Prêt entre particuliers : 24 mai 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 22/00294

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Prêt entre particuliers : 24 mai 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 22/00294
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24 mai 2023
Cour d’appel d’Agen
RG n°
22/00294

ARRÊT DU

24 Mai 2023

AB / NC

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N° RG 22/00294

N° Portalis DBVO-V-B7G -C7RM

——————–

[O] [B]

C/

[I] [B]

[Z] [B]

——————-

GROSSES le

aux avocats

ARRÊT n° 230-23

COUR D’APPEL D’AGEN

Chambre Civile

LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,

ENTRE :

Madame [O] [Y] [B]

née le 25 décembre 1955 à [Localité 4]

de nationalité française, assistante maternelle

domiciliée : [Adresse 5]’

[Localité 7]

représentée par Me Marie-Luce D’ARGAIGNON, SCP D’ARGAIGNON-BOLAC, avocate au barreau du GERS

APPELANTE d’un jugement du tribunal judiciaire d’AUCH en date du 15 décembre 2021, RG 18/00036

D’une part,

ET :

Madame [I] [B]

née le 25 décembre 1955 à [Localité 4]

de nationalité française

domiciliée : [Adresse 5]

[Localité 7]

représentée par Me [J] [L], en qualité d’administratrice provisoire du cabinet de Me Nadège BEAUVAIS, avocate au barreau du GERS

Madame [Z] [B]

née le 16 mars 1950 à [Localité 4]

de nationalité française, retraitée

domiciliée : [Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me David LLAMAS, avocat postulant au barreau d’AGEN

et Me Isabelle HARAMBURU, avocate plaidante au barreau du GERS

INTIMÉES

D’autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 03 avril 2023, sans opposition des parties, devant la cour composée de :

Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre, qui a fait un rapport oral à l’audience

Assesseur : Dominique BENON, Conseiller

qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre eux-mêmes de :

Elisabeth SCHELLINO, Présidente de Chambre

en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, et après qu’il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,

Greffière : Nathalie CAILHETON

ARRÊT : prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

‘ ‘

EXPOSÉ DU LITIGE

Vu l’appel interjeté le 7 avril 2022 par Mme [O] [B] à l’encontre d’un jugement du tribunal judiciaire d’AUCH en date du 15 décembre 2021.

Vu les conclusions de Mme [O] [B] en date du 28 décembre 2022

Vu les conclusions de Mme [I] [B] en date du 29 novembre 2022.

Vu les conclusions de Mme [Z] [B] en date du 20 décembre 2022.

Vu l’ordonnance de clôture du 22 février 2023 pour l’audience de plaidoiries fixée au 4 avril 2023.

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[K] [B] est décédé le 15 avril 2003, laissant pour lui succéder son épouse, [T] [F], et leurs trois filles : Mmes [Z] [B], [O] [B] et [I] [B]. La succession de [K] [B] n’a pas été réglée.

[T] [F] est décédée le 29 janvier 2015, laissant pour lui succéder ses trois filles, Mmes [Z] [B], [O] [B] et [I] [B].

Par acte en date du 26 décembre 2017, Mme [O] [B] a assigné ses soeurs, Mmes [Z] [B] et [I] [B] en liquidation et partage des successions de leurs parents.

Par jugement en date du 15 décembre 2021, le tribunal judiciaire d’AUCH a notamment :

– déclaré les demandes de Mme [O] [B] recevables ;

– ordonné le partage de la succession de [K] [B] décédé 15 avril 2003 à [Localité 4] ;

– ordonné le partage de la succession de [T] [F] décédée le 29 janvier 2015 à [Localité 4] ;

– ordonné le partage de la communauté ayant existé entre eux

– désigné pour y procéder le président de la chambre interdépartementale des notaires du Gers, du Lot et du Lot et Garonne, avec faculté de délégation, sous surveillance du magistrat coordonnateur du service civil général du tribunal,

– condamné Mme [I] [B] à rapporter à la succession de [T] [F] la somme de 2.256 euros ;

– débouté Mme [O] [B] de sa demande de rapport au titre des travaux effectués à l’égard de Mme [I] [B] ;

– condamné Mme [O] [B] à rapporter à la succession de [K] [B] la somme de 22.105,11 euros,

– rejeté les demandes tendant à voir appliquer les règles du recel successoral ;

– débouté Mme [I] [B] de sa demande reconventionnelle d’une créance d’assistance ;

– débouté Mme [O] [B] de sa demande en partage en nature des biens et bijoux des successions ;

– débouté Mme [Z] [B] de sa demande en dommages intérêts pour procédure abusive ;

– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– dit que les dépens entreront en frais privilégiés de partage ;

– constaté que la décision est exécutoire par provision.

