Prêt entre particuliers : 16 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00557

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Prêt entre particuliers : 16 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00557

16 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG
21/00557

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 3

ARRET DU 16 MARS 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00557 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CC4SC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Août 2020 -Juge des contentieux de la protection d’AUBERVILLIERS – RG n° 1119000901

APPELANTE

S.A.S. SOGEFINANCEMENT, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés es-qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3] / FRANCE

Représentée et ayant pour avocat plaidant Me Sébastien MENDES GIL de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

Substitué à l’audience par Me Christine LHUISSIER de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, avocate au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [J] [D]

[Adresse 2]

[Localité 4] / FRANCE

Assignation devant la Cour d’Appel de PARIS, en date du 29/02/2021, déposée à l’Etude d’Huissier de Justice conformément aux articles 656 et 658 du code de procédure civile.

Madame [Y] [B] épouse [D]

[Adresse 2]

[Localité 4] / FRANCE

Assignation devant la Cour d’Appel de PARIS, en date du 29/02/2021, déposée à l’Etude d’Huissier de Justice conformément aux articles 656 et 658 du code de procédure civile.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Aurore DOCQUINCOURT, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur François LEPLAT, président

Madame Anne-Laure MEANO, conseiller

Madame Aurore DOCQUINCOURT, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE

ARRET :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par François LEPLAT, Présidente et par Joëlle COULMANCE, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous-seing privé du 1er juillet 2015, M. [J] [D] et Mme [Y] [B] épouse

[D] ont souscrit un contrat de prêt personnel aupres de la SAS Sogefinancement.

Le crédit a été consenti pour un montant total de 14 448 euros au taux nominal conventionnel de 7,40 % l’an, remboursable en 84 mensualités de 248,20 euros (cotisation d’assurance incluse) à compter du 10 août 2015. Un avenant de réaménagement de la dette d’un montant de 12 758,23 euros a été conclu le 13 janvier 2017 rééchelonnant le remboursement en 99 mensualités de 196,68 euros à compter du 5 mars 2017.

La SAS Sogefinancement a adressé une mise en demeure à M. [J] [D] par courrier daté du 8 octobre 2018 recu le 9 octobre 2018 et à Mme [Y] [B] par courrier daté du 12 février 2019 présenté le 14 février 2019, leur réclamant la totalité des sommes dues.

Par acte d’huissier en date des 8 et 9 octobre 2019, la SAS Sogefinancement a fait assigner M. [J] [D] et Mme [Y] [B] épouse [D] aux fins de et sous le bénéfice de l’exécution provisoire:

– constater que la déchéance du terme est acquise suivant mise en demeure du 8 octobre 2018, et à défaut prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit sur le fondement de l’article 1184 du code civil,

– les condamner à lui payer les sommes de :

– 1 1 272,97 euros représentant les mensualités impayées, la capital restant dû et les intérêts échus, majorée des intérêts au taux conventionnel de 7,40 % l’an sur la somme de 11 265,05 euros,

– 886,21 euros au titre de l’indemnité légale de 8%,

– 500 euros au titre de l’article 700 du code de procedure civile,

– les condamner aux dépens.

Par jugement contradictoire entrepris du 25 août 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d’Aubervilliers a ainsi statué :

– déclare recevable le décompte actualisé fourni par la SAS Sogefinancement par mail du 24 juin 2020,

– déclare recevable l’action en paiement de la SAS Sogefinancement,

– constate que la déchéance du terme est acquise depuis le 14 février 2019,

– condamne M. [J] [D] et Mme [Y] [B] à payer à la SAS Sogefinancement :

– la somme de 3 218,99 euros au titre du solde de prêt, assortie des intéréts au taux légal à compter de la présente décision,

– la somme de 878,12 euros au titre de l’indemnité légale de 8% sur le capital restant dû, assortie des interéts au taux légal à compter de la présente décision,

– dit que ces sommes ne porteront pas intérêts au taux legal majoré,

– rejette la demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamne M. [J] [D] et Mme [Y] [B] aux dépens,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l’appel interjeté le 31 décembre 2020 par la SAS Sogefinancement,

