Prêt entre particuliers : 9 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/05546

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Prêt entre particuliers : 9 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/05546

9 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG
21/05546

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 09 FÉVRIER 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/05546 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDLDR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 février 2021 – Juge des contentieux de la protection de NOGENT SUR MARNE – RG n° 11-20-000821

APPELANTE

La société COFIDIS, société anonyme à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 325 307 106 00097

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET HELAIN, avocat au barreau de l’ESSONNE

INTIMÉE

Madame [V] [T] épouse [H]

née le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 5]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– DÉFAUT

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 3 novembre 2015, Mme [V] [T] épouse [H] a contracté auprès de la société Cofidis un prêt personnel en regroupement de crédits antérieurs d’un montant de 24 300 euros, remboursable en 72 mensualités de 416,16 euros chacune moyennant un taux d’intérêts fixe de 7,16 % l’an.

Par ordonnance rendue le 28 juillet 2017 par le tribunal d’instance de Villejuif, il a été donné force exécutoire à la mesure de suspension de l’exigibilité des créances pendant une durée de 24 mois décidée par la commission de surendettement du Val-de-Marne le 13 avril 2017.

A l’issue du moratoire en août 2019, les échéances du crédit sont demeurées impayées et la société Cofidis s’est prévalue de la déchéance du terme du contrat.

Saisi le 29 octobre 2020 par la société Cofidis d’une demande tendant principalement à la condamnation de l’emprunteuse au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le tribunal de proximité de Nogent-sur-Marne, par un jugement contradictoire rendu le 5 février 2021 auquel il convient de se reporter, a :

– prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis à compter de cette date,

– écarté l’application de l’article 1231-6 du code civil et de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier,

– condamné Mme [H] à payer à la société Cofidis la somme de 19 368,10 euros,

– dit que cette somme ne portera pas intérêts au taux légal,

– rejeté la demande de capitalisation des intérêts,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [T] épouse [H] aux dépens.

Après avoir rappelé que l’office du juge encadré par l’article R. 632-1 du code de la consommation n’était enfermé dans aucun délai, le premier juge a constaté que le prêteur avait méconnu les dispositions des articles L. 311-18 et R. 311-5 du même code en ne mentionnant pas le montant des mensualités assurance comprise dans l’encadré de l’offre de crédit. Il a prononcé en conséquence la déchéance du droit aux intérêts puis a écarté l’application des dispositions des articles 1231-6 du code civil et L. 313-3 du code monétaire et financier afin d’assurer l’effectivité de la sanction de déchéance du droit aux intérêts contractuels.

Par une déclaration enregistrée le 22 mars 2021, la société Cofidis a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 31 octobre 2022, l’appelante demande à la cour :

– d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

– de condamner Mme [H] à lui payer la somme de 25 015,71 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,16 % l’an à compter de la mise en demeure du 20 juillet 2020,

– subsidiairement si la cour estimait que la déchéance du terme n’était pas acquise, de constater les manquements graves et réitérés de Mme [H] à son obligation contractuelle de remboursement et de prononcer la résolution judiciaire du contrat,

– de la condamner en conséquence à lui payer la somme de 25 015,71 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

– de la condamner à lui payer la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle soutient que l’article R. 311-5 du code de la consommation n’impose pas la mention du montant de l’assurance facultative dans l’encadré, que seules les sommes obligatoires doivent y figurer et que le contrat mentionne bien le montant des mensualités assurance comprise. Elle conteste donc toute déchéance de son droit à percevoir les intérêts et indique avoir valablement prononcé la déchéance du terme du contrat suite à une mise en demeure infructueuse, conformément aux dispositions de l’article L. 312-39 du code de la consommation et aux conditions générales du contrat.

Suivant acte d’huissier remis le 31 mai 2021 à étude, la déclaration d’appel et les conclusions d’appel ont été signifiées à Mme [H] qui n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 novembre 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience du 14 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Au regard de sa date de conclusion, c’est à juste titre que le premier juge a fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016. Les dispositions du code civil en leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats doivent trouver à s’appliquer.

Sur la recevabilité de l’action au regard du délai biennal de forclusion

Aux termes de l’article L. 311-52 du code de la consommation, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur, doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est notamment caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement dans le cadre d’un plan de surendettement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après l’adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 311-6 ou après décision du juge de l’exécution sur les mesures mentionnées à l’article L. 311-7.

En application de l’article 125 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi d’une demande en paiement de vérifier d’office même en dehors de toute contestation sur ce point et même en cas de non-comparution du défendeur que l’action du prêteur s’inscrit bien dans ce délai.

En l’espèce, suivant ordonnance rendue le 28 juillet 2017 par le tribunal d’instance de Villejuif, il a été donné force exécutoire à la mesure de moratoire de 24 mois octroyée à Mme [H] par la commission de surendettement du Val-de-Marne.

A l’issue du moratoire en août 2019, et selon historique de compte communiqué, les échéances du crédit sont demeurées impayées dès l’appel d’échéance du 13 août 2019 et la société Cofidis a assigné Mme [H] suivant acte du 29 octobre 2020, soit dans le délai de deux années. Son action est donc recevable.

Sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels

Les dispositions de l’article L. 311-18 du code de la consommation dans leur version applicable en la cause, prévoient que le contrat de crédit est établi par écrit ou sur un autre support durable. Il constitue un document distinct de tout support ou document publicitaire, ainsi que de la fiche mentionnée à l’article L. 311-6 du même code. Un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.

Le non-respect de ces dispositions est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts aux termes de l’article L. 311-48 du même code.

L’article R. 311-5 du même code fixe la liste des informations figurant dans le contrat et dans l’encadré mentionné à l’article L. 311-18 lesquelles doivent être rédigées en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit, en termes clairs et lisibles. Doivent notamment figurer dans l’encadré en caractères plus apparents :

a) Le type de crédit ;

b) Le montant total du crédit et les conditions de mise à disposition des fonds ;

c) La durée du contrat de crédit ;

d) Le montant, le nombre et la périodicité des échéances que l’emprunteur doit verser et, le cas échéant, l’ordre dans lequel les échéances seront affectées aux différents soldes dus fixés à des taux débiteurs différents aux fins du remboursement. Pour les découverts, il est indiqué le montant et la durée de l’autorisation que l’emprunteur doit rembourser ;

e) Le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux, le cas échéant tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux débiteur initial, ainsi que les périodes, conditions et procédures d’adaptation du taux. Si différents taux débiteurs s’appliquent en fonction des circonstances, ces informations portent sur tous les taux applicables ;

f) Le taux annuel effectif global et le montant total dû par l’emprunteur, calculés au moment de la conclusion du contrat de crédit. Toutes les hypothèses utilisées pour calculer ce taux sont mentionnées ;

g) Tous les frais liés à l’exécution du contrat de crédit, dont, le cas échéant, les frais de tenue d’un ou plusieurs comptes destinés à la mise à disposition des fonds ou au paiement des échéances de crédit et les frais liés à l’utilisation d’un instrument de paiement déterminé, ainsi que les conditions dans lesquelles ces frais peuvent être modifiés ;

h) Les sûretés et les assurances exigées, le cas échéant.

Le contrat signé par les parties prévoit une assurance facultative effectivement souscrite par Mme [H] au moment de la signature du contrat. Dès lors que l’assurance n’est pas imposée par le prêteur, comme c’est le cas en l’espèce, les dispositions légales et réglementaires précitées n’imposent pas que le coût mensuel de l’assurance et le montant de l’échéance assurance comprise figurent dans l’encadré inséré au début du contrat, ni que le montant total dû par l’emprunteur comprenne le montant de cette assurance facultative.

C’est donc en ajoutant aux textes précités que le premier juge a retenu que la société Cofidis encourrait la déchéance du droit aux intérêts contractuels sur ce fondement. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur le bien-fondé de la demande en paiement

L’appelante produit à l’appui de sa demande :

– l’offre préalable de crédit avec bordereau de rétractation,

– la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées (FIPEN),

– la fiche de dialogue (ressources et charges) et les pièces justifiant de l’identité et de la solvabilité de l’emprunteuse,

– le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement (FICP),

– la notice d’information relative à l’assurance,

– le document d’information propre aux regroupements de crédits,

– le tableau d’amortissement,

– l’historique de prêt,

– un décompte de créance.

Pour fonder sa demande en paiement, la société Cofidis justifie de l’envoi à l’emprunteuse les 6 juillet 2020 d’un courrier recommandé de mise en demeure exigeant le règlement sous 15 jours des mensualités impayées à hauteur de 4 777,50 euros sous peine de voir rendre exigible l’intégralité des sommes dues au titre du contrat. Un courrier recommandé de mise en demeure a également été adressé le 20 juillet 2020 à Mme [H] portant sur la somme totale de 25 015,71 euros.

C’est donc de manière légitime que la société Cofidis se prévaut de l’exigibilité des sommes dues et de la déchéance du terme du contrat.

En application de l’article L. 311-24 du code de la consommation dans sa version applicable au litige eu égard à la date de conclusion du contrat, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application des articles 1152 devenu 1231-5 et 1231 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.

Au vu des pièces justificatives produites, la créance de l’appelante s’établit de la façon suivante :

– échéances impayées : 4 161,60 euros

– capital restant dû à la date de déchéance du terme du contrat : 18 960,32 euros

– intérêts de retard sur échéances impayées arrêtés au 20 juillet 2020 : 142,31 euros

soit la somme totale de 23 264,23 euros.

Mme [H] est en conséquence condamnée à payer cette somme augmentée des intérêts au taux contractuel de 7,16 % l’an à compter du 20 juillet 2020 sur la somme de 23 121,92 euros.

L’appelante sollicite en outre la somme de 1 751,48 euros au titre de l’indemnité de résiliation.

Selon l’article D. 311-6 du code de la consommation, lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 311-24, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Il s’infère de cette disposition que la notion de capital restant dû fait référence au capital rendu exigible par l’effet de la déchéance du terme.

Or, la somme demandée par la société Cofidis est supérieure à 8 % de 18 960,32 euros et elle s’ajoute aux indemnités de même nature d’ores et déjà capitalisées s’agissant du regroupement de crédits antérieurs.

En conséquence, il est fait droit à la demande de la société Cofidis dans la seule limite de 1 euro.

Mme [H] est condamnée au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2020.

La sanction de déchéance du droit aux intérêts n’étant pas prononcée, il n’y a pas lieu de statuer spécifiquement sur l’application de la majoration du taux légal prévue par l’article L. 313-3 alinéa 1er du code monétaire et financier.

Le rejet de la demande de capitalisation des intérêts n’est pas contesté à hauteur d’appel de sorte que le jugement est confirmé sur ce point.

Les dispositions du jugement querellé relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées. En revanche rien ne justifie de la condamner aux dépens d’appel, alors qu’elle n’a jamais fait valoir aucun moyen ayant pu conduire le premier juge à statuer comme il l’a fait. La société Cofidis conservera donc la charge de ses dépens d’appel ainsi que de ses frais irrépétibles.

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut, par décision mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement dont appel sauf en ce qu’il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts, rejeté la demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et quant au sort des dépens ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare la société Cofidis recevable en son action ;

Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels ;

Condamne Mme [V] [T] épouse [H] à payer à la société Cofidis la somme de 23 264,23 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 7,16 % l’an à compter du 20 juillet 2020 sur la somme de 23 121,92 euros outre la somme de 1 euro augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2020 ;

Rejette le surplus des demandes ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Cofidis aux dépens d’appel.

La greffière La présidente

 


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