Production Audiovisuelle : 18 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/04144

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Production Audiovisuelle : 18 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/04144

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 13

ARRET DU 18 AVRIL 2023

(n° , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/04144

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Janvier 2020 – Tribunal Judiciaire de PARIS – RG n° 19/02655

APPELANTE :

Madame [Z] [H]

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Ruth BURY, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Anne-laure ARCHAMBAULT de la SELAS MATHIEU ET ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : R079

AUTRE PARTIE :

LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D’APPEL DE PARIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre, chargée du rapport, et devant Mme Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre

Mme Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Florence GREGORI

MINISTERE PUBLIC : L’affaire a été communiquée au ministère public le 26 juin 2020, qui a fait connaître son avis le 12 décembre 2022.

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour 18 avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre et parVictoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

Mme [Z] [H] a épousé M. [U] [F] le 6 décembre 1986 sous le régime de la séparation de biens.

Par jugement du 18 novembre 1999, rectifié par jugement du 11 septembre 2000, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Tarbes a prononcé le divorce des époux, tout en mentionnant à tort une séparation de corps, et commis le président de la chambre des notaires pour procéder aux opérations de liquidation-partage.

Par jugement du 19 juin 2003, devenu définitif, le tribunal de grande instance de Tarbes a fixé le droit à récompense de M. [F] à un montant de 129 315,18 euros et renvoyé les parties à poursuivre la liquidation-partage.

Par jugement du 19 mai 2005, le tribunal de grande instance de Tarbes a rappelé que le montant de la créance de M. [F] avait été fixé à 129 770,44 euros par le jugement du 19 juin 2003 et que Mme [H] disposait d’une créance de 23 284,97 euros et renvoyé les parties devant le notaire pour l’établissement de l’acte de partage définitif.

Par arrêt du 26 mars 2007, le cour d’appel de Pau, statuant sur appel du jugement du 19 mai 2005, a notamment constaté que, par l’effet du jugement définitif du 19 juin 2003, la récompense due à M. [F] s’élevait à 129 315,18 euros.

Par jugement du 7 mai 2008, devenu définitif, le tribunal de grande instance de Tarbes a homologué l’état liquidatif présenté par le notaire lequel fixait, notamment, après compensation, la créance de M. [F] à 124 164,13 euros.

Le 12 février 2009, Mme [H] et son nouvel époux, M. [D] [O], ont sollicité l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire laquelle a été prononcée à l’égard des deux époux le 18 février suivant par le tribunal de grande instance de Tarbes, maître [K] étant nommé mandataire judiciaire.

Le 10 avril 2009, M. [F] a déclaré sa créance au titre de la liquidation du régime matrimonial.

Selon ordonnance rendue le 3 décembre 2009 par le juge-commissaire la créance a été admise à titre hypothécaire à hauteur de 132 031,84 euros.

Par jugement du 28 avril 2010, le tribunal a arrêté un plan de redressement sur 14 ans, maître [K] étant désigné comme commissaire à l’exécution du plan.

Suivant arrêt du 20 juin 2011, la cour d’appel de Pau a confirmé l’admission de la créance de M. [F] considérant qu’elle était fondée sur un titre exécutoire définitif.

Par jugement du 21 octobre 2011, rendu sur requête de maître [K], le tribunal a ouvert une procédure de liquidation judiciaire considérant que les époux [O]-[H] n’avaient pas respecté le plan et ce, sans poursuite de l’activité.

Le premier président de la cour d’appel de Pau a refusé de suspendre l’exécution provisoire du jugement par ordonnance du 17 janvier 2012.

Le 2 juillet 2012, le divorce de Mme [H] et de M. [O] a été prononcé.

Le 10 juillet 2012, le tribunal a ordonné la poursuite de l’activité par le liquidateur jusqu’au 31 octobre 2012.

Par arrêt du 26 février 2013, la cour d’appel de Pau a confirmé la résolution du plan et la liquidation judiciaire.

Le 20 mars 2013, le juge commissaire a ordonné la vente aux enchères des biens immobiliers.

Par décisions des 21 octobre 2011, 15 novembre 2013, 22 mai 2014 et 17 avril 2015, le tribunal a prononcé le report de la clôture de la liquidation.

Le 8 janvier 2016, le tribunal a rejeté la demande de clôture de Mme [H] et de M. [O].

Par jugement du 6 mai 2016, le tribunal a prorogé la liquidation de deux ans considérant qu’un appel avait été interjeté.

Par décision du 31 mai 2016, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi interjeté à l’encontre de l’arrêt du 26 février 2013, confirmant ainsi le principe de la liquidation judiciaire.

Par arrêt du 20 février 2017, la cour d’appel de Pau a confirmé le rejet de la demande de clôture.

L’aide juridictionnelle n’a pas été accordée à Mme [H] pour se pourvoir en cassation.

