Production audiovisuelle : 19 juin 2012 Cour d’appel de Paris RG n° 11/04317

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Production audiovisuelle : 19 juin 2012 Cour d’appel de Paris RG n° 11/04317
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 4

ARRÊT DU 19 Juin 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 11/04317

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Mars 2011 par le conseil de prud’hommes de PARIS RG n° 10/09072

APPELANT

Monsieur [R] [M]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Me Yann DU PENHOAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C 683

INTIMEES

Me [T] [X] – Mandataire liquidateur de la Société CARTEL PRODUCTIONS

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par Me Jean-Luc TISSOT, avocat au barreau de VERSAILLES

AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Sabine NIVOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Mai 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

Madame Dominique LEFEBVRE-LIGNEUL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

– signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie de l’appel interjeté par M. [M] du jugement du Conseil de Prud’hommes de Paris section Encadrement Chambre 6 du 2 mars 2011 qui l’a débouté de ses demandes.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

M. [M] a signé le 12 février 2008 un contrat de production audiovisuelle auteur-adaptateur-réalisateur en qualité d’auteur avec la société Cartel Productions pour un film de 30 minutes destiné prioritairement à la télévision dénommé Légende de sang ;

Il revendique l’existence d’un contrat d’usage de travail de technicien- metteur en scène à durée déterminée à requalifier en contrat à durée indéterminée à défaut de souscription écrite d’un contrat de travail, selon la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 étendue par arrêté du 4 janvier 1994, au salaire mensuel de 10 055.88 € selon l’article 3 d’étape dans le secteur de la production cinématographique du 3 juillet 2007 de directeur de photographie pour 3 semaines entre le 21 janvier et le 8 mars 2008 et du 9 mars 2008 au 27 mai 2009, qui a été rompu abusivement sans procédure de licenciement ;

La société Cartel Productions a été mise en liquidation judiciaire par jugement du 4 mars 2009 du tribunal de commerce de Nanterre réformé par arrêt de la cour d’appel de Versailles du 25 juin 2009 qui a ouvert une procédure de redressement judiciaire à dater du 4 mars 2009 avec périodes d’observation prorogées jusqu’à la mise en liquidation judiciaire par jugement du 6 octobre 2010 du tribunal de commerce de Nanterre.

M. [M] demande d’infirmer le jugement, de faire des constats auxquels il est référé, de requalifier le contrat de travail à durée déterminée de technicien metteur en scène non écrit sur la période de mars 2007 au 27 mai 2009 en contrat à durée indéterminée, de fixer au passif les sommes suivantes :

10 055.88 € d’indemnité de requalification

60 335.28 € pour licenciement abusif

20 111.76 € pour préavis et 2011.17 € de congés payés afférents

10 055.88 € pour non-respect de la procédure

15 000 € pour perte d’allocation chômage

60 335.28 € pour travail dissimulé

7 098.27 € pour rappel de salaire sur la période du 21 janvier au 8 mars 2008 et 709.82 € de congés payés afférents

145 810.26 € pour la post-production du 9 mars 2008 au 27 mai 2009 et 14 581.02€ de congés payés afférents

5000 € pour frais irrépétibles,

et d’ordonner la remise des documents conformes sous astreinte.

Il a demandé oralement d’écarter des débats l’argumentation de Me [X] assimilant les feuilles de tournage à des contrats à durée déterminée d’usage opposée oralement devant la cour.

Me [X] es-qualités de mandataire-liquidateur de la société Cartel Productions demande de confirmer le jugement et de condamner M. [M] à payer la somme de 2000 € pour frais irrépétibles.

L’Ags demande de confirmer le jugement, subsidiairement de limiter la rémunération au smic, de prononcer sa mise hors de cause pour novation des rappels de salaires en créances à limiter en tout état de cause à un mois et demi et oppose les limites de sa garantie légale et le plafond 5

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l’audience ;

L’argument développé oralement par Me [X], es-qualités, au-delà des écritures communiquées, que les feuilles de tournage sont assimilables à des contrats à durée déterminée d’usage, et la note en délibéré déposée par M. [M] qui n’a pas été demandée par la cour, seront écartées des débats pour atteinte au contradictoire ;

Le contrat de production du 12 février 2008 a pour objet la commande d’écriture par le producteur de textes à l’auteur et les conditions de la cession au producteur des droits d’exploitation correspondant à cette contribution et engage l’auteur en qualité de réalisateur du film pour diriger la préparation de la production, établir le découpage technique, assurer les prises de vue et les enregistrements sonores, diriger le montage et tous travaux de finition jusqu’à l’établissement de la version définitive du film d’un commun accord des parties, conformément à l’article L211-5 du code la propriété intellectuelle, le réalisateur s’engageant à rester à la disposition du producteur pour réaliser les travaux ci-dessous dans les délais suivants :

préparation depuis mars 2007 et reprise le 21 janvier 2008

tournage du 25 février au 8 mars 2008

post-production selon une période et dates à déterminer en commun accord dans les installations du producteur, le film devant être livré au 15 juin 2008.

