Prêt entre particuliers : 8 décembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/04585

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Prêt entre particuliers : 8 décembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/04585
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8 décembre 2022
Cour d’appel de Douai
RG n°
20/04585

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 08/12/2022

****

N° de MINUTE : 22/1029

N° RG 20/04585 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TI4P

Jugement (N° 1120000154) rendu le 22 octobre 2020 par le tj hors jaf, jex, jld, j. expro, jcp d’Arras

APPELANTE

Société My Money Bank anciennement dénommée Ge Sovac, Ge Capital Bank puis Ge Money Bank prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 5]

[Localité 3] / France

Représentée par Me Martine Mespelaere, avocat au barreau de Lille

INTIMÉ

Monsieur [L] [T]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 4] – de nationalité française

[Adresse 2]

Représenté par Me Matthieu Lamoril, avocat au barreau d’Arras

DÉBATS à l’audience publique du 14 septembre 2022 tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Convain, conseiller

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 décembre 2022 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 8 septembre 2022

– FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Selon offre préalable acceptée en date du 15 novembre 2007, M. [L] [T] s’est vu consentir par la société GE MONEY BANK, un prêt personnel d’un montant de 77.712 euros remboursable en 144 mensualités de 807,48 euros moyennant un taux d’intérêt annuel de 7,2 %. A la suite d’impayés, le contrat a été résilié.

Par acte d’huissier de justice en date du 7 février 2020, la société GE MONEY BANK a fait assigner en justice M. [L] [T] aux fins de voir :

– condamner M. [L] [T] a lui payer la somme de 12.441,29 euros à titre principal outre les intérêts au taux contractuel, a compter du 19 décembre 2019,

– ordonner la capitalisation des intérêts échus pour une année entière, sur le fondement de l’article 1154 ancien du code civil,

– condamner Monsieur [L] [T] aux entiers dépens et au paiement de la somme de 1.800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 22 octobre 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d’Arras, a :

– prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société GE MONEY BANK au titre du prêt souscrit par M. [L] [T] le 15 novembre 2007, à compter de cette date,

– débouté la société GE MONEY BANK de sa demande d’indemnité au titre de la clause pénale,

– débouté la société GE MONEY BANK de sa demande en paiement,

En conséquence,

– dit n’y avoir lieu à statuer sur la capitalisation des intérêts,

– dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de délai de paiement,

– rejeté la demande de la société GE MONEY BANK sur le fondement de

l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société GE MONEY BANK aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 10 novembre 2020, la société MY MONEY BANK a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a :

‘ prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société GE MONEY BANK au titre du prêt souscrit par M. [L] [T] le 15 novembre 2007, à compter de cette date,

‘ débouté la société GE MONEY BANK de sa demande d’indemnité au titre de la clause pénale,

‘ débouté la société GE MONEY BANK de sa demande en paiement,

‘ dit n’y avoir lieu à statuer sur la capitalisation des intérêts,

‘ rejeté la demande de la société GE MONEY BANK sur le fondement de

l’article 700 du code de procédure civile,

‘ condamné la société GE MONEY BANK aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de la société MY MONEY BANK (anciennement dénommée GE MONEY BANK) en date du 29 juin 2021, et tendant à voir:

– Dire bien appelé et mal jugé

– Infirmer le jugement frappé d’appel

– Débouter Monsieur [T] de l’intégralité de ses demandes

Statuant à nouveau,

– Condamner solidairement Monsieur [T] à hauteur de 12.441, 29 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 7,2% l’an à compter du 19 décembre 2019, date du dernier décompte.

– Voir ordonner la capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière, et ce par application de l’article 1154 ancien et application 1343-2 nouveau du Code Civil.

– Voir condamner Monsieur [T] à payer à la société MY MONEY BANK la somme de 1 800,00 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC.

– Le voir condamner en tous les frais et dépens de 1ère instance et d’appel.

Vu les dernières conclusions de M. [L] [T] en date du 27 avril 2021, et tendant à voir :

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire d’ARRAS en ce qu’il a :

– Prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société MY MONEY BANK au titre du prêt souscrit par Monsieur [L] [T] le 15 novembre 2007 ;

– Débouté la société MY MONEY BANK de sa demande d’indemnité au titre de la clause pénale ;

– Débouté la société MY MONEY BANK de sa demande en paiement ;

– Dit n’y avoir lieu à statuer sur la capitalisation des intérêts ;

– Dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de délai de paiement ;

– Rejeté la demande de la société MY MONEY BANK sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– Condamné la société MY MONEY BANK aux entiers frais et dépens ;

Sur l’appel incident et limité de monsieur [L] [T] :

– Constater l’irrégularité de l’offre de contrat de prêt émise par la société MY MONEY BANK ;

– Prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la société MY MONEYBANK ;

– Déclarer recevable la demande de Monsieur [L] [T] tendant à obtenir le remboursement des intérêts versés ;

– Condamner la société MY MONEY BANK à payer à Monsieur [L] [T] la somme de 37 032,59 euros au titre du paiement des intérêts indûment versés, majorée au taux légal à compte de l’arrêt à intervenir ;

– Condamner la société MY MONEY BANK à payer à Monsieur [L] [T] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société MY MONEY BANK au paiement des entiers frais et dépens.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures respectives.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 8 septembre 2022.

********

***

– MOTIFS DE LA COUR:

– SUR L’INVOCATION DE L’ABSENCE DE REMISE PAR LA BANQUE DE LA FICHE D’INFORMATIONS PRE CONTRACTUELLES POUR LÉGITIMER LA DÉCHÉANCE DU DROIT AUX INTÉRÊTS:

Au soutien de sa demande tendant à la déchéance du droit aux intérêts, M. [L] [T] fait valoir que la banque s’est abstenue de lui remettre la fiche d’informations précontractuelles.

Toutefois cette exigence réglementaire de remise d’une fiche d’informations précontractuelles résulte initialement de l’ancien article R 311-3 du code de la consommation qui fait partie de notre droit positif depuis l’entrée en vigueur du décret n°2011-136 du 1er février 2011.

Or dans le cas présent le contrat de prêt à la consommation a été souscrit le 15 novembre 2007 alors même que notre droit positif dans la sphère du crédit à la consommation n’imposait pas encore au prêteur la remise d’une fiche d’informations précontractuelles.

Par suite, M. [L] [T] n’est pas bien fondé à solliciter pour ce motif la déchéance du droit aux intérêts.

– SUR L’INVOCATION DE L’ABSENCE DE REMISE DE BORDEREAU DE RÉTRACTATION POUR LÉGITIMER LA DÉCHÉANCE DU DROIT AUX INTÉRÊTS:

L’ancien article L 311-15 du code de la consommation résultant de la loi n°93-949 du 27 juillet 1993 et applicable au présent litige, dispose:

‘Lorsque l’offre préalable ne comporte aucune clause selon laquelle le prêteur se réserve le droit d’agréer la personne de l’emprunteur, le contrat devient parfait dès l’acceptation de l’offre préalable par l’emprunteur. Toutefois, l’emprunteur peut, dans un délai de sept jours à compter de son acceptation de l’offre, revenir sur son engagement. Pour permettre l’exercice de cette faculté de rétractation, un formulaire détachable est joint à l’offre préalable. L’exercice par l’emprunteur de sa faculté de rétractation ne peut donner lieu à enregistrement sur un fichier.’

Par des motifs pertinents que la cour adopte, c’est à bon droit que le premier juge opérant une exacte et complète appréciation des faits de l’espèce dans la décision entreprise a considéré à bon droit que la mention de l’offre préalable située au dessus de la signature de l’emprunteur, selon laquelle celui-ci reconnaissait être en possession d’un formulaire détachable de rétractation ne permet nullement de prouver la conformité du bordereau de rétractation aux dispositions d’ordre public du code de la consommation à défaut de production d’un exemplaire identique à celui remis à l’emprunteur. Le premier juge en a ainsi déduit à juste titre que cette clause de style ne permet nullement d’inverser la charge de la preuve de la régularité de l’offre préalable au détriment de l’emprunteur. Par suite le premier juge a estimé de manière pertinente qu’en l’absence de production du bordereau de rétractation le tribunal ne peut vérifier sa conformité au modèle type.

De plus les éléments et justificatifs dont se prévaut la banque appelante devant la cour ne permettent pas de battre en brèche les appréciations objectives et nuancées du premier juge.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement querellé qui au regard de la défaillance du prêteur dans l’administration de la preuve de la remise du bordereau de rétractation, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société GE MONEY BANK au titre du prêt souscrit par M. [L] [T] le 15 novembre 2007, à compter de cette date.

– SUR LE MONTANT DE LA CRÉANCE:

Par des motifs pertinents que la cour adopte, c’est à bon droit que le premier juge dans la décision entreprise, a débouté la banque prêteuse de la demande d’indemnité au titre de la clause pénale étant entendu qu’à raison de la déchéance du droit aux intérêts et au regard des dispositions de l’article L 311-30 du code de la consommation, la banque ne peut prétendre au paiement de l’indemnité légale de 8%.

Par ailleurs par des motifs également pertinents que la cour adopte, c’est à juste titre que le premier juge a considéré qu’au regard du prononcé de la déchéance du droit aux intérêts entraînant l’exigibilité du seul capital, il apparaît que les remboursements ont été effectués à hauteur de la somme de 114.744,59 euros soit une somme supérieure au capital emprunté de 77.712 euros. Il en résulte donc que la créance revendiquée par le prêteur est nulle.

Par suite, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a débouté la société GE MONEY BANK de sa demande en paiement, et en conséquence, dit n’y avoir lieu à statuer sur la capitalisation des intérêts ainsi que sur la demande de délai de paiement.

Par ailleurs par des motifs pertinents qui méritent adoption c’est à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de la société GE MONEY BANK sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et condamné la société GE MONEY BANK aux entiers dépens. Le jugement querellé sera donc confirmé sur ces points.

– SUR L’APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE AU TITRE DE L’INSTANCE D’APPEL:

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [L] [T] les frais irrépétibles exposés par lui devant la cour et non compris dans les dépens d’appel.

Il convient dès lors de condamner la société MY MONEY BANK à payer à M. [L] [T] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

En revanche il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société MY MONEY BANK les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens d’appel.

Il y a lieu en conséquence de débouter la société MY MONEY BANK de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

– SUR LE SURPLUS DES DEMANDES:

Au regard des considérations qui précédent, il y a lieu de débouter les parties du surplus de leurs demandes.

– SUR LES DÉPENS D’APPEL:

Il y a lieu de condamner la société MY MONEY BANK qui succombe, aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,

– CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement querellé,

Y ajoutant,

– CONDAMNE la société MY MONEY BANK à payer à M. [L] [T] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,

– DÉBOUTE la société MY MONEY BANK de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,

– DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

– CONDAMNE la société MY MONEY BANK aux entiers dépens d’appel.

LE GREFFIER

Gaëlle PRZEDLACKI

LE PRESIDENT

Yves BENHAMOU

 


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