22 juin 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
22/05403
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 2
ARRÊT DU 22/06/2023
N° de MINUTE : 23/617
N° RG 22/05403 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UTJB
Jugement (N° 11-22-0438) rendu le 04 Novembre 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Béthune
APPELANTS
Monsieur [Z] [C]
né le 25 Février 1980 à [Localité 4] – de nationalité Française
[Adresse 7]
Comparant en personne
Madame [R] [H] épouse [C]
née le 15 Octobre 1982 à [Localité 4] – de nationalité Française
[Adresse 7]
Représentée par [Z] [C], son époux, muni d’un pouvoir
INTIMÉES
[12] Chez [11]
[Adresse 6]
Société Sip [Localité 5]
[Adresse 2]
SA [8] chez [14]
[Adresse 9]
SA [13]
[Adresse 1]
SA [10]
[Adresse 3]
Non comparants, ni représentés
Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience
DÉBATS à l’audience publique du 17 Mai 2023 tenue par Catherine Convain magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul les plaidoiries, en application de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile , les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 805 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Véronique Dellelis, président de chambre
Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Danielle Thébaud, conseiller
ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement réputé contradictoire prononcé par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Béthune, statuant en matière de surendettement des particuliers, le 4 novembre 2022 ;
Vu l’appel interjeté le 16 novembre 2022 ;
Vu le procès-verbal de l’audience du 17 mai 2023 ;
***
Suivant déclaration déposée le 21 janvier 2022, M. [Z] [C] et Mme [R] [H], son épouse, ont saisi la commission de surendettement du Pas-de-Calais d’une demande de bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers, ne parvenant pas à s’acquitter de leurs dettes en raison de l’absence de ressources mensuelles suffisantes et des dépenses nécessaires pour satisfaire aux besoins de la vie courante avec quatre enfants à charge.
Le 10 février 2022, la commission de surendettement des particuliers du Pas-de-Calais, après avoir constaté la situation de surendettement de M. [C] et Mme [H], a déclaré leur demande recevable.
Le 21 avril 2022, après examen de la situation de M. [C] et Mme [H] dont les dettes ont été évaluées à 55 431,01 euros, les ressources mensuelles à 3705 euros et les charges mensuelles à 2609 euros, la commission qui a déterminé un minimum légal à laisser à la disposition des débiteurs de 1994,36 euros, une capacité de remboursement de 1096 euros et un maximum légal de remboursement de 1710,64 euros, a retenu une mensualité de remboursement de 1096 euros et a imposé le rééchelonnement de tout ou partie des créances sur une durée maximum de 53 mois, au taux d’intérêt maximum de 0,76 %.
Ces mesures imposées ont été contestées par M. [C] et Mme [H].
À l’audience du 5 septembre 2022, M. [C] et Mme [H] qui ont comparu en personne, ont contesté les mesures imposées par la commission. Ils ont demandé un nouveau calcul de leur passif en raison de l’apurement du prêt personnel contracté auprès de [12] n°50464754493 ainsi que la modification de la mensualité de remboursement qu’ils considéraient trop élevée. Ils ont expliqué être une famille composée de six personnes dont un enfant en études supérieures et indiqué que le reste à vivre était insuffisant pour couvrir l’ensemble de leurs besoins.
Par jugement en date du 4 novembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Béthune, statuant en matière de surendettement des particuliers, a notamment déclaré le recours formé par M. [C] et Mme [H] à l’encontre des mesures imposées prises par la commission de surendettement du Pas-de-Calais le 21 avril 2022, a fixé le montant des créances à la somme de 51 173,78 euros sous réserve d’éventuels règlements effectués en cours de procédure, a fixé à 1096 euros la contribution mensuelle totale de M. [C] et Mme [H] à affecter à l’apurement de leur passif, a dit que M. [C] et Mme [H] devront s’acquitter du paiement de leurs dettes sur la base d’une capacité de remboursement mensuelle de 1096 euros dans le délai de 47 mois et ce, au taux d’intérêt de 0 %, selon les modalités précisées dans le tableau annexé au jugement et a laissé les dépens à la charge du Trésor public.
M. [C] et Mme [H] ont relevé appel de ce jugement le 16 novembre 2022.
À l’audience de la cour du 17 mai 2023, M. [C] qui a comparu en personne, et Mme [H], dûment représentée par son époux muni d’un pouvoir, ont fait valoir à l’appui de leur appel que la mensualité de remboursement retenue par le premier juge était trop élevée compte tenu de leurs ressources et de leurs charges actuelles. M. [C] a invoqué une baisse des allocations familiales en raison des 20 ans de sa fille aînée qui préparait une licence en histoire. Il a précisé que le couple n’avait pas de prime d’activité ni d’aide au logement. Il a indiqué que quelques dettes avaient été réglées.
