Prêt entre particuliers : 20 juin 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 23/00537

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Prêt entre particuliers : 20 juin 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 23/00537
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20 juin 2023
Cour d’appel de Pau
RG n°
23/00537

SD et KB

Numéro 23/

COUR D’APPEL DE PAU

3ème CH Spéciale

Surendettement

ARRÊT DU 20/06/2023

Dossier : N° RG 23/00537 – N° Portalis DBVV-V-B7H-IOO7

Nature affaire :

Contestation des mesures imposées par la commission de surendettement des particuliers

Affaire :

[S] [X] épouse [C]

C/

[G] [W]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 20 Juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 20 Juin 2023, devant :

Mme DE FRAMOND, magistrate chargée du rapport,

assistée de Madame BOURG, greffier présente à l’audience et au délibéré,

Mme DE FRAMOND, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame DE FRAMOND, Conseillère faisant fonction de Présidente

mme ROSA-SCHALL, Conseillère

Mme CARIOU, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [S] [X] épouse [C]

[Adresse 2]

[Localité 4] NON COMPARANTE

Représentée par Me Florence HEGOBURU, avocat au barreau de PAU

(bénéficie d’une aide juridictionnelle du 03/05/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PAU)

INTIME :

Monsieur [G] [W]

[Adresse 1]

[Localité 3] COMPARANT

sur appel de la décision

en date du 03 FEVRIER 2023

rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE BAYONNE

EXPOSE DU LITIGE

Le 22 février 2022, la Commission de surendettement des particuliers des Pyrénées Atlantiques a déclaré recevable la demande de traitement de sa situation de surendettement présentée par Mme [S] [X] épouse [C].

Le 24 mai 2022, la Commission a établi des mesures consistant en un déblocage de l’épargne de la débitrice pour la somme de 2000 € affectée au remboursement partiel de la créance de M. [G] [W] en une mensualité, avec effacement du solde de la dette pour la somme de 38’895 € après cette mensualité, l’endettement total étant constitué de la seule créance de M. [W] pour la somme de 40’895 €.

Mme [S] [X] a contesté cette décision en indiquant avoir déjà débloqué cette épargne pour régler ses charges courantes notamment une facture ENGIE étant sans ressources depuis la liquidation de son commerce le 11 juin 2019.

M. [G] [W], présent à l’audience, a invoqué la mauvaise foi de Mme [S] [X] dans l’affectation des sommes perçues par elle à la suite de la vente du bien indivis dont elle était propriétaire avec son ex époux.

Par jugement réputé contradictoire du 3 février 2023 , le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pau a déclaré Mme [S] [X] irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement, en constatant notamment qu’elle n’avait fait aucun effort pour régler même partiellement son seul créancier alors qu’ elle avait perçu une somme de 167.200 € de la vente de son bien indivis sur laquelle un montant de 94’153,55 € seulement avaient servi au remboursement anticipé d’un crédit souscrit à la [5].

Par déclaration faite au Greffe de la Cour d’Appel de Pau le 16 février 2023, Mme [S] [X] a interjeté appel de la décision rendue.

Les parties ont été convoquées à l’audience par lettre recommandée avec accusé de réception.

A l’audience,

Mme [S] [X], se rapportant à ses dernières écritures du 9 mai 2023, indique que le mari de sa mère, M. [G] [W], lui a prêté 40’000 € alors qu’elle était commerçante à [Localité 7] mais que la crise des gilets jaunes lui a fait perdre son activité qu’elle a dû arrêter, se séparant de son mari, leur maison a dû être vendue, et elle s’est installée sur la Côte Basque où elle a trouvé du travail ; elle n’a pas pu rembourser sa dette à l’égard de M. [G] [W] qui est son seul créancier, et qui a obtenu un jugement de condamnation en l’assignant à son ancienne adresse, alors qu’il connaissait parfaitement sa nouvelle adresse à [Localité 4], raison pour laquelle elle n’a pas comparu. Elle ne peut pas rembourser plus de 30 € par mois. Il ne lui restait que 2000 € de la vente de sa maison qu’elle a utilisée pour payer une facture de ENGIE; elle démontre qu’elle assume personnellement bien le coût d’un loyer, et travaille aux nouvelles galeries à temps partiel.

Ayant été plusieurs années sans revenus et divorcée en 2020, elle a utilisé les 73’000 € qui lui sont revenus après la vente de la maison le 11 juillet 2019 pour régler les dettes de son fonds de commerce et vivre en attendant de retrouver un emploi. Elle a été également obligée de vendre sa voiture, et en a reloué une pour pouvoir travailler. Elle soutient continuer à entretenir sa fille aînée bien que celle-ci soit majeure, et une autre enfant adolescent.

Elle demande à bénéficier de la procédure de surendettement estimant qu’elle n’est pas de mauvaise foi, et demande la réformation de la décision de la commission sur son épargne de 2000 € dont elle ne dispose plus, et que ses dettes soit effacées à l’issue de ce moratoire d’un mois. Elle demande que soit ordonné le remboursement des sommes qui auraient pu être versées en vertu de l’exécution provisoire de la décision déférée, en principal, intérêts, frais et accessoires, avec intérêts au taux légal à compter de leur versement, et ceux au besoin à titre de dommages-intérêts.

M. [G] [W], beau-père de la débitrice, se rapportant à ses pièces et conclusions notifiées le 28 avril 2023, fait valoir qu’il a aidé sa belle-fille en 2017 par un prêt de 40’000 € sur lequel elle n’a fait que six remboursements de 650 € chacun en 2018, que son commerce était déjà en difficulté bien avant la crise des gilets jaunes; il ne connaissait pas la nouvelle adresse de sa belle-fille après la vente de sa maison; celle-ci n’est pas crédible et dissimule la réalité de sa situation, qu’elle n’a pas justifié réellement de ses charges ni de l’emploi des fonds qu’elle a perçus, ni de ses recherches d’emploi pendant les deux années pendant lesquelles elle est restée sans travailler; fin avril 2022 elle a débloqué son assurance-vie de 2129,62 € contrairement aux obligations qu’elle avait de ne pas disposer de son épargne pendant la procédure de surendettement. Elle occupe un logement dont le loyer de 1000 € est très onéreux compte tenu de sa situation. Il demande la confirmation de l’irrecevabilité de sa demande de traitement de son surendettement.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la bonne foi et la recevabilité de Mme [S] [X] :

Lorsqu’elle est saisie d’un recours contre les mesures imposées par la Commission de surendettement, la Cour d’Appel, comme le premier juge, doit réexaminer l’ensemble de la situation du débiteur.

Avant de statuer, le juge doit s’assurer que le débiteur se trouve bien dans la situation définie à l’article L711-1 du code de la consommation, c’est à dire qu’il est dans l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes exigibles et à échoir, et qu’il est de bonne foi.

La bonne foi se présume, et celui qui invoque la mauvaise foi du débiteur doit la prouver.

La mauvaise foi peut se manifester antérieurement à la procédure si le débiteur s’est placé délibérément en situation de surendettement, ou a constitué son endettement par des dépenses ou engagements en sachant qu’il était dans l’incapacité de les assumer, s’il n’a pas mis en oeuvre toutes les mesures dont il disposait pour réduire son endettement. Cette mauvaise foi conduit alors à déclarer le débiteur irrecevable à la procédure de surendettement qu’il sollicite.

En l’espèce, Mme [S] [X] a déposé son dossier de surendettement le 20 janvier 2022 en invoquant son incapacité à rembourser son seul créancier, M. [G] [W], qui détient une créance fixée par jugement du tribunal judiciaire de Montauban du 19 janvier 2021, la condamnant au paiement de la somme de 36’100 € avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 2020 ainsi qu’une somme de 1000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Mme [S] [X] ne conteste pas être débitrice de son beau-père, lui ayant signé une reconnaissance de dette en 2017, et admettant n’avoir pas pu le rembourser en raison de ses difficultés économiques.

À la suite de la radiation en 2019 et de la vente de son fonds de commerce de bijoux et accessoires de mode de [Localité 7] elle a perçu le 26 mars 2021 la somme de 1842,61 €.

Elle justifie s’être inscrite à PÔLE EMPLOI en juin 2019, mais n’avoir pas eu droit à l’allocation d’aide à retour à l’emploi.

