Production Audiovisuelle : 16 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00580

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Production Audiovisuelle : 16 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00580

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 34E

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 MAI 2023

N° RG 22/00580

N° Portalis DBV3-V-B7G-U7D3

AFFAIRE :

S.A.S. RENOVABAT

C/

[U] [M]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Décembre 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 202101026

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Frédérique THUILLEZ

Me Guillaume NICOLAS

TC NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S. RENOVABAT

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Frédérique THUILLEZ, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 513

Représentant : Me Nicolas PINTO, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Madame [U] [M]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Guillaume NICOLAS de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 255 – N° du dossier 220304

Représentant : Me Johann BOUSKILA de l’AARPI COVER AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 Mars 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique MULLER, Magistrat honoraire chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Madame Véronique MULLER, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

Mme [U] [M] est associée à hauteur de 30% de la SAS Renovabat, société spécialisée dans la réalisation de travaux d’isolation et d’installation d’équipements thermiques.

Le 27 avril 2020, la société Renovabat a convoqué Mme [M] à l’assemblée générale annuelle du 12 mai 2020 appelée à statuer sur les comptes de l’exercice clos le 30 septembre 2019. Par lettre recommandée du 24 juin 2020, Mme [M] a soutenu ne pas avoir reçu de convocation, demandant à être de nouveau convoquée et informant la société qu’elle désignait son fils, M. [J] [M], comme mandataire à l’effet de la représenter.

Par lettre du 30 juin 2020, la société Renovabat a rappelé à Mme [M] qu’elle avait été régulièrement convoquée, que l’assemblée générale s’était bien tenue le 12 mai 2020, et que le procès-verbal de l’assemblée – accompagné de tous les documents présentés et d’un chèque de 72 390 euros en règlement des dividendes 2019 (après déduction de ses contraventions personnelles) – lui avait été adressé par lettre recommandée du 14 mai 2020, ce courrier lui ayant toutefois été retourné avec la mention ‘pli avisé, non réclamé’.

Par lettre du 18 décembre 2020, Mme [M] a mis en demeure la société Renovabat de lui régler la somme de 80 850 euros au titre des dividendes relatifs à l’exercice 2019. La société Renovabat a répondu, le 23 décembre 2020, qu’elle rencontrait des difficultés financières en raison de saisies conservatoires réalisées sur ses comptes par la société Isolidarité (dont le fils de Mme [M] est associé).

Le 9 mars 2021, la société Renovabat a toutefois versé la somme de 12 390 euros à Mme [M] à titre d’acompte sur dividendes.

Par ordonnance du 7 avril 2021 rendue sur requête de Mme [M], le président de tribunal de commerce de Nanterre a autorisé, au titre des dividendes, la saisie conservatoire de la somme de 80 850 euros sur les comptes bancaires de la société Renovabat.

Par jugement contradictoire du 15 décembre 2021, le tribunal de commerce de Nanterre, saisi le 17 mai 2021 sur assignation délivrée à la société Renovabat à l’initiative de Mme [M], a :

– condamné la société Renovabat à payer à Mme [M] la somme de 68 460 euros, outre les intérêts calculés au taux légal à compter du 18 décembre 2020 ;

– ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions posées à l’article 1343-2 du code civil;

– débouté la société Renovabat de sa demande de mainlevée de la saisie conservatoire de 80 850 euros autorisée par le président de ce tribunal ;

– débouté la société Renovabat de sa demande de paiement en 12 mensualités du solde des dividendes ;

– débouté Mme [M] de sa demande visant à voir la société Renovabat condamnée à lui payer la somme de 10 000 euros pour résistance abusive ;

– condamné Mme [M] à payer à la société Renovabat la somme d’un euro à titre de dommages et intérêts ;

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société Renovabat aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration du 27 janvier 2022, la société Renovabat a interjeté appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 18 octobre 2022, la société Renovabat demande à la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il a :

* condamné la société Renovabat à payer à Mme [M] la somme de 68 460 euros, outre les intérêts calculés au taux légal à compter du 18 décembre 2020 ;

* ordonné la capitalisation des intérêts ;

* débouté la société Renovabat de sa demande de paiement en 12 mensualités du solde des dividendes;

* limité la condamnation de Mme [M] au profit de la société Renovabat à un euro à titre de dommages et intérêts ;

* dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la société Renovabat aux dépens ;

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

– juger Mme [M] irrecevable et à tout le moins mal fondée en ses demandes ;

– débouter Mme [M] de l’ensemble de ses demandes ;

– ordonner la restitution par Mme [M] des sommes saisies dans le cadre de l’exécution provisoire de la décision attaquée ;

A titre subsidiaire,

– juger que le solde des dividendes demandés par Mme [M] ne peut être supérieur à la somme de 60 000 euros ;

– ordonner la restitution par Mme [M] des sommes saisies dans le cadre de l’exécution provisoire de la décision attaquée, soit le montant de 47 457,82 euros ;

– juger que la société Renovabat pourra s’acquitter du solde du montant de ses dividendes en 12 mensualités de 5 000 euros chacune ;

A titre très subsidiaire,

– juger que les sommes saisies par Mme [M] dans le cadre de l’exécution provisoire du jugement déféré viendront en déduction du montant des dividendes réclamés ;

En tout état de cause,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [M] de ses demandes de dommages et intérêts et au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que Mme [M] a commis une faute engageant sa responsabilité envers la société Renovabat en favorisant la société Isolidarité dans un litige les opposant;

En conséquence, statuant à nouveau,

– condamner Mme [M] à payer à la société Renovabat la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– débouter Mme [M] de ses demandes d’intérêts au taux légal ;

– condamner Mme [M] à payer à la société Renovabat la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont les frais d’huissier liés aux différentes saisies qu’elle a fait pratiquer sur les comptes de la société Renovabat.

Mme [M], dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 19 juillet 2022, demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a :

* condamné la société Renovabat à payer à Mme [M] la somme de 68 460 euros, outre les intérêts calculés au taux légal à compter du 18 décembre 2020 ;

* ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions posées à l’article 1343-2 du code civil;

* débouté la société Renovabat de sa demande de mainlevée de la saisie conservatoire de 80 850 euros;

* débouté la société Renovabat de sa demande de paiement en 12 mensualités du solde des dividendes dus ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a :

* débouté Mme [M] de sa demande visant à voir la société Renovabat condamnée à lui payer la somme de 10 000 euros pour résistance abusive ;

* condamné Mme [M] à payer à la société Renovabat la somme d’un euro à titre de dommages et intérêts ;

* dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile et débouté les parties de ce chef ;

Et statuant à nouveau,

– déclarer Mme [M] recevable et bien fondée en ses demandes;

– constater l’absence de faute contractuelle commise par Mme [M] ;

– constater la résistance abusive de la société Renovabat dans le paiement de la créance de Mme [M];

– débouter la société Renovabat de l’ensemble de ses demandes ;

En conséquence,

– condamner la société Renovabat à régler à Mme [M] la somme de 68 460 euros à titre de dividendes distribués lors de l’assemblée générale annuelle du 12 mai 2020 augmenté de l’intérêt légal de retard à compter du 18 décembre 2020 ;

– ordonner la capitalisation des intérêts ;

– condamner la société Renovabat à payer la somme de 10 000 euros pour résistance abusive ;

En tout état de cause,

– condamner la société Renovabat à payer à Mme [M] la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société Renovabat aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

1 – sur la demande principale de Mme [M] en paiement de dividendes

La société Renovabat fait en premier lieu valoir que le litige n’existerait pas si Mme [M] avait retiré les courriers recommandés qui lui ont été adressés, notamment le courrier du 14 mai 2020 contenant le chèque de 72 390 euros en paiement de ses dividendes, ajoutant que celle-ci est à l’origine du blocage de sa trésorerie (transmission par Mme [M] d’un courrier aboutissant au rejet de sa demande de main-levée de la saisie pratiquée sur ses comptes bancaires). Elle soutient – sur le fondement de l’adage selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude – que ce comportement de Mme [M], caractérisant une intention de nuire, est une cause d’irrecevabilité, et à tout le moins de mal fondé de sa demande en paiement, sollicitant dès lors le débouté des demandes et le remboursement des sommes saisies dans le cadre de l’exécution provisoire du jugement. Elle soutient, à titre subsidiaire, que le quantum de la demande en paiement est erroné, en ce qu’elle est fondée à opérer une compensation avec le montant des contraventions de stationnement du véhicule de société utilisé par le fils de Mme [M] (pour 8 460 euros). Elle soutient ainsi qu’elle ne peut tout au plus être redevable que de la somme de 60000 euros.

Mme [M] rappelle que le délai de mise en paiement des dividendes est de neuf mois après la clôture de l’exercice, et qu’il est échu depuis juin 2020. Elle sollicite la confirmation du jugement qui a condamné la société Renovabat au paiement de la somme de 68 460 euros, faisant valoir que l’adage invoqué par cette dernière est hors de propos, et que l’existence même de la créance de dividendes n’est pas contestée. S’agissant du montant de cette créance, Mme [M] s’oppose à toute compensation avec des avis de contravention uniquement adressés au représentant légal de la société Renovabat, de sorte qu’ils ne peuvent lui être imputés.