Les intimés, régulièrement convoqués par le greffe par lettre recommandée avec avis de réception, n’ont pas comparu ni personne pour les représenter.
Sur ce,
Attendu qu’aux termes de l’article L 731-1 du code de la consommation, ‘le montant des remboursements est fixé, dans des conditions précisées par décret en conseil d’État, par référence à la quotité saisissable du salaire telle qu’elle résulte des articles L 3252-2 et L 3252-3 du code du travail, de manière à ce que la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité.’ ;
Qu’aux termes de l’article L 731-2 du code de la consommation, ‘la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage ne peut être inférieure, pour le ménage en cause, au montant forfaitaire mentionné à l’article L 262-2 du code de l’action sociale et des familles. Elle intègre le montant des dépenses de logement, d’électricité, de gaz, de chauffage, d’eau, de nourriture et de scolarité, de garde et de déplacements professionnels ainsi que les frais de santé.’;
Que selon l’article R 731-1 du code de la consommation, ‘pour l’application des dispositions des articles L 732-1, L 733-1 et L 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l’apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L 731-1, L 731-2 et L 731-3, par référence au barème prévu à l’article R 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l’intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l’article L 262-2 du code de l’action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur.’ ;
Qu’aux termes de l’article R 731-2 du code de la consommation, « la part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l’ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l’article L 731-2 » ;
Que le montant des remboursements stipulés dans le plan ne doit pas excéder la part des ressources du débiteur indispensable aux dépenses courantes du
ménage ; que le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue ;
Attendu qu’en l’espèce, il résulte des pièces produites et des éléments fournis que les ressources mensuelles de M. [C] et Mme [H] s’élèvent en moyenne à la somme de 3470,25 euros (soit 2009,47 euros au titre du salaire perçu par M. [C] selon la moyenne du net à payer figurant sur ses bulletins de paie des mois d’août et septembre 2022, 1065,33 euros au titre du salaire perçu par Mme [H] selon la moyenne du net à payer figurant sur ses bulletins de salaire des mois d’août et septembre 2022 et 395,45 euros au titre des prestations familiales avec quatre enfants à charge dont un enfant majeur âgé de 20 ans) ;
Que les revenus mensuels des débiteurs s’élevant en moyenne à 3470,25 euros, la part saisissable déterminée par les articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail s’établit à 1359,41 euros par mois ;
Que le montant du revenu de solidarité active pour un couple avec quatre enfants à charge s’élève à la somme mensuelle de 1762,49 euros. ;
Que le montant des dépenses courantes de M. [C] et Mme [H] doit être évalué, au vu des pièces produites et des éléments du dossier, à la somme mensuelle moyenne de 2840,55 euros ;
Que compte tenu de ces éléments, il convient de fixer à la somme mensuelle de 629,70 euros la capacité de remboursement de M. [C] et Mme [H], le montant de cette contribution mensuelle à l’apurement de leur passif laissant à leur disposition une somme de 2840,55 euros qui est supérieure au revenu de solidarité active dont ils pourraient disposer (1359,41 euros), n’excédant pas la différence entre leurs ressources mensuelles et ce revenu de solidarité active, soit 1707,76 euros (3470,25 € – 1762,49 € = 1707,76 €) ni le montant de la quotité saisissable de leurs ressources (1359,41 euros), et leur permettant de faire face aux dépenses de la vie courante (2840,55 euros) ;
***
Attendu que selon l’article L 733-2 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation des mesures imposées par la commission peut vérifier, même d’office, la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées ;
Que par ailleurs, aux termes de l’article 1353 du Code civil, « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation» ;
Attendu qu’en l’espèce, il ressort de l’avis d’échéance en date du 21 mars 2023 produit par M. [C] que la créance de la société [13], retenue par la commission de surendettement et le premier juge pour un montant de 424,23 euros, a été soldée ;
Qu’en revanche, M. [C] et Mme [H] ne produisent aucune pièce permettant d’établir que des créances de la société [8] auraient été soldées ;
Qu’il résulte de ce qui précède que le passif de M. [C] et Mme [H] sera actualisé et fixé, pour les besoins de la procédure de surendettement, à la somme de 50 749,55 euros (sous réserve d’autres paiements effectués au profit de l’un ou l’autre des créanciers depuis la fixation de l’état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris) ;
***
Attendu qu’en vertu des articles L 732-3 et L 733-3 du code de la consommation, la durée totale du plan, y compris lorsqu’il fait l’objet d’une révision ou d’un renouvellement et/ou lorsqu’il met en oeuvre les mesures mentionnées à l’article L733-1 du code de la consommation, ne peut excéder sept années ;
Attendu que la capacité mensuelle de remboursement de M. [C] et Mme [H] (629,70 euros) leur permet d’apurer leur passif (50 749,55 euros) sur une durée de 81 mois ;
Attendu que dès lors, en considération de l’ensemble de ces éléments, le paiement des dettes des débiteurs sera rééchelonné en 81 mensualités, selon l’échéancier figurant dans le dispositif du présent arrêt (étant précisé que les paiements effectués au profit de l’un ou l’autre des créanciers depuis la fixation de l’état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s’imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces paiements) ;
Attendu qu’afin de favoriser le redressement de la situation financière des débiteurs, le taux des intérêts des créances sera réduit à 0 % pendant la durée du plan d’apurement du passif ;
Attendu que le jugement entrepris sera donc infirmé sauf du chef de la recevabilité du recours et des dépens ;
Par ces motifs,
La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort ;
Infirme le jugement entrepris sauf du chef de la recevabilité du recours et des dépens ;
Statuant à nouveau,
Fixe, pour les besoins de la procédure de surendettement, le passif de M. [Z] [C] et Mme [R] [H] à la somme de 50 749,55 euros (sous réserve d’autres paiements effectués en cours de procédure) ;
Dit que M. [Z] [C] et Mme [R] [H] devront rembourser leurs dettes selon les modalités fixées dans l’échéancier suivant :
Créanciers
Solde des créances
Le 1er mois :
1 mensualité
Du 2ème au 81ème mois inclus :
80 mensualités
[13] 383363-19
0,00 €
0,00 €
0,00 €
SIP [Localité 5] TH 2021
0,00 €
0,00 €
0,00 €
[8] 149403883300252819610
18,98 €
18,98 €
0,00 €
[8] 149403883300254066790
90,38 €
90,38 €
0,00 €
[8] 149403883300254979064
20,22 €
20,22 €
0,00 €
[8] 149403883300255353262
34,22 €
34,22 €
0,00 €
[8] 28901001175912
957,76 €
0,00 €
11,97 €
[8] 28963001132715
2 942,86 €
0,00 €
36,78 €
[8] 28989001014091
2 477,37 €
0,00 €
30,97 €
[10] 12394933381
10 741,51 €
113,20 €
132,85 €
[12] CF 60060166918106
6 077,69 €
64,05 €
75,17 €
[12] CF
00050465815962
20 275,63 €
213,70 €
250,77 €
[12] CF
50463761747
7 112,93 €
74,95 €
87,97 €
[12] CF
50464754493
0,00 €
0,00 €
0,00 €
Totaux
50 749,55 €
629,70 €
626,48 €
Dit que les paiements effectués au profit de l’un ou l’autre des créanciers depuis la fixation de l’état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s’imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces paiements ;
Réduit à 0 % le taux des intérêts dus sur les créances figurant dans cet échéancier pendant la durée du plan ;
Dit que sauf meilleur accord des parties, les paiements devront être effectués le 15 de chaque mois et pour la première fois le 15 du mois suivant la notification du présent arrêt ;
Dit qu’à défaut de paiement d’une seule des mensualités du plan à son terme, l’ensemble du plan est de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure adressée à M. [Z] [C] et à Mme [R] [H] par lettre recommandée avec avis de réception d’avoir à exécuter leurs obligations, et restée infructueuse ;
Rappelle qu’aucune voie d’exécution ne pourra être poursuivie par l’un quelconque des créanciers figurant dans le plan, pendant toute la durée d’exécution des mesures sauf à constater la caducité de ces dernières ;
Dit qu’il appartiendra à M. [Z] [C] et Mme [R] [H], en cas de changement significatif de leurs conditions de ressources ou de leurs charges, à la hausse comme à la baisse, de ressaisir la commission de surendettement d’une nouvelle demande de traitement de leur situation de surendettement ;
Rejette toute autre demande ;
Laisse les dépens d’appel à la charge du trésor public.
LE GREFFIER
Gaëlle PRZEDLACKI
LE PRESIDENT
Véronique DELLELIS