Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 9
ARRÊT DU 21 JUIN 2023
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/04914 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFJK
Décision déférée à la Cour : Arrêt du 16 Janvier 2020 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – Section Activités diverses chambre 2 – RG n° F18/07493
APPELANT
Monsieur [M] [F]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Grégoire HERVET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0621
INTIMÉES
SELARL AXYME prise en la personne de Me [D] [R] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS DHA CONSEIL ET SERVICES
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Sophie BAUDET, avocat au barreau de PARIS
SARL MYFORMABOX
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Sophie BAUDET, avocat au barreau de PARIS
PARTIE INTERVENANTE
ASSOCIATION UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Florence ROBERT DU GARDIER de la SELARL DUPUY Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0061
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 3 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Fabrice MORILLO, conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur Philippe MICHEL, président de chambre
M. Fabrice MORILLO, conseiller
Mme Nelly CHRETIENNOT, conseillère
Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats
ARRÊT :
– contradictoire
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe MICHEL, président et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 19 décembre 2016, M. [M] [F] a été engagé en qualité de commercial, statut non-cadre, par la société DHA CONSEILS & SERVICES, celle-ci employant habituellement moins de 11 salariés et appliquant la convention collective nationale du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire.
Les parties ont signé une convention de rupture conventionnelle le 2 octobre 2017 fixant la date de rupture du contrat de travail au 7 novembre 2017.
Invoquant l’existence d’une situation de travail dissimulé ainsi que d’un prêt illicite de main-d’oeuvre au profit de la société MYFORMABOX et s’estimant par ailleurs insuffisamment rempli de ses droits, M. [F] a saisi la juridiction prud’homale le 5 octobre 2018 de demandes formées à l’encontre des sociétés DHA CONSEILS & SERVICES et MYFORMABOX.
Par jugement du 16 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Paris a :
– mis hors de cause la société MYFORMABOX,
– condamné la société DHA CONSEILS & SERVICES à payer à M. [F] les sommes suivantes :
– 4 286,48 euros au titre du reliquat de salaire d’avril à juillet 2017 outre 428,64 euros au titre des congés payés afférents,
– 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté M. [F] du surplus de ses demandes,
– débouté la société DHA CONSEILS & SERVICES de l’ensemble de ses demandes,
– condamné la société DHA CONSEILS & SERVICES aux dépens.
Par déclaration du 23 juillet 2020, M. [F] a interjeté appel du jugement lui ayant été notifié le 6 juillet 2020.
Suivant jugement du 28 octobre 2020, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société DHA CONSEILS & SERVICES et désigné la société Axyme en la personne de Maître [R] en qualité de mandataire judiciaire liquidateur.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 septembre 2021, M. [F] demande à la cour de :
sur les demandes dirigées à l’encontre de la société DHA CONSEILS & SERVICES
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société DHA CONSEILS & SERVICES au titre du rappel de salaire et des congés payés y afférents,
– fixer au passif de la liquidation judiciaire les sommes suivantes :
– 10 000 euros au titre du rappel de l’indemnité forfaitaire mensuelle des frais professionnels,
– 18 000 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
– 18 000 euros au titre de la réparation du préjudice subi par la dissimulation de son emploi aux caisses de sécurité sociale,
– 5 000 euros au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail et de la mauvaise foi durant la relation de travail,
– 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dire opposable les sommes à l’AGS,
sur les demandes dirigées à l’encontre de la société MYFORMABOX
– condamner la société MYFORMABOX à lui payer les sommes suivantes :
– 18 000 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
– 18 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du prêt de main d »uvre illicite et en réparation du préjudice,
– 5 000 euros au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail et de la mauvaise foi durant la relation de travail,
– 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dire que toutes les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la demande introductive d’instance,
– condamner in solidum les intimées aux dépens de première instance et d’appel.
Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 janvier 2021, la société Axyme, ès qualités, et la société MYFORMABOX demandent à la cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société DHA CONSEILS & SERVICES au paiement des sommes de 4 286,28 euros à titre de rappel de salaires, 428,64 euros au titre des congés payés afférents et 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouter en conséquence M. [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner M. [F], à titre reconventionnel, au paiement de la somme de 5 000 euros pour procédure abusive à chacune des sociétés,
– condamner M. [F] à payer aux sociétés DHA CONSEILS & SERVICES et MYFORMABOX la somme de 7 000 euros pour chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Suivant acte d’huissier de justice du 30 septembre 2021, M. [F] a fait assigner en intervention forcée l’association UNEDIC Délégation AGS CGEA d’Ile-de-France Ouest et lui a fait signifier la déclaration d’appel et ses conclusions du 21 septembre 2021.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 novembre 2021, l’association UNEDIC Délégation AGS CGEA d’Ile-de-France Ouest demande à la cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société DHA CONSEILS & SERVICES au paiement des sommes de 4 286,48 euros au titre du reliquat de salaire d’avril à juillet 2017, 428,64 euros au titre des congés payés et 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [F] du surplus de ses demandes,
– débouter en conséquence M. [F] de l’intégralité de ses demandes,
– condamner M. [F] aux entiers dépens,
– dire et juger que s’il y a lieu à fixation, la garantie de l’AGS ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale, que la garantie prévue suivant les dispositions de l’article L.3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens de l’article L. 3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en ‘uvre la responsabilité de droit commun de l’employeur ou l’article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie, et que la garantie de l’AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié confondues, l’un des trois plafonds des cotisations maximum du régime d’assurance chômage conformément aux dispositions des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
– statuer ce que de droit quant aux frais d’instance ‘ dont les dépens ‘ sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS.
La clôture de l’instruction est intervenue le 21 février 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 3 avril 2023.
MOTIFS
Sur les demandes formées à l’encontre de la société DHA CONSEILS & SERVICES
L’appelant fait valoir qu’il n’a pas été intégralement payé de la partie fixe de son salaire mensuel, ni de son indemnité forfaitaire pour frais professionnels, que la soustraction de l’employeur aux obligations relatives à l’établissement de la fiche de paie caractérise le délit de dissimulation d’emploi salarié et qu’il a subi un préjudice lié à la non-déclaration de ses revenus par son employeur.
Le liquidateur réplique que toutes les sommes dues par la société DHA CONSEILS & SERVICES ont bien été réglées au salarié.
L’AGS conclut au rejet des différentes demandes compte tenu des justificatifs de paiement versés aux débats par le liquidateur et de l’absence de production par l’appelant de pièces permettant de justifier du bien-fondé de ses demandes.
Sur la demande de rappel de salaire au titre de la période d’avril à juillet 2017
Il résulte de l’article 7 (rémunération) du contrat de travail liant les parties que : « En contrepartie de votre travail, vous percevrez une rémunération brute constituée d’une partie fixe et d’une partie variable réparties comme suit :
– Rémunération fixe :
Pendant la période d’essai : une rémunération mensuelle brute de 1 800 euros, soit l’équivalent de Vingt et un Mille six cents (21 600) euros brut sur douze mois.
Cette rémunération est prévue pour un horaire de travail de 169 heures.
Vous vous engagez à respecter les horaires de travail indiqués par votre direction, soit de 9 heures à 18 heures avec une heure de pause déjeuner.
– Rémunération variable :
Elle est constituée de commissions calculées conformément au plan en vigueur et fonction d’objectifs annuels annexés au contrat.
Ce plan sera modifié annuellement par la direction et donnera lieu à l’établissement d’un avenant faisant partie intégrante du contrat de travail.
Ces commissions sont fondées sur votre capacité à développer la marge brute de l’entreprise sur le secteur qui vous est attribué et sur la gamme de produits dont la vente vous est confiée.
Les primes et commissions sont réputées inclure les congés payés et sont versées au salarié le mois suivant l’encaissement des prestations vendues.
Une avance pourra être versée mensuellement, dans ce cas l’ensemble des commissions sera régularisé en fin de période. »
Si l’appelant affirme qu’il résulte des échanges de mails des 10, 11 et 12 mai 2017 que sa rémunération fixe a été augmentée à la somme de 3 000 euros brut par mois, il convient tout d’abord de replacer les courriels litigieux dans un contexte d’échange entre les sociétés DHA CONSEILS & SERVICES (représentée par M. [I]) et PRIUM CONSULTING (représentée par Mme [N]), lesdites sociétés étant liées par un contrat de prestations de service (sous-traitance) du 1er septembre 2016 prévoyant la mise en place par DHA CONSEILS & SERVICES d’une équipe de formateurs ainsi que la réalisation de prestations de formation lui étant confiées par PRIUM CONSULTING, celle-ci prenant en charge le coût de l’équipe de formateurs spécifiquement dédiée à ses activités de formation, de sorte que les montants dont il est fait état dans les mails litigieux (« 3 000 euros brut par mois et 2 000 euros de frais ») ne correspondent pas à la rémunération devant être réglée à l’appelant par la société DHA CONSEILS & SERVICES mais au montant des prestations commerciales effectuées par M. [F] au profit de PRIUM CONSULTING devant être facturées à celle-ci par DHA CONSEILS & SERVICES, ainsi que cela ressort également des factures établies par DHA CONSEILS & SERVICES à l’encontre de PRIUM CONSULTING qui sont versées aux débats par l’appelant.
