Prêt entre particuliers : 23 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/06697

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Prêt entre particuliers : 23 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/06697

23 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG
20/06697

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 23 FÉVRIER 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/06697 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBZHC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 février 2020 – Tribunal de proximité de JUVISY SUR ORGE du Tribunal judiciaire d’EVRY COURCOURONNES – RG n° 11-19-001526

APPELANTE

Le CRÉDIT DU NORD, société anonyme

N° SIRET : 456 504 851 00019

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Maryvonne EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ

Monsieur [P] [K]

né le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 6] (75)

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

assisté de Me Séverine TRIBOULET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0597

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 4 janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 14 juin 2000, M. [P] [K] a ouvert dans les livres de la société Crédit du Nord un compte bancaire avec une facilité temporaire de trésorerie de 4 000 francs.

Le compte étant devenu débiteur, la société Crédit du Nord a dénoncé la convention par courrier recommandé du 25 juillet 2017.

Selon offre préalable de crédit du 26 février 2015, la société Crédit du Nord a consenti à M. [P] [K] un prêt personnel d’un montant de 30 000 euros au taux contractuel de 5,70 % l’an, remboursable en 84 échéances mensuelles de 433,95 euros chacune hors assurance.

En raison d’échéances impayées, la société Crédit du Nord s’est prévalue de la déchéance du terme du contrat par courrier recommandé du 21 décembre 2017.

Saisi le 30 septembre 2019 par la société Crédit du Nord d’une demande tendant principalement à la condamnation de M. [K] au paiement du solde restant dû au titre du contrat de prêt et au titre du solde débiteur du compte, le tribunal de proximité de Juvisy sur Orge, par un jugement contradictoire rendu le 18 février 2020 auquel il convient de se reporter, a déclaré l’action de la société Crédit du Nord irrecevable comme étant forclose sur le fondement de l’article R. 312-35 du code de la consommation et l’a condamnée aux dépens.

Concernant le solde débiteur, le premier juge a considéré que la banque avait bien consenti à son client une facilité de caisse d’un montant de 4 000 francs, soit 609,80 euros et que l’action était forclose comme ayant été engagée plus de deux années après le 27 juillet 2017, date à laquelle M. [K] avait réceptionné le courrier recommandé de dénonciation de la convention.

Concernant le prêt personnel, il a considéré que le premier incident de paiement remontait au 10 mai 2017 rendant irrecevable une action engagée le 30 septembre 2019.

Par une déclaration enregistrée le 29 mai 2020, la société Crédit du Nord a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 7 juillet 2020, l’appelante demande à la cour :

– d’infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

– de juger qu’elle n’est pas forclose en ses demandes sauf celle portant sur 4 échéances impayées du prêt,

– en conséquence, de condamner M. [K] à lui payer les sommes de 3 893,24 euros au titre du solde débiteur de son compte outre les intérêts au taux légal postérieurs au 20 novembre 2018 date du dernier arrêté et ce jusqu’à parfait paiement et de 23 803,75 euros au titre du prêt outre les intérêts au taux de 5,70 % postérieurs au 20 novembre 2018 date du dernier arrêté et ce jusqu’à parfait paiement,

– de voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts,

– de le condamner à la somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens.

Elle soutient que le contrat d’ouverture de compte du 14 juin 2000 n’était assorti d’aucune autorisation expresse de découvert mais d’une simple facilité temporaire de trésorerie et qu’il en résulte que le délai de forclusion n’a couru qu’à compter de la date à laquelle le solde débiteur est devenu exigible c’est-à-dire à la date de la clôture du compte intervenue le 18 janvier 2018 de sorte que son action n’est pas forclose.

S’agissant du prêt personnel, elle soutient que l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité de sorte qu’elle n’est pas forclose. Pour les échéances impayées, elle fait valoir que la forclusion ne s’applique qu’aux échéances des 10 juin 2017 au 10 octobre 2017.

Aux termes de conclusions remises le 6 octobre 2020, M. [K], intimé, demande à la cour :

– à titre principal, de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes,

– en conséquence, de rejeter toutes les autres demandes, fins et prétentions formulées par le Crédit du Nord à son encontre,

– à titre subsidiaire, de faire application de l’article 1343-5 du code civil,

– d’ordonner la communication d’un décompte sur les éventuelles sommes à régler,

– de dire et juger que la dette ressortant du décompte établi par la banque sera échelonnée dans un délai de 2 ans, la dernière échéance due au titre étant fixée en 2024, c’est-à-dire dans un délai de 2 ans à compter de la fin de la dernière échéance qui aurait dû être réglée en 2022 au titre du Crédit Etoile Express, lesdites sommes ne produisant pas d’intérêt,

– de dire que chacune des parties conservera la charge des dépens et des sommes réglées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– en conséquence, de rejeter toutes les autres demandes, fins et prétentions formulées par le Crédit du Nord à son encontre.