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 31 mars 2021 par lesquelles la SAS Sogefinancement demande à la cour de :

Vu les articles 561 et suivants du code de procédure civile,

Vu l’article 9 du Code de procédure civile,

Vu les articles 1315 et 1322 du code civil dans leur rédaction antérieure au 1 er octobre

2016,

Vu les articles L 311-9, L 311-8 et L311-24 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la date de l’offre de crédit,

Vu les articles 1134 alinéa 1, 1184 et 1154 du code civil dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016,

Vu l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire,

– infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d’Aubervilliers le 25 août 2020 en ce qu’il a constaté que la déchéance du terme est acquise depuis le 14 février 2019 ; en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels ; en ce qu’il a limité la condamnation de M. [J] [D] et Mme [Y] [D] née [B] à payer à la SAS Sogefinancement la somme de 3.218,99 euros à titre de solde de prêt, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision et la somme de 878,12 euros au titre de l’indemnité de 8% sur le capital restant dû, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision, et précisé que ces sommes ne porteront pas intérêts au taux légal majoré ; en ce qu’il a partiellement débouté la SAS Sogefinancement de ses demandes formées à l’encontre de M. [J] [D] et Mme [Y] [D] née [B], en ce compris sa demande en condamnation solidaire au paiement de la somme de 11.272,97 euros, représentant les mensualités impayées, le capital restant dû et les intérêts échus, augmentée des intérêts de retard courus au taux conventionnel de 7,40% l’an sur la somme en principal de 11.265,05 euros, sa demande en paiement de la somme de 886,21 euros au titre de l’indemnité légale de 8% du capital restant dû et sa demande en paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ; en ce qu’il a rejeté la demande formée par la SAS Sogefinancement au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Statuant à nouveau sur les chefs contestés,

– dire et juger que les arguments visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme contractuel ou précontractuel sont infondés ; rejeter les moyens ;

– constater que la déchéance du terme a été prononcée ;

Subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit au vu des manquements de l’emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 03/10/2018 ;

En conséquence, et en tout état de cause, condamner solidairement M. [J] [D] et Mme [Y] [D] née [B] à payer à la société Sogefinancement la somme de 9.824,57 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 7,40 % l’an à compter du 24/06/2020 en deniers ou quittances valables pour les éventuels règlements postérieurs au 23/06/2020, en remboursement du prêt personnel n°36195638022 contracté le 01/07/2015; Subsidiairement, en cas de prononcé de la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

– modérer la déchéance prononcée ;

Plus subsidiairement, condamner solidairement Monsieur [J] [D] et Madame [Y] [D] née [B] à payer à la société Sogefinancement la somme de 4.485,16 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12/02/2019, en deniers ou quittances valables pour les éventuels règlements postérieurs au 23/06/2020 ;

– dire et juger n’y avoir lieu à écarter la majoration du taux légal ;

En tout état de cause, condamner in solidum M. [J] [D] et Mme [Y] [D] née [B] à payer à la société Sogefinancement la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– les condamner in solidum aux entiers dépens avec distraction au profit de la SELARL Cloix & Mendes-Gil en application de l’article 699 du Code de procédure civile.

M. [J] [D] et Mme [Y] [B] épouse [D], à qui la déclaration d’appel a été signifiée à étude d’huissier le 23 mars 2021, n’ont pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions remises au greffe et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de l’article 472, alinéa 2, du code de procédure civile, que si l’intimé ne comparait pas le juge d’appel est tenu de vérifier si la demande de l’appelant est régulière recevable et bien fondée.

En application de l’article 954 alinéa 6 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas est réputée s’approprier les motifs du jugement.

1 – Sur la déchéance du terme

Selon l’article L.311-24 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au jour de la souscription de l’offre de crédit litigieuse, ‘en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés’.

Dans le dispositif de ses écritures, la SAS Sogefinancement sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a constaté que la déchéance du terme était acquise depuis le 14 février 2019.

Toutefois, la SAS Sogefinancement n’explicite pas dans la discussion de ses écritures en quoi la date retenue par le premier juge serait erronée.