Par ailleurs, Mme [H] et M. [O] ont fait l’objet d’une procédure pénale pour avoir continué l’exploitation agricole après le 31 octobre 2012 malgré l’interdiction découlant de la liquidation judiciaire, avoir procédé à des dessaisissements et à des détournements d’actifs.

Par jugement du 21 février 2017, le tribunal correctionnel de Tarbes a déclaré Mme [H] et M. [O] coupables et les a condamnés chacun à une peine de 3 mois d’emprisonnement délictuel avec sursis outre 500 euros d’amende. Par arrêt du 9 mai 2019, la cour d’appel de Pau a relaxé Mme [H].

Par jugement du 9 juin 2017, le tribunal de grande instance de Tarbes a confirmé l’ordonnance rendue le 21 avril 2017 par le juge-commissaire, ayant déclaré irrecevable la demande de M. [O] et Mme [H] tendant à la désignation d’un nouveau liquidateur judiciaire. Après un arrêt du 30 avril 2018, par lequel la cour d’appel de Pau a renvoyé le dossier devant le procureur général pour saisine du bâtonnier relativement au conflit d’intérêt soulevé par Mme [H] à l’encontre de l’avocat du mandataire, l’appel formé contre cette décision a été déclaré irrecevable le 23 novembre 2018.

Parallèlement, et par décision du 31 mai 2018, la Cour européenne des droits de l’Homme a déclaré la requête de Mme [H] irrecevable considérant l’absence d’épuisement des voies de recours internes.

C’est dans ces circonstances que, par acte du 29 janvier 2019, Mme [H] a fait assigner l’agent judiciaire de l’Etat devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins d’engager la responsabilité de l’Etat sur le fondement de l’article L.141-1 du code de l’organisation judiciaire.

Au cours de la procédure, le juge-commissaire, par ordonnance du 21 mai 2019, a autorisé le liquidateur judiciaire à vendre un bien immobilier dépendant de la liquidation et par trois jugements des 18 septembre 2020, à l’encontre duquel l’appel a été déclaré irrecevable par arrêt du 1er mars 2021, 8 juillet 2021 et 17 février 2022, à l’encontre duquel l’appel a été déclaré irrecevable par arrêt du 15 novembre 2022, le délai de clôture de la liquidation judiciaire a été prorogé jusqu’au 17 janvier 2024.

Par jugement rendu le 6 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :

– déclaré irrecevables les demandes de Mme [H] relatives à la procédure de liquidation du régime matrimonial,

– déclaré recevable le surplus des demandes,

– débouté Mme [H] de ses demandes,

– condamné Mme [H] aux dépens,

– dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit n’y avoir lieu à exécution par provision,

– rejeté le surplus des demandes.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA et déposées le 11 décembre 2022, Mme [Z] [H] demande à la cour de :

– annuler le jugement,

et statuant à nouveau,

– la dire recevable et bien fondée en ses demandes,

en tout état de cause,

– condamner l’agent judiciaire de l’Etat à lui payer :

– au titre de la perte des primes agricoles au titre des campagne 2013 et 2018, la somme de 103 467,54 euros,

– au titre de la dégradation matérielle de ses conditions de vie jusqu’à précarisation, la somme de 105 000 euros,

– au titre de son préjudice moral, la somme de 170 000 euros,

– au titre de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 9 000 euros,

– dire et juger que tous les montants porteront intérêts au taux légal à compter de la date d’assignation,

– ordonner la capitalisation des intérêts dus à ce jour pour plus d’une année entière à compter de la date de l’assignation, dans les termes de l’article 1343-2 du code civil (ancien 1154 du code civil),

– condamner l’Etat français, représenté par l’agent judiciaire de l’Etat, en tous les frais et dépens dont distraction au profit de maître Ruth Bury,

– dire et juger que sa ‘clôture judiciaire’ doit être prononcée,

à titre infiniment subsidiaire,

– ne pas la condamner au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA et déposées le 12 août 2020, l’Agent judiciaire de l’Etat demande à la cour de :

à titre principal,

– déclarer irrecevables comme prescrites les demandes d’indemnisation de Mme [H], la prescription quadriennale étant acquise depuis la date du 31 décembre 2012,

– condamner Mme [H] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [H] aux dépens d’appel, dont distraction au profit de maître Anne-Laure Archambault, avocat comme il est dit à l’article 699 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire,

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

– condamner Mme [H] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [H] aux dépens d’appel, dont distraction au profit de maître Archambault, avocat comme il est dit à l’article 699 du code de procédure civile,

à titre infiniment subsidiaire,

– débouter Mme [H] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner Mme [H] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [H] aux dépens d’appel, dont distraction au profit de maître Anne-Laure Archambault, avocat comme il est dit à l’article 699 du code de procédure civile,

si par extraordinaire, la cour réformait le jugement en ce qu’il a dit irrecevables et mal fondées,

– réduire le montant des demandes indemnitaires de Mme [H] à de plus justes proportions,

– débouter Mme [H] de sa demande tendant au prononcé de la clôture des opérations de liquidation judiciaire,

– condamner Mme [H] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [H] aux dépens, dont distraction au profit de maître Archambault, avocat comme il est dit à l’article 699 du code de procédure civile.

Par avis notifié le 12 décembre 2022, le ministère public demande à la cour de confirmer le jugement et de rejeter l’ensemble des prétentions de Mme [H].

La clôture de l’instruction a été prononcée le 10 janvier 2023.

SUR CE,

Sur la recevabilité de l’action

Considérant que Mme [H] formait des griefs tant sur le fondement de la faute lourde que du déni de justice et à l’encontre de différentes procédures judiciaires, le tribunal a jugé que :

– la procédure de liquidation du régime matrimonial et la procédure de liquidation judiciaire ne sont pas liées au point de devoir les considérer comme indivisibles,

– le fait générateur de la procédure de liquidation du régime matrimonial doit être fixé au plus tard à la dernière décision rendue, soit le jugement du 7 mai 2008 rendu par le tribunal de grande instance de Tarbes, de sorte que la prescription quadriennale était déjà acquise au 31 décembre 2012 alors que l’instance a été introduite le 29 janvier 2019,

– tous les griefs antérieurs à cette date, notamment la fixation de la créance de M. [F], ne peuvent être examinés,

– les griefs relatifs à la procédure de liquidation judiciaire ne sont pas prescrits dès lors que cette procédure est toujours en cours.

Mme [H] soutient que :

– son action est recevable en ce que la procédure de liquidation n’étant pas terminée à ce jour, l’action intentée devant le tribunal judiciaire de Paris s’incorpore dans la prescription quadriennale et le délai de forclusion n’a pas commencé à courir,

– le tribunal ne pouvait pas introduire dans son dispositif une distinction non prévue par la loi du chef de la recevabilité,

– la recevabilité ne dépend que de la demande en justice, or les demandes du chef de la faute lourde et du déni de justice du service public de la justice sont exposés au titre de la liquidation judiciaire,

– la relation de cause à effet entre les séries de fautes du service public de la justice n’entre pas en ligne de compte pour juger de la recevabilité à agir de la requérante,

– la liquidation judiciaire a opéré un déni constant de procédure de vérification de la déclaration de créance contestée alors que cette prétendue créance résultait elle-même d’une série de fautes du service public de la justice opérée en violation de son premier régime matrimonial,

– le jugement du 7 mai 2008 a été rendu de manière fautive,

– les carences de surveillance du notaire et du mandataire judiciaire sont indivisibles.

Invoquant l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968, l’agent judiciaire de l’Etat conclut à la prescription de l’action de Mme [H] depuis le 31 décembre 2012 dès lors que le fait générateur du dommage allégué par celle-ci est l’homologation de l’état liquidatif retenant une créance au bénéfice de M. [F] d’un montant de 124 164,13 euros par jugement du 7 mai 2008 et non la procédure collective critiquée subséquemment. Il conclut par conséquent à l’irrecevabilité de l’ensemble des demandes de Mme [H] et à tout le moins à la confirmation du jugement.

Le ministère public reprend la distinction opérée par le tribunal entre les procédures de liquidation du régime matrimonial et de liquidation judiciaire pour conclure à la confirmation du jugement sur ce point.

Selon l’article 122 du code de procédure civile, ‘Constitue une fin de non- recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée’.

Selon l’article 1er de la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics, sont prescrites, au profit de l’Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la même loi, toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis.

Le point de départ de la prescription quadriennale des créances sur l’Etat et les collectivités publiques est constitué par la date du fait générateur de la créance, soit au jour où la créance indemnitaire est réputée acquise en son principe, sauf ignorance légitime de son titulaire.

Il ressort des conclusions de Mme [H] que celle-ci invoque d’une part des fautes lourdes du service public de la justice tant au titre de la liquidation de son régime matrimonial que de la liquidation judiciaire et d’autre part un déni de justice résultant de la durée de la procédure collective et de l’inaction des organes de la procédure.

Il s’agit de deux procédures distinctes et donc divisibles.

En outre, il résulte des jugements des 18 février 2009 et 28 avril 2010, ayant ouvert la procédure de redressement judiciaire de Mme [H] et de M. [O] puis arrêté le plan de redressement, que le passif a été déclaré à hauteur de 303 837,76 euros et retenu à hauteur de 245 399,65 euros, de sorte que la créance par M. [F] n’est pas la seule cause de l’ouverture de la procédure collective.

C’est par conséquent à bon droit que le tribunal a considéré qu’il n’y avait pas un lien tel entre les deux procédures justifiant de les considérer comme indivisibles.

