Prêt entre particuliers : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/03891

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Prêt entre particuliers : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/03891

19 janvier 2023
Cour d’appel de Paris
RG
21/03891

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 19 JANVIER 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/03891 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDGCT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 9 novembre 2020 – Juge des contentieux de la protection de SAINT-MAUR-DES-FOSSÉS – RG n° 11-20-000178

APPELANTE

La société CRÉDIT DU NORD, société anonyme agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 456 504 851 00019

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Sophie MÜH, avocat au barreau de PARIS, toque : D1256

INTIMÉ

Monsieur [B] [Z]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 6] (94)

[Adresse 4]

[Localité 5]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– DÉFAUT

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon convention du 17 mai 2017, M. [B] [Z] a ouvert auprès de la société Crédit du nord un compte bancaire numéro n° 30076 02077 293495 003 00 et a bénéficié par avenant du 5 octobre 2017 d’une facilité de trésorerie de 500 euros.

Selon offre préalable acceptée le 19 avril 2018, la société Crédit du nord a consenti à M. [Z] un crédit personnel « Etoile express » d’un montant en capital de 15 000 euros remboursable en 48 mensualités de 325,10 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 1,95 %, le TAEG s’élevant à 1,968 %, soit une mensualité avec assurance de 333,67 euros.

Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Crédit du nord a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 13 mars 2020, la société Crédit du nord a fait assigner M. [Z] devant le tribunal de proximité de Saint-Maur-des-Fossés en paiement du solde du prêt et du compte bancaire, lequel par jugement contradictoire du 9 novembre 2020, a rejeté ses demandes au motif que la banque ne produisait que des extraits informatiques sous forme de feuillets de classeur inexploitables pour le compte de dépôt de sorte qu’il était impossible de déterminer tant le détail des sommes versées par M. [Z] que les sommes éventuellement mises en débit du fait du prêt et que dès lors la fixation de la créance et le calcul d’une éventuelle forclusion étaient impossibles.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 26 février 2021, la société Crédit du nord a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 20 avril 2021 la société Crédit du nord demande à la cour d’infirmer le jugement, et de condamner M. [Z] à lui payer :

– la somme de 5 213,56 euros au titre du solde débiteur du compte bancaire avec intérêts au taux légal, du jour de la mise en demeure en date du 4 novembre 2019, jusqu’au jour du parfait paiement ;

– la somme de 12 780,24 euros au titre du contrat de prêt personnel avec intérêts au taux contractuel, du jour de la mise en demeure, soit le 4 novembre 2019, jusqu’au jour du parfait paiement ;

– 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de Me Sophie Müh, avocat au Barreau de Paris.

Elle fait valoir qu’elle produit toutes les pièces propres à justifier de ses demandes, que s’agissant du compte de dépôt, la dernière position créditrice date du 6 février 2019, que le compte a finalement présenté un débit de 5 213,56 euros le 18 octobre 2019 mais que cette somme ne comprend aucun impayé au titre du prêt personnel souscrit, que la forclusion n’est pas acquise, que s’agissant du crédit, les mensualités du prêt étaient prélevées sur le compte de dépôt, qu’il est donc facile de retracer les mensualités payées et celles qui ne l’ont pas été contrairement à ce qu’affirme le tribunal de première instance, que la dernière mensualité du prêt payée est celle du 13 janvier 2019, celle de février 2019 n’étant pas entièrement réglée et qu’elle n’est pas non plus forclose.

Aucun avocat ne s’est constitué pour M. [Z] à qui tant la déclaration d’appel que les conclusions ont été signifiées par acte du 13 avril 2021 délivré selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience le 22 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Le présent litige est relatif à un compte courant ouvert le 17 mai 2017 et à un contrat de crédit souscrit le 19 avril 2018 lesquels sont soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

1- Le compte courant

Sur la forclusion

Il résulte de l’article R. 312-35 du code de la consommation que les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

En matière de solde débiteur d’un compte courant, cet événement est caractérisé par le dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai de 3 mois prévu à l’article L. 312-93.

Le « dépassement » est le « découvert tacitement accepté en vertu duquel un prêteur autorise l’emprunteur à disposer de fonds qui dépassent le solde de son compte de dépôt ou de l’autorisation de découvert convenue ». Il est toutefois admis que le retour du compte à une position créditrice avant l’expiration du délai biennal interrompt ce délai.

La société Crédit du nord produit les relevés de compte depuis l’ouverture du compte qui font apparaître le libellé de chaque opération, sa nature et le solde du compte après imputation de l’opération. Ces pièces sont parfaitement lisibles et compréhensibles contrairement à ce qu’affirme le premier juge. Il en résulte que le compte a été débiteur à plusieurs reprises mais que le crédit a été restauré à chaque fois dans un délai inférieur à 2 ans et qu’il n’est constamment débiteur que depuis le 11 février 2019 et après cette date, qu’il a dépassé le montant du découvert autorisé de 500 euros que du 27 février 2019 au 6 mars 2019 puis de manière constante à partir du 28 mars 2019 jusqu’au 30 septembre 2019 date de clôture du compte. Dès lors, l’action de la société Crédit du nord, introduite par acte du 13 mars 2020, n’est pas forclose.

Sur les sommes dues

Il résulte de l’article L. 312-4-5° du code de la consommation, que les opérations de crédit comportant un délai de remboursement dépassant trois mois sont soumises aux dispositions du chapitre 1er du titre 1er du livre III du code de la consommation, relatif au crédit à la consommation.

L’article L. 312-93 du code de la consommation impose au prêteur, lorsque le dépassement se prolonge au-delà de trois mois, de proposer sans délai à l’emprunteur un autre type d’opération de crédit et ce à peine de déchéance du droit aux intérêts et des frais de toute nature applicables au titre du dépassement (article L. 341-9).

En l’espèce, le découvert dépassant les 500 autorisés a duré plus de 3 mois du 28 mars 2019 jusqu’au 30 septembre 2019.

Dès lors, la cour soulève d’office, sur le fondement des articles L. 312-93 et L. 341-9 du code de la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts, invite la société Crédit du nord à présenter ses observations sur ce point.

2- Le crédit

Sur la forclusion

L’article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur dans le cadre d’un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion et que cet événement est caractérisé par :

– le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;

– ou le premier incident de paiement non régularisé ;

– ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ;

– ou le dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93.

Il résulte de l’historique de compte du crédit que la dernière mensualité du prêt payée est celle du 13 janvier 2019, celle de février 2019 n’étant pas entièrement réglée. D’autre part à compter du 28 mars 2019 date à laquelle le montant du découvert autorisé a été dépassé, les échéances prélevées sur le compte ont été rejetées et le solde débiteur du compte ne comprend donc pas ces mensualités mais seulement les frais de rejet. Dès lors, l’action de la société Crédit du nord, introduite par acte du 13 mars 2020, n’est pas forclose.

Sur les sommes dues

La société Crédit du nord produit :

– le contrat de prêt,

– la fiche de solvabilité intitulée « fiche d’information sur les ressources et charges de l’emprunteur »,

– le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement du 19 avril 2018 soit avant la date de déblocage des fonds qui date du 27 avril 2018,

– la notice d’assurance, et la fiche de synthèse des garanties.

Elle ne produit pas la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées (FIPEN) exigée par les dispositions de l’article L. 312-12 du code de la consommation à peine de déchéance totale du droit aux intérêts par l’article L. 341-1 du même code, étant précisé qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information.

A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’informations précontractuelles normalisées européennes, ne permet de démontrer l’exécution par le prêteur de son obligation d’information que si la fiche elle-même est produite ce qui n’est pas le cas.

Dès lors, la cour soulève d’office, sur le fondement des articles L. 312-12 et L. 341-1 du code de la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts, invite la société Crédit du nord à présenter ses observations sur ce point et à produire toute pièce utile, notamment la fiche précontractuelle d’informations (FIPEN).

Dans la limite des moyens qu’elle a relevés d’office, la cour ordonne la réouverture des débats. Elle invite la société Crédit du nord à faire valoir ses observations sur les moyens soulevés d’office et à produire tout pièce utile avant le 28 février 2023.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt mixte par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau,

Dit que la société Crédit du nord est recevable comme non forclose en ses demandes en paiement du solde du compte bancaire n° 30076 02077 293495 003 00 et du solde du crédit personnel « Etoile express » d’un montant en capital de 15 000 euros consenti le 19 avril 2018 à M. [B] [Z] ;

Avant dire droit, sur les demandes en paiement,

Soulève d’office sur le fondement des articles L. 312-93 et L. 341-9 du code de la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts du compte bancaire, invite la société Crédit du nord à présenter ses observations sur ce point ;

Soulève d’office, sur le fondement des articles L. 312-12 et L. 341-1 du code de la consommation, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts en ce qui concerne le crédit, invite la société Crédit du nord à présenter ses observations sur ce point et à produire toute pièce utile, notamment la fiche précontractuelle d’informations (FIPEN) ;

Ordonne la réouverture des débats, dans la limite du moyen soulevé d’office ;

Invite la société Crédit du nord à faire valoir ses observations sur les moyens soulevés d’office et à produire tout pièce utile, avant le 28 février 2023 ;

Renvoie l’affaire à l’audience du 21 mars 2023 à 09h30 pour plaider ;

Réserve l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

La greffière La présidente

 


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