Prêt entre particuliers : 7 juin 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00399

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Prêt entre particuliers : 7 juin 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00399
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7 juin 2023
Cour d’appel de Limoges
RG n°
22/00399

ARRÊT N° 197

RG N° : N° RG 22/00399 – N° Portalis DBV6-V-B7G-BIKWH

AFFAIRE :

Organisme PÔLE EMPLOI NOUVELLE AQUITAINE agissant en la personne de son représentant légal.

C/

[S] [D]

[E] [P] es-qualité de curateur de Monsieur [S] [D] (selon jugement du juge des tutelles de Limoges en date du 19.05.2022)

88B demande en annulation d’une mise en demeure ou d’une contrainte

Grosse délivrée

Me A-H PLEINEVERT, Me DOUNIES, avocat

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU 07 JUIN 2023

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Le sept juin deux mille vingt trois la Chambre civile de la cour d’appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

ENTRE :

Organisme PÔLE EMPLOI NOUVELLE AQUITAINE agissant en la personne de son représentant légal.

Dont le siège social est sis au [Adresse 1]

représenté par Me Abel-Henri PLEINEVERT de la SCP PLEINEVERT DOMINIQUE PLEINEVERT ABEL-HENRI, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTE d’un jugement rendu le 05 MAI 2022 par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LIMOGES

ET :

[S] [D]

de nationalité française

né le 31 Janvier 1991 à [Localité 5] (87) ([Localité 5]),

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Amandine DOUNIES – SELARL AMANDINE DOUNIES – avocat au barreau de LIMOGES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/4574 du 21/09/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Limoges)

INTIME

[E] [P] es-qualité de curatrice de Monsieur [S] [D] (selon jugement du juge des tutelles de Limoges en date du 19.05.2022)

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Amandine DOUNIES – SELARL AMANDINE DOUNIES – avocat au barreau de LIMOGES

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Selon avis de fixation de la Présidente de chambre chargée de la Mise en Etat, l’affaire a été fixée à l’audience du 08 Février 2023 pour plaidoirie avec arrêt rendu le 22 mars 2023.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 janvier 2023

Conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Mme Marie-Laure LOUPY, Greffier, a tenu seule l’audience au cours de laquelle elle a été entendu en son rapport, les avocats des parties sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Après quoi, Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 12 Avril 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi. A cette date le délibéré a été prorogé au 10 mai 2023, puis au 31 mai 2023, puis au 07 juin 2023, les parties ayant été régulièrement avisées.

Au cours de ce délibéré, Madame Marie-Christine SEGUIN, a rendu compte à la Cour, composée de Madame Corinne BALIAN, Présidente de chambre, de Monsieur Gérard SOURY, et d’elle-même, Conseillers. A l’issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l’arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.

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LA COUR

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EXPOSE DU LITIGE :

Le 9 juillet 2021, Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine a décerné trois contraintes à l’encontre de M. [S] [D] pour le recouvrement de sommes indûment perçues par ce dernier au titre de l’allocation de retour à l’emploi pour la période du 1er juin 2016 au 30 novembre 2020.

M. [D] a formé opposition à l’encontre de ces contraintes qui lui ont été signifiées par actes d’huissier du 23 juillet 2021.

Par jugement contradictoire du 5 mai 2022, le tribunal judiciaire de Limoges a notamment :

– déclaré Pôle Emploi irrecevable pour cause de prescription en sa demande relative aux allocations d’aide au retour à l’emploi (ARE)versées avant le 23 juillet 2018 ;

– condamné M. [D] à payer à Pôle Emploi la somme de 477,91 euros, en 23 mensualités de 20 euros et le solde à la 24ème échéance ;

– dit que chacune des parties conserve la charge des dépens qu’elle a exposés.

Le tribunal judiciaire a :

– estimé que l’omission de déclaration de certaines périodes d’activités ne peut être qualifiée de fraude ou de fausse déclaration au sens de l’article L 5422-5 du code du travail, si bien que le délai de la prescription de l’action en remboursement se prescrit par trois ans ;

– considéré que Pôle Emploi rapporte la preuve de sa créance de remboursement pour la période du 23 juillet 2018 au 30 novembre 2020 ;

– relevé son incompétence pour connaître de la demande d’effacement de la dette sur le fondement de l’article L 332-5 du code de la consommation ;

– jugé qu’il y avait lieu d’accorder des délais de paiement à M. [D] compte tenu de sa situation.

Par jugement du 19 mai 2022, M. [D] a été placé sous curatelle simple avec désignation de Mme [E] [P] en qualité de curatrice.

*****

Par déclaration du 23 mai 2022 effectuée dans des conditions de forme et de délai non contestées, Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine a relevé appel de ce jugement.

L’affaire a été orientée à la mise en état.

*****

Par dernières conclusions signifiées et déposées le 9 décembre 2022, Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine demande à la Cour d’infirmer le jugement et de :

– condamner M. [D] à lui rembourser la somme globale de 9 182,54 euros à titre principal, outre les intérêts à compter des mises en demeure du 24 juillet 2017 ;

– subsidiairement, condamner M. [D] à lui verser la somme de 2 000 euros de dommages-intérêts pour préjudice distinct ;

– condamner M. [D] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, en ce compris les frais de signification des 3 contraintes.

*****

Par conclusions signifiées et déposées le 12 octobre 2022, M. [S] [D] a demandé à la Cour de :

– confirmer le jugement,

in limine litis,

– déclarer irrecevables les contraintes signifiées à son encontre en raison de la prescription de l’action en recouvrement de Pôle emploi pour les allocations de retour à l’emploi perçues antérieurement par M. [S] [D] au 23 juillet 2018 ;

au fond et subsidiairement,

– constater que M. [S] [D] est reconnu comme travailleur handicaper

par décision de la [6] du 20 juin 2017 et qu’il existe actuellement une procédure devant le juge des tutelles

– le déclarer irresponsable en raison du certificat médical du Docteur [L] du 3 septembre 2021 et suite au jugement rendu par le juge des tutelles de novembre 2021 qui a prononcé une mesure de curatelle simple à son bénéfice,

-ordonner, par application de l’article L332 ‘5 du code de la consommation, l’effacement total de sa dette ;

à titre très subsidiaire,

– lui accorder un délai de paiement selon un échelonnement de 15 euros par mois.

– débouter Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine de l’intégralité de ses demandes.

Par conclusions distinctes signifiées et déposées le 6 décembre 2022, Mme [E] [P], en sa qualité de curatrice de M. [D], demande à la Cour de juger recevable son intervention forcée et de statuer ce que de droit sur les dépens.

****

La Cour pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait expressément référence au jugement entrepris ainsi qu’aux dernières conclusions déposées.

La clôture de la procédure a été prononcée le 18 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

L’intervention de la curatrice de M. [S] [D] sera déclarée recevable.

Par lettres de son avocat du 23 juillet 2021,M. [S] [D] a formé opposition à trois contraintes émises par Pôle emploi le 9 juillet 2021, qui lui ont été signifiées par actes d’ huissier le 23 juillet 2021,

-contrainte n° UN121702290 :

Indû restant activité salariée du 1 er août 2016 au 9 août 2016: 287, 72€

Indû restant activité salariée du 1 er juin 2016 au 24 juin 2016 :259,17€

Indû restant activité salariée du 1 er juillet 2016 au 9 juillet 2016 :287,72€

– contrainte n° UN 121702291:

Indû restant activité salariée du 10 août 2016 au 30 septembre 2016: 382,01€

Indû restant activité salariée du 1 septembre 2016 au 19 septembre 2016 : 602,02€

Indû restant activité salariée du 1er février 2017 au 12 février 2017 :267,74€

– contrainte n° UN 121702292:

Indû activité non déclarée du 3 octobre 2017 au 31 juillet 2018 : 6618,25€

Indû activité non déclarée du 1 novembre 2020 au 30 novembre 2020 : 304,85€

Indû restant activité salariée du 1er mars 2020 au 5 avril 2020 : 173,06€

Ces oppositions, régularisées dans les conditions de forme et de délai prévues par la loi, sont recevables.

Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine exerce l’action en répétition de l’indu contre M. [S] [D], exposant que ce dernier a perçu de manière indue l’allocation de retour à l’emploi pour des périodes où il exerçait une activité salariée qu’il n’a pas déclarée.

M. [S] [D] oppose à l’action de cet organisme, la prescription triennale prévue par l’article L 5422-5 du code du travail, et soutient que le recouvrement des allocations versées antérieurement au 23 juillet 2018 est prescrit.

Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine oppose à la fin de non-recevoir soulevée par M. [S] [D], deux moyens de droit:

-la prescription décennale, applicable en cas de fraude ou de fausse déclaration du bénéficiaire,

-l’interruption de la prescription triennale par l’accord de règlement échelonné signé par M. [S] [D] le 22 juillet 2017.

Selon l’article L5422- 5 du code du travail, l’action en remboursement de l’allocation d’assurance indûment versée se prescrit par trois ans. En cas de fraude ou de fausse déclaration, elle se prescrit par dix ans . Ce délai court à compter du jour du versement de ces sommes.

Il incombe à Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine de démontrer la fraude ou les fausses déclarations de M. [S] [D] .

L’absence de contestation par M. [S] [D] de l’indû réclamé est insuffisant à démontrer la fraude de l’allocataire ou l’existence de fausses déclarations de sa part.

Il sera relevé qu’aucune poursuite pénale sur le fondement de l’article L365-1 du code du Travail, incriminant le fait de percevoir des allocations de chômage indues, n’a été engagée à l’encontre de M. [S] [D], qui n’a donc pas été condamné sur le fondement de ce texte.

Si la [4] a, le 6 décembre 2018, ordonné la suppression définitive de l’ARE versée par Pôle emploi à Monsieur [D] au motif que ce dernier avait effectué des déclarations mensongères lors de ses actualisations mensuelles auprès de Pôle emploi, il sera relevé que la décision produite n’ est accompagnée d’ aucun justificatif de sa notification à M. [S] [D] et qu’il ne peut donc être inféré de ce document, la preuve de son caractère définitif. Au demeurant, l’autorité de chose jugée éventuellement attachée à cette décision administrative, en l’absence de recours gracieux exercé devant le préfet de la région nouvelle Aquitaine ou de recours contentieux devant le tribunal administratif, ne concernerait que la décision proprement dite de suppression définitive pour l’avenir de l’ARE versée par Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine.

À cet égard, il sera relevé que la troisième contrainte décernée par Pôle emploi porte notamment sur un indû relatif à la période du 1 er mars 2020 au 30 novembre 2020.

Ainsi que l’a relevé à bon droit le premier juge, Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine n’a pas produit aux débats les déclarations litigieuses effectuées par M. [S] [D], se bornant simplement à produire la synthèse des activités déclarées à ses services qui se présente sous la forme d’un listing informatique extraite de l’ordinateur de cet organisme et dont il convient de déduire en creux, les activités salariées non déclarées par le bénéficiaire pour les périodes considérées, par rapprochement avec les déclarations d’emploi faites par les employeurs.

Ces seuls documents produits par Pole emploi émanant de ses propres services , sont insuffisants à démontrer la volonté délibérée et consciente de M. [S] [D] de laisser croire qu’il était toujours sans activité, étant observé que l’allocataire a été, en raison d’une altération de ses facultés mentales constatée médicalement, placé sous le régime de la curatelle simple le 19 mai 2022 avec nécessité d’être assisté pour l’administration de ses biens, ce qui, sans entraîner une déclaration d’irresponsabilité civile comme le sollicite à tort l’intimé, révèle l’existence de difficultés personnelles de ce dernier dans l’accomplissement d’actes de la vie civile .

En l’absence de production aux débats des déclarations personnelles effectuées par l’assuré faisant apparaître notamment qu’il a coché de manière systématique et délibérée la case chômage au lieu de la case emploi, la preuve d’une fraude ou de fausses déclarations intentionnelles ne se trouve pas suffisamment rapportée par Pôle EMPLOI.

L’action de cet organisme demeure donc soumise à la prescription triennale prévue par l’article rappelé ci-dessus, et est recevable pour la période postérieure au 23 juillet 2018.

S’agissant des allocations versées pour la période antérieure, comprise entre le 1 er juin 2016 et le 23 juillet 2018, Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine verse aux débats un échéancier de règlement signé le 22 juillet 2017 par M. [S] [D], par lequel ce dernier reconnaît devoir à Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine, la somme de 5228,33 € pour des allocations indûment perçues en 2016 et 2017.

Selon l’article 2240 du Code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait, interrompt le délai de prescription. À compter de la reconnaissance par le débiteur du droit du créancier, court un nouveau délai de prescription, lequel n’a pas pour effet de frapper le débiteur d’une déchéance du droit d’invoquer une nouvelle prescription.

En l’espèce, la reconnaissance de dette de M. [S] [D] dans l’accord d’échéancier du 22 juillet 2017 constitue un acte interruptif de prescription, de sorte qu’ à compter de cette date, un nouveau délai de trois ans a commencé à courir pour expirer le 22 juillet 2020. Or, les 2 contraintes afférentes aux allocations versées antérieurement au 23 juillet 2018 ont été émises le 9 juillet 2021 et signifiées le 23 juillet 2021 de sorte qu’ à la date de leur émission, la prescription de ces allocations était acquise .

Dans ces conditions , compte tenu de l’application de la prescription, M. [S] [D] est redevable de l’ARE perçue indûment pour la période du 23 juillet 2018 au 30 novembre 2020, et la décision du premier juge condamnant M. [S] [D] au paiement de la somme de 477,91€ sera confirmée.

Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine sera débouté du surplus de sa demande.

M. [S] [D] sera débouté de sa demande d’effacement de la dette, la juridiction n’ayant pas le pouvoir dans le cadre du présent litige d’ordonner l’effacement d’une dette.

Au regard de la situation de ressources et de charges dont il est justifié, les délais de paiement accordés à M. [S] [D] par le premier juge avec clause de déchéance seront confirmés.

*Sur les demandes accessoires :

Succombant en son recours , Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine supportera les dépens d’appel, ce qui exclut par ailleurs qu’il puisse bénéficier des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

Les dépens de première instance seront supportés par M. [S] [D] .

—==oO§Oo==—

PAR CES MOTIFS

—==oO§Oo==—

LA COUR,

Statuant publiquement par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Déclare recevable l’intervention volontaire à la procédure de Madame [E] [P], ès qualités de curatrice de M. [S] [D]

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a dit que chacune des parties conserverait la charge des dépens qu’elle a exposés,

Statuant de nouveau de ce chef,

Condamne M. [S] [D] aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Dit que les dépens d’appel seront supportés par Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine .

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

Marie-Laure LOUPY. Corinne BALIAN.

 


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