Par courriers présentés respectivement les 9 octobre 2018 pour M. [D] et 14 février 2019 pour Mme [D], la SAS Sogefinancement a sollicité le remboursement de la totalité des sommes dues.

C’est par une parfaite appréciation des éléments de la cause que le premier juge a retenu la date de la présentation de la mise en demeure adressée dans un second temps à Mme [D] le 14 février 2019 comme étant la date de la déchéance du terme, le prêt ayant été souscrit solidairement par les deux co-emprunteurs.

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

2 – Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Selon l’article L.311-8 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au jour de la souscription de l’offre de crédit litigieuse, ‘le prêteur ou l’intermédiaire de crédit fournit à l’emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, notamment à partir des informations contenues dans la fiche mentionnée à l’article L. 311-6 [fiche d’informations précontractuelles]. Il attire l’attention de l’emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement. Ces informations sont données, le cas échéant, sur la base des préférences exprimées par l’emprunteur’.

L’article L. 311-48 dans sa rédaction applicable au jour de la souscription de l’offre de crédit litigieuse dispose que ‘le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par les articles L. 311-6 ou L. 311-43, sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l’article L. 311-10 (…), est déchu du droit aux intérêts.

Lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge (…).

L’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû (…).

Par arrêt du 18 décembre 2014(CA Consumer Finance, C-449/13), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à ce qu’en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 32). La Cour de justice précise qu’une clause type figurant dans un contrat de crédit ne compromet pas l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 si, en vertu du droit national, elle implique seulement que le consommateur atteste de la remise qui lui a été faite de la fiche d’information européenne normalisée (point 29) ; elle ajoute qu’une telle clause constitue un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et que le consommateur doit toujours être en mesure de faire valoir qu’il n’a pas été destinataire de cette fiche ou que celle-ci ne permettait pas au prêteur de satisfaire aux obligations d’informations précontractuelles lui incombant (point 30) ; selon le même arrêt, si une telle clause type emportait, en vertu du droit national, la reconnaissance par le consommateur de la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, elle entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 31).

Il en résulte qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information ; il ne peut se contenter de se prévaloir d’une clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’information précontractuelle normalisée européenne ; la signature de la mention d’une telle clause ne peut être considérée que comme un simple indice non susceptible, en l’absence d’élément complémentaire, de prouver l’exécution par le prêteur de son obligation d’information (Cass; Civ. 1re, 5 juin 2019, n°17-27.066).

En l’espèce, la SAS Sogefinancement fournit son exemplaire de la fiche d’informations précontractuelles, mais ne justifie pas de sa remise aux emprunteurs, la clause type figurant au contrat selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’informations précontractuelles ne constituant qu’un simple indice non corroboré en l’espèce par d’autres éléments.

C’est par des motifs exacts et pertinents, qui ne sont pas utilement contredits par la SAS Sogefinancement, laquelle ne produit en cause d’appel aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l’appréciation faite par le tribunal, et que la cour adopte, que le premier juge a considéré que la SAS Sogefinancement ne prouvait pas avoir fourni des explications suffisantes aux emprunteurs pour leur permettre d’appréhender les conséquences de la conclusion du crédit sur leur situation financière ni pour permettre de déterminer si le crédit proposé était adapté à leurs besoins. Le premier juge relève en outre avec pertinence que la ‘fiche de dialogue’ précisant les ressources et charges des emprunteurs ne comporte que des indications générales sur le fonctionnement du crédit mais pas d’informations personnalisées en rapport avec les ressources et charges des époux [D] ni sur leurs besoins.

Il convient dès lors de confirmer la décision entreprise, en ce qu’elle a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels sur ce fondement, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres moyens de déchéance du droit aux intérêts invoqués.

3 – Sur le montant des sommes dues

C’est par une parfaite appréciation des éléments de la cause que le premier juge a considéré qu’en présence d’une déchéance totale du droit aux intérêts, tous les paiements effectués par les époux [D] doivent s’imputer sur le montant emprunté.

