Prêt entre particuliers : 25 janvier 2023 Cour de cassation Pourvoi n° 20-18.562

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Prêt entre particuliers : 25 janvier 2023 Cour de cassation Pourvoi n° 20-18.562

25 janvier 2023
Cour de cassation
Pourvoi n°
20-18.562

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 janvier 2023

Rejet non spécialement motivé

M. VIGNEAU, président

Décision n° 10094 F

Pourvoi n° Q 20-18.562

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 JANVIER 2023

1°/ M. [P] [J],

2°/ Mme [U] [T], épouse [J],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° Q 20-18.562 contre l’arrêt rendu le 26 mars 2020 par la cour d’appel de Versailles (16e chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à la Société générale, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société Office notarial de Chevreuse [M] et Pero, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],

3°/ à M. [L] [M], domicilié [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fèvre, conseiller, les observations écrites de la SCP Le Griel, avocat de M. et Mme [J], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Office notarial de Chevreuse [M] et Pero et de M. [M], de la SCP Spinosi, avocat de la Société générale, après débats en l’audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Fèvre, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme [J] aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [J] et les condamne à payer à la Société générale la somme globale de 3 000 euros et à la Selarl [M] et Pero et M. [M] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [J].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement rendu le 13 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Versailles, en ce qu’il a condamné solidairement M. et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 181 679,61 euros en principal, outre les intérêts au taux de 6,50 % sur chaque échéance impayée et sur le capital restant dû, à compter du 7 avril 2015 ou de leur date d’exigibilité, ainsi que l’indemnité forfaitaire de 7 % sur le capital restant dû, et dit qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité à son échéance, la totalité de la dette serait immédiatement exigible,

aux motifs propres qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et qu’il ne sera pas statué sur les « dire et juger » et les « constater » , comme les « donner acte » lorsqu’ils sont simplement des moyens invoqués à l’appui des demandes ou ne constituent pas en eux-mêmes des prétentions ;

et aux motifs adoptés qu’à titre reconventionnel, la Société Générale réclame la somme de 181.679,61 euros en principal outre intérêts à compter du 7 avril 2015 et outre l’indemnité forfaitaire ; qu’en vertu de l’article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ; qu’il résulte des pièces versées aux débats et notamment : – le contrat notarié de prêt, – le tableau d’amortissement, – le décompte des sommes réclamées, – une mise en demeure adressée à chacun des époux [J], signés par eux le 20 septembre 2016 et notifiant la déchéance du terme du prêt au 15 septembre 2016, que la créance est fondée en son principe et se décompose comme suit : Échéances impayées : 33.714,72 euros, Capital restant dû : 147.964,89 euros, Total : 181.679,61 euros, Indemnité de 7% : 10.357,54 euros ; que les défendeurs seront ainsi condamnés à payer la somme de 181.679,61 euros outre les intérêts et l’indemnité forfaitaire ; que les intérêts contractuels au taux de 6,50 % courront sur chaque échéance impayée et sur le capital restant dû, à compter du 07 avril 2015 ou de leur date d’exigibilité, en application de l’article 1231-6 du code civil ;

1° alors que les conclusions des parties doivent comporter, outre un exposé des faits et de la procédure et une discussion des prétentions et des moyens, un dispositif récapitulant leurs prétentions, la cour ne devant statuer que sur ces dernières ; que le chef d’un dispositif par lequel une partie demande à la cour de « dire et juger » ou de « constater » constitue une prétention, dès lors que la demande a un objet précis ; qu’en l’espèce, pour déterminer a priori le champ de son examen, la cour a retenu qu’elle n’entendait pas statuer « sur les « dire et juger » et les « constater » (…) lorsqu’ils sont simplement des moyens invoqués à l’appui des demandes ou ne constituent pas en eux-mêmes des prétentions » ; qu’en se déterminant ainsi, quand les « dire et juger » et les « constater », qui expriment juridiquement une « prétention », ne peuvent pas être confondus avec les moyens qui en sont le fondement dans le corps des conclusions, la cour a violé l’article 954 du code de procédure civile ;

