Prêt entre particuliers : 21 mars 2023 Cour d’appel de Fort-de-France RG n° 21/00062

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Prêt entre particuliers : 21 mars 2023 Cour d’appel de Fort-de-France RG n° 21/00062

21 mars 2023
Cour d’appel de Fort-de-France
RG
21/00062

ARRET N°

N° RG 21/00062

N��Portalis DBWA-V-B7F-CGLT

Mme [H], [U] [D]

C/

LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL – CREDIT SOCIAL

COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 21 MARS 2023

Décision déférée à la cour : Jugement du Tribunal de grande instance Fort-de-France, en date du 04 Septembre 2018, enregistré sous le

n° 18/00495 ;

APPELANTE :

Madame [H], [U] [D]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Taniev LABEJOF, avocat au barreau de MARTINIQUE

INTIMEE :

LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL – CREDIT SOCIAL, pris en la personne de son représentant légal en exercice, domiciliée audit siège social de la société

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Catherine RODAP, avocat au barreau de MARTINIQUE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 Janvier 2023 sur le rapport de Monsieur Thierry PLUMENAIL, devant la cour composée de :

Présidente : Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

Assesseur : Mme Claire DONNIZAUX, Conseillère

Assesseur : M. Thierry PLUMENAIL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Mme Beatrice PIERRE-GABRIEL,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l’arrêt fixée au 21 Mars 2023 ;

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’alinéa 2 de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous-seing privé en date du 1er avril 2014, Mme [H] [D] a souscrit auprès du Crédit social ‘ Caisse de crédit mutuel un prêt personnel de 30.000 euros remboursable selon les modalités et conditions suivantes :

– taux d’intérêt conventionnel : 7,25 % l’an,

– durée du remboursement : 60 mois,

– montant des amortissements : première échéance de 27,12 euros le 05/04/2014 puis 611,89 euros par mois, assurance incluse, à compter du 05/05/2014,

– garantie : nantissement de contrat d’assurance vie souscrit auprès des Assurances du Groupe CM-C.

Le Crédit social ‘ Caisse de crédit mutuel expose que, suite à des incidents de paiement, il a été contraint d’adresser à la débitrice une mise en demeure restée infructueuse, puis de prononcer la déchéance du terme le 18 août 2017.

Par exploit d’huissier du 28 février 2018, il a assigné Mme [H] [D] devant le tribunal de grande instance de Fort-de-France aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, sa condamnation à lui payer la somme de 20.170,46 euros au titre du remboursement du prêt personnel n°161590520600020592525 du 1er avril 2014 avec intérêts au taux conventionnel de 7,25% l’an jusqu’à parfait paiement et de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Par jugement réputé contradictoire et en premier ressort rendu le 04 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Fort de France a :

– condamné Mme [H] [D] à payer au Crédit social ‘ Caisse de crédit mutuel la somme de 20 170,46 € avec intérêts au taux de 7,25 % à compter de l’assignation,

– condamné Mme [H] [D] à payer au Crédit social ‘ Caisse de crédit mutuel la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

– condamné Mme [H] [D] aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 27 janvier 2021, Mme [H], [U] [D] a critiqué tous les chefs du jugement rendu le 04 septembre 2018, sauf en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.

Par ordonnance rendue le 16 décembre 2021, le conseiller de la mise en état près la cour d’appel de Fort-de-France a statué comme suit :

– déclare recevables les conclusions du 19 octobre 2021 de Mme [H] [D],

– dit que la signification du 08 octobre 2018 du jugement du 04 septembre 2018 est entachée de nullité et n’a pu faire courir le délai d’appel,

– déclare recevable l’appel de Mme [H] [D] formé par déclaration du 27 janvier 2021,

– dit n’y avoir lieu à nullité de la déclaration d’appel du 27 janvier 2021,

– renvoie l’affaire pour clôture à l’audience du 17 février 2022;

– déboute les parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– met les dépens de l’incident à la charge de la Caisse de Crédit Mutuel – Crédit Social.

Dans ses conclusions d’appelant n° 5 du 11 février 2022, Mme [H] [U] [D] demande à la cour d’appel de :

– la déclarer recevable et bien fondée en son action,

– déclarer nul l’acte de signification du 18 octobre 2018 du jugement du 4 septembre 2018 du tribunal de grande instance de Fort-de-France en ce qu’il ne lui a pas été délivré, ou subsidiairement, déclarer l’acte de signification inopposable à l’appelante,

– déclarer nulle l’assignation du 28 février 2018 délivrée à Mme [H] [D],

– rejeter toute demande, fin ou conclusion contraires,

– prendre acte de la recevabilité de l’appel interjeté par Mme [D] suivant ordonnance du conseiller de la mise en état du 16 décembre 2021 tirée de la signification irrégulière et nulle du jugement du 4 septembre 2018,

– réformer et annuler le jugement du 4 septembre 2018

du tribunal de grande instance de Fort-de-France en ce qu’il a

notamment :

* condamné l’appelante à payer au Crédit Social Caisse de Crédit Mutuel la somme de 20170,46 € avec intérêts au taux de 7,25 % à compter de l’assignation,

* condamné l’appelante à payer au Crédit Social Caisse de Crédit Mutuel la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la même aux entiers dépens,

* considéré que Mme [H] [D] avait été bien citée par l’assignation remise à étude conformément aux articles 656 et 658 du code de procédure civile,

* considéré que l’appelante n’aurait aucun moyen sérieux à opposer à la demande,

* reçu la demande du Crédit Social Caisse de Crédit Mutuel,

* considéré la demande en paiement comme apparaissant fondée,

* fait droit à la demande du Crédit Social Caisse de Crédit Mutuel ;

À titre subsidiaire,

– constater la caducité du jugement réputé contradictoire du 4 septembre 2018 faute de signification régulière,

– déclarer nul et non avenu le jugement du 4 septembre 2018 du tribunal de grande instance de Fort-de-France enrôlé sous le RG n°18/00495,

– déclarer forclose les demandes de la Caisse de Crédit Mutuel Crédit Social à l’encontre de Mme [H] [D] ;

En tout état de cause,

– condamner la Caisse de Crédit Mutuel Crédit Social à payer la somme de 5.000 € à Mme [H] [D] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la Caisse de Crédit Mutuel Crédit Social à payer la somme de 10.000 € à Mme [H] [D] pour procédure abusive,

– condamner la Caisse de Crédit Mutuel Crédit Social aux entiers dépens de l’instance et de première instance.

L’appelante expose que son changement d’adresse a été porté à la connaissance du Crédit Mutuel notamment par l’intermédiaire de son conseiller clientèle à deux reprises au cours de l’année 2014 et que l’huissier de justice, qui n’a pas réalisé les diligences nécessaires aux fins de la retrouver, ne pouvait ignorer sa dernière adresse connue, dès lors que le Crédit Mutuel avait fait signifier à personne le 08 mars 2018 par le même huissier de justice un commandement de payer simple à la SCI JBC représentée par Mme [H] [D] elle-même.

Elle fait valoir que son adresse a été mentionnée sur le commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 18 juin 2018 au représentant légal de la SCI JBC. Mme [H] [D] prétend que le Crédit Mutuel – Crédit Social avait la possibilité de faire le rapprochement entre la procédure de saisie immobilière et l’action en paiement et donc de connaître son adresse actuelle, et ce d’autant que le créancier a mandaté le même huissier pour signifier les actes dans les deux procédures concomitantes. L’appelante ajoute que l’acte de signification n’ayant pas été signifié à son adresse ou remis à personne est irrégulier et doit être annulé. Elle indique également que l’assignation qui lui aurait été délivrée le 28 février 2018 à une mauvaise adresse est irrégulière et lui a causé un grief, de sorte que devront être déclarés nul et de nul effet l’assignation du 28 février 2018 et le jugement rendu le 04 septembre 2018.

