20 juin 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
22/02904
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 53B
1re chambre 2e section
ARRET N°
PAR DEFAUT
DU 20 JUIN 2023
N° RG 22/02904 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VFAR
AFFAIRE :
S.A. COFIDIS
C/
M. [C] [O]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Février 2022 par le Tribunal de proximité de DREUX
N° RG : 1121000225
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 20/06/23
à :
Me Sabrina DOURLEN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A. COFIDIS
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 3]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Sabrina DOURLEN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 453
Représentant : Maître Jean-Pierre HAUSSMANN de la SELARL HAUSMANN KAINIC HASCOËT, Plaidant, avocat au barreau d’ESSONNE –
APPELANTE
****************
Monsieur [C] [O]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Assigné à étude
Madame [D] [Z] [S] épouse [O]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Assigné à étude
INTIMES DEFAILLANTS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 19 Janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
EXPOSE DU LITIGE
Suivant offre préalable acceptée le 3 février 2016, la société anonyme Cofidis a consenti à M.[C] [O] et Mme [D] [O] née [Z] [S], un crédit soumis aux dispositions des articles L.311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur le 1er mai 2011 de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010. Aux termes de ce contrat, M. et Mme [O] ont bénéficié d’un prêt personnel d’un montant de 15 000 euros remboursable par 71 mensualités de 258,19 euros et une mensualité de 257,82 euros hors assurance au taux nominal conventionnel de 7,34%.
Par acte de commissaire de justice délivré le 29 juillet 2021, la société Cofidis a assigné M. et Mme [O] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Dreux aux fins d’obtenir leur condamnation solidaire sous le bénéfice de l’exécution provisoire à lui payer:
– la somme de 9 919, 87 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,34% à compter du 19 avril 2021,
– 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire du 15 février 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Dreux a :
– déclaré recevable l’action en paiement de la société Cofidis,
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts,
– condamné en conséquence solidairement M. et Mme [O] à payer à la société Cofidis la somme de 2 217,43euros, qui ne produira pas intérêts fut-ce au taux légal,
– débouté la société Cofidis de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné in solidum M. et Mme [O] aux dépens,
– rappelé la décision était exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration reçue au greffe le 26 avril 2022, la société Cofidis a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 8 décembre 2022, elle demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions d’appel,
– y faire droit,
– infirmer le jugement entrepris en ses dispositions critiquées dans la déclaration d’appel,
Statuant à nouveau,
– condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 9 919,87 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,34 % l’an à compter du jour de la mise en demeure du 19 avril 2021,
– subsidiairement, si la cour confirmait la déchéance du droit aux intérêts contractuels, condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 2 217,43 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 avril 2021, sans suppression de la majoration de 5 points,
En tout état de cause,
– ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l’article 1343-2 du code civil,
– condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement M. et Mme [O] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
M. [O] n’a pas constitué avocat. Par acte de commissaire de justice délivré le 29 juin 2022, la déclaration d’appel et les conclusions de l’appelant lui ont été signifiées par dépôt à l’étude.
Mme [O] n’a pas constitué avocat. Par acte de commissaire de justice délivré le 29 juin 2022, la déclaration d’appel et les conclusions de l’appelant lui ont été signifiées par dépôt à l’étude.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 15 décembre 2022.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la déchéance du droit aux intérêts
La SA Cofidis, appelante, fait grief au premier juge de l’avoir déchue de son droit aux intérêts conventionnels, après avoir relevé qu’elle ne justifiait pas d’éléments suffisants pour apprécier la solvabilité des emprunteurs, notamment leurs éléments de charges.
L’appelante soutient que le premier juge a ainsi ajouté aux dispositions du Code de la consommation.
Elle rappelle les dispositions de l’article L. 312-16 du code de la consommation qui disposent qu’avant de conclure un contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur.
Elle fait valoir que l’article D. 311-10-3 du code de la consommation (devenu l’article D. 312-8 du même code) n’impose comme pièces justificatives que :
– Tout justificatif du domicile de l’emprunteur
– Tout justificatif du revenu de l’emprunteur
– Tout justificatif de l’identité de l’emprunteur
La société Cofidis indique avoir produit :
– La carte d’identité de M. [O] et celle de Mme [O]
– une facture Free de M. et Mme [O] justifiant de leur domicile
– Les bulletins de paie des mois novembre et décembre 2015 de M. [O]
Elle fait valoir s’agissant de Mme [O] qu’il ressort de la fiche de dialogue complétée et signée par les emprunteurs que cette dernière ne travaillait pas et ne percevait aucun revenu.
Elle déduit de ces productions s’être suffisamment renseignée sur la solvabilité de M. [O] et Mme [O], aucune disposition légale ni jurisprudence n’imposant au prêteur la vérification des charges des emprunteurs.
Elle soutient en outre que les intimés ont rempli une fiche de dialogue faisant figurer les informations sur leur situation personnelle et financière, corroborée par les pièces produites et ont eu la possibilité de déclarer leurs éventuelles charges.
Elle indique avoir vérifié que leur taux d’endettement n’était que de 21,90 %, soit en dessous des 33 % retenus pour la souscription d’une offre de prêt.
La Société Cofidis indique également avoir rempli son obligation de consultation du FICP, et avoir entièrement respecté les dispositions du Code de la consommation.
Elle sollicite l’infirmation du jugement déféré en ce qu’il a prononcé la déchéance de son droit aux intérêts contractuels et la condamnation solidaire de M. et Mme [O] à lui payer la somme de 9 919,87 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,34 % l’an à compter du jour de la mise en demeure du 19 avril 2021.
Sur ce,
L’article L 311-48, dans sa version applicable en l’espèce, du code de la consommation dispose :
‘ Le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations pré-contractuelles dans les conditions fixées par les articles L. 311-6 ou L. 311-43, sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l’article L. 311-10, ou sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-11, L. 311-12, L. 311-16, L. 311-18, L. 311-19, L. 311-29, le dernier alinéa de l’article L. 311-17 et les articles L. 311-43 et L. 311-46, est déchu du droit aux intérêts. (…)
L’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.’
En application de l’article L 311-8 du code de la consommation dans sa version applicable, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit fournit à l’emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, notamment à partir des informations contenues dans la fiche mentionnée à l’article L. 311-6. Il attire l’attention de l’emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement. Ces informations sont données, le cas échéant, sur la base des préférences exprimées par l’emprunteur.
Il convient de constater en l’espèce que :
– la société Cofidis verse aux débats la fiche d’informations précontractuelles normalisées en matière de crédit aux consommateurs, ainsi que la fiche de dialogue signée par les co emprunteurs
– la société Cofidis a bien sollicité et obtenu de M. et Mme [O] des pièces justificatives corroborant la fiche d’informations : une facture Free de M. et Mme [O] justifiant de leur domicile, les bulletins de paie des mois novembre et décembre 2015 de M. [O], Mme [O] n’exerçant pour sa part aucune activité.
Il n’existe donc pas de motif de déchéance du droit aux intérêts lié au défaut de vérification de la solvabilité par le prêteur. Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.
Sur le montant de la créance
L’appelante produit à l’appui de sa demande :
– l’offre préalable de crédit relative à un prêt personnel d’un montant de 15 000 euros remboursable par 71 mensualités de 258,19 euros et une mensualité de 257,82 euros hors assurance au taux nominal conventionnel de 7,34%,
– le tableau d’amortissement,
– le justificatif de la consultation du FICP,
– la notice d’information sur l’assurances,
– la fiche d’information précontractuelle ,
– la fiche de dialogue,
– un décompte des sommes réclamées
– un historique du prêt
– une mise en demeure préalable par LRAR du 25 mars 2021
– une mise en demeure par LRAR du 19 avril 2021 à M. [O]
-une mise en demeure par LRAR du 19 avril 2021 à Mme [O] née [Z] [S]
– un décompte de créance au 10 juin 2021
Dès lors, au regard des documents produits, la créance s’établit à la somme de :
échéances impayées : 1497, 08 euros
capital restant dû : 7 702, 04 euros
intérêts : 21, 68 euros
Total : 9220, 80 euros
Il convient donc de condamner solidairement M. et mme [O] au paiement de la somme de 9220, 80 euros à ce titre.
Conformément à la demande de la banque, ces sommes porteront intérêts au taux contractuel, de 7, 34 % à compter du 19 avril 2021.
Sur la clause pénale
Aux termes de l’article 1152 ancien du code civil, le juge peut toujours, même d’office, modérer ou réduire la pénalité prévue au contrat si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
En l’espèce, l’indemnité de 8% apparaît manifestement excessive eu égard à l’importance du taux d’intérêt contractuel applicable. Il convient de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il l’a réduite à la somme d’un euro, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Sur la capitalisation des intérêts
Aux termes de l’article L 312-38 du code de la consommation, aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.
Il en résulte qu’il ne peut être demandé la capitalisation des intérêts. La demande de l’appelante sera rejetée.
Sur l’indemnité procédurale et les dépens
M. et Mme [O], qui succombent, seront condamnés in solidum aux dépens de première instance outre ceux exposés devant la cour.
Il convient en équité de condamner in solidum M. et Mme [O] à verser à la société Cofidis la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, par arrêt rendu par défaut et mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Condamne solidairement M.[C] [O] et Mme [D] [O] née [Z] [S] à payer à la société Cofidis les sommes de :
– 9220, 80 euros au titre du prêt du à’ février 2016, outre les intérêts au taux contractuel de 7, 34% à compter du 19 avril 2021,
– 1 euro au titre de la clause pénale, outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne in solidum M.[C] [O] et Mme [D] [O] née [Z] [S] à verser à la société Cofidis la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum M.[C] [O] et Mme [D] [O] née [Z] [S] aux dépens de première instance et d’appel.
– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,