9 février 2023
Cour d’appel de Chambéry
RG n°
20/01599
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 09 Février 2023
N° RG 20/01599 – N° Portalis DBVY-V-B7E-GST6
Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 16 Décembre 2020, RG 1120000322
Appelante
S.A.S. SOGEFINANCEMENT dont le siège social est sis [Adresse 3] – prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Georges PEDRO, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL LEXWAY, avocat plaidant au barreau de GRENOBLE
Intimé
M. [G] [Y] [K] [I]
né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 4] (PORTUGAL), demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me Orlando CANTON GONZALEZ, avocat au barreau de CHAMBERY
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l’audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 06 décembre 2022 par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, qui a rendu compte des plaidoiries
– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Selon offre préalable acceptée le 9 mai 2014, la société Sogefinancement a consenti à M. [G] [K] [I] un prêt en capital de 15 000 euros, remboursable en 84 mensualités de 215,55 euros, incluant les intérêts au taux nominal de 5,50 % l’an.
Par avenant au contrat régularisé le 24 juin 2016, le montant des sommes dues a été réaménagé en 108 mensualités de 145,48 euros selon un nouveau tableau d’amortissement.
A la suite d’impayés non régularisés, par requête déposée au greffe du tribunal judiciaire de Bonneville, la société Sogefinancement a sollicité une ordonnance d’injonction de payer contre M. [G] [K] [I].
Par ordonnance du 22 janvier 2020, le juge des contentieux de la protection de Bonneville a enjoint à M. [G] [K] [I] de payer la somme de 4 586,68 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 13 août 2019 et exclusion de l’application du taux majoré ainsi que la somme de 6,48 euros au titre des frais. L’ordonnance a été signifiée à M. [G] [K] [I] par acte délivré à étude d’huissier.
Par déclaration au greffe du 24 avril 2020, Monsieur [G] [K] [I] a formé opposition à cette ordonnance.
Par décision contradictoire du 16 décembre 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville a :
– déclaré recevable en la forme l’opposition formée par M. [G] [K] [I],
– mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer du 22 janvier 2020,
statuant à nouveau,
– déclaré la société Sogefinancement recevable à agir en paiement au titre de l’offre de prêt personnel du 9 mai 2014,
– dit que la société Sogefinancement est déchue du droit aux intérêts conventionnels,
– condamné M. [G] [K] [I] à payer à la société Sogefinancement la somme de 4 987,27 euros, en remboursement du solde du prêt personnel consenti le 9 mai 2014, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,
– autorisé M. [G] [K] [I] à se libérer de cette dette par fraction mensuelles de 200 euros, les paiements devant être faits avant le 20 de chaque mois, pendant 24 mensualités, la dernière mensualité étant égale au solde de la dette,
– exclut l’application du taux d’intérêt légal majoré prévu à l’article L. 313-3 du code monétaire et financier,
– dit qu’à défaut d’un seul paiement à son échéance, la totalité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible avec intérêt légal à compter de la date de la défaillance,
– dit que les paiements s’imputeront en priorité sur le capital,
– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [G] [K] [I] aux entiers dépens,
– rappelé que l’exécution provisoire du jugement, frais et dépens compris est de droit.
Par déclaration du 24 décembre 2020, la société Sogefinancement a interjeté appel de la décision.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 1er mars 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société Sogefinancement demande à la cour de :
– déclarer son appel recevable et bien fondé,
– infirmer le jugement rendu le 16 décembre 2020 en ce qu’il la déchoit de son droit aux intérêts conventionnels et en ce qu’il accorde des délais de paiement au débiteur,
en conséquence,
– condamner M. [G] [K] [I] à lui payer la somme de 9 938,58 euros outre intérêts au taux contractuel de 5,90 % et capitalisation des intérêts par années entières conformément à l’article 1343-2 du code civil, sur le principal de 9 223,47 euros, à compter du 2 septembre 2019,
– condamner celui-ci au paiement d’une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et capitalisation des intérêts par année entière, ainsi qu’aux dépens par application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
En réplique, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 3 juin 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [G] [K] [I] demande à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris,
– débouter la société Sogefinancement de l’ensemble de ses demandes,
– ordonner à la société Sogefinancement d’avoir à solliciter auprès de la banque de France la sa désinscription du fichier des incidents de paiement liés aux crédits accordés aux personnes physiques (FICP) qui devra intervenir dans un délai de 48 heures à compter de l’arrêt à intervenir,
– condamner la société Sogefinancement à lui payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Sogefinancement à payer les entiers dépens dont distraction pour ceux d’appel au profit de maître Canton Gonzalez, par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 mai 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la déchéance du droit aux intérêts
L’article R. 311-3 I 11° du code de la consommation, dans sa version applicable au présent contrat, dispose que le prêteur ou l’intermédiaire de crédit communique à l’emprunteur des informations concernant le taux annuel effectif global, à l’aide d’un exemple représentatif mentionnant toutes les hypothèses utilisées pour le calcul de ce taux. A défaut de communication de cette information, le prêteur s’expose à la déchéance du droit aux intérêts par application de l’article L. 311-48 du code de la consommation, dans sa version en vigueur au jour de la conclusion du contrat.
Or l’offre préalable litigieuse ne concernait pas un crédit autorisant plusieurs hypothèses de durée ou de montant des échéances mais un prêt classique mettant à disposition le montant du crédit en totalité et en une seule fois. L’offre et les informations pré contractuelles indiquent que le montant du TAEG a été calculé sur la base du montant du crédit (15 000 euros) et de la durée qu’elle mentionne (84 mois) selon l’hypothèse d’un décaissement unique du crédit.
Le montant total du prêt hors ou avec assurance facultative a été mentionné. De même, le montant des frais de dossier a bien été indiqué (120 euros). Ainsi la simple mention du taux effectif global était suffisante et la déchéance du droit aux intérêts n’est pas encourue de ce chef.
Par ailleurs, la banque verse aux débat la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées répondant aux critères légaux et dont l’emprunteur a reconnu avoir reçu un exemplaire.
En conséquence, la cour infirme le jugement déféré sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels.
Sur les sommes dues par M. [G] [K] [I]
La société Sogefinancement réclame les sommes de :
– 8 338,39 euros au titre du capital restant dû, outre intérêts au taux contractuel de 5,90 % et capitalisation des intérêts par années entières,
– 885,08 euros au titre des échéances impayées, outre intérêts au taux contractuel de 5,90 % et capitalisation des intérêts par années entières
– 715,11 euros au titre de la clause pénale.
Elle justifie du montant des échéances impayées et du capital restant dû (pièce 14). M. [G] [K] [I] sera donc condamné à payer à la société Sogefinancement la somme de 9 223,17 euros outre intérêts au taux contractuel de 5,50 % l’an à compter du 29 novembre 2019.
En ce qui concerne la demande de capitalisation des intérêts, il convient de relever que l’article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat litigieux, dispose que : ‘aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 312-21 et L. 312-22 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévus par ces articles’. Or la capitalisation des intérêts n’est pas mentionnée par ces textes. Par conséquent, la société Sogefinancement sera déboutée de sa demande au titre de la capitalisation des intérêts.
En ce qui concerne la clause pénale, il convient de relever que l’article 1152 ancien du code civil, applicable au présent contrat, dispose que : ‘Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l’exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite’.
En l’espèce, la société Sogefinancement réclame une pénalité d’un montant de 715,11 euros ce qui représente plus de 8% du capital restant dû, en l’espèce 8,58 %. La somme demandée est donc manifestement excessive comme dépassant le seuil légal et sera donc ramenée à néant, banque étant déboutée de sa demande à ce titre.
Sur les délais de paiement
M. [G] [K] [I] sollicite la confirmation du jugement entrepris. Or ce dernier lui avait accordé des délais de paiement en l’autorisant à s’acquitter de sa dette en 24 mensualités de 200 euros pour les 23 premières, la dernière étant égale au solde de la dette.
La cour observe que M. [G] [K] [I] ne verse aucune pièce de nature à justifier sa situation actuelle. En outre le paiement de 23 mensualités de 200 euros laisserait une somme due, hors intérêts de 4 623,17 euros dont le débiteur devrait s’acquitter, outre intérêts et frais, en une seule fois à la 24ème mensualité. Or il ne démontre pas qu’il serait en capacité de le faire. Par conséquent, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a accordé à M. [G] [K] [I] des délais de paiement.
Sur la désinscription du FICP
L’article 1er de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au contenu du fichier national des incidents de paiement dispose que le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) est géré par la Banque de France. Il centralise notamment les incidents de paiement correspondant au champ d’application défini à l’article 3, déclarés par les établissements de crédit et les sociétés de financement.
L’article 8 de ce texte prévoit que les informations inscrites au FICP sont conservées dans le fichier pendant cinq ans à compter de la date à laquelle l’incident est devenu déclarable. Elles sont radiées dès la réception de la déclaration du paiement intégral des sommes dues, effectué en application du II de l’article 6.
En conséquence, dans la mesure où M. [G] [K] [I] est toujours débiteur des sommes dues, sa demande de mainlevée de l’inscription au FICP ne peut pas prospérer. Il en sera donc débouté.
Sur les dépens et la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, M. [G] [K] [I] qui succombe sera tenu aux dépens d’appel et de première instance. En revanche aucune considération d’équité ne permet de faire application au profit de la société Sogefinancement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Infirme le jugement déféré
Statuant à nouveau,
Condamne M. [G] [K] [I] à payer à la société Sogefinancement la somme de 9 223,17 euros outre intérêts au taux contractuel de 5,50 % à compter du 29 novembre 2019,
Déboute la société Sogefinancement de ses autres demandes sauf celle relative aux dépens,
Déboute M. [G] [K] [I] de sa demande de délai de paiement,
Déboute M. [G] [K] [I] de sa demande de mainlevée de l’inscription au FICP,
Condamne M. [G] [K] [I] aux dépens de première instance et d’appel,
Déboute la société Sogefinancement de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Ainsi prononcé publiquement le 09 février 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente