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N° E 21-80.726 F-D
N° 00040
ECF
12 JANVIER 2022
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 12 JANVIER 2022
M. [E] [T], M. [L] [B] et Mmes [S] et [M] [Y] ont formé des pourvois contre l’arrêt de la cour d’appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 10 décembre 2020, qui a condamné, le premier, pour abus de confiance et détournement de bien public, à deux ans d’emprisonnement avec sursis probatoire, à 10 000 000 XPF d’amende et à cinq ans d’interdiction de droit de vote et d’éligibilité, le deuxième, pour détournement de bien public, à 1 000 000 XPF d’amende, la troisième pour recel à 5 000 000 XPF d’amende, la quatrième, pour recel, à 10 000 000 XPF d’amende, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Planchon, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, de la SCP Célice, Texidor, Périer et de la SCP Piwnica et Molinié, avocats de Mmes [S] et [M] [Y], M. [L] [B] et M. [E] [T], et les conclusions de Mme Zientara-Logeay, avocat général, après débats en l’audience publique du 1er décembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Planchon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 30 novembre 2009, à la suite d’une dénonciation anonyme parvenue le même jour, le procureur de la République a ordonné une enquête préliminaire concernant les conditions dans lesquelles la commune de […] a pris en charge entre 1989 et 2008, la construction, le fonctionnement et les consommations d’eau de la station de pompage située dans la vallée de la […] située sur le territoire de cette commune mais destinée à alimenter, entre 1989 et 2008, d’abord l’habitation de M. [T], ancien maire de […] et ancien président de la […], puis celles de dix-sept bénéficiaires, dont Mmes [S] et [M] [Y], tous demeurant sur la commune voisine d'[…] et n’ayant jamais réglé de facture à ce titre alors que les frais d’alimentation en eau ont été évalués à 190 000 000 XPF.
3. M. [B], maire de […], qui a succédé à M. [T] qui est son beau-père, a reconnu ne pas avoir mis fin à cette situation et avoir ainsi indûment dépensé une somme de 49 000 000 XFP.
4. Le 30 août 2013, à l’issue de l’enquête préliminaire, le procureur de la République a ouvert une information des chefs de prise illégale d’intérêts et recel de ce délit visant, notamment, M. [T], l’information ayant été étendue, le 9 janvier 2014, à des faits de détournements de biens publics.
5. A l’issue de l’information, le juge d’instruction a ordonné le renvoi de M. [T] devant le tribunal correctionnel pour avoir à […] et […], d’une part, de 1989 au 1er mars 1994, détourné les moyens matériels et humains de la mairie de […], et les fonds de cette mairie, en faisant effectuer des travaux d’installation, d’entretien et de réparation d’un système de pompage et d’adduction d’eau destiné à sa maison et en faisant payer par la mairie de […] les factures d’électricité de la station de captage qui alimentait ledit système, qui lui avaient été remis, et qu’il avait acceptés à charge de les rendre ou d’en faire un usage déterminé dans le cadre de son mandat de maire, et ce au préjudice de ladite commune, d’autre part, de 1994 à avril 2001, étant dépositaire de l’autorité publique en sa qualité de maire de la commune de […], détourné ou soustrait des fonds publics et un bien qui lui avaient été remis en raison de sa fonction ou de sa mission en installant un système, une infrastructure de pompage et d’adduction d’eau destiné à alimenter en eau gratuitement sa résidence personnelle puis celle d’autres administrés de la commune d'[…] et en faisant supporter indûment par le budget communal, d’une part, des dépenses de matériel et de rémunération de personnels municipaux affectés à la réalisation des travaux et pose des canalisations d’eau sur des terrains situés sur la commune d'[…] et, d’autre part, des dépenses d’entretien et d’électricité de la station de pompage du site […], et fourni ainsi gratuitement une certaine quantité d’eau.
6. M. [B] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir à […], de mai 2001 à avril 2008, étant dépositaire de l’autorité publique en sa qualité de maire de la commune de […], détourné ou soustrait des fonds publics et un bien qui lui avaient été remis en raison de sa fonction ou de sa mission en l’espèce en laissant gratuitement à disposition de M. [T] et d’autres administrés de la commune de […] une infrastructure de pompage et d’adduction d’eau et en faisant supporter indûment par le budget communal des dépenses d’entretien et d’électricité de la station de pompage du site […].
7. Mme [M] [Y] a été renvoyée devant le tribunal correctionnel pour avoir à […] et […], entre 1998 et fin 2008, sciemment recelé un système d’infrastructure de pompage, d’adduction et d’alimentation en eau qu’elle savait provenir d’un délit de détournement de biens publics commis au préjudice de la commune de […] et ainsi bénéficié gratuitement d’un circuit de pompage et d’adduction d’eau dont les frais de fonctionnement étaient indûment imputés au budget communal de […].
8. Mme [S] [Y] a été renvoyée devant le tribunal correctionnel pour des faits de recel d’abus de confiance commis de 1989 au 1er mars 1994 et pour des faits de recel de détournement de fonds publics commis entre le 1er mars 1994 et fin 2008.
9. Par jugement du 27 juin 2019 à l’encontre duquel les demandeurs ont interjeté appel, le tribunal correctionnel, après avoir écarté les exceptions de nullités et de prescription de l’action publique invoquées par les prévenus, a, notamment, déclaré ces derniers coupables des faits objet de la prévention et les a condamnés pénalement.
10. Sur l’action civile, les premiers juges ont déclaré recevable la constitution de partie civile de la commune de […] et ont condamné les prévenus à indemniser celle-ci du préjudice par elle subi.
Examen des moyens
Sur les deuxième moyen, pris en sa quatrième branche, troisième moyen, quatrième moyen, cinquième moyen, pris en sa seconde branche et sixième moyen proposés pour M. [T], deuxième moyen, dont la première branche est reprise par M. [T], et troisième moyen, pris en sa seconde branche proposés pour M. [B] et le moyen unique proposé pour Mmes [M] et [S] [Y]
11. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen proposé pour M. [T]
Enoncé du moyen
12. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a rejeté l’exception de prescription de l’action publique, alors « que l’article 4 de la loi du 27 février 2017 est contraire aux exigences relatives à la prescription de l’action publique qui découlent des articles 8 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, aux principes de légalité et de la séparation des pouvoirs qui découlent de l’article 34 de la Constitution, et au principe de précision, d’intelligibilité et de prévisibilité de la loi qui découle des articles 34 de la Constitution, 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, en ce qu’est exclue l’application immédiate de la disposition nouvelle plus douce de prescription de douze ans à compter de la commission de l’infraction occulte ou dissimulée, aux faits commis antérieurement et donnant lieu à la présente procédure ; que l’annulation par le Conseil constitutionnel saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, en application de l’article 61-1 de la Constitution, de ces dispositions, privera de base légale l’arrêt attaqué. »