S’agissant de la procédure de liquidation du régime matrimonial, le tribunal a justement retenu que le fait générateur de la responsabilité de l’Etat devait être fixé au plus tard à la dernière décision définitive rendue soit le jugement du tribunal de grande instance de Tarbes du 7 mai 2008 ayant homologué l’état liquidatif.

La prescription quadriennale étant acquise depuis le 31 décembre 2012 et l’action ayant été engagée le 29 janvier 2019, tous les griefs antérieurs à cette date ne peuvent être examinés et les demandes résultant de ceux-ci doivent être déclarées irrecevables.

En revanche, la procédure de liquidation judiciaire étant toujours en cours, la prescription n’est pas acquise. Les demandes formées à ce titre sont par conséquent recevables.

Sur la responsabilité de l’Etat

* Au titre de la faute lourde

Le tribunal a jugé qu’en admettant la créance de M. [F] à la procédure collective, le service public de la justice ne saurait être critiqué, dès lors que dans son arrêt du 20 juin 2011 la cour d’appel de Pau a confirmé l’admission de cette créance, après avoir retenu que la déclaration de créance était régulière en la forme et fondée sur un titre exécutoire définitif, Mme [H] n’ayant pas interjeté appel du jugement rendu le 7 mai 2008 par le tribunal de grande instance de Tarbes.

Mme [H] soutient que plusieurs fautes ont été commises :

– violation du premier régime matrimonial qui a causé la déclaration de créance de M. [F],

– absence de vérification du passif notamment de la créance contestée de M. [F],

– absence de contrôle du notaire commis et du mandataire judiciaire désigné, ce dernier étant protégé de façon arbitraire par les autorités judiciaires,

– liquidation judiciaire inutile,

– certains actes ne comportant pas de numéro de RG, ne sont pas signés par le greffier ou sans mention de la personne ‘PO’, voire dressés après le décès du liquidateur judiciaire.

Elle considère que les autorités judiciaires ont ainsi ‘généré un passif arbitraire qui a causé sa liquidation judiciaire et une série de décisions arbitraires basées sur un passif inexistant.’

L’agent judiciaire de l’Etat réplique que :

– la responsabilité de l’Etat ne peut pas être engagée du fait d’une éventuelle faute commise par un mandataire judiciaire, qui est un collaborateur du service public de la justice distinct de l’institution judiciaire, ou par un notaire,

– l’inaptitude du service public de la justice ne peut être appréciée que dans la mesure où l’exercice des voies de recours n’a pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué or Mme [H] n’a pas interjeté appel des deux jugements qu’elle critique,

– Mme [H] effectue une mauvaise analyse du fondement de la créance de M. [F] à son encontre alors même que le raisonnement du notaire et du tribunal était juste, ceux-ci considérant que dans le cadre de la liquidation d’un régime matrimonial d’époux séparés de biens les créances entre époux sont évaluées en utilisant les règles des récompenses du régime de la communauté, la différence de nomenclature étant sans incidence sur la méthode de calcul du montant dû par l’épouse ayant bénéficié d’une plus-value du fait d’améliorations financées en partie par son conjoint séparé de biens,

– si une contestation du calcul était souhaitée, Mme [H] aurait dû recourir à un avocat se présentant lors des opérations de liquidation et contester le jugement du 19 juin 2003 ainsi que le jugement d’homologation, ce qu’elle n’a pas fait,

– l’usage du rapport [P], soumis au débat et discuté contradictoirement ne constitue pas une faute,

– M. [F] disposant d’un titre exécutoire ayant autorité de la chose jugée, les juges n’avaient d’autres choix que d’admettre sa créance lors de la procédure collective, aucune faute ne saurait leur être reprochée,

– Mme [H] critique des décisions ayant autorité de la chose jugée sans démontrer une faute lourde du service public de la justice.

Le ministère public est d’avis que la faute lourde ne peut pas être caractérisée sur le fondement des agissements d’un mandataire judiciaire dans l’exercice de sa mission et que Mme [H] ne démontre pas l’existence d’une faute lourde de l’Etat issue des jugements des 19 juin 2003 et 7 mai 2008 à propos desquels elle ne démontre pas avoir épuisé les voies de recours qui lui étaient ouvertes.

Aux termes de l’article L.141-1 du code de l’organisation judiciaire, l’Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. Cette responsabilité n’est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice, la faute lourde consistant en une déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi.

L’inaptitude du service public de la justice ne peut être appréciée que dans la mesure où l’exercice des voies de recours n’a pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué. Il n’y a donc pas de faute lourde lorsque l’exercice des voies de recours a été favorable au demandeur ou lorsque la voie de recours qui était ouverte n’a pas été exercée, le juge n’ayant pas à s’assurer de l’issue possible de cette voie de recours.

