Producteur délégué : décision du 31 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 21/03983
Producteur délégué : décision du 31 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 21/03983

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Le
Expédition exécutoire délivrée à :
Maître Hocquet, vestiair P329
Copie certifiée conforme délivrée à :
– Maître Klugman, vestiaire R26

3ème chambre
3ème section

N° RG 21/03983 –
N° Portalis 352J-W-B7F-CUAL6

N° MINUTE :

Assignation du :
11 mars 2021

JUGEMENT
rendu le 31 janvier 2024
DEMANDERESSE

S.A.S. PAIVA FILMS
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Patrick KLUGMAN de l’AARPI GRINAL KLUGMAN AUMONT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0026

DÉFENDEURS

S.A.S. CENTAURE
[Adresse 3]
[Localité 6]

Monsieur [W] [Z] [R]
dit “[B]”
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentés par Maître Claire HOCQUET de la SCP RAPPAPORT HOCQUET SCHOR, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0329

Décision du 31 Janvier 2024
3ème chambre 3ème section
N° RG 21/03983 – N° Portalis 352J-W-B7F-CUAL6

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jean-Christophe GAYET, premier vice-président adjoint
Anne BOUTRON, vice-présidente
Linda BOUDOUR, juge

assistés de Lorine MILLE, greffière,

DEBATS

A l’audience du 26 octobre 2023 tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société par actions simplifiée Païva films (ci-après « Païva ») est une société de production.
Monsieur [W] [Z] [R] dit « [B] » est un humoriste, acteur, scénariste, metteur en scène et réalisateur. Il est le gérant de la société à responsabilité limitée de production Centaure.
Dans le cadre d’un partenariat envisagé entre la société Païva d’une part et la société Centaure et M. [Z] [R] d’autre part pour le développement de projets audiovisuels ont été conclus entre les parties divers contrats de coproduction et de cession de droits d’auteurs, comme suit:
– Le 27 juillet 2017, un contrat de coproduction relatif au film « Mauvaises herbes » conclu entre la société Païva et la société Centaure ;
– Le 28 février 2018, une lettre-accord cadre prévoyant d’une part entre la société Païva et la société Centaure et d’autre part entre la société Païva et [B] des partages de rémunérations et produits d’exploitation générés par tous projets cinématographiques développés par les parties, acte modifié par la lettre accord cadre du 24 décembre 2018;
– Le 5 juin 2018, un “contrat de cession de droits d’auteur scenario” relatif au scenario du film « Brutus » conclu entre la société Païva et M. [Z] [R], modifié par avenant du 26 mai 2019;
– Le 27 août 2018, un contrat de coproduction relatif au film « Brutus » conclu entre la société Païva et la société Centaure et modifié par avenant du 27 mai 2019;
– Le 25 mai 2019, un “contrat de cession de droits réalisateur long métrage” relatif au film « Brutus », conclu entre la société Païva et M. [Z] [R] et modifié par avenantd du 10 juillet 2020.

La société Païva a émis dans ce cadre entre les 1er et 31 janvier 2021 quatre factures n°2101-002, 2101-005, 2101-006 et 2101-007, adressées à la société Centaure, pour un montant total de 353 848 euros, la société Païva proposant par ailleurs, le 5 janvier 2021, à M. [Z] [R] et la société Centaure de procéder par compensation des sommes réciproquement dues entre les parties.
Par courrier recommandé du 12 février 2021, M. [Z] [R] a mis en demeure la société Païva par l’intermédiaire de son conseil de lui régler une somme de 240 000 euros en exécution du “contrat de cession de droits d’auteur scenario” relatif au film « Brutus » du 5 juin 2018 et de son avenant.
Par courrier recommandé du 17 février 2021, la société Païva a mis en demeure M. [Z] [R] et la société Centaure de lui régler la somme totale de 353 848 euros en paiement des quatre factures susvisées.
Par acte d’huissier du 11 mars 2021, la société Païva a fait assigner M. [Z] [R] et la société Centaure devant le tribunal judiciaire de Paris en paiement desdites factures.
Par ordonnance du 21 juin 2021, le juge des référés, saisi par M. [Z] [R] par actes des 25 mars et 22 avril 2021, a condamné la société Païva à lui payer à titre provisionnel la somme de 240 000 euros au titre du minimum garanti et de la rémunération forfaitaire pour l’écriture du scénario du film « Brutus » prévus par le contrat de cession de droits d’auteur du 5 juin 2018 ainsi que 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’instruction de l’affaire a été clôturée par une ordonnance du 12 janvier 2023 et l’affaire plaidée à l’audience du 26 octobre 2023.
Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 15 décembre 2022, la société Païva demande au tribunal de :
A titre principal,
Condamner solidairement la société Centaure et M. [Z] [R] à lui verser :
– la somme de 228 000 euros en paiement de la facture n° 2101-002 du 12 janvier 2021 ;
– la somme de 80 000 euros en paiement de la facture n° 2101-005 du 1er janvier 2021 ;
– la somme de 28 498 euros au titre de la facture n° 2101-007 du 31 janvier 2021 ;
– la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

Condamner M. [Z] [R] à lui verser la somme de 100 000 euros en restitution de la compensation SACD versée par la société Païva pour le film « Brutus »

A titre subsidiaire sur la demande de condamnation en restitution de la compensation SACD versée par Païva pour le film « Brutus »:
– Condamner M. [Z] [R] à lui verser la somme de 75.000 euros en restitution de la compensation SACD versée par la société Païva pour le film « Brutus » ;

En tout état de cause,
– Condamner la société Centaure et M. [Z] [R] chacun à lui verser la somme de 5000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Débouter la société Centaure et M. [Z] [R] de l’ensemble de leurs demandes ;
– Ordonner l’exécution provisoire du jugement à venir.

Par leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 janvier 2023, M. [Z] [R] et la société Centaure demandent au tribunal de :- Débouter la société Païva de toutes ses demandes
– Condamner la société Païva à verser à la société Centaure à M. [Z] [R] chacun la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive
– Condamner la société Païva à verser à la société Centaure, et à M. [Z] [R] chacun la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la société Païva en tous les frais et dépens,
– Ordonner l’exécution provisoire de droit de la décision à intervenir.

MOTIVATION

Sur les demandes de la société Païva tirées des factures impayées et de la compensation SACD

Moyens des parties

La société Païva demande la condamnation solidaire des défendeurs à lui verser la somme de 228 000 euros en paiement de la facture n°2101-002 du 12 janvier 2021 et correspondant selon elle à la balance de répartition issue du partage des rémunérations touchées par les parties pour l’exploitation du film « Brutus » en exécution de la lettre accord cadre du 24 décembre 2018 et du contrat de coproduction du 27 août 2018, modifié par un avenant du 27 mai 2019.
La société Païva fait également valoir qu’en vertu de la répartition à parts égales des dettes prévue entre les parties par l’accord cadre du 24 décembre 2018, les défendeurs sont débiteurs à son égard d’une somme de 80 000 euros en paiement de la facture n° 2101-005 du 1er janvier 2021, qui représente la moitié des sommes qu’elle a versées aux deux sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel (Sofica), les sociétés Manon 8 Production et Cinecap Développement.
La société Païva sollicite également la condamnation solidaire des défendeurs à lui verser la somme de 28 498 euros en paiement de la facture n° 2101-007 du 31 janvier 2021, correspondant à un tiers de la perte de crédit d’impôt du film « Boutchou » qu’elle estime dû en application de la lettre accord cadre du 24 décembre 2018.
Enfin, la société Païva réclame à M. [Z] [R] la somme de 100 000 euros correspondant selon elle aux sommes qu’elle lui a versées directement ou au travers de la société Orange studio en application d’un avenant du 10 juillet 2020 au contrat de cession de droits d’auteur réalisateur du film « Brutus » visant la compensation de la perte de ses rémunérations SACD (société des auteurs et compositeurs dramatiques) résultant de la diffusion du film sur la plateforme Amazon et non en salle de cinéma compte tenu du contexte de la crise sanitaire du covid-19. Elle soutient que cette compensation n’a plus de cause, la SACD ayant conclu, le 26 janvier 2021, un accord avec la société Amazon autorisant cette dernière à utiliser son répertoire et permettant ainsi aux auteurs de percevoir tous leurs droits SACD avec effet rétroactif. A titre subsidiaire, la société Païva demande la condamnation de M. [Z] [R] à lui payer 75 000 euros correspondant, d’une part, à la moitié de la somme de 50 000 euros de compensation SACD devant être prise en charge selon elle par la société Centaure et augmentée de la somme de 50 000 euros payée à M. [Z] [R] au travers de la société Orange studio.
En réponse au moyen de nullité de la lettre accord cadre du 24 décembre 2018 soulevé par les défendeurs, la société Païva invoque l’application de l’article 2 de l’avenant du 27 mai 2019 qui prévoit également une répartition des recettes.
En réplique, la société Centaure et M. [Z] [R] font valoir, s’agissant de la facture n° 2101-002 du 12 janvier 2021 d’un montant de 228 000 euros, que la société Païva ne justifie d’aucune créance et qu’ayant seule la qualité de producteur délégué du film « Brutus », elle est débitrice de sommes à leur égard en leur qualité de coproducteur et d’auteur et qu’il lui appartient de procéder à une reddition des comptes. Ils font également valoir que le tableau des rémunérations versé aux débats par la société Païva comporte des chiffres incohérents et entretient une confusion entre les “recettes nettes part producteur” générées par l’exploitation du film et les droits d’auteur qui ne sont pas des recettes du film mais un coût de celui-ci. Ils ajoutent que la société Païva ne peut se prévaloir de la lettre accord cadre du 24 décembre 2018 qui est nulle en ce qu’elle prévoit une cession globale d’œuvres futures et qu’elle est dépourvue de contrepartie pour la société Centaure, ajoutant qu’en tout état de cause l’avenant du 27 mai 2019 n’y fait aucune référence.
S’agissant de la facture n° 2101-005 du 1er janvier 2021, la société Centaure et M. [Z] [R] font valoir que la société Païva ne justifie pas du remboursement effectué aux Sofica et rappellent que selon eux la lettre accord cadre dont se prévaut la société Païva est nulle et que le contrat de coproduction du 27 août 2018 ne prévoit pas de participation aux dettes à la charge de la société Centaure.
S’agissant de la facture n° 2101-007 du 31 janvier 2021, les défendeurs font encore valoir la nullité de la lettre accord cadre du 24 décembre 2018 et ajoutent que le contrat de coproduction du film concerné n’est pas versé aux débats et que le crédit d’impôt est perçu exclusivement par le producteur délégué et à son profit.
S’agissant de la compensation SACD, M. [Z] [R] fait valoir que l’hypothèse d’un accord conclu entre la société Amazon et la SACD était expressément prévue au contrat, lequel n’a jamais envisagé que puisse advenir un remboursement. Il expose que cet accord ne modifie en rien le renoncement à la qualification du film comme œuvre cinématographique justifiant le complément de minimum garanti de 40 000 euros dû à l’auteur.

Appréciation du tribunal

Selon l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont fait. L’article 1104 du même code précise que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
L’article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
1. Facture n°2101-002 du 12 janvier 2021

La société Païva sollicite la condamnation solidaire des défendeurs au paiement de la facture n°2101-002 d’un montant de 228 000 euros (sa pièce n°13) correspondant selon les termes de ladite facture à la balance de répartition des revenus du film “Brutus” en application de la lettre accord-cadre du 24 décembre 2018.
La lettre accord cadre du 24 décembre 2018, dont il est expressément stipulé qu’elle s’applique au film “Brutus”, prévoit une répartition “des rémunérations diverses et des produits d’exploitation générés par chaque projet” d’une part de 66,67% pour la société Païva et 33,33% pour la société Centaure et d’autre part de 66,67% pour la société Païva et 33,33% pour M. [Z] [R].
La pièce n°17 (“tableau des revenus des parties”) produite par la société Païva pour justifier de sa créance apparaît cependant être relative aux rémunérations versées à M. [Z] [R] pour ses participations en tant que producteur, réalisateur et interprète du film “Brutus” et non aux recettes d’exploitation dudit film, les chiffres qui y sont exposés n’étant par ailleurs pas certifiés.
Aussi, la société Païva, qui ne justifie pas de la créance alléguée, sera déboutée de sa demande de condamnation solidaire des défendeurs au paiement de la facture n°2101-002 du 12 janvier 2021.
2. Facture n° 2101-005 du 1er janvier 2021

Aux termes de cette facture (pièce Païva n°14), la société Païva fait valoir une créance de 80.000 euros correspondant selon elle à la part due par la société Centaure en vertu de la lettre accord cadre du 24 décembre 2018 au titre du remboursement des avances faites par les sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle (SOFICA) Manon 8 production et Cinécap développement en exécution de deux contrats de développement signés l’un avec la société Cinecap Développement le 14 juin 2017 et l’autre avec la société Manon 8 production le 19 juillet 2017 pour le financement des films « Boutchou » (devenu « Bout de chou »), « Ferme les yeux », « Valbonne », « Secondes Noces » et « Joseph Pujol » (pièce Païva n°18).
Ce faisant, la société Païva ne rapporte pas la preuve d’avoir encaissé les avances des Sofica visées aux contrats pré-cités, la seule production desdits contrats étant insuffisantes à cet égard, ni avoir remboursé la somme de 160 000 euros à ce titre.
En conséquence, la demande de paiement de la société Païva sera rejetée.
3. Facture n°2101-007 du 31 janvier 2021

La société Païva a facturé à la société Centaure à hauteur d’un tiers une perte de crédit d’impôt sur le film « Boutchou ». Au soutien de sa prétention, la société Païva ne produit que la facture qu’elle a émise et qui est contestée par les défendeurs et ne peut suffire à elle seule à justifier de la créance alléguée.
En conséquence, la demande de condamnation solidaire de la société Centaure et M. [Z] [R] au paiement de 28 498 euros au titre de la facture n°2101-007 du 31 janvier 2021 sera rejetée.
4. Sur la compensation SACD

Le “contrat de cession de droits réalisateur long métrage” relatif au film « Brutus » (pièce Païva n° 6) conclu entre la société Païva et M. [Z] [R] le 25 mai 2019 prévoit d’une part, des modalités de rémunération proportionnelle de M. [Z] [R] distinguées selon les modes d’exploitation du film (article 6) et d’autre part, une rémunération forfaitaire constituant un minimum garanti à valoir sur le produit des pourcentages prévus au titre de la rémunération proportionnelle (article 8).
En raison de l’octroi d’une licence d’exploitation des droits du film consentie à la société Amazon en vue de sa diffusion sur la plateforme Amazon Prime Vidéo, le contrat précité a été modifié par un avenant du 10 juillet 2020 (pièce Païva n°9), lequel a remplacé l’article 8 par les dispositions suivantes :« Minimum Garanti et Rémunération Forfaitaire :
1. En rémunération de la réalisation du Film et de la cession des droits correspondants le Producteur s’engage à verser à l’Auteur la somme brute Hors Taxes de 50.000 € (cinquante mille euros) payable comme suit :
10.000 € HT (dix mille euros) à la signature du contrat d’ores et déjà payés
10.000 € HT (dix mille euros) au dernier jour du tournage d’ores et déjà payés
30.000 € HT (trente mille euros) au plus tard au premier jour d’exploitation du Film sur la plateforme Amazon Prime Vidéo.

Les sommes versées à l’Auteur en application des dispositions ci-dessus seront considérées à hauteur de (i) 30% comme une rémunération forfaitaire au titre de la réalisation, (ii) 35% comme une rémunération forfaitaire au titre de l’exploitation du Film sur la plateforme de SVOD Amazon Prime Vidéo dans le monde entier, et (iii) 35% comme un à valoir sur la rémunération proportionnelle à revenir à l’Auteur en application de l’article 6 I à IV, hors exploitation en SVOD prévu au point (ii) ci-dessus.

Toutefois si un accord est conclu entre AMAZON et la SACD, les sommes versées à l’auteur en application des dispositions ci-dessus seront considérées à hauteur de (i) 30% comme une rémunération forfaitaire au titre de la réalisation, (ii) 20% comme une rémunération forfaitaire au titre de l’exploitation du film sur la plateforme de SVOD AMAZON PRIME VIDEO dans le monde entier hors les territoires couverts par l’accord SACD, et (iii) 50% comme un avaloir sur la rémunération proportionnelle à revenir à l’auteur en application de l’article 6 I à 9 hors exploitation SVOD prévue au point (ii) ci-dessus.

Les sommes versées au titre de l’à valoir ne sont pas productives d’intérêts.
Le Producteur se remboursera de cet avoir en exerçant une compensation avec l’ensemble des sommes dont il sera redevable vis-à-vis de l’Auteur par le jeu des pourcentages définis à l’article 6 et ce jusqu’à complet remboursement de l’à valoir.

Ledit à valoir constituant un minimum garanti, si l’ensemble des sommes revenant à l’Auteur au titre de la rémunération proportionnelle définie aux présentes était inférieur au montant de l’à valoir, le producteur ne pourrait pas exercer de recours contre l’Auteur pour la différence.

