Prêt entre particuliers : 13 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04196

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Prêt entre particuliers : 13 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04196

13 juin 2023
Cour d’appel de Grenoble
RG
21/04196

N° RG 21/04196 – N° Portalis DBVM-V-B7F-LCAB

C6

N° Minute :

copie certifiée conforme délivrée

aux avocats le :

Copie Exécutoire délivrée

le :

aux parties (notifiée par LRAR)

aux avocats

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES

ARRET DU MARDI 13 JUIN 2023

APPEL

Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Grenoble, décision attaquée en date du 20 septembre 2021, enregistrée sous le n° 19/01598 suivant déclaration d’appel du 05 octobre 2021

APPELANT :

M. [X] [E]

né le 24 Mars 1950 à [Localité 9] (75)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 12]

représenté par Me Véronique LUISET de la SCP SAUNIER-VAUTRIN LUISET, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

Mme [K] [S]

née le 23 Juillet 1950 à [Localité 5] (49)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Charlotte ALLOUCHE, avocat au barreau de GRENOBLE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 22/002537 du 22/03/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Mme Anne BARRUOL, Présidente,

Mme Martine RIVIERE, Conseillère,

M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire,

DEBATS :

A l’audience publique du 25 avril 2023,M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de Amélia Thuillot, greffière a entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s’y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte authentique du 11 décembre 2014, passé devant Maître [O], notaire à [Localité 10], Mme [K] [S] et M. [X] [E], tous deux de nationalité française, ont conclu un pacte civil de solidarité soumis au régime de la séparation des biens.

Suivant acte authentique du 5 novembre 2015, passé devant Maître [T], notaire à [Localité 6], Mme [S] et M. [E] ont acquis en indivision un tènement immobilier sis [Adresse 8] à [Localité 12] comprenant une maison à usage d’habitation de type 06 et un garage, cadastré section AB n° [Cadastre 3] de 4a 48 ca.

Cette vente a été acceptée moyennant le prix principal de 90.000 euros à concurrence de moitié chacun pour Mme [S] et M. [E].

Mme [S] et M. [E] ont rompu leur pacte civil de solidarité en mai 2018.

En l’absence de règlement amiable de leurs intérêts patrimoniaux, par acte du 12 avril 2019, Mme [S] a fait assigner M. [E] en partage de l’indivision existante entre eux devant le juge aux affaires familiales de Grenoble.

Par jugement contradictoire du 20 septembre 2021, le juge aux affaires familiales de Grenoble a principalement :

– ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l’indivision existant entre Mme [S] et M. [E],

– dit que les opérations peuvent être considérées comme complexes,

– dit que l’actif à partager est composé :

* du bien immobilier sis [Adresse 8] à [Localité 12] dont la valeur pour les besoins du partage sera fixée à la somme de 215.000 euros,

* de l’indemnité due par M. [E] pour son occupation du bien indivis du 7 mars 2018 jusqu’au partage définitif sur une base mensuelle de 875 euros, soit après abattement de 15 % pour-précarité, une somme mensuelle due à l’indivision de 743,75 euros,

– dit que le passif à partager est composé :

* des sommes versées au titre du crédit de 50.000 euros souscrit auprès de la Caisse d’Epargne Rhône Alpes, postérieurement à la dissolution du PACS et jusqu’au partage définitif, ainsi que le capital restant dû au jour du partage,

* des taxes foncières et de l’assurance habitation payées postérieurement à la dissolution du PACS et jusqu’au partage définitif,

* de la créance de 30.652,08 euros de M. [E] au titre du financement de fournitures pour la réalisation de travaux,

– dit que M. [E] dispose d’une créance à l’encontre de Mme [S] de 35.000 euros,

– attribué de façon préférentielle à M. [E] le bien immobilier indivis,

– déclaré la demande de clôture du compte-joint ouvert à la Caisse d’Epargne Agence de [Localité 7] sans objet,

– dit que chaque partie conservera la charge de ses propres frais irrépétibles et débouté en conséquence les parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens, avec application des règles en matière d’aide juridictionnelle,

– débouté les parties de toute autre demande plus ample ou contraire.