Les chefs du jugement critiqués dans la déclaration d’appel sont les suivants :

– déboute Mme [O] [B] de sa demande de rapport au titre des travaux effectués à l’égard de Mme [I] [B]

– condamne Mme [O] [B] à rapporter à la succession de [K] [B] la somme de 22.105,11 euros

– rejette les demandes tendant à voir appliquer les règles du recel successoral,

– déboute Mme [O] [B] de sa demande en partage en nature des biens et bijoux des successions.

Mme [O] [B] demande à la cour de :

– réformer ou infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

– statuant à nouveau,

– débouter [I] et [Z] [B] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

– condamner [I] [B] à rendre compte des mouvements du LIVRET A de [T] [F] sur lequel elle détenait une procuration.

– condamner [I] [B] à rapporter à la masse partageable la somme de 29.645.89 euros, sauf à parfaire correspondant aux travaux payés par [T] [B] pour la maison appartenant à sa fille [I], outre l’avantage indirect que constitue son logement dans la maison de [Localité 7].

– condamner [I] [B] à rapporter à la masse partageable la somme de 44.000 euros correspondant aux retraits faits par elle sur le compte de sa mère,

– juger que [I] [B] qui a recelé ces sommes dont elle doit le rapport ne pourra prétendre à aucune part sur ces sommes,

– ordonner le partage en nature des meubles meublants et bijoux par tirage au sort.

– limiter le montant du rapport dû par elle à la somme de 12.958,17 euros.

– condamner Mmes [Z] [B] et [I] [B] au paiement d’une somme de 3.000,00 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– dire que les dépens de l’instance seront passés en frais privilégiés de partage avec distraction au profit de la SCP ML d’ARGAIGNON – C BOLAC, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

– sur les retraits bancaires : [I] [B] disposant à compter du 15 octobre 2009 d’une procuration sur le compte de [T] [F] alimenté par ses seules pensions de retraite, a procédé à des retraits de 500,00 (1998 à 2001) à 1.000,00 jusqu’à 4.000,00 euros par mois, soit au total 44.000,00 euros. Il lui revient de rendre compte de sa gestion en qualité de mandataire. Un chèque a été émis pour financer la construction du caveau, et trois autres ont été tirés pour payer des frais de réfection de la maison. Elle soutient que sa soeur s’est rendue coupable de recel successoral

– sur le rapport au titre des travaux sur la maison : les grosses réparations sont à la charge des donataires : des travaux de réfection de la maison ont été entrepris, ils ont été financés pour partie par [T] [F] et pour partie par [I] [B] au moyen de fonds provenant du compte de [T] [F] grâce à la procuration donnée par cette dernière à sa fille. Or ces réparations n’étaient pas nécessaires au bien après la donation. En outre les époux [B] [F] ont financé des travaux d’amélioration. Ont été entrepris des travaux de rénovation complète de la maison ce qui constitue une amélioration et non des grosses réparations au sens de l’article 605 du code civil. Ces travaux incombaient au propriétaire c’est à dire [I] [B] ils ont été financés par [T] [F], il s’agit de donations indirectes rapportables, alors que [I] [B] et son fils étaient logés gratuitement par ses parents.

– sur la demande d’attribution des meubles : ses deux soeurs se sont attribué tous les souvenirs de leurs parents, elle liste les biens qu’elle réclame et à défaut sollicite un tirage au sort

– sur les demandes de rapports effectuées par [Z] et [I] [B] : elle reconnaît devoir rapporter la somme de 85.000,00 francs soit 12.958,17 euros que son père lui a donnée en 1999. Elle déclare avoir remboursé la somme de 60.000,00 francs donnée en 1984, à l’occasion de l’acquisition de 1994 financée par leur père pour les parts de ses soeurs et en remboursement pour sa part. Il n’est pas démontré que ses parents l’ont aidée à acquérir un fonds de commerce en 1984 à concurrence de 30.000,00 francs.

– sur la créance de [I] [B] au titre de l’assistance apportée à ses parents : [T] [F] était valide jusqu’en novembre 2014, sa dépendance n’est pas établie, [I] [B] était logée avec son fils gratuitement dans le bien.

Mme [I] [B] demande à la cour de :

– débouter [O] [B] de son appel.

– débouter [O] [B] de ses demandes comme étant infondées.

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris sauf en ce qui concerne sa demande de créance d’assistance.

– faire droit à l’appel incident à ce titre, et statuant à nouveau sur ce point,

– fixer au passif successoral la somme de 45.000,00 euros au titre de la créance d’assistance de [O] [B] (sic)

– condamner [O] [B] à rapporter à la succession de [T] [B] la somme de 4.573.47 euros.

– condamner [O] [B] à lui verser la somme de 3.000,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens judiciaires avec distraction au profit de Maître BEAUVAIS en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

– toutes trois ont bénéficié de donations de leurs parents, [O] [B] ayant reçu pour l’ouverture de son restaurant en 1984, revendu en 1992, les sommes de 60.000,00 francs de son père, 30.000,00 francs de sa mère, un prêt d’un oncle et la caution solidaire de sa soeur. La famille l’a aussi aidée en 1995 dans l’acquisition d’un second commerce

– en 1998, la fille de [O] [B] se voit donner procuration sur le compte de son grand-père et effectue des opérations dont il n’est pas justifié. En 1999, [O] [B] reçoit ainsi les sommes de 19.361,00 euros et 12.958,16 euros, 50.000,00 francs le 25 février 1999 et 35.000,00 francs le 22 juin 1999.

– à compter de 2001, elle s’installe chez ses parents et s’en occupe au quotidien, sans elle ses parents auraient été placés en maison de retraite. En 2003 [O] [B] bloque la liquidation de la succession paternelle, Mme [F] se trouve privée d’une somme de 24.302,85 euros devant lui revenir et qui aurait pu financer les travaux rendus nécessaires, étant relevé que l’immeuble a fait l’objet d’un arrêté de péril imminent en date du 23 décembre 2008. Elle a participé aux travaux de réfection de l’immeuble, elle a entretenu sa mère sans prélever de sommes à son profit

– le compte joint a été ouvert à la demande de l’ANAH dédié au versement de l’aide attachée à l’immeuble et non à la personne du requérant, il a été crédité le 11 juin 2014 du montant de la subvention soit 10.372,00 euros. Les sommes de 5.000,00 euros et 10.966,00 euros retirées respectivement la veille du décès de [T] [F] et trois mois après, ont été employées en frais funéraires et solde des travaux. Ces deux sommes ne sont pas rapportables.

– les époux [B] [F] n’utilisaient pas de chèques ni carte bancaire, ils procédaient par des paiements en espèces qu’ils retiraient de leur compte. Aucune donation n’est établie à son profit, elle bénéficiait de son coté de ressources lui permettant de faire face à ses charges.

– elle s’explique sur les chèques émis du vivant de [T] [F] de 4.636,00 euros (12 avril 2011) : frais de caveau 4 places, financé à concurrence de 2.000,00 euros par [Z] [B] ; 2 chèques de 2.865,00 euros : travaux de charpente ; chèque de 3.819,69 euros travaux entreprise ULIAN.

– les travaux exécutés dans l’immeuble relèvent des grosses réparations mises expressément à la charge du titulaire du droit d’usage et d’habitation par l’acte de 1998. Les sommes ainsi exposées ne sont pas des donations rapportables. En outre aucun appauvrissement de [T] [F] n’est établi, alors que cette dernière a simplement exécuté ses obligations.

– sur les meubles revendiqués, leur existence n’est pas rapportée, le mobilier existant a été acquis par [I] et [Z] [B].

– le recel successoral avancé n’est établi ni dans son élément matériel ni dans son élément moral.

– sa présence quotidienne auprès de ses parents pendant 10 ans, a permis leur maintien dans la maison, elle est titulaire d’une créance d’assistance, alors que sa mère ne percevait que 800,00 euros par mois environ de retraite et ne disposait pas d’assurance complémentaire santé.

– elle se joint à l’appel incident formé par [Z] [B] aux fins de voir [O] [B] rapporter la somme de 4.573,47 euros du chef d’une somme de 30.000,00 francs remise le 17 juillet 1984 par [T] [F] pour financer l’acquisition d’un fonds de commerce.

Mme [Z] [B] demande à la cour de :

– accueillir son appel incident ;

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– infirmer le jugement en ce qu’il :

– statuant à nouveau et ajoutant au jugement

– ordonner le rapport par [O] [B] de la somme supplémentaire de 4.573,47 euros à la succession de [T] [F]

– juger que [O] [B] a recelé les sommes dont elle doit le rapport et qu’elle ne pourra prétendre à aucune part sur ces sommes.

– déclarer irrecevable, et en tout état de cause, rejeter la demande de partage en nature des meubles meublants et bijoux par tirage au sort.

– statuer sur ce que de droit sur l’appel incident de [I] [B].

– condamner [O] [B] à lui payer la somme de 3.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’au paiement des entiers dépens.

Elle fait valoir que :

– sur les retraits bancaires en complément des développements ci-dessus : une somme de 2.286,00 euros a été virée à [I] [B] pour acquérir un véhicule pour transporter leur mère ; les retraits de 44.000,00 euros sur 10 ans correspondent à 366,00 euros par mois soit aux besoins quotidiens de leur mère.

– chacune des filles résidant avec leur mère disposait de ses propres revenus ; les grosses réparations financées étaient nécessaires : la prise en charge de 19.273,89 euros sur 74.400,15 euros par leur mère ne constitue pas un avantage au regard des dispositions de l’acte de 1998

– elle ajoute que la demande de tirage au sort des meubles est nouvelle en cause d’appel donc irrecevable :

– elle établit les rapports dont est tenue [O] [B] aux successions de chacun de leurs parents. Elle relève que cette dernière n’établit pas que le prix d’acquisition de la maison était de 164.075,00 francs, et que si elle avait remboursé son père elle aurait fait établir un acte annulant sa reconnaissance de dette. Elle démontre que l’acquisition du fonds de commerce de [O] [B] (400.000,00 francs dont 318.000,00 francs de prêt et 60.000,00 francs de leur père) n’a pu se faire sans la somme de 30.000,00 francs versée par leur mère. Le recel est établi, et [O] [B] ne peut prétendre à une part sur les sommes recelées.

– elle s’en remet sur le principe d’une créance d’assistance au bénéfice de [I] [B].

Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Repères chronologiques :

– les époux [B] [F] se sont mariés le 10 juillet 1948 sans contrat de mariage préalable. Ils étaient donc soumis au régime légal antérieur à 1965 de la communauté des meubles et acquêts.

– par actes des 4 juillet 1994 et 21 août 1998 les époux [B] [F] ont acquis un terrain à bâtir sis sur la commune de [Localité 7]

– par acte du 4 juillet 1994 les trois filles [B] ont acquis chacune à concurrence d’un tiers, une maison d’habitation en état vétuste avec étable et terrain sise à [Localité 7] au prix de 100.000,00 francs. Cette maison était occupée par leurs parents qui la louaient au précédent propriétaire. Les fonds employés à cette acquisition sont indiqués dans l’acte provenant des acquéreurs et proviendraient de [K] [B].

– par acte du 21 août 1998 :

– à [I] : la maison de [Localité 7] évaluée à 80.000,00 francs sous réserve du droit d’habitation de ses parents, évalué à 8.888,00 francs.

– à [O] : une parcelle de terrain à bâtir sise à [Localité 7] évaluée à 40.000,00 francs

– à [Z] : une soulte de [I] de 40.000,00 francs.