Aucun grief tiré de la violation du régime matrimonial, antérieur au jugement du tribunal de grande instance de Tarbes du 7 mai 2008, notamment en lien avec la prétendue absence de contrôle du notaire commis par le tribunal, ne peut plus être examiné du fait de la prescription relevée ci-dessus.

A supposer établies les fautes reprochées par l’appelante au mandataire judiciaire désigné, celles-ci ne pourraient avoir pour conséquence que d’engager la responsabilité civile professionnelle de celui-ci et en aucun cas celle de l’Etat pour un fonctionnement défectueux du service public de la justice dès lors qu’il s’agit d’un professionnel distinct de l’institution judiciaire.

La procédure de redressement judiciaire a été ouverte sur déclaration de cessation des paiements de Mme [H] et de son époux. Le tribunal y a fait droit après avoir vérifié que le passif exigible était supérieur à l’actif disponible de sorte qu’aucune faute ne peut lui être reprochée.

Suivant arrêt du 20 juin 2011, la cour d’appel de Pau a confirmé l’ordonnance du juge-commissaire ayant prononcé l’admission de la créance hypothécaire de M. [F] pour un montant de 132 031,84 euros. La cour a relevé que cette créance avait été contestée, comme le montre la mention portée sur l’état des créances, et admise au passif de sorte que Mme [H] ne pouvait prétendre avoir été privée du double degré de juridiction. Dans le cadre de cette procédure, Mme [H] a eu la possibilité de faire valoir ses moyens et de critiquer la créance déclarée par M. [F], la cour considérant toutefois que celle-ci était régulière et fondée sur un titre exécutoire définitif, la débitrice n’ayant pas interjeté appel du jugement du 7 mai 2008. Mme [H], qui n’a pas usé de la voie de recours qui lui était ouverte à l’encontre de cette décision confirmant l’ordonnance du juge commissaire, ne rapporte donc pas la preuve d’une absence fautive de vérification du passif et en particulier de la créance contestée de M. [F].

La résolution du plan de redressement judiciaire et l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire ont été prononcées sur saisine du commissaire à l’exécution du plan par jugement du 21 octobre 2011, confirmé par arrêt du 26 février 2013, devenu irrévocable suite à l’arrêt de la Cour de cassation du 31 mai 2016, au motif que les époux [O] n’avaient pas exécuté leur engagement relatif au paiement de la première annuité du plan.

Ainsi, contrairement à ce qu’affirme Mme [H], la liquidation judiciaire n’était ni fautive ni inutile et aucune faute caractérisant un fonctionnement défectueux du service public de la justice n’est donc caractérisée à ce titre.

Sous sa pièce n°85, Mme [H] produit quatre ordonnances rendues sur requête par la présidente du tribunal judiciaire de Tarbes ayant toutes trait à la désignation de la société de maître [K], mandataire judiciaire désigné dans la procédure des époux [O], ou de maître [V] [C], mandataire judiciaire, afin d’accomplir les actes nécessaires à la gestion de l’étude de la Selarl MJPA, suite au décès de maître [K]. Outre qu’elles ont nécessairement été dressées après le décès de maître [K] puisqu’il s’agissait de le remplacer, elles sont régulières en ce qu’elles sont signées par le magistrat qui les a rendues et comportent la signature du greffier qui en a délivré une expédition conforme, le greffier n’ayant pas à signer une ordonnance rendue sur requête. L’absence de numéro de répertoire général sur les copies produites ne caractérise nullement une faute.

Enfin, le liquidateur judiciaire a une mission très large dans la conduite de la liquidation. Il représente le débiteur dessaisi ainsi que l’intérêt collectif des créanciers, ses pouvoirs n’étant pas les mêmes dans chacune de ses missions et le débiteur disposant d’un droit de recours en cas de conflit d’intérêt procédural. Il rend compte au tribunal de l’accomplissement de sa mission par la remise régulière de rapports. En l’espèce, Mme [H] allègue mais ne démontre pas en quoi le mandataire et le liquidateur judiciaires désignés dans la procédure n’auraient pas fait l’objet d’un contrôle de la part des autorités judiciaires et notamment du juge-commissaire alors que le rappel des faits démontre au contraire que de nombreuses procédures ont permis le contrôle de leurs missions et que le juge-commissaire a bien fait mention de la contestation par Mme [H] de la créance déclarée par M. [F] sur l’état des créances manifestant ainsi l’information reçue du mandataire judiciaire.

Il s’en déduit qu’aucune faute lourde caractérisant un fonctionnement défectueux du service public de la justice n’est établie.

