30 janvier 2023
Cour d’appel de Colmar
RG n°
22/01403
MINUTE N° 23/96
Copie exécutoire à :
– Me Grégoire FAURE
Le
Le greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A
ARRET DU 30 Janvier 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/01403 – N° Portalis DBVW-V-B7G-HZ5J
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 07 janvier 2022 par le Juge des contentieux de la protection de MULHOUSE
APPELANTE :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Grégoire FAURE, avocat au barreau de STRASBOURG
INTIMÉE :
Madame [F] [E]
[Adresse 2]
[Localité 3]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 novembre 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme FABREGUETTES, Conseiller, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme MARTINO, Présidente de chambre
Mme FABREGUETTES, Conseiller
Madame DAYRE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme HOUSER
ARRET :
– rendu par défaut
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE
Selon offre préalable acceptée le 5 octobre 2018, la Sa BNP Paribas Personal Finance a consenti à Madame [F] [E] un prêt personnel d’un montant de 15 000 €, remboursable en 60 échéances de 278,96 €, moyennant un taux d’intérêt débiteur de 4,40% l’an.
Faisant valoir que Madame [E] n’a pas réglé les échéances malgré mise en demeure, la société BNP Paribas s’est prévalue de la déchéance du terme le 13 juillet 2020.
Par acte du 29 juin 2021, la Sa BNP Paribas Personal Finance a assigné Madame [F] [E] devant le tribunal judiciaire de Mulhouse, aux fins de voir constater, la résiliation de l’offre de crédit et de voir condamner la défenderesse à lui verser la somme de 11 743,77 € outre intérêts au taux de 4,49 % sur la somme de 11 096,07 € à compter de la déchéance du terme et intérêts au taux légal sur la somme de 647,70 € à compter du 13 juillet 2020 jusqu’au règlement effectif, avec capitalisation des intérêts, ainsi qu’à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Interpellée à l’audience par le premier juge quant à une éventuelle forclusion et une éventuelle déchéance du droit aux intérêts, la demanderesse a maintenu ses prétentions.
Madame [F] [E] n’a pas comparu.
Par jugement du 7 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :
-déclaré irrecevable l’action de la Sa BNP Paribas Personal Finance,
-condamné la Sa BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens,
-rappelé que l’exécution provisoire du jugement est de droit.
Pour se déterminer ainsi, le premier juge a retenu que la première échéance non régularisée datait de mars 2019, de sorte que l’assignation introduite plus de deux ans après est tardive.
La Sa BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel de cette décision le 6 avril 2022.
Par écritures notifiées le 9 mai 2022, elle conclut à l’infirmation du jugement déféré et demande à la cour de :
A titre principal :
-condamner Madame [F] [E] à verser à la Sa BNP Paribas Personal Finance la somme de 11 096,07 € augmentée des intérêts au taux contractuel de 4,40 % l’an à compter du 13 juillet 2020,
-la condamner à payer à la Sa BNP Paribas Personal Finance la somme de 647,70 € à titre d’indemnité contractuelle,
A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour ordonnerait la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,
– condamner Madame [F] [E] à verser à la Sa BNP Paribas Personal Finance la somme de 10 068,85 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2020,
En tout état de cause :
– condamner Madame [F] [E] à verser à la Sa BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 500 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-la condamner en tous les frais et dépens de la procédure.
Elle fait valoir que les parties sont convenues de limiter le financement à la somme de 12 000 € afin de tenir compte des besoins de l’emprunteuse ; que le montant des échéances de remboursement s’est limité à 230,76 €, frais d’assurance inclus ; que les fonds ont été débloqués le 15 octobre 2018 ; que Madame [E] s’est acquittée des paiements jusqu’au 10 juillet 2019 ; qu’elle n’a pas régularisé les arriérés malgré mise en demeure, de sorte qu’elle s’est prévalue de la déchéance du terme.
Elle soutient que la date du premier incident de paiement non régularisé est postérieure au 29 juin 2019, de sorte qu’elle n’est pas forclose en son action introduite par assignation du 29 juin 2021 ; que l’emprunteuse a effectué des règlements entre le 10 novembre 2018 et le 7 juillet 2019 pour un montant total de 1 931,15 €, ce qui équivaut à 8,36 échéances, la neuvième échéance, partiellement réglée, étant celle du mois de juillet 2019 ; que le report de certaines échéances est sans incidence sur le mode de calcul du point de départ du délai de forclusion ; que compte tenu de la règle d’imputation des paiements énoncée par
l’article 1342-10 du code civil et en l’absence de précision quant à l’affectation des paiements par la débitrice, les versements reçus avant déchéance du terme ont été imputés sur la dette la plus ancienne.
Au fond, elle fait valoir qu’elle a rempli ses obligations au regard des dispositions du code de la consommation, relatives à la vérification de la solvabilité de l’emprunteur et à son information précontractuelle ; qu’elle a consulté le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers le 12 octobre 2018, soit antérieurement au déblocage des fonds intervenus le 15 octobre 2018 ; que les dispositions de l’article L 312 -16 du code de la consommation ont été respectées en ce que l’information définitive du contrat s’entend de l’agrément de l’emprunteur par le prêteur, en application des dispositions de l’article L 312-24 ; que l’agrément de Madame [E] est intervenu par le déblocage des fonds ; qu’elle est fondée à obtenir paiement du solde du prêt.
Madame [F] [E], à qui la déclaration d’appel et les conclusions d’appel ont été signifiées par acte du 11 mai 2022 remis en l’étude d’huissier, n’a pas constitué avocat.
MOTIFS
En vertu des dispositions de l’article R 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant lui à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est notamment caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé.
En l’espèce, l’examen de l’historique des règlements montre que Madame [F] [E] s’est acquittée d’une somme totale de 1 931,15 €. Ce montant, rapporté à celui des échéances mensuelles de 230,76 € tel que prévu au tableau d’amortissement mentionnant le déblocage d’une somme limitée à 12 000 €, établit que 8,3 échéances ont ainsi été réglées, la neuvième échéance, partiellement réglée, se situant, conformément au tableau d’amortissement, le 10 juillet 2019.
Il ressort de même du relevé des paiements que l’emprunteuse a régularisé d’un coup plusieurs échéances en un versement, à trois reprises ; qu’en l’absence de toute précision quant aux échéances qu’elle entendait ainsi acquitter, l’organisme prêteur a pu valablement imputer ces règlements sur la dette la plus ancienne, conformément aux dispositions de l’article 1342-10 alinéa 2 du code civil.
Il en résulte qu’à la date de signification de l’assignation le 29 juin 2021, l’appelante n’était pas forclose en son action.
Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu’il a déclaré ses demandes irrecevables.
Sur la créance :
Selon décompte versé aux débats, la société BNP Paribas, qui justifie s’être acquittée de ses obligations légales au regard des dispositions du code de la consommation quant à la conclusion du contrat et à effectuer la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers dans des conditions conformes, est en droit d’obtenir paiement, du fait de la défaillance de l’emprunteuse, d’une somme de 2 252,46 € au titre des mensualités échues impayées, d’une somme de 747,42 € au titre des échéances reportées et d’une somme de 8 096,19 € au titre du capital non échu, soit au total 11 096,07 € portant intérêt au taux contractuel de 4, 40 % l’an à compter du 13 juillet 2020, date de la déchéance du terme.
L’intimée sera de même condamnée au paiement d’une somme de 647,70 € au titre de l’indemnité de 8 % calculée sur le capital dû, portant intérêt au taux légal à compter du présent arrêt.
Sur les frais et dépens :
Les dispositions du jugement déféré quant aux frais et dépens seront infirmées.
Partie perdante, Madame [E] sera condamnée aux dépens des deux instances, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à l’appelante la somme de 700 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt par défaut,
INFIRME le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
DECLARE recevable l’action de la Sa BNP Paribas Personal Finance,
CONDAMNE Madame [F] [E] à payer à la Sa BNP Paribas Personal Finance les sommes de :
– 11 096,07 € portant intérêts au taux conventionnel de 4, 40 % l’an à compter du 13 juillet 2020,
– 647,70 € portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
CONDAMNE Madame [F] [E] aux dépens de première instance,
Y ajoutant,
CONDAMNE Madame [F] [E] à payer à la Sa BNP Paribas Personal Finance la somme de 700 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Madame [F] [E] aux dépens de l’instance d’appel.
La Greffière La Présidente