Il était prévu une rémunération de la cession des droits d’auteur proportionnelle pour l’exploitation télévisuelle et à usage privé avec un minimum garanti d’auteur scénariste de 10 000 € et d’auteur-réalisateur de 3000 € ;

Le tournage s’est fait selon des feuilles quotidiennes de service éditées par la société Cartel du lundi 25 février 2008 au samedi 8 mars 2008 pour fixer unilatéralement la programmation collective des opérations techniques et des intervenants;

Les courriels échangés à partir du 9 juin 2008 font état de retard dans la post-production lié à des problèmes financiers de la société Cartel et qui a été terminée au 27 mai 2009 ;

Le contrat de production du 12 février 2008 est seulement un contrat de rémunération de la cession des droits de propriété intellectuelle d’auteur-réalisateur mais est taisant sur le salaire afférent au travail de technicien réalisateur effectué par M. [M] dans la fabrication du film sous la direction de la société Cartel Productions pendant le tournage et sa mise à disposition sur un temps programmé pour la préparation et la post-production, qui fait habituellement l’objet de contrat de travail d’usage à durée déterminée ;

La demande en requalification en contrat à durée indéterminée du contrat d’usage de technicien-réalisateur à durée déterminée, à défaut de contrat de travail écrit signé par les parties, est fondée en son principe ;

Le temps de travail effectif de préparation et de tournage demandé sur 3 semaines sur la période du 21 janvier 2008 au 8 mars 2008 est approprié au travail fourni pour la préparation et le tournage du film à l’intérieur de cette période ; Il était prévu dans le contrat de production un planning de post-production à définir en commun, qui en tout état de cause représentait au maximum 3 mois et une semaine entre le 8 mars 2008 et le 15 juin 2008 ; Dans la réalité le planning de post-production a été repoussé du fait des difficultés financières du producteur et terminé le 24 mai 2009 ;

Il n’est pas établi que M. [M] est resté à la disposition de la société Cartel Productions pendant toute la période du 9 mars 2008 au 24 mai 2009, alors qu’il était prévu que le planning de post-production était établi en accord entre M. [M] et la société Cartel Productions, que les courriels échangés font état d’autres réalisations de M. [M] pour des tiers, ce qui est confirmé par les informations figurant sur les sites internet vimeo.com et commeaucinema telles que produites, faisant référence à d’autres réalisations en 2008 et 2009 dont le tournage du ‘facteur chance’ en décembre 2008 ;

Dans ces conditions il y a lieu à rappel de salaire pour 4 mois de travail effectif selon les prévisions de travail faites en commun ;

Sur le montant du salaire, la mise en scène d’un film destiné à une diffusion à la télévision ne rentre pas dans la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles qui s’applique aux spectacles vivants et non aux enregistrements audio-visuels ; la convention collective de la production cinématographique n’est de même pas applicable en l’espèce comme non étendue et alors qu’il s’agit d’un court film destiné à la télévision, étant observé que le travail de réalisateur n’est pas celui d’un directeur de la photographie, en tout état de cause limité au temps de tournage ;

Il n’y avait pas de convention collective télévisuelle applicable au moment de la réalisation du film ;

Dans ces conditions, M. [M] a droit à la rémunération légale minimum du smic à défaut de toute convention collective applicable à ses fonctions ;

Il n’a pas été donné suite par M. [M] à sa proposition de mettre ses salaires en production faite le 16 mars 2008 qui n’a pas fait l’objet de réponse l’ayant satisfait et qui a par la suite réclamé le paiement de ses droits de telle sorte qu’il ne peut être opposé de novation en créance commerciale ;

Il sera alloué la somme de 5 284 € pour rappel de salaire de 4 mois de travail outre congés payés afférents ;

L’interruption du travail salarié au 24 mai 2009 à la fin des opérations de post-production constitue une rupture abusive du contrat requalifé en contrat à durée indéterminée, faite sans motivation ni procédure et alors que le salarié n’oppose pas de prise d’acte et qu’il est le seul à pouvoir le faire ;

Il sera alloué la somme de 1 321 € pour indemnité de requalification du contrat et celle de 1000 € pour défaut de respect de procédure de licenciement ;

Il sera alloué un préavis d’un mois de 1 321 € pour une ancienneté de moins de 2 ans ;

Il sera alloué la somme de 3000 € de dommages-intérêts pour la rupture abusive en rapport avec l’ancienneté et appropriée à l’entier préjudice subi y compris la perte d’allocation chômage afférente au défaut de déclaration assedic sans avoir lieu à dommages-intérêts spécifiques ;

Il n’est pas établi d’intention de recourir à un travail dissimulé de la part de la société Cartel Productions dont les courriels établissent que selon elle au début des relations, le contrat de production recouvrait tous les droits de M. [M];

L’ags sera dite tenue au titre de rappel de salaires, en application des alinéas 1° et 4° de l’article L 3253-8 du code du travail, pour un mois et 10 jours au titre de rappel de salaire dû à la date du jugement d’ouverture de redressement judiciaire au 4 mars 2009 et dans la limite d’un mois et 15 jours au titre de la période travaillée du 4 mars au 24 mai 2009 au cours de la période d’observation du 4 mars 2009 jusqu’au jugement de liquidation judiciaire du 6 octobre 2010, soit au total deux mois et 25 jours pour la somme de 3 742.89 € outre congés payés afférents ;

PAR CES MOTIFS

Ecarte des débats le moyen de Me [X] es-qualités assimilant les feuilles de tournage à des contrats à durée déterminée d’usage et les note et pièces envoyées par M. [M] en délibéré.

Infirme le jugement et statuant à nouveau :

Fixe les créances de M. [M] au passif de la liquidation judiciaire de la société Cartel Productions aux sommes suivantes :

1 321 € d’indemnité de requalification

3 000 € pour licenciement abusif

1 321 € pour préavis et 132.10 € de congés payés afférents

1 000 € pour non-respect de la procédure

5 284 € de rappel de salaire et 528.40 € de congés payés afférents

2 500 € pour frais irrépétibles.

Ordonne la remise des documents conformes sans avoir lieu à astreinte.

Dit l’Ags tenue à garantie pour le rappel de salaire dans la limite de 3 742.89 € et 374.28 € de congés payés afférents et des autres sommes telles qu’allouées, hors les frais irrépétibles, dans la limite du plafond 5 ;

Rejette les autres demandes ;

Dit que les entiers dépens seront pris en frais de liquidation judiciaire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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