Prêt entre particuliers : 9 mars 2023 Cour d’appel de Bourges RG n° 22/00341

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Prêt entre particuliers : 9 mars 2023 Cour d’appel de Bourges RG n° 22/00341

9 mars 2023
Cour d’appel de Bourges
RG
22/00341

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

– SCP GERIGNY & ASSOCIES

– SCP AVOCATS CENTRE

LE : 09 MARS 2023

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 09 MARS 2023

N° – Pages

N° RG 22/00341 – N° Portalis DBVD-V-B7G-DOCM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de BOURGES en date du 09 Février 2022

PARTIES EN CAUSE :

I – Mme [U] [L] épouse [G]

née le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 3]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par la SCP GERIGNY & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES

aide juridictionnelle totale numéro 18033 2022/00897 du 05/05/2022

APPELANTE suivant déclaration du 24/03/2022

II – M. [M] [T]

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 5]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Représenté par la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de BOURGES

aide juridictionnelle totale numéro 18033 2022/001363 du 02/06/2022

INTIMÉ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Janvier 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. PERINETTI, Conseiller chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CLEMENT Présidente de Chambre

M. PERINETTI Conseiller

Mme CIABRINI Conseillère

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme JARSAILLON

***************

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

**************

EXPOSE

Par ordonnance en date du 10 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Bourges a fait injonction à M. [M] [T] de payer à Mme [U] [L] épouse [G] la somme en principal de 10.000 euros au titre d’une reconnaissance de dette, outre les sommes de 175,64 euros au titre des frais de sommation de payer, 51,48 euros au titre des frais de requête et 319,86 euros au titre des intérêts calculés sur la période comprise entre le 24 janvier et le 2 décembre 2020.

Cette injonction de payer a été signifiée à personne par acte d’huissier en date du 18 décembre 2020.

Par courrier recommandé avec accusé de réception enregistré au greffe de la juridiction le 11 janvier 2021, M. [T] a formé opposition à cette ordonnance.

À l’audience tenue le 3 décembre 2021, Mme [L] épouse [G] a demandé au tribunal de :

– débouter M. [T] de son opposition,

– condamner M. [T] à lui payer la somme principale de 10.000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2020,

– condamner M. [T] à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [T] aux entiers dépens, comprenant les frais relatifs à la procédure d’injonction de payer ainsi que ceux de la sommation de payer,

– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

En réplique, M. [T] a demandé au tribunal de

– déclarer Mme [K] mal fondée en son action,

– débouter Mme [K] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner Mme [K] à lui payer la somme de 800 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [K] aux entiers dépens de la procédure, en ce compris ceux de la procédure d’injonction de payer.

Par jugement contradictoire du 9 février 2022, le Tribunal judiciaire de Bourges a :

‘ déclaré recevable l’opposition formée par M. [T] à l’encontre de l’ordonnance d’injonction de payer en date du 10 décembre 2020, n° 21 ‘ 20 ‘ 001065, rendue au profit de Mme [K],

‘ réduit à néant ladite ordonnance et,

statuant à nouveau,

‘ débouté Mme [K] en son action en paiement à l’encontre de M. [T] comme mal fondée,

‘ condamné Mme [K] à payer à M. [T] la somme de 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ condamné Mme [K] aux dépens de la procédure, en ce compris ceux de la procédure d’injonction de payer,

‘ débouté Mme [K] du surplus de ses demandes,

‘ rappelé que la présente décision était exécutoire de plein droit par provision.

Le Tribunal a notamment retenu que la reconnaissance de dette litigieuse avait bien été rédigée et signée par M. [T], qu’aucun élément objectif ne venait valider l’hypothèse soutenue par M. [T] d’une contrainte exercée à son encontre par Mme [G], que la reconnaissance de dette produite devait s’analyser en un commencement de preuve par écrit, que les documents émanant de la société Sofinco établissaient l’existence d’un prêt personnel au bénéfice de Mme [G] sans que le nom de M. [T] n’y apparaisse, que la somme objet du prêt avait été versée sur le compte joint des concubins et ne pouvait être considérée comme relevant de l’avantage exclusif de M. [T], et que les mensualités de remboursement de ce prêt étaient également prélevées sur le compte joint sans distinction d’origine des ressources.

Mme [G] a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 24 mars 2022.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 octobre 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu’elle développe, Mme [L] épouse [G] demande à la Cour de :

– Infirmer en totalité le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire en date du 09 février 2022 et notamment en ce qu’il a débouté Mme [G] de sa demande en paiement.

Statuant à nouveau,

Vu les articles 1103 et 1104 du Code Civil,

– Condamner M. [T] à payer à Mme [G] la somme principale de 10.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2020.

– Condamner M. [T] à payer la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel qui comprendront en outre ceux de la procédure d’injonction de payer ainsi que ceux de la

sommation de payer.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 22 août 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu’il développe, M. [T] demande à la Cour de :

– déclarer Mme [G] mal fondée en son appel et l’en débouter.

En conséquence,

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 9 février 2022 par le Tribunal

Judiciaire de Bourges.

Y ajoutant,

– condamner Mme [G] à verser à M. [T] une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles d’appel.

– condamner Mme [G] aux entiers dépens et allouer à la SCP Avocats Centre le bénéfice de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 2 janvier 2023.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir « dire et juger », « rappeler » ou « constater » ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu’il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n’y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt. Il en va de même de la demande de « donner acte », qui est dépourvue de toute portée juridique et ne constitue pas une demande en justice.

I l sera également observé que la recevabilité de l’opposition formée par M. [T] à l’ordonnance portant injonction de payer n’est pas querellée bien qu’elle figure au nombre des chefs frappés d’appel de la décision entreprise.

Sur la demande en paiement présentée par Mme [G] :

Les articles 1103 et 1104 du code civil posent pour principe que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L’article 1376 du même code dispose que l’acte sous signature privée par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent ou à lui livrer un bien fongible ne fait preuve que s’il comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l’acte sous signature privée vaut preuve pour la somme écrite en toutes lettres.

En l’espèce, Mme [G] produit, au soutien de sa demande, un document manuscrit sans titre, rédigé de la main de M. [T] qui ne conteste plus ce point à hauteur d’appel et signé par les deux parties, libellé comme suit :

« Je soussigner M. [T] [M] devoir la somme de 10.000 euro à Mme [G] [U] emprunté à son nom à Sofinco. Je m’engage à payer ces mensualité de 300 euro jusqu’à la fin de ce dernier. Fait à [Localité 4] pour valoire ce que de droit. 1/01/2020 »

Le tribunal a relevé, à juste titre, que ce document ne respectait pas les formes prescrites par l’article 1376 du code civil précité et ne pouvait de ce fait valoir reconnaissance de dette, mais seulement commencement de preuve par écrit.

Il peut être ajouté que le texte rédigé par M. [T] ne porte pas engagement de celui-ci à payer à Mme [G] une somme d’argent stricto sensu, mais à s’acquitter seul des échéances du prêt souscrit par celle-ci auprès de la société Sofinco.

Contrairement à ce que soutient Mme [G], l’argumentaire développé par M. [T] ne vise pas à relier artificiellement entre elles deux opérations juridiques distinctes, à savoir une reconnaissance de dette de M. [T] d’une part et un prêt accordé à Mme [G] d’autre part. Ce lien résulte en effet des termes mêmes du document rédigé par M. [T] qui concentre en une seule phrase la reconnaissance de sa dette et l’origine de celle-ci.

Aucun document relatif à la souscription de ce prêt par Mme [G] n’est versé aux débats, bien que le premier juge en ait pour sa part eu connaissance et ait visé, dans sa décision, des documents émanant de la société Sofinco, organisme prêteur, établissant que le prêt de 10.000 euros s’analysait comme un prêt personnel au bénéfice de Mme [K], tout en relevant que le nom de M. [T] n’y apparaissait pas.

M. [T] produit néanmoins plusieurs relevés du compte bancaire joint dont il disposait dans les livres du Crédit agricole Centre Loire avec Mme [G]. Il ressort du relevé relatif au mois d’octobre 2019 qu’un virement émanant de la CA Consumer Finance, identifié par une référence Sofinco, a été porté au crédit de ce compte, le 9 octobre 2019.

La réalité de ce prêt se trouve ainsi établie, cet élément venant corroborer le commencement de preuve par écrit, et caractérise la cause de l’obligation dont Mme [G] entend désormais se prévaloir.

Le versement de ces fonds sur le compte commun dont M. [T] et Mme [G], qui vivaient alors en concubinage et en avaient tous deux la libre disposition empêche de considérer que cette somme ait pu constituer un avantage exclusif au seul M. [T].

Il n’est nullement démontré que M. [T] ait employé la moitié de cette somme à l’acquisition d’un cheval, le 13 novembre 2019, ainsi que l’allègue Mme [G]. Si un retrait d’un montant de 6.000 euros a bien été effectué à partir de ce compte, le 12 novembre 2019, rien ne permet de déterminer que M. [T] en ait été seul bénéficiaire, le formulaire de retrait portant la signature des deux concubins. L’identification du client par la mention « M. [T] [M] ou », qui correspond aux indications portées sur la première ligne de chaque relevé de compte, est insuffisante à déterminer que ce retrait ait été effectué par M. [T] lui-même plutôt que par Mme [G].

Il peut également être relevé que Mme [G] a procédé, les 30 octobre 2019 et deux janvier 2020, au virement à partir de ce compte joint de sommes de 1.000 et 500 euros à destination de son compte bancaire personnel.

Le prélèvement par la CA Consumer Finance des échéances de ce prêt, d’un montant mensuel de 305,81 euros, a été pratiqué sur ce compte joint.

Les mouvements de fonds apparaissant sur ces relevés de compte indiquent, sans que Mme [G] ne le conteste, qu’à l’exception du montant du prêt en cause, le compte joint des concubins était principalement alimenté par des virements mensuels « Proman 099 » correspondant au salaire de M. [T].

Il se déduit de l’ensemble de ces éléments que la qualité de seul bénéficiaire du prêt litigieux que Mme [G] impute à M. [T] n’est pas démontrée. Les fonds versés sur le compte commun, qui ne sont pas identifiables à partir de leur versement, doivent être considérés comme ayant profité aux deux parties en présence.

À titre surabondant, il peut être relevé que Mme [G] n’établit nullement que M. [T] ait été défaillant dans le règlement des échéances mensuelles du prêt, auquel il s’était obligé en vertu de la convention conclue entre eux et matérialisée par le document ci-dessus évoqué.

En considération de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [G] de son action en paiement exercé à l’encontre de M. [T].

Il n’est de ce fait pas nécessaire de statuer sur l’argumentation développée à titre infiniment subsidiaire par M. [T] tenant au vice du consentement qui affecterait l’engagement qu’il a pris envers Mme [G].

Sur l’article 700 et les dépens :

L’équité et la prise en considération de l’issue du litige déterminée par la présente décision commandent de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner Mme [G], qui succombe en l’intégralité de ses prétentions, à verser à M. [T] la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés en cause d’appel qui ne seraient pas compris dans les dépens.

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie. Mme [G], partie succombante, devra supporter la charge des dépens de l’instance d’appel.

Le jugement entrepris sera enfin confirmé de ces chefs.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

– Confirme le jugement rendu le 9 février 2022 par le Tribunal judiciaire de Bourges en l’intégralité de ses dispositions ;

et y ajoutant,

– Condamne Mme [U] [L] épouse [G] à verser à M. [M] [T] la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Rejette toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;

– Condamne Mme [U] [L] épouse [G] aux entiers dépens de l’instance d’appel, qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’arrêt a été signé par O. CLEMENT, Président et par Mme MAGIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

S.MAGIS O. CLEMENT

 


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