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N° Y 21-86.240 F-D
N° 00033
MAS2
10 JANVIER 2023
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 10 JANVIER 2023
La société [1] et la caisse de retraite du personnel navigant de l’aéronautique civile, partie civile, ont formé des pourvois contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris, chambre 2-13, en date du 21 octobre 2021, qui, pour travail dissimulé, prêt illicite de main d’oeuvre, marchandage et discrimination, a condamné, la première, à 100 000 euros d’amende, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société [1], les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la caisse de retraite du personnel navigant de l’aéronautique civile, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l’audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 29 décembre 2005, [H] [D], pilote d’hélicoptère, depuis décédé, a porté plainte et s’est constitué partie civile des chefs de travail dissimulé, marchandage de main d’oeuvre et discrimination, en exposant qu’ayant signé un contrat de travail avec la société [2] dont le siège social est situé à Jersey, il avait été débouté par le conseil de prud’hommes d’une action tendant à constater que la société [1] avait été son réel employeur et à réparer les conséquences de son licenciement qualifié d’abusif.
3. Par ordonnance en date du 18 janvier 2017, le juge d’instruction a renvoyé cette dernière société devant le tribunal correctionnel des chefs susvisés.
4. Par jugement du 9 avril 2018, le tribunal correctionnel a, sur l’action publique, rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la société prévenue, requalifié les faits de complicité de prêt illicite de main d’uvre en prêt illicite de main d’uvre, l’a déclarée coupable de l’ensemble des faits reprochés, condamnée à une amende de 250 000 euros et a prononcé une peine de confiscation.
5. Statuant sur l’action civile, le tribunal correctionnel a déclaré recevable la constitution de partie civile de la caisse de retraite du personnel navigant de l’aéronautique civile (CRPN) et a condamné la société [1] à réparer tant son préjudice moral que son préjudice matériel, apprécié à 2 043 301 euros, sur la base des cotisations dues au titre de l’affiliation obligatoire de quatorze pilotes.
6. La société [1], la CRPN et le ministère public, notamment, ont relevé appel de cette décision.
Sur les premier, troisième, quatrième et cinquième moyens proposés pour la société [1]
7. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le deuxième moyen proposé pour la société [1]
Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré la société [1] coupable des chefs de prêt illicite de main d’oeuvre, de travail clandestin par dissimulation de salariés et de marchandage, alors :
« 1°/ que l’interdiction de cumuler les qualifications lors de la déclaration de culpabilité s’applique aux cas où un fait ou des faits identiques sont en cause et où l’une des qualifications, telle qu’elles résultent des textes d’incrimination, correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l’autre, qui seule doit alors être retenue ; que le délit de prêt illicite de main d’oeuvre est un élément constitutif du délit de marchandage ; qu’en condamnant la société [1] du chef de ces deux infractions, la cour d’appel a méconnu les articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 4 du protocole n° 7 additionnel à la même Convention, l’article 14-7 du Pacte international de New-York relatif aux droits civils et politiques, ensemble le principe ne bis in idem ;
2°/ que l’interdiction de cumuler les qualifications lors de la déclaration de culpabilité s’applique aux cas où un fait ou des faits identiques sont en cause et où l’une des qualifications retenues, dite spéciale, incrimine une modalité particulière de l’action répréhensible sanctionnée par l’autre infraction, dite générale ; que les délits de prêt illicite de main d’oeuvre et de marchandage constituent des qualifications spéciales incriminant une modalité particulière du travail clandestin par dissimulation de salarié ; qu’en condamnant la société [1] du chef de ces trois infractions, la cour d’appel a méconnu les articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 4 du protocole n° 7 additionnel à la même Convention, l’article 14-7 du Pacte international de New-York relatif aux droits civils et politiques, ensemble le principe ne bis in idem. »
Réponse de la Cour
9. Par arrêt du 15 décembre 2021, la Cour de cassation a jugé que le moyen, qui invoque pour la première fois devant elle la violation du principe ne bis in idem en cas de poursuites concomitantes, est irrecevable (Crim., 15 décembre 2021, pourvoi n° 20-85.924, publié au Bulletin).
10. Cette règle ne méconnaît ni l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme qui est étranger aux règles de recevabilité des moyens devant la Cour de cassation ni l’article 6 de ladite convention, l’irrecevabilité devant cette juridiction des moyens nouveaux qui ne sont pas d’ordre public et qui ne naissent pas de l’arrêt attaqué n’apportant pas une limitation excessive au droit d’accès des requérants à un tribunal.
11. Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur le septième moyen proposé pour la société [1]
Enoncé du moyen
12. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré recevable la constitution de partie civile de la CRPN, alors « que l’affiliation à la CRPN suppose l’affiliation à l’URSSAF ; que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen résultant de ce que les salariés de la société [2] n’avaient pas à s’affilier à l’URSSAF entraînera la cassation par voie de conséquence sur le présent moyen. »