Prêt entre particuliers : 8 décembre 2022 Cour d’appel de Papeete RG n° 20/00149

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Prêt entre particuliers : 8 décembre 2022 Cour d’appel de Papeete RG n° 20/00149
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8 décembre 2022
Cour d’appel de Papeete
RG n°
20/00149

N° 505

GR

————–

Copie exécutoire

délivrée à :

– Me Feuillet,

le 15.12.2022.

Copie authentique

délivrée à :

– Me Jacquet,

le 15.12.2022.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 8 décembre 2022

RG 20/00149 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 20/144, rg n° 16/00685 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 4 mai 2020 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 19 juin 2020 ;

Appelant :

M. [Y] [B], né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 10] – Algérie, de nationalité française, demeurant [Adresse 5] Thailande ;

Représenté par Me Thierry JACQUET, avocat au barreau de Papeete ;

Intimées :

La Sa Banque Socrédo, société anonyme d’économie mixte, au capital de 22 000 000 000 FCP, immatriculée au RCS de Papeete sous le n° Tpi 59 – 1-B, identifiée au répertoire territorial des entreprise sous le n° 075390 dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la pesonne de ses représentants légaux ;

La Sas Nacc, société par actions simplifiées, au capital de 9 032 380 Euros, immatriculée au RCS de Paris sous le n° 4087 917 111 RCS Paris, dont le siège social est sis [Adresse 4]d France, prise en la personne de ses représentants légaux ;

Représentées par Guillaume FEUILLET, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 26 août 2022 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 8 septembre 2022, devant M. RIPOLL, conseiller désigné par l’ordonnance n° 83/OD/PP .CA/21 du premier président de la Cour d’Appel de Papeete en date du 15 décembre 2021 pour faire fonction de président dans le présent dossier, Mme BRENGARD, président de chambre, Mme TISSOT, vice-présidente placée auprès du premier président, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par M. RIPOLL, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES :

La SAEM SOCREDO (BANQUE SOCREDO) a assigné en 2016 [Y] [B] en remboursement de deux prêts souscrits en 2007-2008 et du solde débiteur d’un compte. Elle a cédé ses créances à la société NACC qui a poursuivi l’instance.

Par jugement rendu le 4 mai 2020, le tribunal civil de première instance de Papeete a :

reçu l’intervention volontaire de la SAS NACC, en sa qualité de cessionnaire des créances détenues par la SAEM BANQUE SOCREDO à l’encontre de [Y] [B] ;

rejeté les fins de non-recevoir soulevées par [Y] [B] ;

déclaré recevable l’action de la SAEM BANQUE SOCREDO, aux droits de laquelle vient désormais la SAS NACC ;

condamné [Y] [B] à verser à la SAS NACC les sommes suivantes:

la somme de 5.519.089 F CFP avec intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2016 au titre du découvert du compte dépôt n°[XXXXXXXXXX01] ;

la somme de 29.812.243 F CFP, avec intérêts au taux de 3,95% sur la somme de 23.344.691 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt n°7135379 du 23 octobre 2007 devenu n°7217842 ;

la somme de 13.293.312 F CFP, avec intérêts au taux de 5,50% sur la somme de 10.946.125 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt immobilier n°7155410-01 du 22 septembre 2008 ;

débouté [Y] [B] de sa demande de dommages et intérêts ;

débouté les parties du surplus de leurs prétentions ;

ordonné l’exécution provisoire ;

dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 407 du Code de procédure civile de la Polynésie française ;

condamné [Y] [B] aux dépens.

Celui-ci a relevé appel par requête enregistrée au greffe le 19 juin 2020.

Par ordonnance rendue le 27 août 2021, le conseiller de la mise en état a rejeté ses demandes sur incident.

Il est demandé :

1° par [Y] [B], appelant, dans ses conclusions récapitulatives visées le 22 septembre 2021, de :

Infirmer le jugement n° 16/00658 rendu le 4 mai 2020 par le tribunal civil de première instance de Papeete en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

Avant dire droit :

Pour permettre à Monsieur [B] d’exercer son droit de retrait conformément aux dispositions de l’article 1699 du Code civil :

Ordonner aux sociétés NACC et BANQUE SOCREDO de produire non une attestation, mais l’acte intégral de cession des droits litigieux, avec la liste des droits litigieux cédés, et le prix de cession individualisé de chaque droit litigieux ;

À défaut,

Ordonner aux sociétés NACC et BANQUE SOCREDO d’indiquer le prix de cession des droits litigieux cédés, s’agissant de Monsieur [B], et d’en justifier ;

En tout état de cause,

Dire et juger irrecevables l’action et l’intervention de la société NACC prétendument aux droits de la BANQUE SOCREDO ;

Dire et juger irrecevables les demandes de la société NACC en toutes hypothèses ;

En conséquence,

La débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Dire et juger irrecevables les demandes de la BANQUE SOCREDO en raison de la prescription de son action ;

Dire et juger irrecevables les demandes de la BANQUE SOCREDO en raison de la forclusion de son action ;

Dire et juger irrecevables les demandes de la BANQUE SOCREDO en raison de l’absence de mises en demeure préalables régulières pour la dénonciation du découvert et la déchéance du terme des prêts ;

En toutes hypothèses,

Prononcer la déchéance totale du droit de la BANQUE SOCREDO aux intérêts ;

Dire et juger que les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront imputées sur le capital restant dû ;

