Prêt entre particuliers : 9 février 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/04319

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Prêt entre particuliers : 9 février 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/04319

9 février 2023
Cour d’appel de Douai
RG
20/04319

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 09/02/2023

N° de MINUTE : 23/143

N° RG 20/04319 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TICP

Jugement (N° 19-003425) rendu le 11 Mai 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Lille

APPELANTE

Sas Sogefinancement agissant par ses représentants légaux.

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Charlotte Herbaut, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉE

Madame [C] [M]

née le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 6] (59) – de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Défaillante, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 05 janvier 2021 par acte remis à personne

DÉBATS à l’audience publique du 07 décembre 2022 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 février 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 24 mars 2022

EXPOSE DU LITIGE

Suivant offre préalable acceptée le 20 janvier 2017, la société Sogefinancement a consenti Mme [C] [M] un prêt personnel d’un montant de 26’050 euros, remboursable en 48 mensualités, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 6,44 %.

Par avenant au contrat en date du 18 janvier 2018, les parties ont convenu d’un réaménagement de la dette soit 21 790,09 euros, payable en 85 mensualités de 334,09 euros avec assurance à compter du 1er avril 2018 .

Se prévalant du non-paiement des échéances convenues, la société Sogefinancement a par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 mars 2019, mis en demeure l’emprunteur de régler les échéances impayées pour un montant de 1 457,98 euros dans les 15 jours, puis par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 avril 2019, a notifié la déchéance du terme du contrat de crédit et a mis l’emprunteur en demeure de payer l’intégralité des sommes restant dues.

Par actes d’huissier délivrés les 11septembre 2019 et 28 février 2020, la société Sogefinancement a fait assigner en paiement Mme [M].

Par jugement réputé contradictoire en date du 11 mai 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :

– déclaré la société Sogefinancement recevable en son action,

– condamné Mme [M] à payer à la société Sogefinancement la somme de

14 .147,71 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2019,

– dit que la majoration des intérêts prévue à l’article L.313-3 du code monétaire et financier ne sera pas applicable à la présente décision,

– débouté les parties des autres demandes,

– condamné Mme [M] aux dépens,

– ordonné l’exécution provisoire de la décision.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 26 octobre 2020, la société Sogefinancement a relevé appel de l’ensemble des chefs de ce jugement, à l’exception du chef l’ayant déclarée recevable en ses demandes.

La société Sogefinancement a signifié sa déclaration d’appel à l’intimée par acte d’huissier délivré le 5 janvier 2021 à personne, et ses conclusions d’appelante, par acte d’huissier délivré le 27 janvier 2021à personne.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 17 mars 2022, et signifiées à Mme [M] par acte d’huissier délivré le 18 mars 2022 à personne, elle demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 11 mai 2020 en ce qu’il a :

– condamné Mme [M] à lui payer la somme de 14 147,71 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2019,

– dit que la majoration des intérêts prévue à l’article L.313-3 du code monétaire et financier ne sera pas applicable à la présente décision,

– débouté les parties des autres demandes,

Statuant à nouveau :

– à titre principal,

– dire n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels,

– condamner Mme [M] à lui payer la somme de 25 153,87 euros selon décompte arrêté au 11 mars 2022, outre les intérêts postérieurs au taux de 6,44 % l’an sur la somme de 20 735 euros,

– à titre subsidiaire, si la cour venait à confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a fait application de la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

– dire n’y avoir lieu à écarter la majoration prévue par l’article L.313-3 du code monétaire et financier,

– en tout état de cause, condamner Mme [M] à lui payer la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile s’agissant des frais irrépétibles de première instance, outre la somme de 1 200 euros pour ceux d’appel et les entiers frais et dépens.

Mme [M] n’a pas constitué avocat, ni conclu.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures de l’appelante pour l’exposé de ses moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue 24 mars 2022 et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 7 décembre 2022.

MOTIFS

Les textes du code de la consommation mentionnés dans l’arrêt sont ceux issus de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, en vigueur à la date de souscription du contrat de crédit.

Sur la demande en paiement

Pour déchoir l’organisme de crédit de son droit aux intérêts contractuels, le premier juge a estimé qu’il communiquait un document relatif à la consultation du FICP dont il n’est pas établi qu’il émanerait bien de la Banque de France, et qu’il ne pouvait se constituer une preuve à lui-même en remettant un document émanant de ses propres services pour justifier du respect des obligations que lui impose le code de la consommation.

Aux termes de L. 341-2 du code de la consommation, lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées à l’article L. 312-16, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge. L’article L. 341-8, prévoit que l’emprunteur n’est alors tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu, les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, étant restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Aux termes de l’article L. 312-16 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur, le prêteur consultant le fichier prévu à l’article L. 751-1, dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L.751-6 du même code.

Si cet article n’impose, dans sa rédaction applicable au litige, aucun formalisme quant à la justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) par les organismes prêteurs, l’article 12 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers prévoit, dans sa rédaction applicable au litige, que la communication des informations aux établissements et organismes s’effectue soit par une procédure de consultation sécurisée sur internet, soit par remise ou télétransmission d’un fichier informatique sur internet, et l’article 13 prévoit qu’en application de l’article L. 333-5 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu’ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l’article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l’article 2, conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable.

L’article 13 II de l’arrêté susvisé dispose que les établissements et organismes mentionnés à l’article 1er mettent en place des procédures internes leur permettant de justifier que les consultations du fichier ne se sont effectuées qu’aux fins mentionnées à l’article 2 et à elles seules.

Il est rappelé que la Banque de France ne délivre pas de récepissé de la consultation, et que s’agissant de la preuve d’un fait juridique que doit rapporter la banque, le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même n’est pas applicable. De plus, l’arrêté susvisé relatif au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers fait expressément référence, dans son article 13 relatif aux « modalités de justification et de conservation des données » aux « procédures internes » mises en place par les établissements de crédit.

En l’espèce, le document produit par la société Sogefinancement, qui correspond à la copie écran sur support papier du site de consultation du fichier auprès de la Banque de France – auprès de laquelle la société Sogefinancement justifie par ailleurs payer un abonnement pour les consultations – ne pouvait donc être considéré comme non-probant par le premier juge au seul motif qu’il émane des services de la banque.

Ce document intitulé ‘résultats interrogation Fichage FICP », daté du 24 janvier 2017, comprend le nom, le prénom, la date et le lieu de naissance de l’emprunteur, et s’agissant des renseignements obtenus : type d’interrrogation : automatique, résultat : aucun, ainsi que le numéro du contrat de crédit 199316831, motif de la consultation.

Il constitue un support durable conforme aux dispositions précitées, comporte le motif et le résultat de la consultation, et suffit en conséquence à faire la preuve de la consultation du FICP par la banque le 24 janvier 2017, soit antérieurement au déblocage des fonds le 1er février 2017.

Dès lors, la société Sogefinancement a dûment rempli ses obligations prévues par l’article L.312-16 du code de la consommation.

En conséquence, il convient de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a déchu la banque de son droit aux intérêts.

Sur la créance de la banque

En application des articles L. 312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur dans le remboursement d’un crédit à la consommation, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés ; jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt ; le prêteur peut demander en outre une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance, sans préjudice de l’application des articles 1231-5 du code civil.

Au regard des pièces communiquées par la banque, qui établit un décompte actualisé au 11 mars 2022, la créance sera fixée comme suit :

– échéances impayées : 1 670,45 euros

– capital restant dû : 19 064,55 euros

– intérêts échus au 9 mars 2022 : 3 896,24 euros

– à déduire : – 1 500 euros,

soit la somme de 23 131,24 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 6,44 % à compter du 12 mars 2022 sur la somme de 19 235 euros à laquelle il convient de condamner Mme [M].

Les fais d’exécution à hauteur de 411,81 euros non justifiés seront écartés.

Il convient également de condamner l’intimée à payer la somme de 1 610,82 euros au titre de l’indemnité légale de résiliation, avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2019, date de réception de la mise en demeure, en application de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil.

Sur les demandes accessoires

Les motifs du premier juge méritant d’être adoptés, le jugement déféré est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [M] qui succombe est condamnée aux dépens d’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile.

L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure, et la demande de la société Sogefinancement à ce titre sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire ;

Infirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relative aux dépens et à l’artice 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Condamne Mme [C] [M] à payer à la société Sogefinancement la somme de 23 131,24 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 6,44 % à compter du 12 mars 2022 sur la somme de 19 235 euros au titre du solde du contrat de

crédit ;

Condamne Mme [C] [M] à payer à la société Sogefinancement la somme de 1 610,82 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2019 au titre de l’indemnité légale de résiliation ;

Rejette la demande de la société Sogefinancement en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [C] [M] aux dépens d’appel.

Le greffier

Gaëlle Przedlacki

Le président

Yves Benhamou

 


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