Le 5 octobre 2021, M. [E] a interjeté appel du jugement en ce qui concerne la composition de l’actif et du passif à partager, la créance de 35.000 euros à l’encontre de Mme [S] ainsi que les dépens.

Par conclusions notifiées le 16 mars 2022 dans le délai de trois mois suivant la notification des premières conclusions de l’appelant, Mme [S] a fait appel incident sur le passif à partager et notamment la créance de 30.652,08 euros, la créance de 35.000 due par M. [E], les frais irrépétibles ainsi que les dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 22 décembre 2022, M. [E] demande à la cour de :

– déclarer recevable l’appel interjeté par M. [E],

– infirmer le jugement rendu le 20 septembre 2021 en ce qu’il a :

– dit que l’actif à partager est composé :

*du bien immobilier sis [Adresse 8] à [Localité 12] dont la valeur pour les besoins du partage sera fixée à la somme de 215.000 euros,

* de l’indemnité due par M. [E] pour son occupation du bien indivis du 7 mars 2018 jusqu’au partage définitif sur une base mensuelle de 875 euros, soit après abattement de 15 % pour-précarité, une somme mensuelle due à l’indivision de 743,75 euros,

– dit que le passif à partager est composé :

* des sommes versées au titre du crédit de 50.000 euros souscrit auprès de la Caisse d’Epargne Rhône Alpes postérieurement à la dissolution du PACS et jusqu’au partage définitif, ainsi que le capital restant dû au jour du partage,

* des taxes foncières et de l’assurance habitation payées postérieurement à la dissolution du PACS jusqu’au partage définitif,

* de la créance de 30.652,08 euros de M. [E] au titre du financement de fournitures pour la réalisation de travaux,

– dit que M. [E] dispose d’une créance à l’encontre de Mme [S] de 35.000 euros,

– débouté en conséquence les parties de leur demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens, avec application des règles en matière d’aide juridictionnelle,

– débouté les parties de toute autre demande plus ample ou contraire.

– et statuant à nouveau :

– débouter Mme [S] de ses demandes,

– dire et juger que le passif restant dû au titre du prêt immobilier au 20 mai 2022 s’élève à 18.590,69 euros, somme à parfaire au jour le plus proche du partage,

– dire et juger que M. [E] est redevable d’une indemnité d’occupation à l’égard de l’indivision, d’un montant de 450,40 euros par mois, à compter du 7 juin 2018,

– dire et juger que M. [E] détient des créances à l’encontre de l’indivision et de Mme [S] pour les sommes qu’il a réglées seul :

*soit une créance à l’encontre de l’indivision de 43.058,61 euros pour le remboursement du crédit immobilier au 20 mai 2022, somme à actualiser au jour le plus proche du partage ;

*soit une créance à l’encontre de Mme [S] de 45.000 euros pour l’achat de la maison;

*soit une créance à l’encontre de l’indivision de 30.652,08 euros au titre du financement de fournitures pour la réalisation de travaux ;

*soit une créance à l’encontre de l’indivision de 7.980,11 euros au titre des charges relatives à la maison, somme à actualiser au jour le plus proche du partage,

– condamner Mme [S] à verser à M. [E], la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance, et celle de 2.500 euros pour les frais exposés en cause d’appel,

– condamner Mme [S] aux entiers dépens tant de première instance que d’appel, dont distraction au profit de la SCP Noëlle Saunier-Vautrin & Véronique Luiset sur son affirmation de droit en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 16 mars 2022, Mme [S] demande à la cour de :

-infirmer le jugement rendu le 20 septembre 2021 en ce qu’il a :

– dit que le passif à partager est composé de la créance de 30.652,08 euros de M. [E] au titre du financement de fournitures pour la réalisation de travaux,

– dit que M. [E] dispose d’une créance à l’encontre de Mme [S] de 35.000 euros,

– dit que chaque partie conservera la charge de ses propres frais irrépétibles et débouté en conséquence les parties de leur demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens,

– débouté Mme [S] de toute autre demande plus ample ou contraire.

– confirmer le jugement pour le surplus,

– en conséquence :

– dire que M. [E] est redevable d’une indemnité pour son occupation du bien indivis du 7 mars 2018 jusqu’au partage définitif sur une base mensuelle de 875 euros, soit après abattement de 15%our précarité, une somme mensuelle due à l’indivision de 743,75 euros,

– dire que M. [E] ne dispose d’aucune créance sur l’indivision concernant le règlement du crédit travaux souscrit auprès de la Caisse d’Epargne Rhône Alpes jusqu’à la dissolution du pacte civil de solidarité, ce règlement correspondant à sa contribution aux charges du pacte civil de solidarité,

– dire que Mme [S] a bien procédé à un apport personnel dans le bien indivis à hauteur de 45.000 euros,

– dire que cet apport personnel est inscrit dans l’acte authentique dressé par Maître [T] le 5 novembre 2015,

– déduire du fait que M. [E] n’a pas intenté de procédure en inscription de faux emporte impossibilité de contestation de ce fait,

– juger que M. [E] ne dispose d’aucune créance au titre du financement de fournitures pour la réalisation des travaux,

– juger que M. [E] ne dispose d’aucune créance relative aux charges du ménage jusqu’à la rupture du pacte civil de solidarité car relevant de sa contribution aux charges du pacte civil de solidarité,

– débouter M. [E] de l’intégralité de ses demandes, fins ou prétentions,

– condamner M. [E] à verser à Mme [S] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance, et 2.000 euros pour les frais en cause d’appel,

– condamner M. [E] aux dépens, tant de première instance que d’appel.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application de l’article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’indemnité d’occupation

En application de l’article 815-9 §3 du code civil, « l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité ».

En l’espèce :

– les parties s’accordent pour estimer la valeur de la maison indivise à 215.000 euros ;

– celle ci a une surface habitable de 130 m² sur un terrain de 448 m² à [Localité 12], à proximité de la commune de [Localité 7], où se trouvent tous les commerces et commodités utiles ;

– datant des années 1975, elle a été entièrement rénovée, est située dans un secteur calme avec vue sur les montagnes, et est bien équipée, en étant notamment dotée d’une pompe à chaleur, d’un ballon d’eau chaude thermodynamique et d’une cuisine intégrée.

Dès lors, c’est exactement que le premier juge a fixé sa valeur locative mensuelle à 875 euros, étant observé que la consultation du site internet locservice produite par l’appelant ne peut être prise en compte, car ne faisant état, pour aboutir à un loyer de 563 euros, que des maisons d’une surface inférieure à 90 m².

Par ailleurs, il convient d’appliquer sur le montant de 875 euros un abattement pour précarité qui sera fixé à 20%. L’indemnité d’occupation sera en conséquence de 700 euros par mois, le jugement déféré étant réformé de ce chef.

En revanche, c’est à juste titre que le premier juge a considéré que cette indemnité était due à compter du 07/03/2018, date du départ effectif de Mme [S], le fait qu’elle soit revenue une fois pour chercher ses affaires le 5 juin 2018 ne suffisant pas à démontrer qu’elle détenait les clés de l’immeuble indivis et qu’elle en avait conservé la jouissance. En effet, elle a été hospitalisée en mars 2018 et à sa sortie de l’hôpital, le 21 mars, elle a été hébergée par sa fille à [Localité 11], comme celle-ci l’atteste (pièce 14 intimée).

Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur le prêt contracté auprès de la Caisse d’Epargne

Il résulte de l’acte notarié d’achat de la maison de [Localité 12] du 05/11/2015 et du tableau d’amortissement (pièce 4 appelant) produit que les consorts [E]/[S] ont souscrit un prêt personnel le 10/05/2019 de 50.000 euros remboursable en 120 mensualités au taux de 2,65% l’an, avec des échéances de 544,77 euros, chacun des deux partenaires devant en rembourser la moitié.

Concernant les paiements effectués postérieurement à la dissolution du pacte civil de solidarité, survenue le 28/05/2018, il est constant qu’ils ont été le fait de M. [E], qui justifie ainsi d’une créance sur l’indivision, comme l’a exactement décidé le premier juge.

Concernant les réglements du crédit intervenus durant la vie commune, le pacte civil de solidarité stipule dans sa page 3 que chacun des partenaires « sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive dans les dépenses de la vie courante uniquement, en sorte qu’ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux, ni à retirer à ce sujet aucune quittance l’un de l’autre ». Il est précisé en page 2 in fine que « les partenaires qui s’engagent à une vie commune, s’apportent une aide matérielle et une assistance réciproque pendant la durée du pacte. Chacun des partenaires contribue aux besoins de la vie commune selon ses facultés, éventuellement par son activité dans le cadre de la vie commune ou une aide professionnelle non rémunérée ».

En l’espèce :

– les échéances du crédit ont été payées à partir du compte commun ;

– les frais générés par le logement du couple constituent des dépenses courantes, comme le montrent les sommes en jeu, modestes, 544,77 euros par mois ;

– Mme [S] perçoit une retraite d’un faible montant, soit 744 euros par mois en 2011, 812 euros en 2012, 843 euros en 2013 ;

– M. [E] a des revenus plus conséquents, puisqu’ il ressort de son relevé bancaire (pièce 19 appelant) qu’en 2016, il recevait une pension mensuelle de 2.227 euros au titre d’une retraite Humanis Agirc, une autre de 653 euros de l’Arrco ainsi que 1.392 euros au titre de la sécurité sociale, 1.047 euros de Cardif assurance vie et enfin un versement trimestriel de Gan Vie de 1.002 euros, soit des revenus de l’ordre de 5.650 euros.

Si le compte commun a été alimenté principalement par les fonds de M. [E], celui-ci disposait de facultés financières supérieures à celle de sa compagne. C’est donc exactement que le premier juge a considéré que l’appelant, conformément aux stipulations du pacte civil de solidarité, devait être réputé avoir pris en charge les échéances du crédit au titre de sa contribution aux charges du couple, étant relevé qu’il n’est pas justifié du paiement d’une prestation compensatoire à l’ex-épouse de l’appelant ni du patrimoine de ce dernier.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de M. [E] de voir figurer le remboursement des échéances du crédit au passif de l’indivision.

Sur les charges relatives à la maison

Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-avant, la décision déférée sera confirmée, le règlement par l’appelant des taxes foncières, d’habitation et d’environnement ainsi que les primes d’assurance de la maison relevant de la contribution aux charges du pacte civil de solidarité, seules les dépenses postérieures à la dissolution devant être intégrées au passif indivis.

Sur les travaux

Aux termes de l’article 815-13 du code civil, « lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation ».

En l’occurrence, la maison acquise en indivision a vu sa valeur augmenter sensiblement du fait des travaux de rénovation réalisés.

L’appelant ne réclame pas une indemnisation de son industrie, prévue à l’article 815-12 du même code, d’autant que l’intimée justifie avoir participé avec sa propre famille aux travaux, mais l’inscription au passif de l’indivision du paiement des matériaux non réglès par le prêt souscrit auprès de la caisse d’épargne, soit 30.652,08 euros (80.652,08 euros – 50.000 euros).

Ces réglements sont justifiés par les factures versées aux débats, alors que les justificatifs de dépenses produits par l’intimée ont trait à des objets et meubles meublants dont il n’est pas établi qu’ils ont été laissés en possession de M. [E] ou à des travaux, d’aménagement de cuisine notamment, réalisés dans le précédent domicile de Mme [S].

Ces travaux ne peuvent être considérés comme relevant des charges courantes, de par leur importance, d’autant qu’ils excèdent le montant du prêt travaux souscrit par les partenaires et que M. [E] a pris en charge les autres dépenses afférentes à la maison.

Le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef.

Sur les apports des partenaires

Selon le pacte civil de solidarité conclu entre les parties, une créance entre partenaires peut résulter d’une contribution de l’un deux ne correspondant pas au pourcentage de l’acquisition.

En l’espèce, il est indiqué dans l’acte du 05/11/2015 que M. [E] et Mme [S] sont propriétaires chacun à hauteur de la moitié en pleine propriété du bien acquis au prix de 90.000 euros, ce prix étant payé comptant ainsi qu’il résulte de la comptabilité du notaire.

Il est précisé page 9 que chaque partenaire a déclaré au notaire avoir effectué un apport personnel de 45.000 euros. Toutefois, il ne s’agit là que de simples dires recueillis par l’officier ministériel, et non d’une constatation de celui-ci. Dès lors, la preuve contraire peut être apportée, sans qu’il soit nécessaire d’intenter une procédure en inscription de faux.

L’appelant expose avoir avancé cette somme à sa partenaire, par :

– 12 versements de 900 euros,

– un versement de 15.000 euros le 15/10/2015,

– un réglement de 20.000 euros le 12/06/2015, ce qui est contesté par l’intimée.

Concernant les versements de 900 euros à Mme [S], ils ont débuté en novembre 2013, soit plus d’un an avant la conclusion du pacte civil de solidarité, alors que les parties étaient concubins.

A défaut de règle spécifique au statut des concubins, ce sont les règles de droit commun qui trouvent application, l’article 1099-1 du code civil régissant les donations en vue d’acquisition d’un bien ne jouant qu’entre époux.

En l’espèce, ces versements sont intervenus bien avant l’acquisition du bien immobilier, et ils ne peuvent relever que d’une intention libérale, M. [E] ayant voulu faciliter la vie commune en aidant sa compagne.

Ils ne peuvent ainsi être pris en considération.

Par ailleurs, M. [E] justifie avoir viré de son compte ouvert à la Barclays Bank le 15/10/2015, soit peu de temps avant l’acquisition de la villa, la somme de 15.000 euros sur le compte commun. Toutefois, il n’est pas produit la fiche comptable du notaire relative à l’achat du bien, qui aurait permis de déterminer à quel moment la somme de 90.000 euros a été réunie ainsi que l’origine des fonds.

Dès lors, cette somme a pu être virée sur le compte commun pour régler la part de M. [E] et non celle de sa partenaire.

Pour ce qui est du virement de 20.000 euros, il a été effectivement fait au profit de Mme [S]. Cette opération, par son montant, n’a pu avoir pour objet que l’achat du bien immobilier.

Par ailleurs, si Mme [S] justifie avoir eu à cette époque sur son compte personnel la somme de 30.000 euros, elle n’indique pas comment elle a pu réunir 45.000 euros.

Enfin, Mme [S] dans son assignation du 12/04/2019 devant le tribunal de grande instance de Grenoble, a elle-même exposé que le prix d’acquisition avait été financé par un apport de 20.000 euros par elle-même, M. [E] apportant 80.000 euros, ce qui est compatible avec ses déclarations devant la cour, aux termes desquelles elle avait employé pour ce faire 20.000 euros provenant d’une assurance vie.

Dans ces conditions, la cour retient que l’intimée n’a financé son apport qu’à hauteur de 20.000 euros, le solde étant apporté par l’appelant.

M. [E] est ainsi titulaire d’une créance de 25.000 euros sur Mme [S], le jugement entrepris étant réformé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles

Compte tenu du sort partagé du litige, il n’y a pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant de l’indemnité d’occupation et celui de la créance de M. [E] sur Mme [S] ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe l’indemnité d’occupation due par M. [E] à l’indivision [E]/[S] à la somme de 700 euros par mois ;

Dit que M. [E] est titulaire sur Mme [S] d’une créance de 25.000 euros au titre de l’apport personnel pour l’acquisition du bien immobilier ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d’appel, avec application des règles en matière d’aide juridictionnelle ;

PRONONCÉ par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile .

SIGNÉ par la présidente, Anne Barruol, et par la greffière, Abla Amari, présente lors de la mise à disposition, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La greffière La Présidente

 


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