Il soutient que la facilité temporaire de trésorerie et le crédit Etoile express contractés sont des opérations de crédit régies par le code de la consommation et en particulier par l’article R. 312-35 du code de la consommation qui prévoit que l’action en paiement doit être engagée dans un délai de deux années. Il précise qu’il est de jurisprudence constante que le point de départ du délai de forclusion se situe à la date d’exigibilité de l’obligation qui lui a donné naissance et qu’en l’espèce le prêteur a agi tardivement à compter de la dénonciation du compte en 2017. S’agissant du prêt personnel, il soutient que les textes ne font aucune distinction selon que la dette est payable par termes successifs ou non de sorte que c’est à juste titre que le premier juge a fixé le point de départ du délai de forclusion au 10 mai 2017, date du premier impayé non régularisé rendant l’action irrecevable.

A titre subsidiaire, il plaide sa bonne foi, indique être disposé à régler les sommes dues et sollicite des délais compte tenu de sa situation financière précaire liée au développement récent d’une activité d’auto-entrepreneur en réparation d’ordinateurs depuis 2018.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 novembre 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience du 4 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l’action en paiement concernant le solde débiteur

Il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur au 1er mai 2011 de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

Aux termes de l’article L. 311-37 du code de la consommation en sa version applicable au litige, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

En cas de découvert en compte y compris tacite, tout dépassement du découvert convenu non régularisé à l’issue du délai de 3 mois caractérise la défaillance de l’emprunteur et constitue le point de départ du délai de forclusion biennale. Il est toutefois admis que le retour du compte à une position créditrice avant l’expiration du délai biennal interrompt ce délai.

Comme l’a justement relevé le premier juge, la convention de compte validée le 14 juin 2000 précise expressément que pour faire face aux imprévus, le client demande sous réserve de l’accord de la banque, une facilité temporaire de trésorerie au montant autorisé de 4 000 francs. Dans l’encadré « Adhésion Convention », il est fait expressément référence aux dispositions particulières et conditions de produits et services que le titulaire du compte reconnaît avoir reçu ainsi que les conditions et tarifs particuliers. Si la société Crédit du Nord conteste l’octroi de cette facilité de caisse, la signature du représentant du Crédit du Nord figure bien au contrat et la banque y fait expressément référence dans le courrier de dénonciation de la convention adressé à M. [K] le 25 juillet 2017 puisqu’il est mentionné : « Nous vous rappelons qu’aux termes des conventions intervenues entre nous, nous avons la faculté de dénoncer à compter de la réception de la notification qui vous serait faite : la convention de compte bancaire qui régit nos relations moyennant un préavis de deux mois ; la Facilité Temporaire de Trésorerie (FTT), moyennant un préavis de quinze jours calendaires ».

C’est donc à juste titre que le premier juge a retenu que M. [K] bénéficiait d’une facilité de caisse d’un montant de 4 000 francs, soit 609,80 euros.

La société Crédit du nord produit les relevés de compte pour le mois de mars 2015, puis de mars 2017 à janvier 2018. Il s’en déduit que la vérification ne peut porter sur une date antérieure au mois de mars 2017 et que pour l’unique mois de mars 2015, le solde présentait un solde positif au 31 mars 2015.

Il en résulte que le compte a été débiteur de manière continue depuis le 30 avril 2017, avec dépassement de la facilité autorisée de 609,80 euros (solde débiteur fixé à 1 339,21 euros au 30 avril 2017) sans être jamais reconstitué malgré dénonciation de la convention par courrier du 25 juillet 2017 et clôture du compte par courrier recommandé du 18 janvier 2018, le solde étant à cette date de 3 450,55 euros.

Il doit être considéré que la société Crédit du Nord aurait dû engager son action dans le délai de deux années suivant la réception par M. [K] le 27 juillet 2017, de la lettre de dénonciation de la convention de compte, soit avant le 27 juillet 2019, ce qu’elle n’a fait que le 30 septembre 2019.

C’est donc à juste titre que le premier juge a relevé la forclusion de l’action. Le jugement doit être confirmé.

Sur la recevabilité de l’action en paiement concernant le prêt personnel

Il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur au 1er mai 2011 de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

Aux termes de l’article L. 311-52 du code de la consommation, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé et non par la déchéance du terme du contrat comme le soutient la société Crédit du Nord concernant le capital restant dû.

Le premier juge a relevé que les parties convenaient de ce que le premier incident de paiement non régularisé remontait au 10 mai 2017, à défaut de production aux débats d’éléments de nature à vérifier les paiements opérés avant la date du 10 mai 2017.

L’état de situation du prêt au 10 décembre 2017 communiquée par l’appelante en pièce 8 détaille les opérations relatives au contrat du 10 mai 2017 au 10 décembre 2017. Confronté aux relevés de compte pour les mois de mars 2017 à janvier 2018, cet état confirme que les échéances du crédit sont demeurées impayées à compter de l’échéance du 10 mai 2017 sans régularisation et sans qu’il soit possible de retracer les mouvements du compte avant le mois de mars 2017, mis à part le déblocage des fonds attesté à la date du 6 mars 2015 selon relevé de compte de mars 2015.

L’introduction d’une action en justice le 30 septembre 2019 soit plus de deux années à compter de cette date est donc tardif. C’est donc à bon droit que la société Crédit du Nord a été déclarée irrecevable en ses demandes, le jugement étant confirmé.

Le jugement est confirmé dans ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles. La société Crédit du Nord qui succombe est condamnée aux dépens d’appel.

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société Crédit du Nord aux dépens d’appel.

La greffière La présidente

 


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