25 juillet 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/07524
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53B
1re chambre 2e section
ARRET N°
PAR DEFAUT
DU 25 JUILLET 2023
N° RG 21/07524 – N° Portalis DBV3-V-B7F-U4YU
AFFAIRE :
S.A. BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE
C/
Mme [Y] [D]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Septembre 2021 par le Tribunal de proximité de Saint Germain en Laye
N° RG : 11-21-000009
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 25/07/23
à :
Me Jack BEAUJARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A. BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE
N° SIRET : 549 .80 0.373 RCS VERSAILLES
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 2]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Jack BEAUJARD de la SELAS DLDA AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 543 – N° du dossier 20210304 –
Représentant : Maître Christofer CLAUDE de la SELAS REALYZE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R175
APPELANTE
****************
Madame [Y] [D]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Monsieur [J] [N]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Assignés à étude
INTIMES DEFAILLANTS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Mars 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller et Monsieur Philippe JAVELAS, président, chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
EXPOSE DU LITIGE
La société Banque populaire Val de France expose avoir consenti à M. [J] [N] et Mme [Y] [D], par convention du 27 janvier 2016, un prêt personnel d’un montant de 26 000 euros. Se prévalant d’échéances demeurées impayées, la société Banque populaire Val de France leur a adressé le 20 novembre 2019 une mise en demeure de régler ces échéances sous 8 jours et a prononcé la déchéance du terme.
Par acte d’huissier de justice délivré le 23 décembre 2020, la société Banque populaire Val de France a assigné M. [N] et Mme [D] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Germain-en-Laye aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, leur condamnation solidaire à lui payer :
– 15 151,71 euros avec les intérêts au taux contractuel de 4,17 % l’an à compter du 20 novembre 2019 jusqu’à parfait paiement,
– 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– les dépens.
Par jugement réputé contradictoire du 22 septembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Germain-en-Laye a :
– déclaré irrecevable l’action de la société Banque populaire Val de France comme forclose,
– condamné la société Banque populaire Val de France aux dépens de l’instance.
Par déclaration reçue au greffe le 20 décembre 2021, la société Banque populaire Val de France a relevé appel de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 1er février 2022, la société Banque populaire Val de France, appelante, demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en son appel du jugement rendu le 22 septembre 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Germain-en-Laye,
– infirmer en toutes ses dispositions le jugement sus énoncé et daté,
Statuant à nouveau,
– condamner solidairement M. [N] et Mme [D] à lui payer la somme de 12 151,71 euros avec intérêts au taux de 4,17% à compter du 20 novembre 2019, date des mises en demeure et jusqu’à parfait paiement,
– à titre subsidiaire, vu l’article 1184 du code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016 et les articles 1224, 1227 et 1229 du même code, prononcer la résolution judiciaire du contrat de crédit du 27 janvier 2016,
– en conséquence, condamner solidairement M. [N] et Mme [D] au paiement de la somme de 12 151,71 euros avec intérêts au taux de 4,17% à compter de la décision à intervenir, ce en vertu du contrat de prêt souscrit le 27 janvier 2016,
En tout état de cause,
– condamner solidairement M. [N] et Mme [D] à lui payer la somme de 1 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement M. [N] et Mme [D] aux entiers dépens par application de l’article 699 du code de procédure civile, dont le recouvrement sera effectué par la SELAS DLDA Avocats représentée par Maître Jack Beaujard, avocat au Barreau des Hauts-de-Seine.
Ni M. [N], ni Mme [D] n’ont constitué avocat. Par actes d’huissier de justice délivrés le 2 février 2022, la déclaration d’appel et les conclusions de l’appelante leur ont été signifiées respectivement par dépôt à l’étude.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 8 septembre 2022.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
M. [N], ni Mme [D], qui ne comparaissent pas, n’ayant pas été intimés à personne, la cour statuera par défaut en application des dispositions de l’article 474, alinéa 2, du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I) Sur la forclusion de l’action en paiement
La banque appelante fait grief au premier juge d’avoir déclaré son action forclose, au motif que le premier incident de paiement non régularisé remontait au 4 mars 2018, ‘ les mentions ‘ annulation de retard’, ‘indemnités de retard’ et ‘ prélèvement MSO’ n’étant que des moyens pour le prêteur de reporter le paiement de la dette au terme du contrat’.
La banque fait valoir, à hauteur de cour, que la forclusion n’est pas encourue, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, parce que le premier impayé non régularisé remonte au 4 février 2019, soit moins de deux ans avant l’assignation délivrée le 23 décembre 2020, que les ‘annulations de retard’ doivent être considérées comme des échéances impayées, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, etque les ‘ prélèvements MSO’ n’ont pas pour objectif, comme l’a retenu à tort le premier juge, de retarder artificiellement le point de départ du délai biennal de forclusion, mais viennent régulariser un impayé et, partant, correspondent à des échéances payées.
Réponse de la cour
L’article L311-52 du code de la consommation, applicable en l’espèce, dispose : ‘Le tribunal d’instance connaît des litiges nés de l’application du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :
– le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;
– ou le premier incident de paiement non régularisé ;
– ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ;
– ou le dépassement, au sens du 11° de l’article L311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L311-47.’
Par ailleurs, tous les règlements reçus par le créancier s’imputent sur les échéances les plus anciennement impayées par le débiteur (Cass. 1er civ. 7 mars 1995, n°92-20.974).
Au cas d’espèce, l’examen de l’historique de compte permet de constater que plusieurs incidents de paiement ont été régularisés, par des règlements effectués par les emprunteurs, notamment par prélèvements sur ordre (‘ MSO’,) qui correspondent, comme le soutient à bon droit la banque, à des échéances payées. Le relevé de compte permet également de confirmer que les annulations de retard sont des échéances reportées en fin de contrat et sont, en conséquence, des échéances impayées, ce report d’échéances impayées à l’initiative du prêteur étant sans effet sur la computation des délais de forclusion (Cass.1er civ.28 octobre 2015, n°14-23.267).
Pour déterminer la date du premier incident de paiement non régularisé, il convient de calculer le total des règlements qui ont été effectués par l’emprunteur avant le contentieux, et de le diviser par le montant unitaire de la mensualité payée par l’emprunteur ; ce calcul permettant de déterminer combien de mensualités ont été payées par l’emprunteur, et de retrouver quelle est la première échéance impayée non régularisée à l’aide du tableau d’amortissement.
Au cas d’espèce, le décompte de créance versé aux débats, en date du 17 décembre 2021, laisse apparaître que les règlements reçus avant contentieux s’élèvent à la somme totale de 13 792, 32 euros, laquelle divisée par le montant d’une mensualité, 387,85 euros, donne 35 mensualités acquittées à la société ‘Banque populaire Val de France’.
Le tableau d’amortissement permet de constater que la trente cinquième et dernière mensualité, qui est la dernière entièrement acquittée, est celle du 4 janvier 2019.
Il s’ensuit que c’est la trente sixième mensualité qui constitue le premier incident de paiement non régularisé, cette mensualité correspondant, aux termes du tableau d’amortissement, à l’échéance du 4 février 2019.
Ce calcul est corroboré par l’analyse de l’historique du compte produit par la banque qui permet de constater que le dernier paiement intervenu le 2 août 2019, d’un montant de 388 euros, est venu régulariser la mensualité impayée du 4 janvier 2019.
En conséquence, la forclusion biennale n’était pas acquise lors de l’assignation délivré moins de deux ans plus tard, le 23 décembre 2020, et le jugement déféré doit subséquemment être infirmé en toutes ses dispositions.
II) Sur la créance de la société ‘ Banque populaire Val de France’
L’article L311-24 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, dispose :
‘En cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application des articles 1152 et 1231 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret’.
L’article D. 311-6 devenu D. 312-16 du même code dispose que le prêteur peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de défaillance. Aucune autre pénalité notamment de retard ne peut être exigée par le prêteur.
La société La banque populaire Val de France produit, en sus de l’offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l’historique de prêt, le tableau d’amortissement, la mise en demeure avant déchéance du terme du 4 novembre 2019, la mise en demeure de déchéance du terme, envoyée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception le 20 novembre 2019 et réceptionnée par emprunteurs destinataires le 23 novembre 2019, un détail de créance, enfin, établi au 17 décembre 2021.
Il en résulte que la société ‘ banque populaire Val de France’ se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues et qu’elle est fondée à obtenir paiement des sommes dues :
– 4 095, 19 euros d’échéances impayées,
– 13 015, 30 euros de capital restant dû, selon tableau d’amortissement.
Il convient de déduire de ces sommes les règlements intervenus postérieurement à la déchéance du terme, pour un montant total de 6 000 euros.
La banque est ainsi légitime à solliciter le paiement de la somme totale de 11 110, 49 euros avec intérêts au taux contractuel de 4, 17 % à compter du 23 novembre 2019.
La banque est, en outre, fondée à obtenir une indemnité de résiliation de 8 % laquelle, sollicitée à hauteur de 1 041, 22 euros, apparaît supérieure à ce à quoi elle peut prétendre et en tout état de cause excessive, et doit, par suite, être réduite à la somme de 700 euros et produire intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2019.
III) Sur les demandes accessoires
Les intimés, qui succombent, seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par défaut et par mise à disposition au greffe
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau
Condamne solidairement Mme [Y] [D] et M. [J] [N] à payer à la société ‘ banque populaire Val de France’ une somme de 11 110, 49 euros avec intérêts au taux contractuel de 4, 17 % à compter du 23 novembre 2019, outre une somme de 700 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2019 ;
Déboute la société ‘ banque populaire Val de France’ du surplus de ses demandes ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum Mme [Y] [D] et M. [J] [N] à payer à la société ‘ banque populaire Val de France’ une indemnité de 1500 euros ;
Condamne in solidum Mme [Y] [D] et M. [J] [N] aux dépens de première instance et d’appel et dit que les dépens de la procédure d’appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile par la SELAS DLDA Avocats, représentée par Me Jack Beaujard, avocat au Barreau des Hauts-de-Seine, qui en a fait la demande.
– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,