Prêt entre particuliers : 6 décembre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/01195

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Prêt entre particuliers : 6 décembre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/01195
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6 décembre 2022
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
21/01195

N° RG 21/01195 – N° Portalis DBVM-V-B7F-KY72

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SCP CONSOM’ACTES

Me Bernard BOULLOUD

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 06 DECEMBRE 2022

Appel d’un Jugement (N° R.G. 19/00573) rendu par le tribunal judiciaire de BOURGOIN JALLIEU en date du 12 janvier 2021, suivant déclaration d’appel du 08 Mars 2021

APPELANT :

M. [O] [D]

né le 14 Avril 1950 à [Localité 6] (38)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Régine PAYET de la SCP CONSOM’ACTES, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

S.A. DOMOFINANCE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités de droit audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Bernard BOULLOUD, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Emmanuèle CARDONA, présidente

Monsieur Laurent GRAVA, conseiller,

Madame Anne-Laure PLISKINE, conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 17 Octobre 2022, M. Laurent Grava conseiller, qui a fait rapport et, Mme Anne-Laure Pliskine, assistés de Frédéric Sticker, greffier, en présence de Céline Richard, greffière stagiaire, ont entendu seuls les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile.

Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [O] [D] a conclu deux contrats de fourniture et de prestation de services avec la SARL Groupe Eco Conseil Energie(GECE) suite à démarchage à domicile, le premier le 20 juillet 2017, portant sur le remplacement de l’ensemble des menuiseries de sa maison et l’isolation des combles, le second signé vraisemblablement en août 2017, portant sur l’installation d’une pompe à chaleur, contrats financés au moyen de deux crédits affectés souscrits auprès de la société Domofinance les 8 et 25 août 2017 :

– le premier d’un montant de 16 200 euros, remboursable par échéances mensuelles de 187,69 euros, incluant les intérêts au taux de 2,92 % l’an,

– le second d’un montant de l3 800 euros, remboursable par échéances mensuelles de 124,89 euros, sans intérêts.

La société GECE a été placée en redressement judiciaire le 28 novembre 2018, Me Meynet et Me Sabourin ayant été nommés respectivement administrateur judiciaire et mandataire judiciaire.

Par actes des 28 août et 2 septembre 2019, M. [D] a fait assigner la société Domofinance, d’une part, Me Robert-Louis Meynet et Me Bernard Sabourin, ès qualités d’administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire de la société GECE, d’autre part, devant le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu, en nullité des contrats.

Par jugement du 20 novembre 2019, le tribunal de commerce de Lyon a adopté le plan de redressement de la société GECE et désigné Me Meynet en qualité de commissaire à l’exécution du plan.

Par ordonnance du 24 mars 2020, le juge de la mise en état de [Localité 5] a suspendu l’exécution des contrats de crédit, à la demande de M. [D] et invité les parties à conclure au fond sur l’absence en la cause de la société GECE désormais in bonis et sur la qualité des organes du redressement judiciaire à la représenter.

Par jugement réputé contradictoire en date du 12 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu a :

– prononcé la nullité des deux contrats de prestation de services conclus en 2017 entre la société Groupe Eco Conseil Energie, vendeur et M. [O] [D], acquéreur, portant sur le remplacement de l’ensemble des menuiseries de sa maison et l’isolation des combles, d’une part, l’installation d’une pompe à chaleur, d’autre part ;

– constaté la nullité des contrats de crédit affectés à ces prestations de service conclus les 8 et 25 août 2017 entre la société Domofinance, prêteur et M. [O] [D], emprunteur ;

– condamné M. [O] [D] à payer à la société Domofinance les sommes de 12 203,02 euros pour le crédit du 8 août 2017 et de 8 933,95 euros pour le crédit du 25 août 2017 ;

– débouté M. [O] [D] de ses autres demandes ;

– débouté la société Domofinance de ses autres demandes ;

– condamné la société Domofinance à payer à M. [O] [D] la somme de 2 000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté la demande de Me Robert-Louis Meynet en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société Domofinance aux dépens de l’instance, distraction au profit de Me Agnès Derberian, avocat, sur son affirmation de droit ;

– dit n’y avoir lieu a exécution provisoire de la présente décision.

Par déclarations en date du 8 mars 2021, M. [O] [D] a interjeté appel de la décision.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 21 octobre 2021, M. [O] [D] demande à la cour de :

Sur son appel principal

– dire recevable et bien fondé son appel ;

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a :

« – condamné à payer à la société Domofinance les sommes de 12 203,02 euros pour le crédit du 8 août 2017 et de 8 933,95 euros pour le crédit du 25 août 2017 ;

– débouté de ses autres demandes » ;

Statuant à nouveau,

Au regard des multiples fautes relevées à l’encontre de la société Domofinance, tant à titre personnel qu’en sa qualité de mandante,

– dire et juger que celle-ci est privée de sa créance de restitution du capital emprunté sur les deux crédits affectés ;

Subsidiairement,

– dire et juger que ses fautes ont causé un préjudice à M. [D], constitué par la perte d’une chance de ne pas contracter ;

En conséquence,

– condamner la société Domofinance à lui verser des dommages-intérêts équivalant aux montants du capital emprunté sur les deux contrats crédits affectés ;

Plus subsidiairement,

Si la cour devait confirmer le jugement,

– dire et juger que les remboursements feront conformément aux contrats dont l’exécution a été suspendue ;

En tout état de cause,

– condamner la société Domofinance à verser à M. [O] [D] une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel d’un montant de 3 000 euros ;

– la condamner aux entiers dépens ;

Sur l’appel incident de la SA Domofinance

– confirmer le jugement en ce qu’il a :

« – prononcé la nullité des deux contrats de prestation de services conclus en 2017, entre la société GECE vendeur et M. [D] [O] acquéreur, portant sur le remplacement de l’ensemble des menuiseries de sa maison et l’isolation des combles d’une part et l’installation d’une pompe à chaleur d’autre part ;

– constaté la nullité des contrats de crédit affectés à ces prestations de services conclus les 8 et 27 août 2017 entre la société Domofinance prêteur et M. [O] [D] emprunteur ;

– débouté la société Domofinance de ses autres demandes et l’a condamnée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ».

Il expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

– il rappelle les faits, l’opération de réhabilitation, les financements et la procédure ;

– il conteste sa condamnation à restituer le capital emprunté ;

– dès lors que la nullité des contrats prononcés implique la désinstallation du matériel fourni et le remboursement du prix, il est sans effet de démontrer l’existence d’un dysfonctionnement quelconque des matériels installés comme retenu par le juge ;

– en l’espèce, son préjudice résulte dans l’impossibilité pour lui de faire valoir sa créance de restitution du prix suite au prononcé de la nullité des contrats, à l’encontre de la SARL Groupe Eco Conseil Energie (GECE) du fait de la mise en ‘uvre de la procédure collective ; et ce au moins pendant toute la durée de plan de redressement arrêté par le tribunal de commerce de Lyon, soit pour une durée de cinq ans (à compter de novembre 2019) ;

– en revanche, rien n’empêche la SARL GECE de procéder à la désinstallation du matériel s’agissant d’une obligation de faire ;

– la faute de la société Domofinance a nécessairement causé un préjudice à M. [D] constitué par la perte d’une chance de ne pas contracter ;

– il détaille les fautes qu’il reproche à la société ;

– s’il y a faute, il doit y avoir sanction ;

– les contrats de crédit n’ont fait l’objet d’aucune déchéance du terme ;

– leur exécution a été suspendue par ordonnance du JME du 24 mars 2020, en application de l’article L. 312-55 du code de la consommation ;

– si la cour devait confirmer la décision du tribunal, il sera jugé que M. [D] pourra reprendre le paiement des mensualités jusqu’à concurrence des sommes due ;

– en l’espèce, il n’est pas établi que M. [D], consommateur profane en la matière, ait eu connaissance et conscience des vices affectant les contrats principaux et ait manifesté de façon non équivoque une volonté de couvrir les irrégularités relevées postérieurement dans le cadre de la procédure ;

– ces deux conditions sont en effet cumulatives ;

– ni l’acceptation de la livraison et installation du matériel, ni la signature des attestations de fin de travaux ou fiche de réception des travaux complétés par le vendeur, ni le paiement des échéances du prêt, ne sauraient valoir acceptation tacite du contrat principal, sans connaissance des irrégularités dont il est atteint dont M. [D] ne pouvait pas connaître soit en l’absence de remise des contrats, soit en sa qualité de profane.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 10 juin 2021, la SA Domofinance demande à la cour de :

– rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires ;

– confirmer le jugement du 12 janvier 2021 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a :

« – prononcé la nullité des deux contrats de prestations de services entre la société Groupe Eco Conseil Energie (GECE) et M. [O] [D] ;

– constaté la nullité des contrats de crédit affecté à ces prestations de services conclus les 8 et 25 août 2017 entre la société Domofinance et M. [O] [D] ;

– débouté la société Domofinance de ses autres demandes ;

– condamné la société Domofinance à payer à M. [O] [D] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société Domofinance aux dépens de l’instance » ;

Statuant à nouveau, déclarant la société Domofinance recevable et bien fondée en son appel incident et en conséquence,

– déclarer M. [O] [D] mal fondé en toutes ses demandes et l’en débouter ;

– juger que les contrats unissant M. [O] [D] à la société GECE sont réguliers ;

– juger que la société Domofinance n’a manqué à aucune de ses obligations à l’égard de M. [O] [D] et n’a commis aucune faute ;

– de ce fait, ordonner à M. [O] [D] de continuer à honorer les deux crédits affectés litigieux souscrits auprès de la société Domofinance ;

A titre subsidiaire, si la cour estimait que les contrats principaux contenaient certaines irrégularités,

– juger que M. [O] [D] a exécuté volontairement son obligation après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée ;

– juger que M. [O] [D] a bien accepté la livraison, puis la pose du matériel, la demande de crédit, la signature des attestations de fin de travaux et le paiement des échéances du prêt ;

– juger de ce fait qu’en agissant de la sorte, M. [O] [D] a entendu couvrir une éventuelle nullité ;

– de ce fait, ordonner au requérant de continuer à honorer les crédits affectés souscrits auprès de la société Domofinance ;

Plus subsidiairement, si les contrats unissant M. [O] [D] avec la société Domofinance étaient annulés,

– remettre les parties dans l’état où elles se trouvaient antérieurement à la conclusion des contrats.

En conséquence,

– juger que les contrats principaux ont été exécutés ;

– juger de ce fait que M. [O] [D] ne justifie d’aucun préjudice que lui aurait causé le comportement de la banque, ce dernier eût-il été fautif ;

– condamner M. [O] [D] à rembourser à la société Domofinance le capital financé pour les deux contrats de crédits, déduction faite des versements ayant déjà pu intervenir ;

– condamner la société GECE à garantir M. [O] [D] du remboursement de son prêt ;

– condamner la société GECE à verser à la société Domofinance des dommages-intérêts correspondant au montant du capital des contrats de prêts ;

A titre infiniment subsidiaire, si l’annulation des contrats unissant M. [O] [D] à la société Domofinance était prononcée du fait de la société GECE,

– condamner la société GECE à rembourser à la société Domofinance le montant du capital financé prévu par les contrats outre le montant correspondant aux intérêts contractuels non remboursés par l’emprunteur ;

En tout état de cause,

– condamner M. [O] [D] à payer à la société Domofinance la somme de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [O] [D] aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction faite au profit de Me Bernard Boulloud, avocat, sur son affirmation de droit.

Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

– elle rappelle les faits, le projet et la procédure ;

– après avoir reçu deux fiches de réception des travaux signées et datées du 16 août 2017 et du 8 septembre 2017, la société Domofinance a logiquement adressé les sommes dues à l’installateur, la société GECE ;

– les contrats principaux sont valides et donc les contrats de prêt le sont aussi ;

– seule l’absence de mention sur le contrat principal est une cause de nullité, et non une imprécision de la mention ;

– de plus, il y a une couverture de la nullité par le requérant du fait de son acceptation tacite des contrats principaux ;

– lorsque le consommateur adresse la demande de financement à l’établissement prêteur en attestant de l’exécution conforme des travaux, il exécute volontairement le contrat principal, d’une part, en indiquant qu’il accepte les travaux réalisés et de ce fait les réceptionne, d’autre part, en demandant au prêteur qu’il paie le prix des travaux ;

– lorsque l’irrégularité a une nature formelle, elle est visible à la seule lecture du contrat de sorte que l’exécution de ce dernier intervient en connaissance de cause ;

– en l’espèce, M. [O] [D] a bien accepté la livraison, puis la pose du matériel, la demande de crédit (appel à financement signé par M. [D]), la signature de l’attestation de fin de travaux et le paiement des échéances du prêt ;

– Il a également signé avec EDF un certificat d’économie d’énergie et un contrat pour la vente de la production d’électricité ;

– il a donc accepté de manière certes tacite, mais non équivoque les contrats principaux et la nullité ne peut dès lors plus être invoquée ;

– Domofinance ne saurait engager sa responsabilité ;

– il n’existe aucun texte, dans quelque code que ce soit, qui fasse obligation au prêteur professionnel de vérifier la régularité du contrat principal conclu par l’emprunteur qui souscrit un crédit pour en payer le prix ;

– une norme légale, réglementaire, conventionnelle ou professionnelle est nécessaire aux fins de caractériser une faute d’abstention ;

– il ne revient pas au prêteur d’apprécier et de conseiller son client sur les contrats que ce dernier entend conclure dans son intérêt propre ;

– il existe même un principe de non-immixtion du prêteur qui finance les travaux ;

– il faut donc la nécessité d’une faute propre du prêteur pour dispenser l’emprunteur du remboursement du capital en cas d’inexécution du contrat principal ;

– le prêt souscrit par M. [D] est un éco-prêt à taux zéro ;

– dans ce type de contrat à taux zéro, il n’y a en principe pas d’attestation de fin de travaux ;

– après validation de la facturation, les fonds sont débloqués au bénéfice de la société ;

– c’est après avoir reçu d’une part, la facture et d’autre part l’appel à financement et la fiche de réception des travaux dûment signées par l’emprunteur, ce que ce dernier ne conteste pas, que la société Domofinance a libéré les fonds entre les mains de la société GECE ;

– c’est à M. [O] [D] qu’il appartient d’expliquer pourquoi il a apposé sa signature, qu’il ne conteste pas, sur les attestations de fin de travaux ;

– une fois de plus, la signature de l’emprunteur l’engage et il ne fait aucun doute qu’il a bien signé sans aucune réserve les attestations de fin de travaux aux dates inscrites sur ces documents ;

– Domofinance est une entité distincte de GECE ;

– il n’y a aucun manquement aux obligations de surveillance, de vigilance, de conseil et de mise en garde ;

– M. [O] [D] bénéficie d’une installation qui est raccordée, qui fonctionne et qui lui rapporte des revenus ;

– dès lors, il ne subit véritablement aucun préjudice ;

– si la cour prononçait la nullité des contrats principaux, les contrats de crédits affectés seraient nécessairement annulés conformément à l’article L. 311-32 du code de la consommation ;

– il serait alors nécessaire de revenir au statu quo ante et donc, d’envisager des restitutions ;

– chacune des parties devrait en effet rendre à l’autre exactement ce qu’elle avait reçu ;

– M. [O] [D] devrait donc rembourser à la société Domofinance le capital financé, déduction faite des versements ayant déjà pu intervenir et cela pour les deux contrats.

La déclaration d’appel, l’assignation à comparaître et les conclusions de la SA Domofinance ont été signifiées le 6 août 2021 à Me Robert-Louis Meynet, ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de la SARL GECE, par remise à Mme [T] [I], assistante, qui a déclaré être habilitée à recevoir l’acte.

Me Robert-Louis Meynet, ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de la SARL GECE, n’a pas constitué avocat.

La clôture de l’instruction est intervenue le 1er juin 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

À titre liminaire :

Il convient de rappeler qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.

Par prétention, il faut entendre une demande en justice tendant à ce qu’il soit tranché un point litigieux.

Par voie de conséquence, les expressions telles que « juger » «  dire et juger », « déclarer », « dégager » ou « constater » ne constituent pas de véritables prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l’examen des griefs formulés contre la décision entreprise et dans la discussion des prétentions et moyens, mais pas dans le dispositif même des conclusions.

En conséquence, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.

Sur la demande d’annulation des contrats principaux :

M. [D] sollicite l’annulation de deux contrats de prestation de services conclus avec la société GECE, portant sur le remplacement de l’ensemble des menuiseries de sa maison et l’isolation des combles, d’une part, l’installation d’une pompe à chaleur, d’autre part.

Ses demandes ne concernent donc pas l’installation de panneaux photovoltaïques.

1) La pompe à chaleur :

S’agissant du contrat portant sur l’installation d’une pompe à chaleur, contrat conclu hors établissement, l’article L. 221-9 du code de la consommation prévoit que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.

La société Domofinance a consenti à M. [D] un crédit affecté à cette prestation de service par l’intermédiaire du vendeur, la société GECE.

Il lui appartient en conséquence de justifier du respect de cette obligation par la production de l’exemplaire vendeur qu’elle était en mesure d’obtenir et sur lequel la remise d’un exemplaire à l’acquéreur doit être mentionnée, comme elle l’est sur le bon de commande du 20 juillet 2017 afférent aux huisseries et à l’isolation des combles.

La nullité du contrat portant sur la pompe à chaleur doit être prononcée, en application des dispositions de l’article L. 242-1 du code de la consommation, dès lors qu’à défaut de disposer du contrat principal, M. [D] n’a pu avoir connaissance des éventuelles irrégularités formelles l’affectant, en sorte que l’exécution du contrat même volontaire ne saurait valoir confirmation.

2) Les huisseries et l’isolation :

Concernant le contrat portant sur les huisseries et l’isolation, les articles L. 221-5 et L. 221-8 du code de la consommation prévoient que, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible – sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable lorsque le contrat a été conclu hors établissement – notamment les informations suivantes :

– les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2,

– lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État.

En l’espèce, le contrat vise les anciens textes, soit les articles L. 121-23 et suivants lesquels sont repris par les articles L. 111-1, L. 111-2 et L. 221-18 du code de la consommation sans changement, s’agissant de l’exercice du droit de rétractation, quant aux conditions, au délai et aux modalité d’exercice qui figurent à l’exemplaire remis à M. [D] y compris l’adresse au dos du formulaire détachable de rétractation, dès lors qu’il s’agit d’un contrat conclu après 2015.

L’article L. 111-1, 3° auquel renvoie l’article L. 221-5 exige en outre d’informer le consommateur, en l’absence d’exécution immédiate du contrat, de la date ou du délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service.

En l’espèce, il est indiqué, comme date de livraison « sous 3 mois, uniquement valable après étude et acceptation de toutes les démarches administratives », ce qui ne correspond pas à un engagement du professionnel suffisamment clair, en sorte que cette mention ne répond pas aux exigences des textes précités, et ce d’autant plus qu’il est indiqué que ce délai est donné à titre indicatif.

Par ailleurs, le 8 août 2017, soit le jour de la signature du bon de commande à son domicile, M. [D] a signé une autorisation de prélèvement, assimilable à une contrepartie et dès lors contraire aux exigences de l’article L. 221-10 du code de la consommation selon lequel « le professionnel ne peut recevoir aucun paiement ou aucune contrepartie, sous quelque forme que ce soit, de la part du consommateur avant l’expiration d’un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement ».

L’article L. 111-2 dispose qu’outre les mentions prévues à l’article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d’un contrat de fourniture de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés à l’article R. 111-2 et notamment, l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.

En l’espèce, les coordonnées de l’assureur de responsabilité professionnelle ne sont pas mentionnées au bon de commande, où il est seulement indiqué que cette assurance est souscrite « auprès d’une compagnie notoirement solvable» (sic).

Il n’est donc pas justifié d’une mise à disposition de ces coordonnées, et il n’est pas justifié non plus de ce que ces coordonnées ont été communiquées d’une manière ou d’une autre.

L’article L. 221-9 exige que le contrat comprenne toutes les informations prévues à l’article L. 221 -5 et l’article L. 242-1 prévoit que les dispositions de l’article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

La nullité du contrat est des lors encourue.

S’agissant d’irrégularités formelles, elles ne peuvent être couvertes par l’exécution volontaire du contrat par l’acquéreur, en application de l’article 1182 du code civil que si cette exécution a été faite en connaissance de la violation des dispositions, d’ailleurs d’ordre public dans le présent dossier.

En l’espèce, M. [D] a signé l’appel à financement le 16 août 2017, les attestations de fin de travaux les 16 août et 5 octobre 2017 et payé les échéances de prêt, ce qui constitue bien un comportement volontaire.

Toutefois, il n’est pas établi qu’il ait eu connaissance des formalités concernées à la seule lecture du bon de commande où elles ne sont pas mentionnées.

En conséquence, la nullité du contrat du 8 août 2017 est également encourue sur ce fondement.

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

Sur la demande d’annulation des contrats de crédits :

Sur le fondement des dispositions de l’article L. 312-55 du code de la consommation, les deux contrats de crédit des 8 et 25 août 2017 devront donc être annulés en ce qu’ils sont affectés à l’installation des huisseries et à l’isolation des combles, s’agissant du premier, et à la pompe à chaleur, s’agissant du second.

S’agissant du contrat du 8 août, même s’il n’est pas qualifié de crédit affecté mais de prêt personnel, son annulation résulte du fait qu’il est clairement destiné à la prestation de service objet du litige.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les conséquences de l’annulation des contrats :

Le code de la consommation prévoit, en son article L. 312-48, alinéa 1er que « les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’a compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ».

Est donc privé de sa créance de restitution du capital emprunté le prêteur qui verse les fonds, sans procéder aux vérifications préalables lui permettant de relever que le contrat principal est affecté d’une cause de nullité et qu’il n’a pas été entièrement exécuté.

De même, le prêteur ne perd son droit à restitution du capital emprunté que s’il a manqué à son obligation de vérification et qu’il en résulte pour l’emprunteur une prestation incomplète au regard du bon de commande.

En l’espèce, la société Domofinance n’a procédé à aucune vérification de la validité du contrat principal relatif à la pompe à chaleur dont elle ignore jusqu’à la date et n’a pas davantage vérifié la validité du bon de commande du 8 août 2017 qui vise des textes anciens pour partie modifiés.

En revanche, M. [D] n’invoque aucun dysfonctionnement des matériels installés à son domicile, qu’il s’agisse des fenêtres, de l’isolation ou de la pompe à chaleur.

Dès lors, il n’y a donc pas lieu de priver la société Domofinance de son droit à restitution du capital déduction faite des sommes versées par M. [D] au titre du crédit fenêtres et isolation et s’agissant du crédit pompe à chaleur.

Toutefois, seuls l’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire de la société GECE ont été attraits à l’instance, alors qu’en raison du jugement d’adoption du plan de continuation, cette société est redevenue in bonis.

Or, dans l’ordonnance de suspension du crédit en date du 24 mars 2020, le juge de la mise en état avait invité les parties à conclure sur l’absence en la cause de la société GECE désormais in bonis et sur la qualité des organes du redressement judiciaire à la représenter.

Aucune des parties n’avait conclu à cet effet, alors que ni l’administrateur judiciaire, ni le mandataire judiciaire n’avaient plus qualité ni pouvoir pour représenter la société GECE.

M. [D] formait sa demande de remise en état des lieux contre la société GECE qui n’était pas dans la cause, ce qui avait, à juste titre, conduit le premier juge à prononcer un débouté.

De même, s’agissant de la société Domofinance, elle demande :

-soit que la GECE garantisse M. [D] dans le remboursement du capital et sollicite en outre qu’elle soit condamnée à des dommages-intérêts correspondant au montant du capital des prêts,

– soit, à titre infiniment subsidiaire, que cette société procède au remboursement du capital.

Au vu des explication ci-dessus, elle sera également déboutée à ce titre.

M. [D] doit donc être condamné à restituer le capital emprunté sous déduction des sommes versées par lui.

Le premier juge avait en conséquence et très justement condamné M. [D] à payer les sommes de :

– 12 203,02 euros pour le crédit du 8 août 2017,

– 8 933,95 euros pour le crédit du 25 août 2017.

De même, il y a lieu pour M. [D] de faire une action récursoire contre la société GECE.

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

Sur les dommages-intérêts :

M. [D] reproche à la banque de ne pas avoir vérifié la validité des contrats et de ne pas justifier de la formation des agents commerciaux venus à domicile par l’intermédiaire desquels le contrat de crédit affecté a été souscrit, outre un défaut de vérification de sa solvabilité.

En application des dispositions de l’article L. 314-25 du code de la consommation, « les personnes chargées de fournir à l’emprunteur les explications sur les prêts mentionnés aux articles L. 312-l à L. 312-3 et de recueillir les informations nécessaires à l’établissement de la fiche prévue à l’article L. 312-17 sont formées à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement.

L’employeur de ces personnes tient à disposition, à des fins de contrôle, l’attestation de formation mentionnée à l’article L. 6353-l du code du travail, établie par un des prêteurs dont les crédits sont proposés, sur le lieu de vente ou par un organisme de formation enregistré.

Les exigences minimales auxquelles doit répondre cette formation sont définies par décret ».

La société Domofinance produit une attestation émanant du gérant de société GECE qui ne correspond pas à l’attestation de formation mentionnée à l’article L. 6353-l du code du travail relative au personnel qui a été chargé de fournir à M. [D] des explications sur le contrat de crédit.

Par ailleurs, s’il est établi que M. [D] s’est vu remettre la fiche d’informations précontractuelles européennes pour le crédit du 8 août 2017, tel n’est pas le cas s’agissant du second crédit, celui du 25 août.

Il n’est pas établi qu’il a été satisfait à l’obligation d’explications relativement à l’adaptation du contrat de crédit aux besoins et à la situation financière du client et n’a pas attiré l’attention de celui-ci sur les conséquences pouvant être induites par le contrat de crédit sur sa situation patrimoniale en cas de défaut de paiement.

En revanche, la consultation du FICP le 1er septembre 2017, soit après conclusion du contrat du 24 août 2017, n’est pas contraire aux exigences du code de la consommation dès lors qu’elle a eu lieu le 8e jour.

M. [D] invoque un préjudice moral du fait qu’il dispose d’équipement qu’il n’a pas souhaité, qu’il est endetté, du caractère inesthétique de la pompe à chaleur et du coût des travaux de remise en état des lieux, outre les tracasseries engendrées par la présente procédure.

S’il s’agit de manquements normalement sanctionnés par la déchéance du droit aux intérêts, ils ne peuvent donner lieu à dommages-intérêts que s’ils sont à l’origine d’un préjudice pour l’emprunteur.

Aucun des préjudices invoqués par M. [D] n’est justifié ou en lien avec une faute de la SA Domofinance.

Ainsi, M. [D] ne justifie pas de l’inutilité de la pompe à chaleur, pas plus que du niveau prétendument élevé de son endettement, ni davantage du caractère inesthétique de la pompe à chaleur qui en tout état de cause n’aurait pas de lien de causalité avec une faute de la banque.

Enfin, il sera rappelé que M. [D] a passé un contrat avec EDF pour vendre la production non consommée.

S’agissant de la remise en état des lieux, elle est consécutive à l’annulation du contrat, donc sans lien avec une faute du prêteur, étant rappelé que la demande était dirigée en première instance contre la société GECE qui n’était pas dans la cause.

Enfin, les tracasseries de procédure relèvent des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ensemble des développement qui précèdent permet de conclure au débouté de M. [D] de sa demande de dommages-intérêts.

Le jugement entrepris sera confirmé de l’ensemble de ces chefs.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

M. [O] [D], dont l’appel est rejeté, supportera les dépens d’appel avec distraction, ceux de première instance étant confirmés.

Pour la même raison, il ne sera pas fait droit à sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA Domofinance les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d’appel. M. [O] [D] sera condamné à lui payer la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Condamne M. [O] [D] à payer à la SA Domofinance la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne M. [O] [D] aux dépens d’appel, avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande, des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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