La cour relève par ailleurs que le mail de la présidente de PRIUM CONSULTING (Mme [N]) faisant état des montants précités ne peut, en toute hypothèse, aucunement s’analyser comme un engagement de DHA CONSEILS & SERVICES, qui avait seule la qualité d’employeur de l’appelant, à procéder à une augmentation du montant de la rémunération de l’intéressé, ces éléments étant confirmés par Mme [N] qui indique, dans le cadre de l’attestation produite par le liquidateur, que: « Alors que M. [M] [F] était salarié de DHA Conseils depuis plusieurs mois, je négociais avec M. [S] [I] le montant maximum que j’étais prête à payer pour des prestations commerciales qu’il me dédierait. En aucun cas, je n’avais la faculté ni le souhait de fixer le salaire de M. [M] [F], ce qui n’était nullement de mon ressort. »
Dès lors, compte tenu de ces éléments et au vu de l’ensemble des bulletins de paie afférents à la période litigieuse ainsi que des avis de virement, des extraits de relevés de compte bancaire et du tableau récapitulatif des règlements effectués, versés aux débats par le liquidateur, ce dernier justifiant que la société DHA CONSEILS & SERVICES a effectivement réglé à l’appelant l’intégralité des sommes lui revenant au titre de sa rémunération contractuelle, et ce s’agissant tant de la partie fixe intégrant les heures supplémentaires effectuées que de la partie variable intégrant les différentes avances sur commissions (mois de mai, juin, juillet, août et septembre 2017), il convient d’infirmer le jugement et de débouter l’appelant de sa demande de rappel de salaire et de congés payés afférents au titre de la période courant d’avril à juillet 2017.
Sur les frais professionnels
Il ne résulte pas du contrat de travail liant les parties que l’appelant bénéficiait d’une indemnité forfaitaire relative aux frais professionnels.
Si l’appelant affirme à nouveau qu’il résulte des échanges de mails des 10, 11 et 12 mai 2017 que dans le cadre d’une revalorisation salariale, il a été prévu qu’il bénéficierait désormais d’une indemnité forfaitaire mensuelle de 2 000 euros pour pallier les frais engagés dans le cadre de l’exécution de ses missions, il résulte cependant des développements précédents que les courriels litigieux correspondaient uniquement à un échange entre les sociétés DHA CONSEILS & SERVICES et PRIUM CONSULTING concernant le montant des prestations commerciales effectuées par l’appelant devant être facturées à PRIUM CONSULTING par DHA CONSEILS & SERVICES, ainsi que cela ressort également des factures établies par DHA CONSEILS & SERVICES à l’encontre de PRIUM CONSULTING qui sont versées aux débats par l’appelant et qui font effectivement état du paiement, en sus de la prestation commerciale, d’un forfait de frais d’un montant de 2 000 euros. Il sera en toute hypothèse à nouveau relevé que la dirigeante de PRIUM CONSULTING n’avait aucunement la faculté, ni la volonté, de se substituer à l’employeur de l’appelant pour lui accorder une indemnité forfaitaire mensuelle de remboursement de frais professionnels.
Dès lors, compte tenu de ces éléments et au vu de l’ensemble des bulletins de paie afférents à la période litigieuse ainsi que des avis de virement, des extraits de relevés de compte bancaire et du tableau récapitulatif des règlements effectués, versés aux débats par le liquidateur, ce dernier justifiant que la société DHA CONSEILS & SERVICES a, en tout état de cause, effectivement réglé à l’appelant différentes sommes à titre de remboursement de frais professionnels (mois de mai, juin, juillet et août 2017), il convient de débouter l’appelant de sa demande en paiement formée de ce chef, et ce par confirmation du jugement.