2. Par ailleurs, et en contrepartie de l’acceptation de l’Auteur de renoncer à la qualification du Film en tant qu’oeuvre cinématographique, le Producteur versera à l’Auteur un complément de minimump garanti de 40.000 € (quarante mille euros) hors taxes, payable au plus tard le 31/12/2020.
Les sommes versées à l’Auteur en application des dispositions ci-dessus seront considréées à hauteur des pourcentages prévus au 1. du présent article»

Il résulte en premier lieu de ces dispositions que la société Païva s’est engagée à payer à M. [Z] [R] une somme de 50 000 euros, ce contrat ni aucune autre pièce versée aux débats ne venant accréditer son allégation selon laquelle M. [Z] [R] aurait perçu une somme supplémentaire de 50 000 euros “payée par Orange au travers de Païva”. Elle ne justifie pas de ce fait de la créance de 100 000 euros qu’elle réclame à M. [Z] [R].
En outre, comme le relèvent à juste titre les défendeurs, l’hypothèse d’un accord passé entre la société Amazon et la SACD avait été anticipé par l’avenant du 10 juillet 2020, sans que les stipulations ne prévoient de remboursement au bénéfice de la société Païva.
Dès lors, le moyen tiré de la disparition de la cause du paiement réalisé par la société Païva au bénéfice de M. [Z] [R] étant inopérant, les demandes principales et subsidiaires de condamnation de M. [Z] [R] en restitution de la compensation SACD seront rejetées.
Sur la demande de la société Païva tiré du comportement abusif des défendeurs

Moyens de parties

La société Païva fait valoir que l’obstination de la société Centaure et de M. [Z] [R] à refuser de régler les factures litigieuses caractérise un abus de nature à engager leur responsabilité civile et sollicite à ce titre leur condamnation à la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral qu’elle estime subir.
Les défendeurs n’ont pas répondu à cette prétention.
Appréciation du tribunal

L’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Aux termes de l’article 1241 du même code, chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
En l’espèce, il résulte de ce qui précède que la société Païva n’établit pas la preuve des créances alléguées de sorte que sa demande de dommages et intérêts fondée sur le refus de paiement par les défendeurs des factures correspondantes ne peut qu’être rejetée.
Sur la demande reconventionnelle de la société Centaure et M. [Z] [R] de dommages et intérêt pour procédure abusive

Moyens de parties

La société Centaure et M. [Z] [R] sollicitent la condamnation de la société Païva au paiement de 10 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, motif pris d’une procédure opportuniste engagée par la demanderesse en vue d’échapper à sa condamnation relativement à une créance incontestable et en raison de son refus de procéder à une reddition des comptes malgré les demandes puis la sommation qui lui ont été faites.
En réponse, la société Païva fait valoir que les défendeurs n’ont jamais demandé de reddition des comptes et que le caractère abusif de la procédure n’est pas établi.
Appréciation du tribunal

L’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Aux termes de l’article 1241 du même code, chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
Le droit d’agir en justice dégénère en abus constitutif d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil lorsqu’il est exercé en connaissance de l’absence totale de mérite de l’action engagée, ou par une légèreté inexcusable, obligeant le défendeur à se défendre contre une action que rien ne justifie sinon la volonté d’obtenir ce que l’on sait indu, une intention de nuire, ou une indifférence totale aux conséquences de sa légèreté.
En l’espèce, la société Centaure et M. [Z] [R] n’invoquent d’autre préjudice que celui résultant de l’obligation de se défendre, qui fait l’objet d’une demande au titre des frais irrépétibles.
Par conséquent, il convient de rejeter la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société Centaure et M. [Z] [R] .
Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.
La société Païva, qui succombe à l’instance, sera condamnée aux dépens.
Sur l’article 700 du code de procédure civile

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
L’équité commande de condamner la société Païva à payer à la société Centaure et à M. [Z] [R] chacun la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur l’exécution provisoire

Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
En l’espèce, la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire et il n’y a pas lieu d’y déroger.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Déboute la société Païva Films de toutes ses demandes ;

Déboute la société Centaure et à M. [Z] [R] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne la société Païva Films aux dépens ;

Condamne la société Païva Films à payer à la société Centaure et à M. [Z] [R] chacun la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.

Fait et jugé à Paris le 31 janvier 2024

La greffièreLe président

 


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