* Au titre du déni de justice

Le tribunal a jugé que :

– le caractère excessif de la durée de la procédure de liquidation judiciaire doit être évalué en considération du temps séparant chaque étape de la procédure, et non pas de la durée globale de celle-ci,

– la cour d’appel a confirmé la décision d’ouverture de la liquidation judiciaire dans un délai raisonnable,

– la liquidation judiciaire a été ralentie et obscurcie par les recours systématiques intentés par les débiteurs ainsi que par leurs initiatives malheureuses, notamment le détournement des actifs de la liquidation pour leur bénéfice et le règlement de certaines dettes de leur propre initiative,

– les intérêts civils consécutifs aux délits commis par Mme [H] au préjudice de la liquidation judiciaire n’étant toujours pas liquidés, les différentes juridictions ont, à bon droit, considéré que la clôture ne pouvait être ordonnée,

– il ne peut être fait grief de cette situation au service public de la justice, celle-ci étant liée uniquement au comportement des débiteurs, de sorte qu’aucun déni de justice tenant à la durée de la procédure collective ne peut ainsi être caractérisé,

– les manquements reprochés au liquidateur judiciaire ne caractérisent pas plus un déni de justice, la responsabilité des collaborateurs occasionnels du service public de la justice, parmi lesquels figurent les mandataires judiciaires, étant exclusive de la responsabilité de l’Etat.

Mme [H] soutient que :

– il y a déni de justice en raison de la longueur de la procédure de liquidation judiciaire et du refus de clôturer la procédure,

– le tribunal a procédé à une segmentation de la procédure et des différentes décisions rendues en violation de l’article 6 de la CEDH,

– le service public de la justice doit clôturer cette procédure devenue inutile en suite du décès du liquidateur judiciaire et de M. [F],

– les autorités judiciaires ont fixé un délai de huit mois aux organes de la procédure pour établir la liste des créanciers,

– elle a ‘subi durant sept ans et demi une atteinte à son droit de propriété causé par une première série de décisions fautives du service public de la justice et aggravé par une seconde série du chef des procédures collectives qui devaient assainir en réparant les fautes précédemment commises’,

– en la privant d’un degré de juridiction et en l’obligeant à interjeter appel de la décision d’admission de la créance de M. [F], le juge-commissaire et les organes de la procédure ont causé le délai non raisonnable,

– des séries de décisions judiciaires arbitraires de prorogation au-delà du délai raisonnable par mesure d’administration judiciaire ont causé le délai non raisonnable,

– la motivation selon laquelle elle serait à l’initiative des multiples recours est contraire à la jurisprudence applicable en la matière et d’autant plus grave que la liquidation judiciaire a été causée par un passif arbitraire,

– les autorités judiciaires ont ordonné des prorogations du chef de décisions non susceptibles de recours en sorte que la procédure qui devait durer deux ans et demi au plus accuse un délai de onze ans,

– les ordonnances des 4 août 2021, 15 septembre 2021, 1er mars 2022 et 5 août 2022 sont manifestement constitutives d’un déni de justice,

– le liquidateur judiciaire n’a pas procédé au recouvrement d’actifs (PAC, TVA) en dépit de ses demandes,

– le liquidateur judiciaire est décédé sans que cette circonstance ne lui soit notifiée comme prévu par l’article 373 du code de procédure civile.

L’agent judiciaire de l’Etat réplique que :

– la seule durée objectivement longue ne constitue pas à elle seule la démonstration d’un caractère fautif et anormal du déroulement de l’instance,

– la loi ne fixe pas de délai maximum en matière de procédure collective,

– la durée de la procédure dépend de la complexité de la mission, une procédure collective étant par nature parmi les procédures judiciaires les plus complexes à mettre en oeuvre, de l’importance des actifs, et des contentieux en cours,

– la complexité de l’affaire de Mme [H] est avérée, la vente de biens immobiliers telle que la cession d’une exploitation agricole, étant une action compliquée du fait des formalités qu’elle engendre et de la subtilité des marchés sur lesquels elles ont lieu,

– les juridictions saisies ont rendu des décisions dans un délai raisonnable,

– il n’y a aucune faute lourde s’agissant des décisions relatives à la créance de M. [F] qui aurait aggravé le traitement de la liquidation judiciaire, de sorte que l’autorité judiciaire ne peut être jugée responsable de la durée de la procédure collective litigieuse,

– Mme [H] a participé à l’allongement de la procédure et donc à la réalisation du préjudice qu’elle invoque,

– si l’usage des voies de recours ne peut lui être reproché pour autant celles-ci ont augmenté la durée de la procédure, sans que cette durée supplémentaire ne puisse lui être imputée et sans pouvoir être considérée comme excessive,

– Mme [H] est mal venue à critiquer la durée prise pour liquider ses actifs alors qu’elle a demandé un sursis à statuer à la cour d’appel de Pau dans l’attente de l’arrêt de la Cour de cassation du 31 mai 2016.

Le ministère public rappelle qu’aucun déni de justice ne peut résulter des manquements du liquidateur judiciaire, que Mme [H] n’a pas usé des voies de recours disponibles pour critiquer les décisions qui seraient à l’origine d’un refus de clôture de la procédure collective et qu’elle ne rapporte pas la preuve de l’existence de négligences de la part des autorités judiciaires.