En 2020, elle n’a déclaré aucun revenu selon son avis d’imposition à part la pension alimentaire de son ex-mari pour ses filles, elle ne justifie d’aucune démarche pour retrouver un emploi, ni de suvi d’une formation ou reconversion professionnelle envisagée;

En 2021 son avis d’imposition fait état de salaires pour 5982 € dans l’année.

À compter du 3 janvier 2022, elle est entrée aux magasins [6] de [Localité 4] à temps plein mais a subi un accident professionnel le 30 mai 2022 et se trouve en 2023 toujours en mi-temps thérapeutique avec un salaire de 758 € par mois, des indemnités journalières de 743 € par mois une prime d’activité de 22 € la pension alimentaire de 90 € une allocation logement pour 181 € et des allocations familiales de 209,75 € en avril 2023. Soit un total de revenus de 2003 €.

Elle verse une attestation notariée du 7 juin 2019 relatif à l’immeuble acquis en indivision avec son mari, vendu pour un prix 190’000 €, soit 177’200 € après déduction des frais d’agence. L’attestation notariée précise que sur ce prix M. [C] a reçu 10’000 € et Mme [S] [X] épouse [C] le solde soit la somme de 167’200€, somme sur laquelle elle a remboursé le 18 juillet 2019 la somme de 94’153,85€ à la [5] au titre d’un prêt personnel, ainsi qu’elle en justifie.

Il lui restait donc une somme totale de 72’847 €. Elle soutient avoir dû rembourser des dettes constituées dans le cadre de son activité commerciale à hauteur de 34.000 €, mais n’en justifie pas non plus, et avoir employé l’autre moitié soit environ 38’000 € pour vivre pendant 27 mois avec ses 2 filles, ayant divorcé le 19 juin 2020 et percevant une pension alimentaire du père de 90 € par mois aujourd’hui.

Elle produit certes une facture d’électricité pour un montant total de 875,75 € du 25 avril 2022, et justifie avoir le 5 mai 2022 racheté le capital d’assurance-vie qu’elle avait épargné pour un montant de 2129,62 €, qu’elle a ainsi effectivement affecté en partie au paiement de la facture d’électricité.

Mais la cour observe qu’elle n’a effectué aucun versement, même partiel, pour rembourser sa dette principale à l’égard de son beau-père entre 2019 et 2021, que les échanges de courrier ou de sms avec sa mère ou son beau-père traduisent des relations amères et conflictuelles sur le plan affectif , mais qui ne sauraient justifier le refus de payer sa dette alors qu’elle en avait la possibilité, pour ensuite déposer un dossier de surendettement en janvier 2022 pour tenter d’échapper au règlement de cette dette familiale.

Dès lors que Mme [S] [X] disposait dès 2019 d’un capital de 72’847€ entièrement disponible, qu’elle ne démontre par aucune pièce l’existence d’autres créanciers qui auraient exigé un remboursement et auraient absorbé la moitié de ce capital, qu’elle ne justifie surtout d’aucune démarche de recherche active d’emploi entre juillet 2019 et octobre 2021, date à laquelle elle signait son contrat avec les [6], tandis qu’elle prenait une location à [Localité 4] d’un montant de 1000 € par mois le 14 août 2020, alors qu’elle n’avait pas encore d’emploi dans cette agglomération, la Cour considère, à l’instar du premier juge, que Mme [S] [X] a contribué délibérément à sa situation de surendettement et manifesté de la mauvaise foi en n’utilisant pas les moyens à sa disposition pour réduire son endettement, et a en outre employé son épargne restante de 2000 €, après la décision de recevabilité de la Commission, pour payer une de ses dettes alors qu’elle en avait l’interdiction.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement rendu prononçant l’irrecevabilité de Mme [S] [X] au traitement de sa situation de surendettement.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort :

Confirme le jugement rendu le 3 février 2023 par le juge des contentieux de la protection de Bayonne en ce qu’il déclare Mme [S] [X] irrecevable à la procédure de surendettement,

Condamne Mme [S] [X] aux entiers dépens de première instance et d’appel,

Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec avis de réception à chacune des parties, et par lettre simple à la commission de surendettement.

Le présent arrêt a été signé par Madame DE FRAMOND, Présidente, et par Madame BOURG, greffier suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.

Le Greffier La Présidente

 


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