Par ailleurs, Mme [H], [U] [D] demande à la cour de constater la caducité du jugement réputé contradictoire rendu le 04 septembre 2018 en l’absence d’une notification régulière dudit acte dans les six mois de sa date. Elle prétend que l’action en paiement de la banque est forclose depuis le 05 octobre 2018, dès lors que, le jugement en date du 04 septembre 2018 étant considéré comme non avenu, les actes d’exécution qui ont suivi encourent également la nullité, de sorte que le commandement aux fins de saisie-vente délivré le 17 septembre 2019 n’a pu interrompre valablement la forclusion. Mme [H] [D] fait valoir également qu’elle n’a jamais reconnu le bien fondé de la créance qu’elle conteste fermement. Elle rappelle qu’il n’existe aucune cause interruptive de la prescription tenant à une reconnaissance implicite de la demande en paiement, l’article 2240 du code civil visant une reconnaissance claire et non équivoque. Mme [H] [D] ajoute que sa demande de dommages et intérêts au titre d’une procédure abusive à l’encontre de la banque ne constitue pas une reconnaissance de dette et que l’établissement de crédit ne justifie d’aucun acte interruptif de forclusion.

Dans ses conclusions responsives et récapitulatives en date du 1er février 2022, le Crédit social- Caisse de crédit mutuel demande à la cour d’appel de :

– le recevoir en ses demandes.

Y faisant droit :

– débouter Mme [H] [D] de son appel,

– juger que la cour n’est pas valablement saisie d’une demande de réformation et d’annulation,

Sinon,

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement réputé contradictoire du 04 septembre 2018,

– débouter Mme [H] [D] de toutes ses demandes non fondées,

– condamner Mme [H] [D] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’article 699 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Me Catherine Rodap.

L’intimé expose que l’adresse mentionnée par Mme [D] dans sa déclaration d’appel du 27 janvier 2021 est, de son propre aveu, inexacte, si l’on se réfère à ses déclarations faites le 17 décembre 2020 à l’huissier de justice instrumentaire. Il soutient que l’adresse effective de Mme [H] [D] à la date contemporaine de l’assignation en paiement du 28 février 2018 et du jugement réputé contradictoire du 04 septembre 2018 est bien :  » [Adresse 8] ». Il prétend également que, dans un mail du 25 novembre 2014 adressé à son conseiller clientèle, Mme [D] a confirmé qu’elle souhaitait recevoir l’ensemble de ses courriers au siège social de la société Protimm, dont elle est la gérante, et situé au [Adresse 2]. L’intimé ajoute que, au jour de la délivrance de l’assignation du 28 février 2018 puis de la signification du 08 octobre 2018 du jugement réputé contradictoire du 04 septembre 2018, l’adresse susvisée était bien la dernière adresse connue de Mme [D] pour la banque, ce que l’huissier de justice a régulièrement constaté.

En outre, il expose que tant l’extrait K bis de la SAS Protimm que l’extrait K bis de la SCI JBC domicilient l’adresse personnelle de Mme [H] [D] au [Adresse 2]. Il fait valoir qu’il a assigné Mme [D] en paiement d’une dette personnelle le 28 février 2018, alors que la procédure de saisie immobilière a été diligentée à l’encontre de la SCI JBC, dont le siège social est situé [Adresse 4], et que le commandement de payer valant saisie immobilière a été délivré à ladite société prise en la personne de son représentant légal en exercice, à savoir Mme [H] [D]. Le Crédit social caisse de crédit mutuel indique également que les deux actions diligentées par la banque étaient non seulement dirigées à l’encontre de deux personnes distinctes mais surtout pour le recouvrement de deux créances d’origine totalement différente, de sorte que l’huissier de justice instrumentaire , qui avait connaissance de l’adresse du siège social de la SCI JBC, de l’adresse du siège social de la société Protimm et de l’adresse personnelle de la gérante, a précisé que, tant pour la signification de l’assignation que du jugement litigieux, être intervenu au domicile, puis sur le lieu de travail de Mme [D] en vue d’une signification à personne.Il ajoute que, à la demande de la banque, Mme [D] a effectué le 21 juillet 2016, une auto-certification pour lui justifier son adresse, à savoir: « [Adresse 9] ».

Enfin, l’intimé expose que Mme [D] ne rapporte pas la preuve que l’adresse du siège social de la SCI JBC situé au [Adresse 3] au [Localité 7] ait pu constituer son adresse personnelle au 28 février 2018, malgré la production de mails adressés à son conseiller en 2014, alors qu’elle n’a jamais contesté avoir reçu ses extraits de compte [Adresse 9]. Il fait valoir que Mme [D] ne peut fonder sa demande de prononcé de la caducité du jugement litigieux sur les motivations du conseiller de la mise en état qui n’a statué dans son ordonnance du 16 décembre 2021 que sur la recevabilité de la déclaration d’appel en rappelant que la cour est seule compétente pour se prononcer sur la nullité invoquée des actes de procédure. Le Crédit social caisse de crédit mutuel prétend également que l’action en paiement de la banque n’est pas prescrite dès lors que l’assignation, même si elle était annulée, a interrompu la prescription jusqu’au 28 février 2020, et que tant le commandement aux fins de saisie-vente du 17 septembre 2019 que les conclusions de motivation d’appel du 23 février 2021 ont interrompu le délai de prescription biennale. Il ajoute que les dernières conclusions du 29 décembre 2021 de l’appelante ne contiennent aucune contestation de sa créance, tant sur son principe que son quantum.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 07 juillet 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, il sera fait expressément référence à la décision déférée à la cour et aux dernières conclusions déposées.

L’affaire a été plaidée le 27 janvier 2023. La décision a été mise en délibéré au 21 mars 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la nullité de l’assignation.

Selon l’article 657 du code de procédure civile, lorsque l’acte n’est pas délivré à personne, l’huissier de justice mentionne sur la copie les conditions dans lesquelles la remise a été effectuée. La copie de l’acte signifié doit être placée sous enveloppe fermée ne portant que l’indication des nom et adresse du destinataire de l’acte et le cachet de l’huissier apposé sur la fermeture du pli.

En application de l’article 658 du même code, l’huissier de justice doit aviser l’intéressé de la signification, le jour même ou au plus tard le premier jour ouvrable, par lettre simple comportant les mêmes mentions que l’avis de passage et rappelant, si la copie de l’acte a été déposée en son étude, les dispositions du dernier alinéa de l’article 656. La lettre contient en outre une copie de l’acte de signification.

L’article 656 du code de procédure civile dispose que: « Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l’acte et s’il résulte des vérifications faites par l’huissier de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l’huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l’article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l’acte doit être retirée dans le plus bref délai à l’étude de l’huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l’intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.

La copie de l’acte est conservée à l’étude pendant trois mois. Passé ce délai, l’huissier de justice en est déchargé.

L’huissier de justice peut, à la demande du destinataire, transmettre la copie de l’acte à une autre étude où celui-ci pourra le retirer dans les mêmes conditions ».

Il est de jurisprudence établie que l’huissier de justice doit impérativement vérifier que le destinataire demeure à l’adresse indiquée et mentionner sur l’acte qu’il a procédé à cette vérification. L’acte doit justifier d’investigations concrètes et toute formule de style est inopérante.

La seule mention dans l’acte de signification de la confirmation du domicile par différents voisins est insuffisante à caractériser les vérifications imposées à l’huissier, ce dernier devant procéder à des diligences omplémentaires. Ainsi, l’huissier de justice s’exécute suffisamment en vérifiant, dès lors que personne ne peut recevoir l’acte, que le domicile auquel il se présente est bien celui qui est indiqué dans les pièces de la procédure et que le nom du destinataire figure sur la boîte aux lettres.

Mme [H] [D] indique que l’assignation qui lui aurait été délivrée le 28 février 2018 à une mauvaise adresse est irrégulière et lui a causé un grief. Elle prétend également que son changement d’adresse a été porté à la connaissance du Crédit Mutuel notamment par l’intermédiaire de son conseiller clientèle à deux reprises au cours de l’année 2014 et que l’huissier de justice, qui n’a pas réalisé les diligences nécessaires aux fins de la retrouver, ne pouvait ignorer sa dernière adresse connue.

Il ressort du procès-verbal de signification du 28 février 2018 versé aux débats par la banque que la certification du domicile de Mme [H] [D] résulte d’une part, de la mention de son nom sur la boîte aux lettres, et d’autre part, de la confirmation du domicile par le voisinage, ces deux vérifications distinctes et suffisantes ayant été opérées par l’huissier avant de procéder à la remise d’un avis de passage au domicile de Mme [H] [D] et à l’envoi au destinataire d’une lettre avec copie de l’acte conformément à l’article 658 du code de procédure civile.

Il résulte de cet acte que l’huissier s’est strictement conformé aux prescriptions édictées en matière de signification.

La cour relève également que l’huissier a tenté de rencontrer en vain le signifié sur son lieu de travail et le fait que l’appelante ait fait connaître à la banque, par courrier électronique du 25 novembre 2014, un changement d’adresse est insuffisant à justifier l’annulation de l’acte d’huissier du 28 février 2018, la situation de Mme [H] [D] ayant pu évoluer entre le 25 novembre 2014 et le 28 février 2018.

Il résulte de ces éléments que la signification de l’assignation en date du 28 février 2018, aux fins de comparaître devant le tribunal de grande instance de Fort-de-France, était régulière.

En conséquence, l’exception de nullité soulevée par l’appelante sera rejetée.

Sur la signification du jugement du 08 octobre 2018.

L’article 659 du code de procédure civile dispose que lorsque la personne à qui l’acte doit être signifié n’a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l’huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu’il a accomplies pour rechercher le destinataire de l’acte.

Selon la Cour de cassation, il appartient au juge saisi d’une demande tendant à l’annulation de l’acte de signification de préciser les diligences accomplies par l’huissier de justice, sans pouvoir se contenter d’une motivation d’ordre général, l’appréciation de la réalité et du caractère sérieux des recherches effectuées par l’huissier de justice relevant du pouvoir souverain du juge du fond. Les investigations doivent être concrètes, précises et effectives.

L’acte de signification doit comporter une mention relatant les diligences accomplies par l’huissier de justice pour rechercher le lieu de travail du destinataire de l’acte (arrêt Cour de cassation, Civ. 2ème, 21 mars 2013, pourvoi n° 12-14.142).

En l’espèce, il ressort du procès-verbal de signification du 08 octobre 2018 versé aux débats par la banque qu’aucune personne répondant à l’identification du destinataire de l’acte n’a son domicile [Adresse 10], le local d’habitation étant occupé par de nouveaux locataires qui ne possèdent aucune information sur une éventuelle nouvelle adresse. L’huissier de justice a précisé avoir effectué en vain des recherches sur les réseaux sociaux, sur Internet et auprès des services de la gendarmerie, du commissariat et de la mairie. L’huissier de justice a conclu que le destinataire de l’acte n’avait ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, et a dressé le procès-verbal de signification conformément aux dispositions de l’article 659 du code de procédure civile.

Toutefois, la cour relève que c’est la même étude d’huissier qui a procédé à la signification de l’assignation à comparaître devant le tribunal de grande instance de Fort-de-France et à la signification du jugement rendu le 04 septembre 2018 : or, il résulte de l’acte d’huissier délivré le 28 février 2018 que Me [R] [X] n’a pu rencontrer le signifié sur son lieu de travail, de sorte que, à la date de la signification de cet acte, le lieu de travail de Mme [H] [D] était clairement identifié, ce qui n’est pas contesté par l’intimée dans ses dernières conclusions.