La société Renovabat ne conteste pas le principe même de la créance de dividendes de Mme [M], qu’elle avait au demeurant reconnue en lui adressant initialement un chèque en règlement de ces derniers. Son refus de paiement est uniquement motivé par l’attitude de Mme [M] qui aurait fait obstacle au paiement des dividendes.

Le fait que Mme [M] ait omis de retirer le courrier recommandé du 14 mai 2020 contenant le chèque de 72 390 euros constitue une simple négligence qui ne peut avoir pour conséquence, ni de rendre irrecevable la demande en paiement, ni de justifier le refus de paiement de la société Renovabat

S’agissant du litige opposant les sociétés Renovabat et Isolidarité, la seconde (dans laquelle le fils de Mme [M] est associé) a fait l’objet d’un redressement fiscal d’un montant de 355 960 euros du fait d’un défaut de paiement de TVA (TVA réglée à tort à la société Renovabat au titre de diverses prestations facturées par celle-ci, alors qu’elle aurait dû être réglée directement au Trésor public). La société Isolidarité, ne parvenant pas à obtenir restitution de la TVA réglée à tort à la société Renovabat, a fait pratiquer une saisie conservatoire sur ses comptes bancaires selon ordonnance rendue le 12 novembre 2020 par le président du tribunal de commerce de Nanterre. Le 13 janvier 2021, la société Renovabat a assigné la société Isolidarité en rétractation de cette ordonnance et main-levée de la saisie pratiquée le 27 novembre 2020. Par ordonnance du 31 mars 2021, le président du tribunal de commerce de Nanterre a, pour l’essentiel, confirmé l’ordonnance et refusé d’ordonner la main-levée de la saisie pratiquée sur le compte bancaire de la société Renovabat.

Dans sa décision du 31 mars 2021, le président du tribunal de commerce motive le refus de rétractation, et l’existence d’une menace sur le recouvrement de la créance de la société Isolidarité, en se fondant notamment sur un échange de courrier entre Mme [M] et la société Renovabat relatif à ses difficultés de trésorerie liées à l’importance des bénéfices distribués, dont certains n’ont pas encore été réglés.

S’il est pour le moins surprenant que cet échange de courrier ait été communiqué par Mme [M] à la société Isolidarité qui l’a ensuite transmis au tribunal, il n’en reste pas moins que cette attitude de Mme [M] – qui a certes pu contribuer au rejet de la demande de main-levée de la saisie, et aux difficultés de trésorerie de la société Renovabat, ce qui sera examiné plus avant – n’a pour effet, ni de rendre sa demande irrecevable, ni de justifier le refus de paiement d’une créance qui n’est pas contestée en son principe.

S’agissant du quantum de la demande en paiement et de la compensation opposée par la société Renovabat, la cour observe que les avis de contravention dont celle-ci se prévaut sont tous établis au nom du ‘représentant légal de la société Renovabat’. Cette société soutient que Mme [M] lui aurait emprunté un véhicule pour en faire profiter son fils qui serait le véritable auteur des contraventions de stationnement (adresse de contravention correspondant au domicile de ce dernier). Il est toutefois constant que le véhicule appartient à la société Renovabat, et il n’est pas justifié des conditions d’un éventuel prêt à son associée, notamment quant au paiement des événtuelles contraventions, de sorte que celui-ci ne peut être imputé à Mme [M].

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Renovabat à payer à Mme [M] la somme de 68 460 euros (soit 80 850 euros – 12 390 euros d’acompte) au titre des dividendes, outre intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 2020 conformément à l’article 1231-6 du code civil, et capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du même code.

La société Renovabat sollicite d’une part l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de délais de paiement, d’autre part la restitution des sommes saisies au titre de l’exécution provisoire du jugement, et ce au motif que sa trésorerie reste bloquée par la faute de Mme [M] qui a fait obstacle à la main-levée de la saisie pratiquée sur ses comptes à la demande de la société Isolidarité.

La société Renovabat ne produit toutefois aucun élément permettant de constater l’état actuel de sa trésorerie et ses éventuelles difficultés actuelles, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté sa demande de délais de paiement. Il n’y a pas lieu non plus à restitution des sommes saisies en exécution du jugement.

Le jugement sera enfin confirmé en ce qu’il a débouté la société Renovabat de sa demande de main-levée de la saisie-conservatoire de 80 850 euros, aucune demande d’infirmation n’étant présentée à ce titre.

2 – sur la demande reconventionnelle formée par la société Renovabat

La société Renovabat sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a constaté l’existence d’une faute imputable à Mme [M], mais l’infirmation sur le quantum de son préjudice, sollicitant à ce titre paiement d’une somme de 25 000 euros, au lieu de la somme de 1 euro allouée par le premier juge. Elle fait valoir que Mme [M] a agi avec déloyauté, d’une part en intervenant en faveur de la société Isolidarité dans le litige la concernant, d’autre part en pratiquant une saisie conservatoire dans la présente instance, ce qui a eu pour effet de bloquer à nouveau sa trésorerie. Elle fait valoir qu’elle a été contrainte de contracter des emprunts et facilités de caisse pour ne pas déposer le bilan.

Mme [M] soutient qu’elle n’était liée par aucune obligation de confidentialité à l’égard de la société Renovabat, de sorte qu’elle n’a fait preuve d’aucune déloyauté en communiquant à son fils, associé de la société Isolidarité, le courrier de la société Renovabat du 23 décembre 2020 relatif à ses difficultés de trésorerie.

Le 23 décembre 2020, la société Renovabat a répondu à une mise en demeure de Mme [M] en lui indiquant notamment : ‘la situation financière de notre société s’est compliquée, comme vous le savez, puisque la société Isolidarité, dans laquelle votre fils est associé, s’est permise de saisir nos comptes à titre conservatoire pour un montant exorbitant. De ce fait, nos comptes sont bloqués et la société n’est plus en capacité, tant que la contestation qui découle de cette saisie conservatoire n’aurait (sic) pas été traitée judiciairement, de faire de nouveaux paiements (…) D’ailleurs, en dépit des liens familiaux qui vous unissent, il serait contraire aux intérêts de la société Renovabat que vous divulguiez toute information dont vous bénéficiez en qualité d’associé à votre fils en raison du conflit d’intérêt qui nous oppose sur un plan commercial. Je me vois donc contraint de vous rappeler qu’un associé, s’il veut bénéficier de droits, doit respecter ses devoirs envers la société et la loyauté envers elle me semble le premier d’entre eux. Je vous demande donc de mettre fin à vos démarches visant à laisser votre fils s’immiscer dans nos affaires (…)’.

Dans son ordonnance du 31 mars 2021 – rejetant la demande de main-levée de la saisie opérée par la société Isolidarité sur les comptes de la société Renovabat – le juge cite ce courrier de la société Renovabat du 23 décembre 2020 (transmis par Mme [M] à son fils) relatif à ses difficultés de trésorerie.

En communiquant à une société tierce, en litige avec la société Renovabat dont elle est associée, un courrier relatif aux difficultés de trésorerie de cette dernière qui sont des éléments confidentiels, Mme [M] a fait preuve d’une déloyauté certaine, ce d’autant plus que la société Renovabat l’avait précisément mise en garde contre toute divulgation d’informations confidentielles. C’est ainsi à bon droit que le premier juge a retenu l’existence d’une faute imputable à Mme [M].

Il résulte de la motivation de l’ordonnance du 31 mars 2021 que la transmission déloyale du courrier de la société Renovabat, établissant ses difficultés de trésorerie, a été l’un des motifs par lequel le juge s’est déterminé pour rejeter la demande de main-levée de la saisie, contribuant ainsi aux difficultés financières de la société Renovabat, dont elle atteste par la production de justificatifs bancaires de facturation d’intérêts débiteurs.

Au regard des seuls éléments produits, la cour fixera le préjudice subi par la société Renovabat, en lien avec la déloyauté de Mme [M], à la somme de 3 000 euros. Mme [M] sera donc condamnée au paiement de cette somme à titre de dommages et intérêts, le jugement étant infirmé de ce chef.

3 – sur la demande indemnitaire au titre de la résistance abusive

Mme [M] sollicite paiement d’une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, soutenant que la société Renovabat est un débiteur de mauvaise foi qui s’est organisé afin d’entraver le paiement des dividendes, faisant notamment valoir l’augmentation conséquente du salaire de son dirigeant pendant qu’elle refusait le paiement des dividendes.

Il a été démontré que les difficultés de trésorerie rencontrées par la société Renovabat étaient réelles, notamment en raison de la saisie pratiquée sur ses comptes bancaires par la société Isolidarité pour un montant de plus de 300 000 euros, de sorte que la résistance manifestée dans le paiement des dividendes de Mme [M] ne peut être qualifiée d’abusive. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 15 décembre 2021 sauf en ce qu’il a condamné Mme [U] [M] au paiement de la somme d’un euro à titre de dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne Mme [U] [M] à payer à la société Renovabat la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

Déclare recevable la demande de Mme [U] [M],

Rejette toutes autres demandes en ce compris les demandes de frais irrépétibles,

Condamne la société Renovabat aux dépens de la procédure d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Conseiller faisant fonction de Président,

 


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