En revanche, il résulte de l’historique de compte que les emprunteurs ont réglé la somme totale de 7308,33 (et non 7505,01 euros), et ils ont versé des acomptes postérieurs à la déchéance du terme pour un montant total de 3724 euros suivant décompte d’huissier du 23 juin 2020.

Il convient dès lors de condamner solidairement les époux [D] au paiement de la somme totale de :

[ 14 448 – (7308,33 + 3724)] = 3415,67 euros au titre du solde du prêt, qui portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

L’indemnité de 8% du capital restant dû constitue une clause pénale susceptible de réduction par application de l’article 1152 alinéa 2 du code civil dans sa rédaction applicable au jour de la souscription de l’offre de crédit litigieuse, qui dispose que ‘le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; toute stipulation contraire sera réputée non écrite’. Le montant dû étant manifestement excessif, alors que la déchéance du droit aux intérêts a été prononcée, il convient de la modérer, et de condamner solidairement les époux [D] au paiement de la somme de 1 euro au titre de la clause pénale.

Le premier juge a pertinemment rappelé qu’il a été jugé que , bien que déchu de son droit aux intérêts, le prêteur est fondé, en vertu de l’article 1153 du Code Civil, à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure (Cass. Civ.1re, 27 mai 2003, n°01-10.635), le taux d’intérêt légal étant majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L.313-3 du Code monétaire et financier.

Toutefois, l’article 23 de la directive 2008/48 du Parlement européen et du Conseil concernant les contrats de crédits aux consommateurs dispose que les Etats membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées, et que les sanctions soient ‘effectives, proportionnées et dissuasives’.

Le premier juge a rappelé avec exactitude que, par arrêt du 27 mars 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire C-565/12, LCL / [T] [K]) a jugé que l’article 23 de la directive 2008/48 s’oppose à l’application d’intérêts au taux légal si ‘les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l’application de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations’. La Cour de Justice a ainsi ajouté que, ‘si la sanction de la déchéance du droit aux intérêts se trouvait affaiblie, voire purement et simplement annihilée, en raison du fait que l’application des intérêts au taux légal majoré est susceptible de compenser les effets d’une telle sanction, il en découlerait nécessairement que celle-ci ne présente pas un caractère véritablement dissuasif’, et qu’il appartient à la juridiction saisie ‘de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté son obligation avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de cette même obligation’.

Or, la Cour de Justice a édicté le principe selon lequel ‘le juge national chargé d’appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit communautaire, a l’obligation d’assurer le plein effet de ces normes, en laissant au besoin inappliquée, de sa propre initiative, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de celle-ci’ (CJCE, 9 mars 1978, aff. 106/77, Simmenthal).

En l’espèce, il résulte des pièces produites que les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal majoré de cinq points, nonobstant la déchéance du droit aux intérêts, ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci aurait pu bénéficier s’il avait respecté ses obligations découlant de la directive 2008/48, de sorte que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ne revêt pas de caractère effectif et dissuasif.

C’est donc par une parfaite appréciation des éléments de la cause que le premier juge a considéré qu’il convenait de ne pas faire application de l’article 1153 (devenu 1231-6) du code civil et de l’article L.313-3 du code monétaire et financier et de dire que la somme restant due en capital ne portera pas intérêts au taux légal majoré. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

La SAS Sogefinancement, partie perdante à titre principal, sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut,

Confirme, en ses dispositions frappées d’appel, le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a condamné M. [J] [D] et Mme [Y] [B] épouse [D] à payer à la SAS Sogefinancement :

– la somme de 3218,99 euros au titre du solde de prêt, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

– la somme de 878,12 euros au titre de l’indemnité légale de 8% sur le capital restant dû, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. [J] [D] et Mme [Y] [B] épouse [D] à payer à la SAS Sogefinancement les sommes de :

– 3415,67 euros au titre du solde du prêt, qui portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

– 1 euro au titre de la clause pénale,

Rappelle que ces sommes ne porteront pas intérêts au taux légal majoré,

Et y ajoutant,

Condamne la SAS Sogefinancement aux dépens d’appel, avec droit de recouvrement direct par application de l’article 699 du code de procédure civile.

Rejette toutes autres demandes.

La greffière Le président

 


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