Aux termes de l’article L.141-3, alinéa 4, du code de l’organisation judiciaire, ‘il y a déni de justice lorsque les juges refusent de répondre aux requêtes ou négligent de juger les affaires en état et en tour d’être jugées’.

Le déni de justice s’entend non seulement comme le refus de répondre aux requêtes ou le fait de négliger les affaires en l’état d’être jugées mais aussi plus largement, comme tout manquement de l’Etat à son devoir de protection juridictionnelle de l’individu qui comprend le droit pour le justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable.

Le déni de justice est caractérisé par tout manquement de l’Etat à son devoir de permettre à toute personne d’accéder à une juridiction pour faire valoir ses droits dans un délai raisonnable et s’apprécie in concreto, à la lumière des circonstances propres à chaque espèce en prenant en considération la nature de l’affaire, son degré de complexité, le comportement de la partie qui se plaint de la durée de la procédure et les mesures prises par les autorités compétentes.

Le délai de la procédure doit être apprécié selon la complexité et les étapes de celle-ci et non en fonction de sa durée globale.

La procédure collective portant sur le patrimoine de deux époux, qui au demeurant ont divorcé au cours de la procédure, une exploitation agricole exploitée par l’un d’entre eux seulement, avec un cheptel vivant, et la cession de biens immobiliers, est nécessairement une procédure complexe. Au demeurant, Mme [H] reconnaît elle-même dans ses écritures (p89) que la liquidation judiciaire est ‘inextricable et insurmontable’.

Il convient de relever que :

– la procédure de redressement judiciaire a été ouverte le 18 février 2009, soit six jours après le dépôt de la déclaration de cessation des paiements du 12 février 2009,

– le juge-commissaire a rendu le 3 décembre 2009 une décision d’admission de la créance contestée déclarée par M. [F] le 10 avril 2009, soit dans un délai de huit mois,

– la cour d’appel statuant en appel contre cette décision a rendu son arrêt le 20 juin 2011, soit dans un délai raisonnable de dix-huit mois,

– saisi le 8 juin 2011 par le commissaire à l’exécution du plan d’une requête aux fins de résolution du plan de redressement judiciaire et ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, le tribunal a statué par jugement du 21 octobre 2011,

– saisi par requête des époux [O] en date du 8 juin 2012, le tribunal, par jugement rendu le 10 juillet suivant, soit extrêmement rapidement, a fait droit à leur demande de poursuite de l’activité jusqu’au 31 octobre 2012,

– sur appel du 28 octobre 2011, le jugement du 21 octobre 2011 a été confirmé par arrêt rendu le 26 février 2013, étant relevé que les dernières conclusions de Mme [H] et de M. [O] avaient été déposées le 4 septembre 2012, soit dans un délai raisonnable de seize mois,

– cet arrêt est devenu irrévocable suite à l’arrêt rendu le 31 mai 2016 sur le pourvoi formé par Mme [H] par la Cour de cassation, soit trois ans plus tard, étant relevé que ce délai inclut une procédure d’admission à l’aide juridictionnelle et l’échange de plusieurs mémoires,

– la clôture de la procédure de liquidation judiciaire a été reportée par jugement du tribunal de grande instance de Tarbes du 15 novembre 2013, les opérations de la liquidation judiciaire n’ayant pas débuté en raison du pourvoi en cassation formé contre l’arrêt de la cour d’appel de Pau ayant confirmé l’ouverture de la liquidation judiciaire et de l’appel de l’ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé la vente de l’actif mobilier,

– le 16 juin 2015, Mme [H] a sollicité la clôture de la procédure, demande refusée par jugement rendu le 8 janvier 2016, soit sept mois plus tard,

– la clôture de la procédure de liquidation judiciaire a de nouveau été reportée par jugements des 22 mai 2014,17 avril 2015 et 6 mai 2016, ce dernier précisant que Mme [H] avait interjeté appel des jugements du 8 janvier 2016, 4 mai 2018, 18 septembre 2020, celui-ci relevant l’existence d’actifs à réaliser,

– la cour d’appel de Pau a statué sur l’appel formé par Mme [H] et M. [O] du jugement du 8 janvier 2016 par arrêt du 20 février 2017, soit dans un délai raisonnable de treize mois, puis sur l’appel du jugement du 18 septembre 2020 déclaré irrecevable le 1er mars 2021, soit dans un délai de six mois,

– la clôture de la procédure de liquidation judiciaire a encore été reportée par jugements des 8 juillet 2021 au vu des actifs restant à réaliser, et 17 février 2022 au regard des instances toujours pendantes au pénal et en responsabilité de l’Etat,

– les ordonnances des 4 août 2021, 16 septembre 2021, 1er mars 2022 et 5 août 2022 qui concernaient le remplacement du liquidateur judiciaire par sa société d’exercice puis par un autre en raison du décés survenu et la prorogation de la mission de la SCP [C] n’ont aucunement prolongé la durée de la procédure collective,

– le décés du liquidateur judiciaire n’avait pas à être notifié à l’appelante, seule la désignation de son successeur devant l’être et l’interruption n’a en tout état de cause pas rallongé de manière déraissonble la procédure puisqu’il a été pourvu à son remplacment huit jours après.