Sur le travail dissimulé
En application des dispositions des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail, compte tenu des développements précédents relatifs au paiement de l’intégralité des différentes sommes dues à l’appelant à titre de rémunération ou de remboursement de frais au titre de l’exécution du contrat de travail, l’intéressé n’ayant pas le statut cadre contrairement à ce qu’il indique dans ses conclusions, le versement effectué le 5 décembre 2016 correspondant à une avance sur salaire et frais ainsi que cela résulte des mentions du propre relevé de compte bancaire de l’appelant, et eu égard par ailleurs au fait que ce dernier ne justifie pas, mises à part ses seules affirmations de principe et au vu des seuls éléments versés aux débats, du caractère intentionnel de la dissimulation d’emploi alléguée, la cour confirme le jugement en ce qu’il a rejeté cette demande.
Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice subi
Au vu des seules pièces versées aux débats et mises à part les propres affirmations de l’appelant, outre le fait qu’il résulte des développements précédents que l’intéressé a été réglé de l’intégralité des sommes lui revenant au titre de l’exécution de son contrat de travail avec la société DHA CONSEILS & SERVICES, la cour relève par ailleurs que l’appelant ne justifie ni du principe ni du quantum du préjudice allégué.
Dès lors, la cour confirme le jugement en ce qu’il a débouté l’appelant de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice subi du fait de la dissimulation de son emploi aux caisses de sécurité sociale.
Sur les demandes formées à l’encontre de la société MYFORMABOX
L’appelant fait valoir qu’il existait également un lien de subordination juridique avec la société MYFORMABOX et que cette dernière s’est soustraite à ses obligations et a dissimulé son emploi salarié. Il ajoute que ladite société s’est également rendue coupable d’un prêt illicite de main d’oeuvre.
La société intimée réplique que l’appelant ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une relation de travail et d’un lien de subordination à son encontre, aucune dissimulation d’emploi ne pouvant être retenue. Elle ajoute qu’il n’y a eu aucun prêt de main d »uvre entre les deux sociétés DHA CONSEILS & SERVICES et MYFORMABOX concernant l’appelant, et a fortiori aucun prêt de main d »uvre illicite.
Sur le travail dissimulé
Selon l’article L. 1221-1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun. Il peut être établi selon les formes que les parties contractantes décident d’adopter.
En application de ces dispositions, il sera rappelé que, hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s’il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière.
Or, au vu des seuls éléments versés aux débats par l’appelant de ce chef et mises à part ses propres affirmations de principe, il sera relevé que la réunion des critères précités n’est aucunement établie en l’espèce, les éléments allégués par l’appelant concernant l’identité de dirigeant entre les deux sociétés étant manifestement insuffisant et inopérant pour caractériser l’existence d’une immixtion permanente dans la gestion économique et sociale de la société conduisant à une perte totale d’autonomie d’action.
Par ailleurs, il sera relevé au vu des seules pièces produites par l’appelant consistant principalement en quelques échanges de mail isolés, dont il n’était pour leur grande majorité qu’en simple copie à titre d’information sur une adresse mail personnelle ([Courriel 8]), que ce dernier ne justifie pas plus, s’agissant de la société MYFORMABOX, de l’existence d’une prestation de travail, d’une rémunération convenue par les parties ainsi que d’un lien de subordination résultant de l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui avait le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements, les seuls éléments produits étant manifestement insuffisants de ces chefs et étant uniquement de nature à permettre de retenir, ainsi que cela ressort également des pièces produites en réplique par la société intimée, l’existence d’une relation commerciale entre les deux parties, l’appelant ayant notamment effectué et facturé des prestations de conseil pour le compte de la société MYFORMABOX en tant que travailleur indépendant, et ce par l’intermédiaire de ses deux sociétés de consulting (PHH-CALL CENTER enregistrée en Israël et PH CONSULTANT).
Dès lors, en application des dispositions des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail, compte tenu des développements précédents relatifs à l’absence de tout lien de subordination ainsi que d’un contrat de travail avec la société MYFORMABOX, l’existence d’une dissimulation intentionnelle d’emploi ne pouvant ainsi aucunement être retenue, la cour confirme le jugement en ce qu’il a débouté l’appelant de ses demandes formées à l’encontre de la société MYFORMABOX et en ce qu’il a ordonné sa mise hors de cause.
Sur le prêt illicite de main d’oeuvre
Aux termes de l’article L. 8241-1 du code du travail, toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’oeuvre est interdite.
Toutefois, ces dispositions ne s’appliquent pas aux opérations réalisées dans le cadre :
1° Des dispositions du présent code relatives au travail temporaire, aux entreprises de travail à temps partagé et à l’exploitation d’une agence de mannequins lorsque celle-ci est exercée par une personne titulaire de la licence d’agence de mannequin ;
2° Des dispositions de l’article L. 222-3 du code du sport relatives aux associations ou sociétés sportives ;
3° Des dispositions des articles L. 2135-7 et L. 2135-8 du présent code relatives à la mise à disposition des salariés auprès des organisations syndicales ou des associations d’employeurs mentionnées à l’article L. 2231-1.
Une opération de prêt de main-d »uvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition.
En l’espèce, compte tenu à nouveau des développements précédents relatifs à l’absence de tout lien de subordination ainsi que d’un contrat de travail avec la société MYFORMABOX et eu égard par ailleurs à l’absence de démonstration par l’appelant, mises à part ses seules affirmations de principe, du fait que la société DHA CONSEILS & SERVICES se serait effectivement « arrangée » pour le mettre à la disposition de la société MYFORMABOX et pour facturer ainsi le service effectué pour le compte de ladite société afin d’en tirer un bénéfice, les éléments constitutifs d’un prêt de main d »uvre illicite n’étant dès lors pas réunis, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté l’appelant de sa demande de dommages-intérêts formée de ce chef.
Sur les demandes de dommages-intérêts pour exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail formées à l’encontre des sociétés DHA CONSEILS & SERVICES et MYFORMABOX
Selon l’article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Au vu de l’ensemble des développements précédents, outre que l’existence d’un lien de subordination et d’un contrat de travail liant M. [F] avec la société MYFORMABOX n’a pas été retenue, la cour relève également que l’appelant ne justifie, mises à part ses propres affirmations et au vu des seuls éléments versés aux débats, ni de l’existence d’un manquement de la société DHA CONSEILS & SERVICES à ses obligations contractuelles en matière d’exécution de bonne foi du contrat de travail ni de surcroît du principe ou du quantum du préjudice allégué.
Dès lors, il convient de débouter l’appelant de ses demandes de dommages-intérêts formées à l’encontre de chacune des sociétés sur ce fondement.
Sur les demandes reconventionnelles de dommages-intérêts pour procédure abusive
Les intimées font valoir que les demandes de l’appelant sont totalement infondées, que toutes les sommes qui lui étaient dues, au titre de ses salaires, commissions et notes de frais lui ont bien été réglées, qu’il a, de façon intentionnelle, omis de produire tous ses bulletins de paie et ses relevés de compte sur la période d’avril à octobre 2017 ainsi que de préciser ses relations d’affaires entre ses sociétés de consulting et la société MYFORMABOX, l’intéressé ayant abusivement intenté une action contre les deux sociétés intimées, un an après la rupture de son contrat de travail, pour des raisons purement opportunistes et financières.
En application des articles 1382, devenu 1240 du code civil, et 32-1 du code de procédure civile, étant rappelé que l’exercice d’une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à condamnation à dommages-intérêts que dans les cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol, la réitération en appel de moyens soutenus en première instance et rejetés par les premiers juges ne constituant pas un abus en soi, les intimées ne démontrant en toute hypothèse ni la mauvaise foi, l’intention de nuire ou même la légèreté blâmable de l’appelant, ni d’ailleurs l’étendue de leurs préjudices, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il les a déboutées de leurs demandes respectives de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Sur les autres demandes
Compte tenu de l’équité et de la situation économique des parties, il n’y a pas lieu à condamnation en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
L’appelant, qui succombe, supportera les dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement en ce qu’il a condamné la société DHA CONSEILS & SERVICES à payer à M. [F] les sommes de 4 286,48 euros au titre du reliquat de salaire d’avril à juillet 2017 outre 428,64 euros au titre des congés payés afférents et 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute M. [F] de sa demande de rappel de salaire et de congés payés afférents au titre de la période courant d’avril à juillet 2017 ;
Déboute M. [F] de ses demandes de dommages-intérêts pour exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail ;
Dit n’y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [F] aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT