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8ème Ch Prud’homale
ARRÊT N°234
N° RG 20/01992 –
N° Portalis DBVL-V-B7E-QSL2
S.A.S. CLEAR CHANNEL FRANCE (CCF)
C/
– M. [P] [W]
– S.A.R.L. THOMAS PROPRETÉ
Infirmation partielle
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Marie VERRANDO
Me Khalil MIHOUBI
Copie certifiée conforme à :
S.A.R.L. THOMAS PROPRETÉ
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 12 JUIN 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, Président de chambre,
Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,
Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 23 Mars 2023
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 12 Juin 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE et intimée à titre incident :
La S.A.S. CLEAR CHANNEL FRANCE (CCF) prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée à l’audience par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Avocat postulant du Barreau de RENNES
et par Me Maureen CURTIUS substituant à l’audience Me Arnaud BLANC DE LA NAULTE de l’AARPI NMCG AARPI, Avocats plaidants du Barreau de PARIS
INTIMÉ et appelant à titre incident :
Monsieur [P] [W]
né le 26 Décembre 1974 à [Localité 3] (44)
demeurant [Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Khalil MIHOUBI, Avocat au Barreau de PARIS
. ../…
AUTRE INTIMÉE :
La S.A.R.L. THOMAS PROPRETÉ prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 2]
[Localité 3]
NON CONSTITUÉE devant la Cour
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Suivant contrat de travail à durée déterminée du 16 juin 2010, puis à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2010, la SARL THOMAS PROPRETE a engagé M. [P] [W] en qualité d’Agent qualifié, en application de la Convention collective des entreprises de propreté.
M. [W] a été mis à disposition de la société CLEAR CHANNEL FRANCE en tant qu’afficheur publicitaire.
Le 2 novembre 2017, lors de son entretien préalable, M. [W] a été informé de la procédure de licenciement pour motif économique à son encontre.
M. [W] a accepté le bénéfice d’un contrat de sécurisation professionnelle. Son contrat de travail a été rompu le 23 novembre 2017.
Le 7 mars 2018, M. [W] a saisi le Conseil de prud’hommes de Nantes aux fins de :
A titre principal,
‘ Constater l’existence d’un co-emploi entre les sociétés CLEAR CHANNEL FRANCE et THOMAS PROPRETE,
‘ Dire la convention collective nationale de la publicité applicable au contrat de travail,
‘ Fixer le salaire de référence à la somme de 2.112,73 € brut,
‘ Condamner solidairement les sociétés CLEAR CHANNEL FRANCE et THOMAS PROPRETE aux sommes suivantes :
– 15.623,64 € brut à titre de rappel de salaire pour la période de novembre 2015 à novembre 2017,
– 1.562,36 € brut au titre des congés payés afférents,
– 5.873,10 € brut à titre de rappel de 13ème mois sur les années 2015, 2016 et 2017,
– 1.800 € brut à titre de rappel sur prime de vacances pour les années 2015, 2016 et 2017,
– 3.250,80 € brut à titre de rappel de JRTT pour les années 2015, 2016 et 2017,
– 1.984,59 € à titre de solde d’indemnité conventionnelle de licenciement,
– 4.225,45 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 422,54 € au titre des congés payés afférents,
– 16.901 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite,
– 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Assortir les sommes de nature salariale de l’intérêt au taux légal à compter de la saisine du bureau de conciliation et d’orientation,
‘ Ordonner la remise d’une attestation Pôle Emploi rectifiée et conforme au jugement à intervenir,
‘ Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile,
‘ Condamner les parties défenderesses aux dépens,
A titre infiniment subsidiaire, si le Conseil ne retenait pas l’existence d’un co-emploi :
‘ Constater l’absence de cause réelle et sérieuse au licenciement pour motif économique,
‘ Constater la violation des critères d’ordre des licenciements,
‘ Condamner la SARL THOMAS PROPRETE aux sommes suivantes :
– 4.225,45 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 422,54 € au titre des congés payés afférents,
– 16.901 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou, subsidiairement, pour violation des critères d’ordre des licenciements,
– 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Ordonner l’exécution provisoire,
‘ Condamner la SARL THOMAS PROPRETE aux entiers dépens.
La cour est saisie de l’appel régulièrement formé le 27 mars 2020 par la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE contre le jugement du 27 février 2020, par lequel le Conseil de prud’hommes de Nantes a :
‘ Dit que M. [W] était en situation de co-emploi entre la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE,
‘ Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE à verser à M. [W] les sommes suivantes :
– 6.807,60 € brut à titre de rappels de salaires de novembre 2015 à novembre 2017,
– 680,76 € au titre des congés payés afférents,
– 392,47 € à titre de solde d’indemnité conventionnelle de licenciement,
– 3.343,10 € brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
– 334,31 € brut au titre des congés payés afférents,
– 9.529 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 500 € à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite,
– 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Assorti lesdites condamnations des intérêts au taux légal à compter de leur date d’exigibilité pour les sommes à caractère salarial et de la date de la notification du jugement pour celles à caractère indemnitaire,
‘ Ordonné la remise à M. [W] d’un bulletin de salaire récapitulatif des sommes dues et d’une attestation Pôle Emploi rectifiée, tous documents conformes au jugement,
‘ Condamné en outre d’office solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à M. [W] dans la limite de 6 mois d’indemnités,
‘ Ordonné l’exécution provisoire du jugement pour la totalité des condamnations à caractère salarial et à hauteur de la moitié des sommes allouées en ce qui concerne les condamnations à titre indemnitaire,
‘ Débouté M. [W] de ses autres demandes,
‘ Débouté la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE de ses demandes reconventionnelles,
‘ Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE aux dépens éventuels.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 8 mars 2023, suivant lesquelles la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE demande à la cour de :
‘ Dire recevable et bien fondé son appel,
‘ Infirmer le jugement en ce qu’il a :
– Dit que la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE était le co-employeur de M. [W],
– Condamné la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE solidairement avec la SARL THOMAS PROPRETE à verser à M [W] les sommes suivantes :
– 6.807,60 € brut à titre de rappels de salaire de novembre 2015 à novembre 2017,
– 680,76 € au titre des congés payés afférents,
– 392,47 € à titre de solde d’indemnité conventionnelle de licenciement,
– 3.343,10 € brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
– 334,31 € brut au titre des congés payés afférents,
– 9.529 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 500 € à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite,
– 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Débouté la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE de sa demande de condamnation de M. [W] à la somme de 500 € pour procédure abusive,
– Débouté la société CLEAR CHANNEL FRANCE de sa demande de condamnation de M. [W] à la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [W] de toutes ses autres prétentions, dans leur principe et/ou dans leur quantum,
Statuant à nouveau, sur les chefs de jugement soumis à réformation/infirmation,
‘ Juger que la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE n’était pas le co-employeur de M. [W],
‘ Mettre hors de cause la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE,
‘ Constater l’absence de tout fondement aux demandes de rappels de salaire, primes de 13e mois, prime de vacances, JRTT et congés payés afférents de M. [W],
‘ Constater l’absence de fondement à la demande de rappel au titre du solde de l’indemnité conventionnelle de licenciement de l’indemnité compensatrice de préavis et congés payés sur préavis,
‘ Constater l’absence de fondement de la demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
‘ Constater l’absence de fondement de la demande de dommages et intérêts pour prêt illicite de main d’oeuvre,
‘ Débouter M. [W] de son appel incident et toutes ses demandes, fins et prétentions,
Et rejetant toutes prétentions contraires, comme irrecevables et en tout cas non fondées,
En tout état de cause,
‘ Condamner M. [W] à lui payer la somme de 500 € pour procédure abusive,
‘ Condamner M. [W] à lui payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Condamner M. [W] à tous les dépens avec distraction au profit de l’avocat soussigné aux offres de droit.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 1er mars 2023, suivant lesquelles M. [W] demande à la cour de :
‘ Confirmer le jugement en ce qu’il a :
– Dit qu’il était en situation de co-emploi entre la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE,
– Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE à lui verser des rappels de salaires de novembre 2015 à novembre 2017 et les congés payés afférents,
– Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE un solde d’indemnité conventionnelle de licenciement,
– Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE à lui verser une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents,
– Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE à lui verser des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– Condamné solidairement la société CLEAR CHANNEL FRANCE et la société THOMAS PROPRETE à verser à M. [W] des dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite,
– Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE à lui verser la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Assorti les condamnations des intérêts aux taux légal à compter de la date de la notification de la décision pour les sommes à caractère indemnitaire,
– Ordonner la remise d’un bulletin de salaire récapitulatif des sommes dues et d’une attestation Pôle Emploi rectifiée, tous documents non conformes au jugement,
– Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à M. [W] dans la limite de 6 mois d’indemnités,
– Condamné solidairement la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE aux dépens éventuels,
Infirmer pour le surplus et statuer à nouveau,
‘ Recevoir M. [W] en son appel incident,
A titre principal,
‘ Fixer son salaire brut mensuel de référence à la somme de 2.112,73 €,
‘ Condamner solidairement les sociétés CLEAR CHANNEL FRANCE et THOMAS PROPRETE à lui payer les sommes suivantes :
– 15.623,64 € brut à titre de rappel de salaire pour la période de novembre 2015 à novembre 2017,
– 1.562,36 € brut au titre des congés payés afférents,
– 5.873,10 € brut à titre de rappel de 13ème mois sur les années 2015, 2016 et 2017,
– 1.800 € brut à titre de rappel sur prime de vacances pour les années 2015, 2016 et 2017,
– 3.250,80 € brut à titre de rappel de JRTT pour les années 2015, 2016 et 2017,
– 1.984,59 € à titre de solde d’indemnité conventionnelle de licenciement,
– 4.225,45 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 422,54 € au titre des congés payés afférents,
– 16.901 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite,
– 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Dire que les sommes de nature salariale porteront intérêt au taux légal et capitalisation à compter de la saisine du bureau de conciliation et d’orientation du Conseil de prud’hommes de Nantes,
‘ Ordonner la délivrance d’une attestation Pôle Emploi rectifiée et conforme à la décision à intervenir,
‘ Condamner la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE et la SARL THOMAS PROPRETE aux entiers dépens,
‘ Débouter la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE de son appel et de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
A titre infiniment subsidiaire et si par extraordinaire, la Cour ne retenait pas l’existence d’un co-emploi
‘ Constater l’absence de cause réelle et sérieuse au licenciement pour motif économique,
‘ Constater la violation des critères d’ordre des licenciements,
‘ Condamner la SARL THOMAS PROPRETE à lui verser les sommes suivantes :
– 4.225,45 € indemnité compensatrice de préavis,
– 422,54 € de congés payés afférents,
– dire et juger que les sommes de nature salariales porteront intérêts aux taux légal à compter
de la saisine du bureau de conciliation et d’orientation du Conseil de prud’hommes de Nantes.
-16.901 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ou subsidiairement pour violation des critères d’ordre des licenciements,
– 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Ordonner la délivrance d’une attestation pôle emploi rectifiée conforme à la décision à intervenir et sous astreinte de 50 € par jours de retard,
‘ Condamner la SARL THOMAS PROPRETE aux entiers dépens d’instance.
La SARL THOMAS PROPRETE n’a pas constitué avocat devant la cour. Il sera statué par arrêt réputé contradictoire à son égard.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 9 mars 2023.
Par application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’exécution du contrat de travail
Sur l’existence d’une situation de co-emploi
Pour infirmation à ce titre, la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE soutient que le contrat de prestation de service exclut tout lien entre elle et les salariés de la société THOMAS PROPRETE ; que M. [W] était lié uniquement à la société THOMAS PROPRETE par un contrat de travail et que le salarié ne démontre pas l’existence d’un contrat de travail entre lui et la société CLEAR CHANNEL FRANCE.
Pour confirmation à ce titre, M. [W] soutient qu’il était dirigé et contrôlé par la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE ; que les moyens étaient exclusivement fournis par la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE ; qu’il travaillait de façon permanente dans les locaux de cette société où il disposait d’un accès permanent ; qu’il était intégré à la communauté de travail CLEAR CHANNEL [Localité 3] et qu’il a été formé par la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE.
Il est jugé de façon constante, en application de l’article L. 1221-1 du code du travail, que, hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être qualifiée de co-employeur du personnel employé par une autre que s’il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière.
Il appartient à celui qui se prévaut d’un co-emploi d’en apporter la preuve.
En l’espèce, l’employeur la société THOMAS PROPRETE ne fait pas partie du groupe de la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE, mais lui est lié par un contrat de prestation de service.
La société THOMAS PROPRETE dispose de compétences techniques et d’une expertise reconnue dans le domaine des prestations d’affichage. Le contrat de prestation de service précise d’ailleurs que :
‘ Le Prestataire, qui revendique un véritable savoir-faire dans le domaine des prestations d’affichage, a proposé à CCF de lui en faire bénéficier et de réaliser des prestations d’entretien, pose et dépose d’affiches, de nettoyage, de maintenance, de montage, de démontage, d’éclairage et autres travaux divers sur des dispositifs publicitaires ou non publicitaire (ci-après définis par la ou les « Prestation(s)»).
Au regard,
– du savoir-faire revendiqué du Prestataire et de sa volonté d’accompagner CCF dans sa démarche d’amélioration continue en matière de qualité et de sécurité (certification Iso 9001) ainsi que sur le plan environnemental (certification Iso 14001) ;
– de l’offre de services proposée par le Prestataire qui déclare disposer de la compétence et des moyens matériels et techniques nécessaires pour mener à bonne fin les Prestations qui lui seront confiées’.
Par ailleurs, l’annexe 1 du contrat de prestation de service précise que la facturation de la prestation de service était établie de manière forfaitaire en amont et non au temps passé.
De même, le contrat de prestation de service stipule (article 4) que les moyens matériels mis à la disposition de M. [W] étaient propres à la seule société THOMAS PROPRETE.
Il ressort également des dispositions de l’article 8 du contrat de prestation de service que la société THOMAS PROPRETE assume l’entière responsabilité de l’exécution de la mission de M. [W] ainsi que son encadrement en ce que ‘ Le Prestataire reste seul responsable de la gestion, du contrôle, et de la direction du personnel affecté à l’exécution des présentes.
Il s’assure de la sécurité et du bien-être des travailleurs sur le chantier conformément à la réglementation en vigueur’.
Enfin, il ressort de ce contrat de prestation de service que M. [W] bénéficie d’une parfaite autonomie par rapport aux autres salariés de la SAS CLEAR CHANNEL FRANCE en ce qu’il précise que : ‘ En toute hypothèse, le présent contrat est exclusif de toute mise à disposition de personnel entrant dans le cadre du travail temporaire, et n’institue aucun lien de subordination entre CCF et le Prestataire ou les préposés de ce dernier’.
Les parties se sont ainsi attachées à établir un cadre strict entre le personnel de la SAS CLEAR CHANNEL et celui de la société THOMAS PROPRETE leur garantissant ainsi une parfaite autonomie.
M. [W] ne pouvait ignorer ce cadre particulier de fonctionnement dès lors que son propre contrat de travail stipule que ‘THOMAS PROPRETE se réserve la possibilité, en raison de la mobilité qu’impose la profession du nettoyage, d’affecter Monsieur [P] [W] sur tout autre lieu et horaire, selon les nécessités de l’entreprise et pour le bon fonctionnement du service.
Par ailleurs, Monsieur [P] [W] reconnaît que la profession du nettoyage, s’exerçant chez des clients et dans différents lieux, la mobilité est nécessaire et indispensable’.
Il ressort également des pièces versées à la procédure que la société THOMAS PROPRETE a établi seule les bulletins de paie de M. [W] ; géré son affectation ; validé ses congés payés ; procédé aux visites médicales ; assuré sa formation et exercé normalement à l’égard de son salarié le pouvoir de direction et de discipline en procédant à la rupture de son contrat de travail.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il apparaît que la société THOMAS PROPRETE a conclu avec la SAS CLEAN CHANNEL FRANCE un contrat de prestation de service et que les sociétés en cause avaient des dirigeants distincts, qu’elle disposait d’une autonomie de gestion économique et gérait ses personnels de façon autonome, sans que soit rapportée la preuve la perte totale d’autonomie d’action de la société THOMAS PROPRETE.
Il en résulte que la SAS CLEAN CHANNEL FRANCE ne peut être qualifiée de co-employeur, ce qui implique sa mise hors de cause et l’infirmation du jugement sur ce point.
Sur les autres demandes
Compte tenu de l’absence de co-emploi, il s’ensuit que M. [W] sera débouté de ses demandes subséquentes relatives aux rappels de salaires pour la période 2015-2017, au rappel de 13e mois, au rappel de prime vacances, aux JRTT et au prêt de main d’oeuvre illicite. Le jugement sera infirmé de ces chefs.
Sur la rupture du contrat de travail
M. [W] soutient que le licenciement pour motif économique intervenu le 23 novembre 2017 doit être requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse compte tenu de la situation de co-emploi dès lors que la situation économique du groupe CLEAR CHANNEL FRANCE n’a pas été prise en compte et qu’aucun reclassement n’a été recherché au sein du périmètre CLEAR CHANNEL FRANCE.
A titre subsidiaire, si la cour devait écarter l’existence d’un co-emploi, il demande à la cour de juger sans cause réelle et sérieuse son licenciement pour motif économique aux motifs que la société THOMAS PROPRETE n’a procédé à aucune recherche de reclassement et qu’elle ne verse aucun document pouvant justifier le respect de cette obligation et a violé les critères d’ordre des licenciements.
La société CLEAR CHANNEL FRANCE soutient que la recherche n’a pas été effectuée au sein du groupe en raison de l’absence de co-emploi.
En l’absence de co-emploi, le salarié ne peut reprocher à la société CLEAR CHANNEL FRANCE les manquements invoqués à l’encontre de l’employeur la société THOMAS PROPRETE, ni une fraude de la société qui aurait conduit à son licenciement, lequel résulte des difficultés économiques rencontrées par l’employeur.
Les demandes relatives à l’indemnisation de la perte de l’emploi en direction de la société CLEAR CHANNEL FRANCE seront rejetées et le jugement infirmé.
En revanche, les dispositions relatives à l’indemnisation de la perte de l’emploi en direction de la société THOMAS PROPRETE, qui a seule la qualité d’employeur, seront confirmées, en l’absence d’élément susceptible de caractériser une quelconque recherche de reclassement de M. [W] par la société THOMAS PROPRETE.
Sur la procédure abusive
A ce titre, la société CLEAR CHANNEL soutient que M. [W] doit être condamné au paiement de la somme de 500 € à titre de dommages et intérêt au motif qu’il l’a mise en cause dans le seul but d’obtenir des indemnités supplémentaires alors qu’il savait que son licenciement était parfaitement fondé et que l’argumentation qu’il produit est lapidaire.
Au cas présent, l’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits n’est pas, en soi, constitutive d’une faute caractérisant une procédure abusive.
Il n’y a donc pas lieu de faire droit aux demandes indemnitaires présentées par la société CLEAR CHANNEL FRANCE.
Sur la remise des documents sociaux
La demande de remise de documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision par la S.A.R.L. THOMAS PROPRETE est fondée en son principe, sans qu’il y ait lieu à astreinte.
Sur l’article 700
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la S.A.R.L. THOMAS PROPRETE, partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel.
L’équité commande en revanche de la condamner, sur ce même fondement juridique, à payer à M. [W] une indemnité d’un montant de 2.500 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
La SAS CLEAR CHANNEL FRANCE sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en dernier ressort et par arrêt réputé contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
INFIRME partiellement le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau,
MET hors de cause la S.A.S. CLEAR CHANNEL FRANCE ;
DEBOUTE M. [W] de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la S.A.S. CLEAR CHANNEL FRANCE ;
CONDAMNE la SARL THOMAS PROPRETE à verser à M [W] les sommes suivantes :
– 9.529 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 4.225,45 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 422,54 € au titre des congés payés afférents,
RAPPELLE qu’en application de l’article 1231-6 du code civil les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et que les autres sommes à caractère indemnitaire, en application de l’article 1231-7 du code civil, porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les prononce ;
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;
et y ajoutant,
CONDAMNE la SARL THOMAS PROPRETE à remettre à M. [W] les documents sociaux conformes à la présente décision sans qu’il y ait lieu d’ordonner une astreinte ;
CONDAMNE la SARL THOMAS PROPRETE à verser à M. [W] la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, outre la somme déjà allouée en première instance sur ce fondement ;
DÉBOUTE la S.A.S. CLEAR CHANNEL FRANCE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SARL THOMAS PROPRETE aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.