Il sera relevé en outre que :

– Mme [H] et M. [O] ont saisi le 29 août 2016 le juge-commissaire aux fins de remplacement du liquidateur judiciaire, lequel a statué le 21 avril 2017, soit dans un délai rapide, en déclarant la demande irrecevable ; qu’ils ont formé un recours qui a abouti à un jugement confirmatif rendu le 9 juin 2017, soit très rapidement, puis un appel lequel a donné lieu à un premier arrêt avant dire droit prononcé le 30 avril 2018 puis à un second rendu le 23 novembre 2018 déclarant l’appel irrecevable, soit là encore dans un délai très raisonnable, Mme [H] se voyant ensuite refuser le 1er juillet 2019, le bénéfice de l’aide juridictionnelle pour exercer un pourvoi en cassation, décision qu’elle a également contestée et qui a été confirmée par ordonnance rendue le 9 octobre 2019, soit dans un délai de trois mois,

– Mme [H] et M. [O] ont eux-mêmes demandé au juge-commissaire de surseoir à statuer sur la demande formée par le liquidateur judiciaire de vendre aux enchères publiques les biens mobiliers et le cheptel dépendant de la liquidation judiciaire, lequel, après avoir relevé les délais qui leur avaient déjà été accordés pour trouver une solution amiable a rejeté leur demande selon ordonnance rendue le 29 mars 2013.

Il est également établi que Mme [H] et M. [O] ont été poursuivis pour avoir utilisé et vendu des actifs de l’entreprise liquidée afin de continuer l’activité par jugement du 21 février 2017, le tribunal correctionnel de Tarbes ayant rendu un jugement de condamnation le 21 février 2017 et la cour d’appel de Pau relaxant Mme [H] selon arrêt du 9 mai 2019, cette procédure ayant également contribué à l’allongement du délai de la procédure collective du fait des débiteurs.

Il se déduit de l’ensemble de ces éléments que la procédure collective a été particulièrement complexe et longue du fait notamment du comportement de la débitrice qui s’est opposée à la réalisation de certains actifs, a payé des créanciers en dehors de toute autorisation pour le faire, a initié des procédures et exercé les voies de recours lui étant ouvertes.

Les délais résultant de l’exercice de ces droits ne peuvent constituer un déni de justice imputable à l’Etat.

Enfin, comme indiqué pour la faute lourde, aucun déni de justice ne peut résulter d’une éventuelle inaction des organes de la procédure collective dont la responsabilité civile professionnelle est indépendante de celle de l’Etat.

En l’absence de faute lourde caractérisant un fonctionnement défectueux du service public de la justice et de déni de justice, il y a lieu de confirmer le jugement de ces chefs.

Sur la demande de clôture de la liquidation judiciaire

Le tribunal a jugé que seul le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Tarbes peut saisir le tribunal de grande instance de cette même ville aux fins de clôture de la procédure collective et qu’il ne lui revenait pas de faire injonction au ministère public d’adopter des réquisitions par lui déterminées ou d’opérer des diligences relevant de son propre pouvoir d’initiative et d’appréciation.

Mme [H] soutient que la clôture de la procédure collective est de droit et demande par conséquent à la cour de faire application de la jurisprudence de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales interprétée par la cour d’appel de Douai dans son arrêt du 19 janvier 2017 (RG du jugement 15/07169), soulignant que le ministère public intervenant à l’instance rien ne s’y oppose.

L’agent judiciaire de l’Etat fait valoir que la demande de clôture d’une liquidation judiciaire ne peut qu’être rejetée, la présente juridiction n’étant pas saisie de cette liquidation et la demande ne relevant pas de la compétence de l’agent judiciaire de l’Etat.

Si le débiteur peut à tout moment saisir le tribunal d’une demande de clôture de la liquidation judiciaire, par application de l’article L.643-9 du code de commerce, en revanche seul le tribunal qui a ouvert la procédure collective est compétent pour le faire, de sorte que la présente cour n’a pas le pouvoir juridictionnel d’y procéder.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit que la présente cour n’a pas le pouvoir juridictionnel de procéder à la clôture de la liquidation judiciaire ouverte à l’égard de Mme [Z] [H],

Condamne Mme [Z] [H] aux dépens d’appel avec droit de recouvrement au profit de maître Laure Archambault, avocat, pour les frais dont elle aurait fait l’avance, conformément à l’article 699 du code de procédure civile

Condamne Mme [Z] [H] à payer à l’agent judiciaire de l’Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

 


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