30 juin 2023
Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion
RG n°
22/00127
ARRÊT N°
EF
R.G : N° RG 22/00127 – N° Portalis DBWB-V-B7G-FU7O
S.A. SOREFI
C/
[N]
RG 1èRE INSTANCE : 21-000170
COUR D’APPEL DE SAINT- DENIS
ARRÊT DU 30 JUIN 2023
Chambre civile TGI
Appel d’une décision rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE SAINT-BENOIT en date du 05 JUILLET 2021 RG n°: 21-000170 suivant déclaration d’appel en date du 07 FEVRIER 2022
APPELANTE :
S.A. SOREFI
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Emmanuelle CHOUKROUN-HERRMANN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIME :
Monsieur [L] [N]
[Adresse 1]
[Localité 4]
CLÔTURE LE : 10 novembre 2022
DÉBATS : En application des dispositions de l’article 804 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Avril 2023 devant la Cour composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : M. Laurent FRAVETTE, Vice-président placé
Conseiller : Monsieur Eric FOURNIE, Conseiller
Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.
A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 23 juin 2023. Le délibéré a été prorogé au 30 Juin 2023.
Greffier lors des débats : Mme Véronique FONTAINE, Greffier.
ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 30 Juin 2023.
* * *
LA COUR
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 31 août 2018, la SA SOREFI a consenti à Monsieur [L] [N] un prêt personnel d’un montant de 55.000,00€ remboursable en 132 mensualités de 565,38 € au taux d’intérêt de 5,54% l’an, du 10 novembre 2018 au 10 octobre 2029 et de 620,38 € assurance comprise.
Le but du prêt était le rachat de quatre crédits consommation à concurrence de la somme de 34.235,36€ et le versement du solde, soit la somme de 20.764,64€, sur le compte en apport de trésorerie.
Par lettre recommandée avec accusé réception en date du 14 septembre 2020, la SA SOREFI a mis en demeure Monsieur [N] de régler les échéances du prêt dues, mais en vain.
Par lettre recommandée avec accusé réception du 29 octobre 2020, la SA SOREFI a notifié à Monsieur [N], la déchéance du terme du contrat et l’a mis en demeure de régler la somme de 54.938,09 Euros représentant le montant total des sommes restant dues.
Suivant acte d’huissier du 17 mai 2021, la SA SOREFI a assigné Monsieur [N] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Benoît aux fins d’obtenir le paiement de sa créance.
Par jugement en date du 05 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Benoît a statué en ces termes’:
– Prononce la déchéance du droit aux intérêts et frais,
– Condamne Monsieur [L] [N] à payer à la SOREFI la somme de trente-neuf mille huit cent soixante-deux euros et soixante-quinze centimes (39.862,75€).
– Dit que cette somme ne produira aucun intérêt, y compris au taux légal.
– Accorde des délais de paiement à Monsieur [L] [N].
– Dit que Monsieur [L] [N] devra s’acquitter des sommes dues par versements mensuels de 1.660,95 euros minimum et cela avant le 10 de chaque mois et pour la première fois le 10 du mois suivant la signification de la présente décision.
– Dit que le solde sera versé lors de la dernière échéance,
– Dit qu’à défaut de paiement d’une seule échéance, la totalité de la dette restant à recouvrir deviendra immédiatement exigible et de plein droit,
– Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– Débout la SOREFI de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Rappelle que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision,
– Condamne Monsieur [L] [N] aux entiers dépens.
Par déclaration du 07 février 2022, la SA SOREFI a interjeté appel du jugement précité.
L’affaire a été renvoyée à la mise en état suivant ordonnance en date du 15 février 2022.
L’acte d’appel a été signifié à domicile à Monsieur [L] [N] le 14 avril 2022.
La SA SOREFI a déposé ses uniques conclusions d’appelante le 09 mai 2022 et les a signifiées à l’intimé par exploit d’huissier en date du 16 mai 2022.
Monsieur [N] n’a pas constitué avocat ou déposé de conclusions. Il est ainsi réputé solliciter confirmation du jugement par adoption de motifs.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 10 novembre 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS
Aux termes de ses uniques conclusions d’appelante déposées le 09 mai 2022, la SA SOREFI demande à la Cour de’:
– INFIRMER la décision déférée en ce qu’elle a déchu la société SOREFI du droit aux intérêts, indemnités, frais et assurances et écarté de plein droit l’application de l’intérêt au taux légal et rejeté la demande présentée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Statuant à nouveau,
– CONDAMNER Monsieur [L] [N] à payer à la société SOREFI les sommes suivantes:
. 3.101,90 € au titre des échéances, assurance comprise des mois de mai, juin, août, septembre et octobre 2020 outre intérêts de retard au taux contractuel de 5,54 % l’an à compter de chaque échéance impayée et jusqu’à parfait paiement,
. 47.996,48 € au titre du capital restant dû, outre intérêts de retard au taux contractuel de 5,54 % l’an à compter 29 octobre 2020, date de la lettre de mise en demeure de payer et jusqu’à parfait paiement,
. 3.839,71 € au titre de l’indemnité contractuelle de 8 %, outre intérêts de retard au taux de 5,54 % l’an à compter du 29 octobre 2020, date de la lettre de mise en demeure de payer et jusqu’à parfait paiement,
– DIRE ET JUGER qu’il conviendra de déduire du montant de la créance de la société SOREFI la somme de 12.450,01 Euros correspondant au montant des versements effectués par Monsieur [L] [N] entre le 6 novembre 2020 et le 6 mai 2022,
– DONNER acte à la société SOREFI de ce qu’elle déduira de sa créance les éventuels règlements ultérieurs de son débiteur,
– CONDAMNER Monsieur [L] [N] à payer à la société SOREFI la somme de 1.500€ au titre des frais irrépétibles exposés en première instance ceci sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
En tout état de cause,
– DIRE n’y avoir lieu à écarter la majoration de plein droit des intérêts au taux légal,
– CONFIRMER le jugement entrepris dans ses autres dispositions,
– CONDAMNER Monsieur [L] [N] à payer à la société SOREFI la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
– CONDAMNER Monsieur [L] [N] aux entiers dépens d’appel.
Selon l’appelante, elle est fondée à solliciter l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la déchéance de son droit aux intérêts et écarté l’application des intérêts au taux légal. Elle soutient qu’elle a bien produit la notice d’assurance remise à l’emprunteur en même temps que l’offre de crédit conformément aux dispositions de l’ancien article L.311-19 du Code de la consommation. Elle ajoute à titre subsidiaire que si la Cour devait considérer que l’offre présentée par la SA SOREFI était irrégulière au regard des dispositions du Code de la consommation, elle ne pourrait qu’infirmer le jugement déféré en ce qui concerne les conséquences sur les intérêts au taux légal que le premier juge a purement et simplement supprimé. En l’espèce, la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de 5,54 % n’est manifestement pas susceptible d’être compensée par l’application de l’intérêt au taux légal compte tenu de son extrême faiblesse dès lors que le créancier est un professionnel.
De surcroît, l’article 1153-1 ancien (devenu 1231-7) du Code civil, n’autorise pas le juge à supprimer l’application des intérêts de retard au taux légal, le seul pouvoir d’appréciation en la matière portant sur la date à laquelle ces intérêts commenceront à courir.
******
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile.
Vu les conclusions de la SA SOREFI du 3 mars 2022 auxquelles la Cour se réfère pour plus ample exposé des prétentions et moyens.
Vu l’ordonnance de clôture du 10 novembre 2022.
MOTIFS
A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Sur le respect des obligations contractuelles par la SOREFI
Sur le respect du formalisme relatif à la notice d’assurances.
En vertu des dispositions de l’article L 311-18 devenu L312-28 et de l’article R311-5 devenu l’article R 312-10 du Code la consommation, applicables au litige,
L’encadré mentionné à l’article L 312-28 qui indique en caractères plus apparents que le reste du contrat dans l’ordre choisi par le prêteur et à l’exclusion de tout autre information’:
a) le type de crédit,
b) le montant total du crédit et les conditions de mise à disposition des fonds,
c) la durée du contrat de crédit,
d) le montant, le nombre et la périodicité des échéances que l’emprunteur doit verser…
e) le taux débiteur….
f) le taux effectif global
g) tous les frais liés à l’exécution du crédit….
h) les sûretés les assurances exigées le cas échéant…
Le premier juge a considéré que la banque n’apportait pas la preuve de la remise d’une notice d’assurance conforme aux exigences légales et a prononcé la déchéance du droit aux intérêts. Il souligne que le préteur doit établir deux exemplaires identiques de l’offre préalable de crédit.
La SOREFI soutient que les assurances facultatives, comme c’est le cas en l’espèce, ne sont pas visées par le texte sus-évoqué. Elle invoque une jurisprudence sur ce point. (Cf Cassation 8 avril 2021 numéro 19-25.236.)
Sur quoi,
Vu l’article L.312-29 du code de la consommation.
Il n’est pas contestable au regard des clauses du u contrat de prêt souscrit versé aux débats qu’il est assorti d’une assurance facultative et non d’une assurance obligatoire.
Il est effectivement admis en droit (cf Cassation 8 avril 2021 numéro 19-25.236) que les dispositions du Code de la consommation sus-évoquées n’ont pas vocation à s’appliquer dès lors qu’il s’agit d’une assurance facultative en l’état du texte sus-évoqué qui fait référence à des assurances exigées.
En conséquence, la banque a donc respecté ses obligations en la matière et il n’y a pas lieu de la déchoir de son droit à la perception des intérêts contractuels.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur le montant de la créance bancaire.
A la suite d’impayés à compter du 10 mai 2020, une lettre de mise en demeure de payer la somme de 2.010€ sera adressée au débiteur le 10 mai 2020.
Une lettre de relance recommandée avec accusé de réception sera à nouveau adressée le 14 septembre 2020, portant la mention «’avisée’».
A défaut de règlement, la banque a adressé au débiteur un courrier recommandé avec accusé réception signé le 29 octobre 2020 emportant déchéance du terme et mise en demeure de régler la somme de cinquante-quatre mille neuf cent trente-huit euros et neuf centimes (54.938,09€) au titre de l’ensemble des sommes dues.
Sur le montant de la créance, le décompte produit par la banque n’a pas été contesté par le débiteur en première instance.
Il se décompose comme suit’:
3.101,90€ au titre des échéances impayées des mois de mai, juin, août, septembre et octobre 2020 outre les intérêts de retard au taux contractuel de 5,54% l’an à compter de chaque échéance impayée jusqu’à parfait paiement,
47.996,48 € au titre du capital restant dû, outre les intérêts au taux contractuel de 5,54% l’an à compter de la mise en demeure du 29 octobre 2020 jusqu’à parfait paiement,
3.839,71€ au titre de l’indemnité contractuelle de 8% outre les intérêts au taux contractuel de 5,54% l’an à compter de la mise en demeure du 29 octobre 2020 jusqu’à parfait paiement,
Soit la somme totale de cinquante-quatre mille neuf cent trente-huit euros et neuf centimes (54.938,09€).
Il conviendra d’en déduire les versements effectués par le débiteur entre le 6 novembre 2020 et le 6 mai 2022 à concurrence de la somme de 12.450,01€, soit une somme due de quarante-deux mille quatre cent quatre-vingt-huit euros et huit centimes (42.488,08€).
Sur l’application des intérêts au taux légal.
En l’état de la décision de la Cour de confirmer le droit aux intérêts contractuels en faveur de la banque, la question de la majoration de l’intérêt légal n’a plus lieu à être examinée.
Sur l’article 700 du Code de procédure civile
Il serait inéquitable de laisser supporter à la SOREFI les frais irrépétibles exposés à l’occasion de la procédure.
Monsieur [L] [N] devra lui verser la somme de mille cinq cents Euros (1500€) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Sur les dépens
Vu les articles 696 du Code de procédure civile;
Monsieur [L] [N], qui succombe, supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt de défaut mis à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,
– Infirme le jugement entrepris dans toutes des dispositions.
Statuant à nouveau
– Condamne Monsieur [L] [N] à payer à la société SOREFI les sommes suivantes’:
3.101,90 € au titre des échéances, assurance comprise des mois de mai, juin, août, septembre et octobre 2020 outre intérêts de retard au taux contractuel de 5,54 % l’an à compter de chaque échéance impayée et jusqu’à parfait paiement,
47.996,48 € au titre du capital restant dû, outre intérêts de retard au taux contractuel de 5,54 % l’an à compter 29 octobre 2020, date de la lettre de mise en demeure de payer et jusqu’à parfait paiement,
3.839,71 € au titre de l’indemnité contractuelle de 8 %, outre intérêts de retard au taux de 5,54 % l’an à compter du 29 octobre 2020, date de la lettre de mise en demeure de payer et jusqu’à parfait paiement,
Dit et juge qu’il conviendra de déduire du montant de la créance de la société SOREFI la somme de 12.450,01 Euros correspondant au montant des versements effectués par Monsieur [L] [N] entre le 6 novembre 2020 et le 6 mai 2022,
Donne acte à la société SOREFI de ce qu’elle déduira de sa créance les éventuels règlements ultérieurs de son débiteur,
– Condamne Monsieur [L] [N] à payer à la société SOREFI la somme de mille cinq cents euros (1.500€) au titre des frais irrépétibles exposés en première instance ceci sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamne Monsieur [L] [N] aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT