Production Audiovisuelle : 11 janvier 2023 Cour d’appel de Bastia RG n° 22/00042

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Production Audiovisuelle : 11 janvier 2023 Cour d’appel de Bastia RG n° 22/00042

Chambre civile

Section 2

ARRÊT N°

du 11 JANVIER 2023

N° RG 22/00042

N° Portalis DBVE-V-B7G-CC4U JJG – C

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance Référé, origine Président du TJ d’ajaccio, décision attaquée en date du 11 Janvier 2022, enregistrée sous le n° 21/00310

[K]

C/

SDC LES RESIDENCES DE SANTA LINA

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU

ONZE JANVIER DEUX-MILLE-VINGT-TROIS

APPELANT :

M. [P], [T] [K]

né le 20 Avril 1960 à [Localité 3] (SYRIE)

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Stéphane RECCHI de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barreau d’AJACCIO plaidant en visioconférence

INTIMÉ :

Syndicat des copropriétaires LES RESIDENCES DE SANTA LINA représenté par son syndic, la SOCIÉTÉ DE GESTION IMMOBILIÈRE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Anne-Marie LEANDRI de la SCP LEANDRI LEANDRI, avocate au barreau d’AJACCIO plaidant en visioconférence

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 3 novembre 2022, devant Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Jacques GILLAND, président de chambre

Judith DELTOUR, conseillère

Stéphanie MOLIES, conseillère

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Françoise COAT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2023.

ARRÊT :

Contradictoire,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Elorri FORT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

Par acte d’huissier du 23 novembre 2021, M. [P] [K] a assigné le Syndicat des copropriétaires des résidences de Santa Lina par-devant le président du tribunal judiciaire d’Ajaccio statuant en référé d’heure à heure aux fins qu’il soit procédé au remplacement de l’expert judiciaire, M. [J] [N], désigné par ordonnance du 26 octobre 2021, qui ne disposerait pas des compétences utiles pour remplir sa mission, qui aurait par le passé été sanctionné dans le cadre d’un conflit d’intérêts et qui se trouverait dans la même situation, son fils ayant eu des relations commerciales avec lui.

Par ordonnance du 11 janvier 2022, le président du tribunal judiciaire d’Ajaccio, statuant en référé, a rejeté la demande présentée et a condamné M. [P] [K] au paiement des entiers dépens et de la somme de 700 euros au Syndicat des copropriétaires des Résidence de Santa Lina en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe du 21 janvier 2022, M. [P] [K] a interjeté appel de l’ordonnance prononcée en ce qu’elle a :

– rejeté la demande en dessaisissement de l’expert judiciaire monsieur [J] [N] en ce qu’il n’est pas inscrit sur la liste des experts dans les matières de

compétence qui lui ont été confiées et récusation en ce que le juge a refusé de faire

application de l’article 234 du code de procédure civile et en ce que le juge a refusé de procéder à la désignation d’un architecte en remplacement de l’expert.

Par conclusions déposées au greffe le 15 mars 2022, le Syndicat des copropriétaires des Résidences de Santa Lina a demandé à la cour de :

Débouter M. [K] en ses demandes ;

Confirmer la décision appelée ;

Condamner M. [K] à verser au syndicat principal des copropriétaires de la résidence

Santa LINA la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

SOUS TOUTES RÉSERVES.

Par conclusions déposées au greffe le 24 mai 2022, M. [P] [K] a demandé à la cour de :

Infirmer l’ordonnance de référé en date du 11.01.2022,

Vu les articles 234 et 235 du CPC,

Procéder au remplacement de l’expert [N] par tel expert qu’il plaira à la cour de désigner, éventuellement même, hors le ressort de la Cour de Bastia.

Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence SANTA LINA à payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du CPC et les entiers dépens de l’instance.

SOUS TOUTES RÉSERVES.

Par ordonnance du 3 octobre 2022, la procédure a été clôturée et fixée à plaider 3 novembre 2022.

Le 3 novembre 2022, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2023.

La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait, en application de l’article 455 du code de procédure civile, expressément référence à la décision entreprise ainsi qu’aux dernières conclusions notifiées par les parties.

SUR CE

Pour statuer comme il l’a fait le premier juge a considéré que la désignation d’un expert relevait du pouvoir discrétionnaire du juge, que l’expert désigné avait toute compétence

pour explorer les causes des désordres invoqués et qu’il n’y avait aucune démonstration de l’existence d’un conflit d’intérêts entre le demandeur et l’expert judiciaire désigné.

* Sur l’irrecevabilité de la demande en raison du dépôt du rapport d’expertise

L’intimé fait valoir que le rapport d’expertise ayant été déposé, le demande de récusation présentée serait, d’après une jurisprudence constante, irrecevable.

S’il est réel que cette jurisprudence existe, elle ne s’applique qu’à la demande de récusation présentée postérieurement au dépôt du rapport d’expertise et non, comme en l’espèce, quand la demande de récusation est formalisée antérieurement, la demande de M. [P] [K] ayant été présentée par le 23 novembre 2021 et le rapport déposé le 18 janvier 2022.

Il convient de rejeter cette irrecevabilité.

* Sur la compétence de l’expert

Il ressort de la mission de l’expert judiciaire, selon le dispositif de l’ordonnance du 26 octobre 2021, que M. [J] [N] devait indiquer si les désordres revendiqués par M. [P] [K] existent, éventuellement les décrire et en rechercher l’origine, décrire les travaux réalisés par M. [P] [K], donner son avis sur leur finalité, s’ils avaient pour but de remédier aux désordres invoqués, s’ils respectent l’état de division et s’il y apportent des modifications et indiquer, en cas de modifications les travaux de remise en état nécessaire.

M. [P] [K] a dénoncé l’existence de problèmes d’évacuation d’eaux sur son lot, la Syndicat des copropriétaires dénonce de son côté le commencement de travaux entraînant le changement de destination d’une partie du lot de l’appelant, ce dernier les niant alors que le premier juge a estimé que cette réalité était démontré par la production de photographies et s’interrogeait sur le rapport entre le début de ces travaux et la résolution des problèmes d’évacuation d’eaux invoqués.

Pour réaliser l’expertise judiciaire, le premier juge a désigné M. [J] [N], expert inscrit sur la liste de la cour d’appel dans le rubrique «Plomberie, sanitaire, robinetterie, eau gaz», ce dernier faisant valoir les qualifications suivantes «Diplôme d’artisan Plombier, Diplôme de Maître-artisan Plombier, Certificat Cofrac Etat des installations intérieures de gaz Attestation Qualigaz Validation des connaissances gaz, Médaille de la reconnaissance artisanale, Certificat Qualibat Ramonage (technicité confirmée), Certificat Qualixpert Etat des installations intérieures de gaz, Formation COSTIC Conduits de fumée. Ramonage et fumisterie, Formation Chambre des Métiers et de l’Artisanat Document technique unifié.

Formation ENR Consulting Diagnostic, entretien et dépannage d’un installation de poêle et insert granulé, Formation SIPLAST ICOPAL Initiation étanchéité du bâtiment, Attestation de stage Bureau d’études Salini Pathologies des constructions, Formation

Compagnie des Experts Judiciaires Bastia 2005, 2006, 2007, 2009», ce qui n’apparaît pas particulièrement en adéquation avec les désordres revendiqués et les modification de l’état de division dénoncées.

Cependant, il est constant que le recours à une expertise judiciaire relève du pouvoir souverain du juge du fond qui, conformément à l’article 144 du code de procédure civile, peut l’ordonner, en tout état de cause, et à la libre choix de la désignation de l’expert pour l’exécution d’une mesure d’instruction relevant de son pouvoir discrétionnaire.

En conséquence, le fait que M. [J] [N] ait été désigné alors que le litige entre les parties relève plus d’un problème de structure du bâti que d’un dysfonctionnement du système de plomberie, n’est en rien sujet à modification, même si cela est étonnant, toute critique du travail de l’expert pouvant donner lieu à une demande de contre-expertise sur ce fondement de son inadaptation intellectuelle au litige existant.

M. [P] [K], outre ses doutes sur l’adéquation des compétences de l’expert choisi avec le litige opposant les parties, fonde sa demande sur les dispositions de l’article 234 du code de procédure civile et, notamment, sur l’existence d’un conflit d’intérêts entre lui-même et l’expert désigné.

La cause de récusation est appréciée souverainement par le juge du fond. Il convient de préciser que l’article 341 code de procédure civile, auquel renvoie l’article 234 prévoyant des cas de récusation, n’épuise pas nécessairement l’exigence d’impartialité requise de tout expert judiciaire.

Pour ce faire, M. [P] [K] évoque l’existence d’un conflit d’intérêt entre lui-même et l’expert désigné, à savoir que le fils de ce dernier l’aurait sollicité pour commercialiser une résidence, proposition à laquelle l’appelant n’aurait pas donné suite.

Pour justifier de cette réalité, M. [P] [K] produit une attestation qu’il a établi lui-même et qui ne démontre rien, les preuves faites à soi-même n’ayant pas de valeur probante.

Rien d’autre n’est avancé pour justifier du conflit d’intérêt revendiqué, mis à part que l’expert judiciaire désigné aurait par le passé était radié de la liste des experts de la cour d’appel en raison d’un conflit d’intérêts avéré. Si cet élément est troublant, il convient de relever qu’au moment de sa désignation M. [J] [N] était bien inscrit sur le liste de la cour d’appel et faisant partie des experts judiciaires de cette juridiction, rendant ce moyen inopérant.

M. [P] [K] fait aussi valoir que la désignation de M. [J] [N], alors qu’il est âgé de plus de 70 ans, est irrégulière, la limite de l’âge légal pour un expert judiciaire étant dépassée.

Or s’il est vrai que l’article 2 7° du décret du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires dispose qu’une personne physique ne peut être inscrite ou réinscrite sur une liste d’experts que si elle est âgée de moins de 70 ans, cette condition s’apprécie au 1er janvier de l’année suivant celle de la présentation de la demande.

En l’espèce, M. [J] [N] a eu 70 ans en 2019, mais sa demande a été présentée et examinée en 2018, selon la liste des experts judiciaires consultables sur le site internet de la cour d’appel de Bastia ; son inscription était donc valable, ce moyen est rejeté.

M. [P] [K] fait valoir en dernier point un manquement à son devoir de loyauté de la part de M. [J] [N] qui a procédé aux opérations d’expertise, et les a même accélérées, alors qu’il savait que dans les jours prochains le président du tribunal judiciaire devait trancher une demande en récusation le concernant.

Cet élément ne peut servir de fondement à la présente demande, et ressort comme l’intimé le conclut, de la critique de l’expertise dans la cadre de l’instance au fond et peut justifier la demande et l’acceptation d’une contre-expertise.

Il convient donc de rejeter la demande présentée et de confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.

* Sur les demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

S’il est équitable de laisser à la charge t de M. [P] [K] les frais irrépétibles qu’il a engagés, il n’en va pas de même pour le Syndicat des copropriétaires ; en conséquence, il convient de débouter l’appelant de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et d’allouer, à ce titre, à l’intimé la somme de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Rejette l’irrecevabilité soulevée,

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute M. [P] [K] de l’ensemble de ses demandes,

Condamne M. [P] [K] au paiement des entiers dépens,

Condamne M. [P] [K] à payer au Syndicat des copropriétaires [Adresse 4], représenté par son syndic la Société de gestion immobilière, la somme de

3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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