2° alors que l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que M. et Mme [J] avaient demandé à la cour, par le dispositif de leurs conclusions, dans l’hypothèse où le principe d’une condamnation serait retenu contre eux, de « dire et juger que la Société Générale ne justifie pas du montant de sa créance et du calcul des intérêts d’après le TEG inscrit au contrat » ; que cette demande, qui constituait juridiquement une prétention, était étayée dans le corps de leurs écritures ; qu’en l’écartant néanmoins de son examen, au motif erroné, présenté en « liminaire », qu’elle était en droit de ne pas statuer sur les « « dire et juger » » qui « sont simplement des moyens invoqués à l’appui des demandes ou ne constituent pas en eux-mêmes des prétentions », la cour a violé l’article 4 du code de procédure civile ;

3° alors, en toute hypothèse, que tout jugement, à peine de censure, doit être motivé ; que ne satisfait pas à cette exigence le juge qui ne répond pas aux conclusions présentées par une partie ; qu’en l’espèce, M. et Mme [J] avaient demandé dans leurs écritures qu’il fût tenu compte de leur contestation de la créance invoquée par la Société Générale et du calcul des intérêts d’après le TEG inscrit au contrat (concl., pp. 20-21) ; qu’ils soutenaient que si la banque indiquait être créancière d’une somme de 181 679,61 euros en principal, outre les intérêts au taux de 6,50 % l’an à compter du 7 avril 2015 et l’indemnité forfaitaire, ses propres pièces faisaient état d’un taux d’intérêts erroné de 9,50 % afin d’obtenir ce résultat, sans qu’elle eût jamais justifié d’un décompte global permettant la vérification de la créance alléguée, contrairement aux exigences de l’article L. 341-48-1 du code de la consommation, se bornant, dans sa dernière mesure d’exécution du 25 juin 2019, à réclamer le versement d’une somme de 243 810,15 euros ; qu’à supposer donc que la demande de M. et Mme [J] de « dire et juger que la Société Générale ne justifie pas du montant de sa créance et du calcul des intérêts d’après le TEG inscrit au contrat » ne puisse être analysée que comme « simplement un moyen invoqué à l’appui des demandes », ne « constituant pas en lui-même une prétention », la cour ne pouvait pas ne pas y répondre, ce « moyen » conditionnant nécessairement le montant de la condamnation qu’elle a jugé devoir mettre à la charge de M. et Mme [J] ; qu’en se dispensant d’y répondre, elle a violé l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le pourvoi fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. et Mme [P] [J] de leur action en responsabilité à l’égard de la Société Générale et du notaire ;

aux motifs que le manquement d’une banque à son obligation de mettre en garde un emprunteur non averti sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi d’un prêt prive cet emprunteur d’une chance d’éviter le risque qui s’est réalisé, la réalisation de ce risque supposant que l’emprunteur ne soit pas en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt ; qu’en l’espèce, il est précisé au tableau « Synthèse charges / ressources » de la Société Générale : Total ressources retenues euros 10.889,00, Total charges retenues euros 2500,55 ; que M. et Mme [J] disposaient en outre d’un patrimoine immobilier de 332.187,61 euros après déduction du patrimoine mobilier s’élevant à la somme de 27.812,39 euros ; qu’il n’est pas établi par les appelants que la situation de la société de M. [J] était déjà déclinante en 2009, puisque M. [J] se versait un salaire de 11.493,88 euros net et que le tribunal de commerce a fixé la date de cessation des paiements de la société de M. [J] au 10 janvier 2011 ; que l’obligation du banquier ne portant que sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi d’un prêt, et si en présence de mensualités de remboursement évolutives il ne faut pas évaluer la capacité d’emprunt du candidat à l’emprunt à l’aune des seules premières échéances, force est de constater qu’en l’espèce, nonobstant les mensualités de remboursement évolutives, l’engagement était proportionné aux capacités financières de M. et Mme [J] qui ont d’ailleurs pu rembourser le prêt pendant les six premières années et qu’aucune faute ne peut être reprochée à la banque ; que la même situation a été soumise à l’appréciation du notaire qui en tout état de cause n’a pas à procéder à la vérification des déclarations des parties s’il n’y a pas d’élément lui permettant de soupçonner l’inexactitude de celles-ci ; que, par suite la demande de dommages et intérêts sera rejetée ;

1° alors que le banquier dispensateur de crédit, tenu à l’égard de l’emprunteur non averti d’une obligation de mise en garde relativement à ses capacités financières et aux risques de l’endettement né de l’octroi des prêts, doit établir qu’il y a satisfait au moment de la conclusion du contrat ; que les exposants, pour mettre en cause de ce chef la responsabilité de la Société Générale, avaient souligné que les conditions du prêt étaient singulières, lequel n’était pas à échéances mensuelles fixes mais évolutives, qui devaient varier dans le temps de matière très sensible, que les revenus mensuels de M. [J] provenaient exclusivement de la société Mat Aviation pour la trésorerie de laquelle le prêt litigieux de 200 000 euros avait été contracté et qui se trouvait déjà en situation difficile, puisqu’elle allait être l’objet d’une procédure collective en 2011, que Mme [J] n’avait aucun revenu, que leur seul patrimoine était leur résidence principale, non encore payée et hypothéquée pour les besoins du prêt, et qu’ils étaient déjà soumis à des remboursements mensuels de prêts de plus de de 2 500 euros ; que, pour écarter toute responsabilité de la banque, la cour a retenu que que M. [J] « se versait un salaire de 11 493.88 euros net », « que le tribunal de commerce a fixé la date de cessation des paiements de la société de M. [J] au 10 janvier 2011 » et que M. et Mme [J] avaient pu rembourser le prêt pendant les six premières années ; qu’en se déterminant par de tels motifs, inopérants, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la Société Générale apportait la preuve de l’exécution, au moment de la conclusion du contrat de prêt, de son obligation d’information de M. et Mme [J] sur les risques attachés à la spécificité des intérêts, compte tenu du fait que les seuls revenus de M. [J] étaient liés au sort révélé incertain de la société Mat Aviation et que Mme [J] était quant à elle dépourvue de tout revenu, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147, devenu 1231-1 du code civil, ensemble de l’article 1315, devenu 1353 du même code ;

2° alors que le notaire, qui doit assurer l’efficacité et la sécurité des actes qu’il instrumente, est tenu d’éclairer son client et d’appeler son attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques de ces actes, eu égard au but poursuivi par celui-ci ; que le notaire doit apporter la preuve qu’il a satisfait à ces obligations ; qu’en l’espèce, les exposants avaient soutenu que Me [L] [M], notaire qui a rédigé l’acte de prêt litigieux, n’avait pas satisfait à ses obligations d’information et de conseil à leur égard, en n’attirant pas leur attention sur les risques attachés aux caractéristiques du prêt qui tenaient à la singularité des mensualités évolutives, à l’absence de tout revenu de Mme [J], à l’endettement personnel déjà conséquent des emprunteurs (plus de 2 500 euros mensuels), à l’absence de tout patrimoine autre que leur résidence principale, hypothéquée pour garantir le prêt lui-même, à l’objet du prêt personnel qui était d’alimenter la trésorerie de la société Mat Aviation et au fait que les seuls revenus de M. [J] dépendaient de cette société, dont la situation, déjà difficile, allait conduire à l’ouverture d’une procédure collective ; que, pour écarter cette demande, la cour s’est bornée à relever que « la même situation », soumise au banquier, « a été soumise à l’appréciation du notaire », avant d’ajouter que le notaire « n’a pas à procéder à la vérification des déclarations des parties s’il n’y a pas d’élément lui permettant de soupçonner l’inexactitude de celles-ci » ; qu’en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le notaire apportait la preuve de ce qu’il s’était acquitté à l’égard de M. et Mme [J] de son obligation de conseil et d’information à l’occasion de la rédaction de l’acte de prêt litigieux, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble de l’article 1315, devenu 1353 du même code.

 


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