– par acte du 21 décembre 2001, [I] [B] vend à [Z] [B] un terrain à bâtir sis commune de [Localité 7] pour un prix de 40.000,00 francs soit 6.097,96 euros (il s’agit du même terrain qu’au paragraphe précédent). Les époux [K] [B] renoncent à leur droit d’usage et d’habitation sur cette parcelle

– 2001 à 2015, [I] [B] et son fils résident dans la maison de [Localité 7] avec ses parents puis [T] [F]

– 2001 travaux d’adaptation au handicap de [K] [B] (chambre et salle de bain) pour 3.388,48 euros.

– 2004 l’assureur refuse de prendre en charge des travaux en raison de la vétusté de l’immeuble

– 23 décembre 2008 arrêté municipal de péril imminent, ‘le mur de refend s’est affaissé, la toiture est en très mauvais état…’

– 2009 travaux d’amélioration de l’habitat (toiture, maçonnerie, carrelage, électricité, isolation, menuiserie, édification d’une aile) pour 74.400,15 euros réglés par [T] [F] à concurrence de 19.273,89 euros ; [I] [B] 42.424,55 euros et [Z] [B] 1.735,71 euros ; ANAH 10.372,00 euros et 594,00 euros pour frais d’obsèques.

– 2002 : rupture entre [I] et [O] [B]

– 15 octobre 2009 : procuration donnée par [T] [F] à [I] [B] sur son livret A

– 2014 ouverture d’un compte joint entre [T] [F] et [I] [B]

1- Sur les demandes de rapport :

Aux termes de l’article 843 du code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.

Les legs faits à un héritier sont réputés faits hors part successorale, à moins que le testateur n’ait exprimé la volonté contraire, auquel cas le légataire ne peut réclamer son legs qu’en moins prenant.

Aux termes de l’article 860-1 du code civil, le rapport d’une somme d’argent est égal à son montant. Toutefois, si elle a servi à acquérir un bien, le rapport est dû de la valeur de ce bien, dans les conditions prévues à l’article 860.

Aux termes de l’article 852 du même code, les frais de nourriture, d’entretien, d’éducation, d’apprentissage, les frais ordinaires d’équipement, ceux de noces et les présents d’usage ne doivent pas être rapportés, sauf volonté contraire du disposant.

Le caractère de présent d’usage s’apprécie à la date où il est consenti et compte tenu de la fortune du disposant.

Aux termes de l’article 778 du même code, sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L’héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession.

A- Sur le rapport par [I] [B] au titre des retraits bancaires :

[I] [B] disposait à compter du 15 octobre 2009 d’une procuration sur le compte de [T] [F] alimenté par les seules pensions de cette dernière. [O] [B] soutient que sa soeur a procédé à des retraits de 500,00 (1998 à 2001) à 1.000,00 jusqu’à 4.000,00 euros par mois, soit au total 44.000,00 euros.

Elle produit des relevés du compte de dépôt de [T] [F] de 2005 à 2015 et des tableaux dressés par elle-même des mouvements sur les comptes de leur mère. Ces relevés et tableaux n’établissement pas que [I] [B] est l’auteur et les destinataires de ces retraits et autres mouvements financiers. Il apparaît en outre que sur la durée retenue de 10 ans, la moyenne des retraits est de l’ordre de 366,00 euros par mois ce qui est compatible avec les dépenses courantes d’une personne âgée.

[O] [B] retient en outre :

– un chèque de banque du 24 avril 2011 de 4.636,58 euros : il est justifié que cette somme a financé l’acquisition d’un caveau 4 places pour [T] [F] et ses filles à [Localité 6] ;

– deux chèques d’un montant de 2.685,00 euros chacun en paiement de travaux de charpente pour la réfection de la toiture de la maison. Il est rappelé qu’aux termes de l’acte du acte du 21 août 1998 la charge des gros travaux repose sur le bénéficiaire du droit d’usage et d’habitation

– un chèque d’un montant de 3.819,69 euros : il est justifié des travaux financés par cette somme, il s’agit de la création d’une dalle dans la maison occupée par [T] [F] à sa charge pour le motif rappelé ci dessus.

Au vu de ces éléments, c’est à bon droit que le premier juge a retenu que [O] [B] ne rapportait pas la preuve d’une donation rapportable.

En concluant à la confirmation de la décision entreprise, [I] [B] reconnaît devoir rapporter la somme de 2.286,00 euros du chef d’un virement à son profit en date du 17 avril 2002.

Le jugement est confirmé sur ce point.

B- Sur le rapport par [I] [B] au titre des travaux :

Par acte du 21 août 1998, les trois soeurs ont consenti à leurs parents et au survivant d’eux sans réduction au prédécès du prémourant, par préciput et hors part, un droit d’usage et d’habitation viager sur cette maison. Les parties à cet acte ont stipulé que par dérogation à l’article 605 du code civil, les donataires supportent outre les réparations d’entretien, toutes les grosses réparations qui deviendront nécessaires au bien.

[I] [B] ayant racheté la part de sa soeur [O] [B] dans la maison habitée par leur mère en était propriétaire au jour où les travaux litigieux ont été exécutés. Il est donc soutenu que [I] [B] a bénéficié du fait de ces travaux dans sa maison d’une donation indirecte.

Les travaux du chef desquels est réclamé un rapport sont les suivants :

– des travaux d’adaptation du logement au handicap de [K] [B] en 2001.

– des travaux de rénovation de l’habitat pour 74.400,15 en 2009. Ces travaux ont été financés comme suit : [T] [F] 19.273,89 euros ; [Z] [B] 1.735,71 euros ; [I] [B] : 42.424,55 euros ; ANAH : 10.372,00 euros.

Il est établi que la maison menaçait ruine, au point qu’un arrêté de péril imminent a été pris le 23 décembre 2008, relevant un mur de refend affaissé et toiture en très mauvais état, de sorte que les travaux entrepris relèvent des gros travaux de l’article 605 mis à la charge de [T] [F] par la convention de 1998 pour lui permettre alors qu’elle est âgée de plus de 80 ans de vivre dans des conditions qui lui permettent de jouir de son droit d’usage et d’habitation.

En outre, les pièces produites n’établissent pas les prélèvements de [I] [B] sur le compte de [T] [F] pour financer la part qu’elle déclare avoir avancée.

Le premier juge a justement considéré qu’en exécutant les obligations mises à sa charge par l’acte du 21 août 1998, [T] [F] ne s’était pas appauvrie, de sorte que sa prise en charge des travaux litigieux ne peut constituer une donation indirecte au profit de [I] [B].

Enfin le compte joint ouvert six mois avant la mort de [T] [F], pour recevoir la subvention de l’ANAH a été employé au financement des travaux subventionnés à concurrence de 10.372,00 euros. La somme de 5.000,00 euros à la veille du décès a été employée aux frais d’obsèques.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de rapport du chef de travaux.

C- Sur le rapport par [O] [B] :

[Z] [B] demande le rapport par [O] [B] des sommes de :

– 60.000,00 francs (9.146,94 euros) objet d’une reconnaissance de dette du 17 juillet 1984.

– 50.000,00 francs (7.622,45 euros) virement à son profit du 25 février 1999

– 35.000,00 francs (5.335,72 euros) virement à son profit du 22 juin 1999.

[O] [B] reconnaît devoir rapporter :

– 50.000,00 francs (7.622,45 euros) virement à son profit du 25 février 1999

– 35.000,00 francs (5.335,72 euros) virement à son profit du 22 juin 1999.

[O] [B] soutient qu’elle a remboursé la somme de 60.000,00 francs (9.146,94 euros) objet d’une reconnaissance de dette du 17 juillet 1984. Elle produit des relevés de son compte ouvert dans les livres de la CAISSE D’EPARGNE [XXXXXXXXXX01] qui relatent des virements de compte à compte sans déterminer les comptes bénéficiaires et des débits de chèque dont le bénéficiaire n’est pas indiqué. Elle produit en outre une copie du livret de [K] [B] qui ne permet pas d’établir le remboursement allégué.

C’est donc à bon droit que le premier juge a considéré que [O] [B] doit rapport de la somme de 60.000,00 francs (9.146,94 euros) objet d’une reconnaissance de dette du 17 juillet 1984.

[Z] [B] soutient que [O] a perçu la somme de 30.000,00 francs (4.573,47 euros) au vu du livret A de [T] [F] mentionnant un retrait du même montant le 17 juillet 1984. Cette pièce est insuffisante à établir que [O] [B] était la bénéficiaire de cette somme, le simple fait que l’opération ait été exécutée le même jour que la reconnaissance de dette ne permet pas de désigner le bénéficiaire de ces fonds.

Sur le recel, pas plus devant la cour que devant le premier juge [Z] [B] n’établit la volonté de cacher à ses soeurs le bénéfice des sommes qu’il lui est demandé de rapporter.

Le jugement est confirmé sur ce point.

2- Sur les meubles :

Aux termes de l’article 826 du code civil, l’égalité dans le partage est une égalité en valeur.

Chaque copartageant reçoit des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l’indivision.

S’il y a lieu à tirage au sort, il est constitué autant de lots qu’il est nécessaire.

Si la consistance de la masse ne permet pas de former des lots d’égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte.

La demande en partage en nature des meubles meublants et bijoux par tirage au sort est une simple application de la loi et ne constitue pas une demande.

Le jugement est confirmé sur ce point.

3- Sur la créance d’assistance réclamée par [I] [B] :

Le premier juge a justement rappelé que :

– les enfants sont tenus à l’égard de leurs parents d’une obligation naturelle d’assistance, notamment en leur prodiguant des soins et en les aidant dans les tâches quotidiennes. Cette obligation naturelle fait en général obstacle à une demande d’indemnisation réclamée par l’enfant s’étant occupé de ses parents.

– cependant, si les soins prodigués par un enfant à ses parents excédent les exigences de la piété filiale et dépassent ainsi ladite obligation naturelle l’action de in rem verso est ouverte à cet enfant contre la succession du parent décédé dont il s’est occupé : les prestations librement fournies par l’enfant ont à la fois causé un appauvrissement de cet enfant et un enrichissement corrélatif du parent assisté.

En l’espèce, [I] [B] et son fils sont venus vivre chez les époux [B] [F] à compter de 2001 et [I] [B] était toujours présente au décès de [T] [F] en janvier 2015.

Il revient donc à [I] [B] de rapporter la preuve que la charge de ses parents excédait son obligation naturelle d’assistance.

Les pièces médicales produites établissent qu’en décembre 2003 [T] [F] présente une asthénie consécutive au décès de son mari et en février 2004, à 82 ans elle présente pour tout antécédents un streeping des varices et une arythmie, une constipation chronique en 2012 à l’âge de 90 ans, en décembre 2014 à l’âge de 92 ans [T] [F] est décrite habituellement autonome à domicile sans troubles cognitif, s’occupe de sa volaille seule.

Aucun élément n’établit que [I] [B] a apporté son aide à sa mère au détriment de sa propre vie personnelle ou professionnelle. Enfin, les diverses attestations ou documents produits par l’ensemble des parties démontrent que les trois soeurs ont été présentes pour leurs parents à des périodes et par des moyens différents.

C’est donc par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a considéré que l’aide apportée par [I] [B] à ses parents ne revêt pas un caractère exceptionnel, dépassant son obligation naturelle à l’égard de ces derniers et a rejeté sa demande de ce chef.

Le jugement est confirmé sur ce point.

4- Sur les demandes accessoires :

Chacune des parties succombe, chacune d’elles supporte la charge des dépens d’appel par elle avancés, l’équité commande qu’il ne soit pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile.

La distraction des dépens toujours prévue par l’article 699 du code de procédure civile n’a plus d’objet du fait de la suppression de tout tarif pour l’avocat le 8 août 2015 en première instance et le 1er janvier 2012 devant la cour.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition et en dernier ressort,

Dans la limite de sa saisine,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties supporte la charge des dépens d’appel par elle avancés.

Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, Le Président,

 


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