme de 4239,44 euros au titre des échéances impayées de janvier à avril 2019.

Il produit également un décompte de créance établi par le banque le 28 janvier 2020 pour un montant de 6892,35 euros.

C’est cependant à juste titre que le tribunal a que M. [O] ne fournissait une attestation de paiement du CIC que pour la somme de 2680,34 euros, et limité en conséquence la condamnation de M. [Y] à ce seul montant.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Les intimés ne démontrent pas que l’exercice, par les appelants, de leur droit d’agir en justice en vertu de la convention de garantie d’actif et de passif aurait dégénéré en abus et seront déboutés de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.

S’agissant de le demande en dommages et intérêts pour saisies abusives, les époux [O] ont déjà été déboutés de ce chef de demande par l’arrêt rendu le 4 novembre 2021 par cette cour sur le jugement du juge de l’exécution ordonnant la mainlevée des mesures conservatoires.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes en dommages et intérêts.

Parties succombantes, les appelants seront condamnés aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité pour frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Déclare les intimés irrecevables en leur exception de nullité de la déclaration d’appel,

Rejette les fins de non-recevoir soulevées par les intimés,

Déboute les appelants de leur demande d’annulation du jugement dont appel,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a condamné in solidum M. [N] [O], Mme [U] [O] née [B] et M. [J] [D] à payer à la SASU Holding CDP, dans le cadre de la garantie de passif, la somme de 3275 euros au titre des pénalités de retard sur la TVA et de l’impôt société et ordonné compensation des paiements,

Statuant à nouveau sur ce point, déboute les appelants de leur demande au titre du redressement fiscal,

Condamne in solidum les appelants à payer à chacun des intimés la somme de 1500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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