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16 novembre 2022
Cour d’appel de Riom
RG n°
21/01347
COUR D’APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°
DU : 16 Novembre 2022
N° RG 21/01347 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FT23
FK
Arrêt rendu le seize Novembre deux mille vingt deux
Sur APPEL d’une décision rendue le 14 Avril 2021 par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire du Puy-en-velay (RG n°11-20-000377)
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire
En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
La société SOGEFINANCEMENT
SAS immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 394 352 272 00022 ,
[Adresse 2]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentants :Me Laurie FURLANINI, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Olivier LE GAILLARD de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE (plaidant)
APPELANTE
ET :
M. [Z] [F]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Non représenté, assigné à étude
Mme [X] [H] épouse [F]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Non représentée, assignée à étude
INTIMÉS
DEBATS : A l’audience publique du 21 Septembre 2022 Monsieur [G] a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 16 Novembre 2022.
ARRET :
Prononcé publiquement le 16 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure – demandes et moyens des parties :
Selon une offre préalable du 24 février 2015 acceptée le même jour, intitulée “Offre de contrat de crédit Compact”, la SAS SOGEFINANCEMENT a consenti à M. [Z] [F] et à Mme [X] [H] épouse [F] un prêt personnel de 21 999 euros, remboursable en 60 mensualités de 439,77 euros, comprenant les intérêts au taux nominal de 7.40 % l’an.
La dette de M. et Mme [F] a fait l’objet d’un avenant signé le 19 novembre 2015 par les emprunteurs et la société prêteuse, prévoyant le paiement du solde en 102 mensualités de 287,75 euros.
M. et Mme [F] ayant interrompu les paiements, la SAS SOGEFINANCEMENT, après les avoir mis en demeure par lettre recommandée du 11 août 2020, les a fait assigner le 25 novembre 2020 devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay, en paiement de la somme principale de 14 444,71 euros.
Le juge a soulevé d’office deux motifs de déchéance pour la société prêteuse du droit aux intérêts contractuels ; le juge, après avoir invité la SAS SOGEFINANCEMENT à présenter ses observations sur cette éventuelle déchéance (M. et Mme [F] ne s’étant pas fait représenter), a suivant un jugement réputé contradictoire du 14 avril 2021 statué dans les termes suivants :
– rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription des moyens soulevés d’office par le tribunal ;
– constate la résiliation du contrat de prêt personnel souscrit par M. et Mme [F] ;
– prononce la déchéance totale pour la SAS SOGEFINANCEMENT du droit aux intérêts contractuels ;
– condamne solidairement M. et Mme [F] à payer à la SAS SOGEFINANCEMENT une somme de 4 906,99 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 11 août 2020 ;
– ordonne la capitalisation des intérêts ;
– rejette le surplus des demandes de la SAS SOGEFINANCEMENT ;
– condamne M. et Mme [F] aux dépens de l’instance.
Le tribunal a fondé sa décision, de déchoir la société prêteuse du droit aux intérêts contractuels, sur le motif soulevé d’office que cette société ne justifiait pas de la remise aux emprunteurs, avant la conclusion du prêt, d’une notice d’information conforme à l’article L. 312-29 du code de la consommation.
Par une déclaration faite par message électronique au greffe de la cour le 18 juin 2021, la SAS SOGEFINANCEMENT a interjeté appel de ce jugement.
La société appelante conclut à la réformation du jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance des intérêts contractuels ; elle demande que M. et Mme [F] soient condamnés à lui payer la somme de 14 444,71 euros, avec intérêts au taux contractuel à compter de la mise en demeure, et capitalisation des intérêts. Elle fait notamment valoir que le tribunal, n’ayant pas plus de pouvoirs que les parties, ne pouvaient soulever d’office l’irrégularité de l’offre préalable, dès lors que la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels constitue non pas une défense mais une demande reconventionnelle, et que cette demande était prescrite, en application de l’article L. 110-4 du code de commerce. À titre subsidiaire, si la cour ne retenait pas la prescription, la SAS SOGEFINANCEMENT fait valoir que M. et Mme [F] ont reconnu, en souscrivant l’offre préalable, qu’ils avaient pris connaissance de la notice d’information relative à l’assurance DIT-PE figurant dans les documents annexés à l’offre, notice dont la SAS SOGEFINANCEMENT produit une copie aux débats.
M. et Mme [F], à qui la société appelante a fait signifier son acte d’appel le 22 juillet 2021 (à leur domicile et à l’étude de l’huissier), puis ses conclusions le 10 septembre 2021, ne se sont pas fait représenter devant la cour.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 19 mai 2022.
Il est renvoyé, pour l’exposé complet des demandes et observations de la SAS SOGEFINANCEMENT, à ses dernières conclusions déposées devant la cour le 8 septembre 2021.
Motifs de la décision :
Ainsi que l’a rappelé le tribunal dans le jugement déféré, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime recevable, régulière et bien fondée (article 472 du code de procédure civile).
Le juge a la faculté de soulever d’office, en invitant le demandeur à s’en expliquer, tout motif qui s’oppose à la demande, s’agissant en particulier des dispositions d’ordre public du code de la consommation, applicables au crédit à la consommation ; le tribunal d’instance avait donc latitude de soulever d’office la question de l’éventuelle déchéance pour le prêteur du droit aux intérêts contractuels : une telle déchéance, dès lors qu’elle ne tend qu’au rejet de la demande en paiement du prêteur, constitue une simple défense au fond, et non pas une demande reconventionnelle comme le prétend à tort la SAS SOGEFINANCEMENT (en ce sens Cass. Civ. 1ère, avis du 18 septembre 2019, n° 19-70.013) ; aucune prescription ne lui est donc applicable.
Le tribunal a rappelé à bon droit les dispositions de l’article L. 312-29 du code de la consommation, selon lesquelles, lorsque l’offre de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, le prêteur doit remettre à l’emprunteur une notice contenant les conditions générales de l’assurance le concernant, ainsi que diverses autres informations précisées au même article, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. La SAS SOGEFINANCEMENT soutient qu’elle a satisfait à cette obligation, et fait valoir en ce sens une mention de l’acte contractuel, par laquelle M. et Mme [F] ont reconnu avoir « reçu la synthèse des garanties du contrat d’assurance » (pièce n° 1 produite par la société appelante).
Cependant M. et Mme [F], s’ils ont en effet reconnu qu’ils avaient chacun reçu la dite synthèse, n’ont pas reconnu en revanche qu’ils avaient reçu en outre la notice d’information, alors que la « Synthèse des garanties » précise qu’il s’agit bien de documents distincts : « Lorsque vous choisissez d’adhérer aux assurances DIT et/ou Perte d’emploi, vous devez, en plus de la synthèse des garanties, prendre connaissance de la notice d’information des contrats » : page 1 de la synthèse des garanties, incluse dans la pièce n°1.
La SAS SOGEFINANCEMENT ne prétend pas, et il n’apparaît pas à la lecture de la dite synthèse, que celle-ci contienne toutes les informations prévues à l’article L. 312-29 du code de la consommation : ainsi, la synthèse n’indique ni la durée de l’indemnisation, ni les risques exclus, alors que ces indications obligatoires figurent dans la Notice d’information destinée à l’assuré (pièce n° 13), notice que la société appelante ne justifie pas avoir remise à M. et Mme [F].
C’est donc à bon droit, faute pour la société prêteuse de justifier qu’elle a rempli son obligation de remettre la notice aux emprunteurs, que le tribunal a appliqué la sanction de la déchéance des intérêts, prévue à l’article L. 341-4 du code de la consommation. Le jugement sera confirmé de ce chef, et aussi en ce qu’il a condamné solidairement les emprunteurs à payer le solde du capital restant dû, déduction faite des paiements déjà effectués, et avec l’intérêt au taux légal. Le jugement sera infirmé en revanche, en ce qu’il a prononcé la capitalisation des intérêts, qui ne peut s’appliquer dès lors que le prêt est soumis aux règles du code de la consommation (Cass. Civ. 1ère, 9 février 2012, pourvoi n° 11 ‘ 14.605).
PAR CES MOTIFS, et par ceux du premier juge :
Statuant après en avoir délibéré, publiquement, par défaut, et mise à disposition des parties au greffe ;
Infirme le jugement déféré en ce qu’il a prononcé la capitalisation des intérêts, et rejette la demande formée de ce chef par la SAS SOGEFINANCEMENT ;
Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la SAS SOGEFINANCEMENT aux dépens d’appel ;
Rejette le surplus des demandes.
Le greffier, La présidente,