Dans ces conditions, il incombait à Me [N] [I], huissier de justice associé au sein de la même étude, de relater avec précision dans l’acte de signification du 08 octobre 2018 les diligences effectuées aux fins de rencontrer le signifié sur son lieu de travail, et ce d’autant que Me [I] avait déjà rencontré Mme [H] [D] sur le lieu d’exercice de son activité professionnelle, lors de la signification à personne, le 08 mars 2018, d’un commandement de payer à la gérante de la S.C.I. JBC.

La cour relève que l’acte d’huissier litigieux du 08 octobre 2018 ne comporte aucune mention en ce sens.

Il résulte de cet acte que l’huissier de justice, à qui il appartenait de faire des investigations complémentaires, ne s’est pas conformé aux prescriptions édictées en matière de signification.

Dans ces conditions, l’irrégularité de la signification de l’acte d’huissier en date du 08 octobre 2018, dont les mentions ne répondent pas aux exigence de l’article 659 du code de procédure civile, a causé un grief à l’appelante qui n’a pu prendre connaissance du jugement rendu le 04 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Fort-de-France et a donc été privée de toute possibilité d’exercer ses droits de la défense.

Dès lors, la nullité de l’acte de signification du 08 octobre 2018, faute de diligences suffisantes de l’huissier de justice, doit être constatée.

Sur le caractère non avenu du jugement.

L’article 478 du code de procédure civile prescrit que le jugement est non avenu s’il n’est pas signifié dans les 6 mois de sa date.

L’acte de signification du jugement litigieux étant nul et étant dépourvu de tout effet, il en découle d’une part que le jugement réputé contradictoire à l’égard de Mme [H] [D] du 04 septembre 2018 n’a pas été signifié dans les 6 mois de la date et qu’il est donc non avenu, et d’autre part, qu’il ne constitue pas un titre exécutoire valable pour fonder des mesures d’exécution forcée.

Le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions, la cour faisant droit aux demandes présentées à titre principal par Mme [H] [D].

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu pour la cour d’examiner les moyens de l’appelante exposés à titre subsidiaire et visant à démontrer que l’action en paiement de la banque est forclose.

Sur la procédure abusive.

L’article 1240 du code civil, dispose: « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Il incombe aux parties qui sollicitent l’octroi de dommages-intérêts d’établir que le responsable de leur préjudice a commis une faute faisant dégénérer son droit fondamental d’agir en justice en abus.

En l’espèce, en l’absence de preuve d’une faute commise par le Crédit social caisse de crédit mutuel, il convient de rejeter la demande de dommages-intérêts formée par Mme [H] [D].

Sur les demandes accessoires.

Les dispositions du jugement déféré sur les dépens et les frais irrépétibles seront infirmées.

Il sera alloué à Mme [H] [D] la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Succombant, l’intimé sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement rendu le 04 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Fort-de-France dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

REJETTE l’exception de nullit é visant à voir déclarer nulle l’assignation délivrée le 28 février 2018 à Mme [H], [U] [D] ;

DÉCLARE nul et de nul effet l’acte du 08 octobre 2018 de signification à Mme [H] [D] du jugement rendu le 04 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Fort-de-France ;

Vu l’article 478 du code de procédure civile,

DÉCLARE ce jugement non avenu ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs plus amples demandes ;

CONDAMNE le Crédit social caisse de crédit mutuel à payer à Mme [H], [U] [D] la somme de 2.000€ (deux mille euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE le Crédit social caisse de crédit mutuel aux dépens de première instance et d’appel.

Signé par Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de Chambre et Mme Béatrice PIERRE-GABRIEL, Greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

 


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