Dire et juger que la BANQUE SOCREDO a commis une faute dans l’octroi des crédits ;

En conséquence

Débouter la BANQUE SOCREDO de ses demandes au titre des clauses pénales contractuelles de 10% ;

Dire et juger que le préjudice subi par l’appelant se compensera à hauteur de moitié avec le capital restant dû à la BANQUE SOCREDO à l’exception des intérêts, des frais, commissions et autres accessoires, et déduction faite des intérêts déchus ;

La condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel ;

2° par la société NACC, intimée, dans ses conclusions récapitulatives visées le 24 mai 2022, et par la BANQUE SOCREDO, intimée, dans ses conclusions visées le 24 février 2021 de :

dire irrecevable et en tout cas mal fondé Monsieur [B] en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

l’en débouter ;

en conséquence,

confirmer le jugement N° RG 16/00058 rendu le 4 mai 2020 par le tribunal civil de Première Instance de Papeete ;

condamner Monsieur [Y] [B] à payer à la société NACC la somme de 250.000 F CFP au titre des frais irrépétibles ;

condamner Monsieur [Y] [B] à payer à la BANQUE SOCREDO la somme de 150.000 F CFP au titre des frais irrépétibles ;

le condamner aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 26 août 2022.

Il est répondu dans les motifs aux moyens et arguments des parties, aux écritures desquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L’appel a été interjeté dans les formes et délais légaux. Sa recevabilité n’est pas discutée.

Sur la demande de productions :

[Y] [B] demande de :

Pour permettre à Monsieur [B] d’exercer son droit de retrait conformément aux dispositions de l’article 1699 du Code civil :

Ordonner aux sociétés NACC et BANQUE SOCREDO de produire non une attestation, mais l’acte intégral de cession des droits litigieux, avec la liste des droits litigieux cédés, et le prix de cession individualisé de chaque droit litigieux ;

À défaut,

Ordonner aux sociétés NACC et BANQUE SOCREDO d’indiquer le prix de cession des droits litigieux cédés, s’agissant de Monsieur [B], et d’en justifier.

Cette demande a été présentée sur incident et a été rejetée par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 27 août 2021 qui a retenu que :

Attendu que [Y] [B] a relevé appel d’un jugement qui l’a condamné à payer diverses sommes à la SAS NACC, cessionnaire de créances détenues par la banque SOCREDO représentant le découvert d’un compte de dépôt et le solde d’un prêt immobilier, et qui l’a débouté de ses exceptions et demandes reconventionnelles ;

Que ses moyens d’appel sont, essentiellement : l’inopposabilité à son égard de la cession de créances et le défaut de qualité de la société NACC ; la non-justification des créances cédées et du prix de cession ; la forclusion biennale de l’action du créancier professionnel du crédit ; le défaut de notification de la dénonciation du découvert et de la déchéance du terme aux domiciles élus du débiteur ; le défaut d’offre préalable et la déchéance du droit aux intérêts ; l’octroi abusif de crédit ;

Attendu que, par conclusions d’incident visées le 27 mai 2021, [Y] [B] demande de :

Pour permettre à Monsieur [B] d’exercer son droit de retrait conformément aux dispositions de l’article 1699 du Code civil :

Enjoindre aux sociétés NACC et BANQUE SOCREDO de produire non une attestation, mais l’acte intégral de cession des droits litigieux, avec la liste des droits litigieux cédés, et le prix de cession individualisé de chaque droit litigieux ;

À défaut,

Ordonner aux sociétés NACC et SOCREDO d’indiquer le prix de cession des droits litigieux cédés, s’agissant de Monsieur [B], et d’en justifier ;

Réserver les dépens de l’incident ;

Qu’il fonde sa demande de production de pièces sur les dispositions de l’article 1699 du code civil qui permettent au débiteur cédé de s’acquitter en remboursant le cessionnaire du prix réel de la cession ; qu’il fait valoir qu’il ne peut exercer ce droit s’il ne connaît pas les éléments dont il demande communication ;

Attendu que la société NACC et la banque SOCREDO, par conclusions sur incident visées le 23 juin 2021 demandent de dire la demande irrecevable et en tout cas mal fondée ;

Qu’elles font valoir qu’en cas de cession de droits litigieux, le débiteur cédé, défendeur à une action en paiement, qui conteste le droit du créancier après la cession, ne peut, selon la jurisprudence citée, exercer le droit de retrait prévu par l’article 1699 du code civil, lequel suppose que le droit cédé ait été litigieux ; que tel n’est pas le cas en l’espèce, puisque [Y] [B] n’avait pas formé de contestation sur le fond du droit cédé au jour de la cession, le 1er mars 2017 ; que le jugement entrepris a relevé que la cession de créance a été notifiée par conclusions du 19 novembre 2018 ;

Attendu que la cession de créance en cause est justifiée par la production d’une attestation de l’étude notariale [E] [U] [S] [W] à [Localité 12] à la date du 1er mars 2017;

Attendu que la présente instance a été engagée par requête de la banque SOCREDO du 9 décembre 2016 ; que [Y] [B] a été assigné à parquet, son adresse étant en Thaïlande ; qu’il a constitué avocat le 27 février 2018 et a conclu sur exceptions le 24 septembre 2018 et au fond le 6 février 2019 ; qu’il a en premier lieu excepté de la prescription de l’action de la banque et de l’absence de mises en demeure préalables régulières ; que la banque SOCREDO a pris le 19 novembre 2018 des conclusions afin de signification d’une cession de créances et que la société NACC est intervenue simultanément;

Attendu qu’il résulte de l’article 1700 du code civil que l’exercice du retrait litigieux par le débiteur cédé a pour condition qu’un procès ayant pour objet le fond du droit ait été déclenché avant la cession ; qu’en l’espèce, [Y] [B], défendeur à l’action, n’a présenté des fins de non-recevoir et des demandes reconventionnelles que postérieurement à la cession ; que les conditions prévues par les articles 1699 et 1700 du code civil ne sont donc pas réunies ;

Qu’il n’y a ainsi pas matière aux productions demandées.

[Y] [B] réitère devant la cour sa demande de ce chef en invoquant l’inopposabilité de la cession de créance à son égard. La société NACC conclut à la confirmation de l’ordonnance. Elle relève que le secret des affaires s’opposerait à la production d’informations concernant des débiteurs étrangers au litige, s’agissant d’une cession de nombreuses créances par un acte unique, et que le débiteur n’a pas présenté cette demande devant le premier juge.

Les dernières conclusions des parties ne contiennent pas de moyens qui remettent en cause l’ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état pour de justes motifs que la cour adopte.

La demande de productions avant dire droit faite par [Y] [B] sera donc rejetée.

Sur l’intervention de la société NACC :

[Y] [B] demande de :

Dire et juger irrecevables l’action et l’intervention de la société NACC prétendument aux droits de la BANQUE SOCREDO ;

Dire et juger irrecevables les demandes de la société NACC en toutes hypothèses ;

En conséquence,

La débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

Le jugement dont appel a retenu que :

-Selon les dispositions de l’article 195 du Code de Procédure civile de la Polynésie française: ‘L’intervention est formée par conclusions, communiquées aux parties pour y répondre dans le délai fixé par le juge. L’intervention ne peut retarder le jugement d’une affaire principale en état. Peuvent intervenir tous ceux qui justifient d’un intérêt. L’intervention peut également être ordonnée par le juge.’

-L’intervention volontaire de la SAS NACC, qui justifie être cessionnaire des créances détenues par la SAEM BANQUE SOCREDO à l’encontre de [Y] [B], régulière en la forme, sera déclarée recevable.

Les moyens d’appel sont : la cession de créance n’a jamais été signifiée au débiteur comme prescrit par l’article 1690 du code civil, qui s’applique seul au litige ; la signification n’a pas été faite par conclusions en première instance ; la cession ne portait pas sur une créance mais sur des droits litigieux.

La société NACC conclut que : la cession a été régulièrement faite par acte sous seing privé du 1er mars 2017, aucun formalisme ou consentement du débiteur n’est requis ; elle a été signifiée à l’appelant par conclusions d’intervention du 16 novembre 2018.

Sur quoi :

Aux termes de l’article 1690 alinéa 1 du code civil en vigueur en Polynésie française : Le cessionnaire n’est saisi à l’égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur.

Il est de jurisprudence constante qu’une assignation en justice du débiteur en paiement de la créance cédée vaut signification du transport (v. p. ex. Com. 4 juin 1996 B n° 154). Il en est de même en cas, comme en l’espèce, d’intervention du cessionnaire dans l’instance en paiement introduite par le cédant contre le débiteur cédé.

C’est vainement que [Y] [B] plaide l’irrecevabilité de cette intervention. Il a constitué avocat en première instance le 27 février 2018 et la procédure a été contradictoire à son égard. La BANQUE SOCREDO, partie principale, a notifié la cession de créances par conclusions visées par le greffe le 19 novembre 2018, et aucun élément de la procédure ne permet de retenir que ces écritures n’ont pas été régulièrement échangées. La société NACC est intervenue volontairement par conclusions visées le même jour dont rien ne permet non plus, nonobstant les contestations de l’appelant, de retenir qu’elles n’ont pas été régulièrement communiquées. Au demeurant, [Y] [B] a conclu au fond le 4 février 2019 sans invoquer alors l’irrecevabilité de l’intervention de la société NACC.

La cession de créance en cause a ainsi été régulièrement signifiée à [Y] [B] par les actes de procédure de la présente instance, en ce compris le jugement déféré et les conclusions échangées en cause d’appel. Elle produit donc effet à son égard, et la société NACC est recevable à intervenir en qualité de cessionnaire de la créance de la BANQUE SOCREDO contre [Y] [B].

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la prescription ou la forclusion de l’action :

[Y] [B] demande de dire et juger irrecevables les demandes de la BANQUE SOCREDO en raison de la prescription ou de la forclusion de son action.

Le jugement dont appel a retenu que :

-Selon les dispositions de l’article L 137-2 du code de la consommation, devenu l’article 218-2 : ‘L’action des professionnels, pour les biens ou services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.’ Selon les dispositions de l’article L 110-4 du code de commerce : ‘I- Les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes…’ Si les dispositions de l’article susvisé, sont, par application des dispositions de l’article L251-1 du code de la consommation, sont applicables dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, elles ne le sont pas en Polynésie française, de telle sorte que la prescription biennale prévue à l’article susvisé ne peut être invoquée en l’espèce. L’action de la SAEM BANQUE SOCREDO, aux droits de laquelle vient désormais la SAS NACC est dès lors soumise à la prescription décennale de l’article L 110-4 du code de commerce dans sa rédaction applicable en Polynésie française.

-Dès lors, la première échéance impayée remontant au 30 novembre 2014, et l’assignation étant intervenue le 25 octobre 2016. l’action de la SAS NACC venant aux droits de la SAEM BANQUE SOCREDO n’est pas prescrite.

Les moyens d’appel sont : la prescription de l’action est de deux ans en application de l’article 137-2 du code de la consommation qui est applicable en Polynésie française depuis 2009 ; sa forclusion est aussi de deux ans en application de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 ; le délai a couru à compter de l’échéance impayée la plus ancienne du 30/11/2014 et il était acquis quand l’instance a été introduite le 9 décembre 2016.

La société NACC conclut que l’article L137-2 du code de la consommation n’a pas été rendu applicable en Polynésie française.

Sur quoi :

La créance du chef d’un découvert du compte de dépôt n° [XXXXXXXXXX01] est née en exécution d’une convention de découvert en date du 30 novembre 2007. En raison du montant du découvert autorisé (5 MF CFP), ce crédit n’est pas soumis aux dispositions d’ordre public de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 relative a` l’information et a` la protection des consommateurs dans le domaine de certaines opérations de crédit (L. 78-22, art. 3, JOPF 11/06/1992 p. 1096 & D. 88-293 du 25/03/1988, JOPF 11/06/1992 p. 1100), et notamment au délai de forclusion de deux ans de l’action du créancier.

La prescription biennale qui s’applique à l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs a été édictée par l’ancien article L137-2 du code de la consommation issu de l’article 4 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile (JOPF 19/02/2009 p. 872). Mais, aux termes des articles 25-IV et 25-VIII de cette loi, ces dispositions ne sont pas applicables en Polynésie française.

Le jugement entrepris a à bon droit retenu que la prescription applicable à cette créance est celle de l’action entre commerçants et non-commerçants, qui est de dix ans. Elle a couru à compter de la mise en demeure adressée le 11 juin 2015. Elle n’était pas acquise au moment de l’introduction de l’instance le 25 octobre 2016, non plus qu’une forclusion.

Le prêt personnel n° 7135379 du 23 octobre 2007 a été consenti pour un montant de 30 MF CFP sous forme d’ouverture de crédit. Comme il vient d’être dit et pour les mêmes motifs, cette créance est soumise à une prescription décennale. Celle-ci a couru à compter de la déchéance du terme qui a été prononcée par la BANQUE SOCREDO, selon son décompte du 18 mai 2016, pour des échéances impayées depuis le 30 novembre 2014. La prescription n’était pas acquise au moment de l’introduction de l’instance, non plus qu’une forclusion.

Le prêt immobilier n° 7155410-01 du 22 septembre 2008 a été contracté en suite de l’acceptation d’une offre préalable faite au visa de la loi du 13 juillet 1979 relative à l’information et à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier. Ces dispositions d’ordre public, telles qu’en vigueur en Polynésie française (JOPF 11 mai 1995 p. 1034), ne contiennent pas de délai de prescription ou de forclusion particulier. Comme il vient d’être dit et pour les mêmes motifs, cette créance est soumise à une prescription décennale. Celle-ci a couru à compter de la mise en demeure adressée le 11 juin 2015. La prescription n’était pas acquise au moment de l’introduction de l’instance, non plus qu’une forclusion.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les mises en demeure :

[Y] [B] demande de dire et juger irrecevables les demandes de la BANQUE SOCREDO en raison de l’absence de mises en demeure préalables régulières pour la dénonciation du découvert et la déchéance du terme des prêts.

Le jugement dont appel a retenu que :

-Il résulte de la lecture des différents contrats et avenant signés par [Y] [B] les 23 octobre 2007, 22 septembre 2008, et 30 novembre 2011, et enfin l’avenant signé en septembre 2012 que ce dernier a déclaré plusieurs adresses géographiques différentes, mais qu’à chaque fois, la seule adresse postale précisée, notamment sur les tableaux d’amortissement, était BP 000460 à [Localité 11], étant précisé qu’il est constant qu’en Polynésie française, l’adresse postale est en général fixée dans une boîte postale, et est distincte de l’adresse géographique.

Il résulte par ailleurs de la lecture des retours des envois RAR que la validité de ladite boîte postale était confirmée, dès lors, aucune fin de non-recevoir ne sera accueillie de ce chef. Dès lors, l’action de la SAS NACC venant aux droits de la SAEM BANQUE SOCREDO sera déclarée recevable.

Les moyens d’appel sont : les mises en demeure avec notifications des déchéances du terme n’ont pas été envoyées aux adresses auxquelles le débiteur avait élu domicile, mais à une ancienne boîte postale, alors qu’il était connu de la banque que le débiteur avait déménagé en Thaïlande ; les créances ne sont pas exigibles.

La société NACC conclut à la confirmation du jugement pour ses motifs.

Sur quoi :

La convention de découvert en compte du 30 novembre 2007 porte élection de domicile de [Y] [B] à son adresse géographique lotissement [Adresse 8] (île de Tahiti). La dénonciation du découvert avec mise en demeure lui a été adressée à la boîte postale 460 [Localité 11]. La copie du récépissé d’avis de réception en date du 11 juin 2015 qui est produite ne mentionne ni signature du destinataire et date de réception, ni mention que le courrier n’a pas été distribué ou qu’il n’a pas été retiré. Un relevé de ce compte bancaire en date du 18 mai 2016 mentionne que [K] [B] est domicilié [Adresse 14] Thaïlande. C’est l’adresse à laquelle il a été assigné par exploit signifié à parquet le 25 octobre 2016.

Cette adresse en Thaïlande a été déclarée par [Y] [B] à la BANQUE SOCREDO au moment de la transformation, par avenant en date du 22 janvier 2014, en compte personnel du compte joint n° [XXXXXXXXXX01] sur lequel fonctionnait le découvert. Les clauses contractuelles qui ont alors été notifiées au débiteur renvoient aux stipulations de la convention d’autorisation de découvert (chap. V).

L’article 1139 du code civil en vigueur en Polynésie française dispose que : Le débiteur est constitué en demeure, soit par une sommation ou par autre acte équivalent, soit par l’effet de la convention, lorsqu’elle porte que, sans qu’il soit besoin d’acte et par la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure.

C’est le cas en l’espèce, puisque les conditions générales de ce contrat stipulent que la suppression de l’autorisation de découvert consentie à un particulier ne donne pas droit à un préavis et que le solde débiteur devient immédiatement exigible (art. 7 § 3).

Le jugement entrepris sera donc confirmé pour avoir à bon droit rejeté la fin de non-recevoir de ce chef.

Le prêt du 29 octobre 2007 porte élection de domicile à la même adresse géographique à Tahiti, ainsi que ses avenants. La lettre de mise en demeure n’est pas produite.

Les conditions générales de la banque prévoient que la mise en demeure en cas d’impayés, avec faculté pour la banque de prononcer la déchéance du terme, doit être faite par lettre recommandée adressée à l’emprunteur au domicile élu (art. 5). Il est de jurisprudence constante que, lorsque les parties ont convenu d’une condition de validité de la mise en demeure tenant à la forme de sa notification, si la mise en demeure est portée à la connaissance du destinataire d’une autre manière, la notification n’est pas valable et ne produit pas d’effet (v. p. ex. Cass. 1re civ., 15 juin 1994 : JCP N 1994, II, 206).

Or, il n’est pas justifié de l’envoi d’une lettre recommandée faite au domicile élu du débiteur. Mais la mise en demeure résulte néanmoins de l’assignation délivrée le 25 octobre 2016, car il est de jurisprudence constante que toute demande en justice vaut mise en demeure (v. p. ex. Cass. 1re civ., 21 juin 1988, n° 86-15.356).

Le jugement entrepris sera donc confirmé, par substitution de motifs, pour avoir rejeté la fin de non-recevoir de ce chef.

Le prêt immobilier du 22 septembre 2008 mentionne que l’adresse du débiteur est résidence [Adresse 13] (île de Tahiti). La mise en demeure lui a été adressée à la boîte postale 460 [Localité 11]. La copie du récépissé d’avis de réception en date du 11 juin 2015 qui est produite ne mentionne ni signature du destinataire et date de réception, ni mention que le courrier n’a pas été distribué ou qu’il n’a pas été retiré.

Les conditions particulières de ce prêt renvoient aux conditions générales précitées de la banque (article 5).

La mise en demeure produit ses effets lorsque le débiteur s’abstient de réclamer au service postal une lettre recommandée envoyée à bonne adresse (Civ. 1re 20 janv. 2021, n° 19-20.680). Mais tel n’est pas le cas lorsque l’adresse d’envoi n’est pas conforme aux stipulations contractuelles. S’il est exact, comme l’a relevé le jugement déféré, qu’en Polynésie française, l’adresse postale est en général fixée dans une boîte postale, et est distincte de l’adresse géographique, cette pratique n’est néanmoins pas de nature à priver d’effet l’élection de domicile à une adresse géographique dont les parties ont convenu. Au demeurant, l’article 109 du code civil en vigueur en Polynésie française établit le domicile au lieu du principal établissement, c’est-à-dire à une adresse géographique, et ce n’est que de convention expresse, en application de l’article 111, que les parties peuvent élire domicile en un autre lieu que celui du domicile réel, par exemple à une boîte postale. Or, il n’est pas justifié en l’espèce d’un tel accord. Si, comme le relève le jugement entrepris, les retours d’envois de lettres recommandées et des documents bancaires permettent de constater l’existence de la boîte postale en question, il demeure que celle-ci n’était pas le domicile élu.

Et, même à considérer que la transformation du compte joint de dépôt en compte personnel de [Y] [B] effectuée le 22 janvier 2014, qui mentionne l’adresse précitée en Thaïlande, aurait opéré une modification conventionnelle du domicile élu du débiteur pour tous les contrats de crédit en cours avec la banque SOCREDO, force est de constater que ce n’est pas à cette nouvelle adresse à l’étranger, mais à une BP 460 à [Localité 11] que les mises en demeure ont été adressées, du moins pour celles dont il est justifié.

La notification du 11 juin 2015 n’a pas été faite par la banque à l’adresse du débiteur contractuellement définie. La mise en demeure résulte par conséquent seulement de l’assignation du 25 octobre 2016 (Civ. 1re 21 juin 1988 préc.).

Le jugement entrepris sera donc confirmé, par substitution de motifs, pour avoir rejeté la fin de non-recevoir de ce chef.

Sur les intérêts :

[Y] [B] demande de prononcer la déchéance totale du droit de la BANQUE SOCREDO aux intérêts et de dire et juger que les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront imputées sur le capital restant dû.

Il fonde cette demande sur le non-respect des dispositions de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 à défaut d’offre préalable et de formulaire de rétractation.

La société NACC conclut à bon droit que ces dispositions ne s’appliquent pas à l’autorisation de découvert du 30 novembre 2007, en raison de son montant, ni au prêt immobilier du 22 septembre 2008, en raison de son objet. Elles ne s’appliquent pas non plus au prêt personnel du 29 octobre 2007 en raison de son montant.

Le prêt immobilier est, en revanche, soumis aux dispositions d’ordre public de la loi du 13 juillet 1979 en vigueur en Polynésie française, comme il a été dit. L’information qui doit être donnée par l’établissement de crédit à l’emprunteur fait l’objet d’une offre écrite qui doit (art. 5) :

-mentionner l’identité des parties, et éventuellement des cautions déclarées : ces renseignements figurent dans l’offre qui est produite par la société NACC acceptée le 22/09/2008 ;

-pre’ciser la nature, l’objet, les modalités du prêt, notamment celles qui sont relatives aux dates et conditions de mise à` disposition des fonds ainsi qu’a` l’échéancier des amortissements : l’offre indique que l’objet du prêt est le refinancement partiel de l’acquisition de deux appartements dans la résidence Le [Adresse 9] à [Localité 6] (Thaïlande) ; que les fonds seront mis à disposition de l’emprunteur en totalité ; un tableau d’amortissement est annexé ;

-indiquer, outre le montant du crédit susceptible d’être consenti et, le cas échéant, celui de ses fractions périodiquement disponibles, son coût total, son taux défini conformément à` l’article 3 modifie’ de la loi n° 66.1010 du 28 décembre 1966 relative a` l’usure, ainsi que, s’il y a lieu, les modalités de l’indexation : l’offre mentionne que le prêt est d’un montant de 20 MF CFP aux taux d’intérêt annuels nominal de 5,5 % et effectif global de 5,6106 % ; elle mentionne le coût total du prêt selon qu’il est avec ou sans assurance ;

-énoncer, en donnant une évaluation de leur coût, les stipulations, les assurances et les sûretés réelles ou personnelles exigées, qui conditionnent la conclusion du prêt : l’offre mentionne les garanties suivantes : délégation de l’assurance-décès de l’emprunteur à concurrence du montant du prêt, domiciliation de ses revenus sur son compte bancaire ;

-faire état des conditions requises pour un transfert éventuel du prêt à une tierce personne : l’offre mentionne que ce transfert est soumis à l’accord de la banque ;

-rappeler les dispositions de l’article 7 : l’offre mentionne qu’elle est valable 30 jours et qu’elle ne peut être acceptée par l’emprunteur qu’après dix jours par écrit et contre récépissé.

L’offre comporte une option d’adhésion à une assurance collective. Aux termes de l’article 6 de la loi du 13 juillet 1979, elle doit comporter en annexe au contrat de prêt une notice énumérant les risques garantis et précisant toutes les modalités de la mise en jeu de l’assurance. Cette notice n’est pas produite. Les conditions particulières de l’offre ne traitent que de la prime d’assurance-décès groupe.

Mais l’omission de cette dernière information n’est pas sanctionnée, aux termes de l’article 31 de la loi du 13 juillet 1979, par la déchéance du droit aux intérêts, qui n’est prévue qu’en cas de non-respect des dispositions des articles 5, 11 ou 24 de la loi.

[Y] [B], qui ne démontre pas avoir subi de préjudice en raison de cette seule omission, sera par conséquent débouté de sa demande de ce chef.

Sur le montant de la créance :

Le jugement dont appel a retenu que :

-Sur le découvert du compte dépôt n°[XXXXXXXXXX01] :

La SAS NACC venant aux droits de la SAEM BANQUE SOCREDO justifie par la production : de la convention de découvert signée le 21 mars 2016, du courrier RAR en date du 08 juin 2015, retourné avec la mention ‘NON- RÉCLAME RETOUR A L ‘ENVOYEUR’, par lequel la SAEM BANQUE SOCREDO a dénoncé le découvert, et lui demandant le remboursement de la somme totale de 5.016.265 F CFP, du relevé bancaire arrêté au 18 mai 2016 du compte dépôt n°[XXXXXXXXXX01], du décompte arrêté au 18 mai 2016, de ce que [Y] [B] est débiteur des sommes suivantes :

solde débiteur : 5.017.354 F CFP,

indemnité forfaitaire de 10% : 501.735 F CFP,

soit la somme de 5.519.089 F CFP qu’il sera condamné à verser à la SAS NACC, avec intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2016.

-Sur le prêt n°7135379 du 23 octobre 2007 devenu n°7217842 :

La SAS NACC venant aux droits de la SAEM BANQUE SOCREDO justifie par la production : de l’offre de contrat de crédit à la consommation n°7135379 signé le 23 octobre 2007 par [Y] [B], de l’avenant signé par les parties en septembre 2012, du courrier RAR du 08 juin 2015 ayant pour objet : ‘Mise en demeure’, par lequel la SAEM BANQUE SOCREDO a informé [Y] [B] de ce qu’il était redevable d’impayés d’un montant global de 2.238.628 F CFP, au titre de ce prêt, du décompte arrêté au 18 mai 2016, de ce que [Y] [B] est débiteur des sommes suivantes :

échéances échues impayées : 3.705.276 F CFP,

capital restant dû à la déchéance du terme : 23.344.691 F CFP,

indemnité forfaitaire de 10% : 2.762.276 F CFP,

soit la somme de 29.812.243 F CFP, avec intérêts au taux de 3,95% sur la somme de 23.344.691 F CFP à compter du 25 octobre 2016, qu’il sera condamné à verser à la SAS NACC,

-Sur le prêt immobilier n°7155410-01 du 22 septembre 2008 :

La SAS NACC venant aux droits de la SAEM BANQUE SOCREDO justifie par la production : du contrat de crédit immobilier n°7155410-01 signé le 22 septembre 2008 par [Y] [B], du courrier RAR du 08 juin 2015 ayant pour objet : ‘Mise en demeure ‘, par lequel la SAEM BANQUE SOCREDO a informé [Y] [B] de ce qu’il était redevable d’impayés d’un montant global de 11.783.239 F CFP, au titre de ce prêt, du décompte arrêté au 18 mai 2016, de ce que [Y] [B] est débiteur des sommes suivantes :

échéances échues impayées : 1.147.650 F CFP,

capital restant dû à la déchéance du terme : 10.946.125 F CFP,

indemnité forfaitaire de 10% : 1.199.537 F CFP,

soit la somme de 13.293.312 F CFP, avec intérêts au taux de 5,50% sur la somme de 10.946.125 F CFP à compter du 25 octobre 2016, qu’il sera condamné à verser à la SAS NACC.

Le jugement entrepris a ainsi exactement caractérisé que les créances dont le paiement est demandé sont certaines, liquides et exigibles.

Toutefois, compte tenu de ce que la mise en demeure du chef du prêt personnel et du prêt immobilier n’a produit effet, comme il a été dit, qu’à compter de l’assignation du 25 octobre 2016, il échet de calculer les intérêts conventionnels jusqu’à cette date sur la base du taux d’intérêt conventionnel non majoré.

Soit, pour le prêt n° 7217842, au vu du décompte produit : au lieu de 554 764 F CFP calculés au taux de 3,95 % pour la période du 17/11/2015 au 18/05/2016 : 328 380 F CFP en appliquant le taux d’intérêt de retard contractuel de 1,5 %.

Et, pour le prêt n° 7155410, au vu du décompte produit : au lieu de 335 371 F CFP calculés au taux de 5, 50 % pour la période du 17/11/2015 au 18/05/2016 : 83 843 F CFP en appliquant le taux d’intérêt de retard contractuel de 1,5 %.

Le jugement sera donc réformé comme suit sur le montant de ces deux condamnations, lequel sera fixé :

à la somme de 29 585 859 F CFP, avec intérêts au taux de 3,95% sur la somme de 23.344.691 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt n°7135379 du 23 octobre 2007 devenu n°7217842 ;

à la somme de 13 041 784 F CFP, avec intérêts au taux de 5,50% sur la somme de 10.946.125 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt immobilier n°7155410-01 du 22 septembre 2008.

Sur la demande de dommages et intérêts et de compensation :

[Y] [B] demande de dire et juger que la BANQUE SOCREDO a commis une faute dans l’octroi des crédits ; en conséquence, débouter la BANQUE SOCREDO de ses demandes au titre des clauses pénales contractuelles de 10% dire et juger que le préjudice subi par l’appelant se compensera à hauteur de moitié avec le capital restant dû à la BANQUE SOCREDO à l’exception des intérêts, des frais, commissions et autres accessoires, et déduction faite des intérêts déchus.

Le jugement dont appel a retenu que :

-Selon les dispositions de l’article 1134 du Code civil : ‘Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. ‘ Selon les dispositions de l’article 1152 du Code civil dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016 : ‘Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite. ‘ Cette rédaction issue la loi du 09 juillet 1975, n’est en effet pas applicable en Polynésie française, faute de disposition le prévoyant, de telle sorte que le juge n’a pas le pouvoir de modérer la clause pénale contractuellement prévue par les parties.

– Sur la demande de dommages et intérêts :

Il est constant que le banquier, en sa qualité de professionnel, est tenu d’un devoir de mise en garde à l’égard de l’emprunteur non averti sur l’inadaptation du prêt à ses capacités financières. C’est au débiteur qu’il appartient de démontrer le caractère excessif au regard de sa situation patrimoniale et de ses revenus au jour de l’octroi des crédits.

Outre que la qualité d’emprunteur non averti paraît difficilement applicable à [Y] [B], qui se déclarait, en 1988, lors de l’ouverture du compte courant, chef comptable de profession, et dont il est justifié qu’il est ou a été gérant ou co-gérant de plusieurs SCI et au moins d’une SARL, celui-ci ne produit strictement aucun élément ou justificatif de sa situation patrimoniale ou de ses revenus au jour de la souscription des divers engagements litigieux, de telle sorte qu’il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Les moyens d’appel sont : le crédit de 30 MF CFP remboursable en une échéance en octobre 2009 a aussitôt dû être étalé sur cinq ans ; le total mensuel des échéances des trois crédits était égal au salaire annuel de l’emprunteur (500 000 F CFP) ; la banque a manqué à son devoir de vérifier que le crédit accordé était adapté aux capacités de remboursement ; le préjudice créé par le surendettement consécutif doit être réparé par une compensation à hauteur de la moitié de la créance et par la suppression des pénalités de retard.

La société NACC conclut que l’appelant ne communique toujours aucun élément sur sa situation patrimoniale ; qu’il n’était pas un emprunteur non averti, mais un homme d’affaires dirigeant de nombreuses sociétés ; que l’indemnité forfaitaire de procédure de 10 % stipulée dans les contrats n’est pas une clause pénale, et que si elle en était une, le juge ne peut la modérer en l’état des textes applicables localement.

Ainsi que l’a retenu le jugement déféré, la preuve d’une faute du banquier dispensateur de crédit doit être faite par l’emprunteur qui l’invoque.

[Y] [B] ne justifie ni de son patrimoine, ni de ses revenus, ni de ses charges au moment où il a demandé et obtenu les crédits en cause.

La convention de découvert a été dénoncée par la banque après avoir fonctionné sans incident rapporté pendant sept ans et demi, et pour un dépassement modique (16 265 F CFP), quand l’établissement a constaté que la domiciliation mensuelle moyenne des revenus (140 000 F CFP) n’était pas adéquate au regard du montant du découvert autorisé (5 MF CFP). Mais aucun élément ne permet de retenir que cette situation existait au moment où la convention a été conclue.

Le prêt personnel a été garanti par une délégation d’assurance-décès de l’emprunteur. Il a fait l’objet d’avenant avec un rééchelonnement demandé par [Y] [B] sans que celui-ci mette alors en cause une imprudence de la BANQUE SOCREDO à son préjudice. Une exonération de pénalité de remboursement par anticipation a été stipulée, ce qui permet de conclure que la banque avait les informations lui permettant d’envisager que [K] [B] était suffisamment solvable pour se libérer rapidement.

Le prêt immobilier a été accordé pour refinancer l’acquisition de deux appartements en Thaïlande alors que [Y] [B] était établi en Polynésie française, ce qui permet de conclure qu’il disposait d’un patrimoine immobilier.

La société NACC produit des bulletins d’annonces légales qui indiquent que [Y] [B] a été, en Polynésie française, gérant de sociétés civiles ou commerciales. Il a notamment été cogérant d’une société civile SOUTH PACIFIC HOLDING, et il se déclare avoir été salarié de la société SOUTH PACIFIC MANAGEMENT. Sa profession déclarée au moment de l’ouverture de son compte bancaire en 1988 était chef comptable d’un hôtel à [Localité 7].

Il résulte de l’ensemble de ces éléments, qui sont constants et concordants, que [Y] [B] était un emprunteur averti. Dès lors, il ne peut engager la responsabilité de l’établissement de crédit que s’il démontre que ce dernier avait en sa possession des éléments que lui-même était en droit d’ignorer (v. p. ex. Cass. 1re civ., 12 juill. 2005, n° 03-10.770).

Mais [Y] [B] ne rapporte nullement cette preuve, ni même celle de l’insolvabilité qu’il allègue.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef, étant observé que la demande de suppression des pénalités de retard ne prospère pas davantage sur le fondement de la responsabilité civile que sur celui du pouvoir modérateur du juge, dont la décision déférée a à bon droit retenu qu’il n’est pas prévu par l’article 1152 du code civil dans sa rédaction en vigueur en Polynésie française.

Pour le surplus, il n’est ni constaté par la cour, ni soutenu que les contrats en cause contiennent des clauses illicites ou abusives.

Il sera fait application des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française au bénéfice de la société NACC. Les dépens seront mis à la charge de l’appelant qui succombe sur l’essentiel de ses demandes.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

En la forme, déclare l’appel recevable ;

Déboute [Y] [B] de ses demandes de production et de ses fins de non-recevoir ;

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a condamné [Y] [B] à verser à la SAS NACC les sommes suivantes :

la somme de 29 812 243 F CFP, avec intérêts au taux de 3,95% sur la somme de 23.344.691 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt n°7135379 du 23 octobre 2007 devenu n°7217842 ;

la somme de 13.293.312 F CFP, avec intérêts au taux de 5,50% sur la somme de 10.946.125 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt immobilier n°7155410-01 du 22 septembre 2008 ;

Statuant à nouveau de ces chefs :

Condamne [Y] [B] à verser à la SAS NACC venant aux droits de la SAEM SOCREDO les sommes suivantes :

la somme de 29 585 859 F CFP, avec intérêts au taux de 3,95% sur la somme de 23.344.691 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt n°7135379 du 23 octobre 2007 devenu n°7217842 ;

la somme de 13 041 784 F CFP, avec intérêts au taux de 5,50% sur la somme de 10.946.125 F CFP à compter du 25 octobre 2016, au titre du prêt immobilier n°7155410-01 du 22 septembre 2008 ;

Y ajoutant,

Déboute [Y] [B] de sa demande de déchéance du droit aux intérêts ;

Condamne [Y] [B] à payer à la société NACC la somme de 250 000 F CFP en application des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

Rejette toute autre demande ;

Met à la charge de [Y] [B] les dépens de première instance et d’appel, en ce compris les dépens de l’incident, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 409 du Code de procédure civile de la Polynésie française.

Prononcé à Papeete, le 8 décembre 2022.

Le Greffier, Le Président,

Signé : M. SUHAS-TEVERO Signé : G. RIPOLL

 


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