Prêt entre particuliers : 13 décembre 2022 Cour d’appel d’Orléans RG n° 20/02216

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Prêt entre particuliers : 13 décembre 2022 Cour d’appel d’Orléans RG n° 20/02216
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13 décembre 2022
Cour d’appel d’Orléans
RG n°
20/02216

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE

GROSSE à :

SCP DERUBAY – KROVNIKOFF

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

EXPÉDITION à :

CAISSE D’EPARGNE LOIRE CENTRE

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d’ORLEANS

ARRÊT du : 13 DECEMBRE 2022

Minute n°560/2022

N° RG 20/02216 – N° Portalis DBVN-V-B7E-GHMG

Décision de première instance : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d’ORLEANS en date du 1er Octobre 2020

ENTRE

APPELANTE :

CAISSE D’EPARGNE LOIRE CENTRE

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Claire DERUBAY de la SCP DERUBAY – KROVNIKOFF, avocat au barreau d’ORLEANS

D’UNE PART,

ET

INTIMÉE :

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par M. [K] [R], en vertu d’un pouvoir spécial

PARTIE AVISÉE :

MONSIEUR LE MINISTRE CHARGE DE LA SECURITE SOCIALE

[Adresse 1]

[Localité 6]

Non comparant, ni représenté

D’AUTRE PART,

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

L’affaire a été débattue le 18 OCTOBRE 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant la cour composée, en double rapporteur, de Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre et Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller.

Lors du délibéré :

Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre,

Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, Conseiller,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller

Greffier :

Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l’arrêt.

DÉBATS :

A l’audience publique le 18 OCTOBRE 2022.

ARRÊT :

– Contradictoire, en dernier ressort.

– Prononcé le 13 DECEMBRE 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre, et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

L’URSSAF a procédé à un contrôle à la Caisse d’épargne Loire Centre portant sur les années 2014 à 2016, clôturé le 3 octobre 2017, et a adressé à la société une lettre d’observations datée du 12 octobre 2017.

La société a émis des observations par courrier du 15 novembre 2017 et l’URSSAF a répondu le 4 décembre 2017. L’URSSAF a émis une mise en demeure le 28 décembre 2017 à l’encontre de la société pour la somme de 891 960.

Le 1er mars 2018, la société a saisi la commission de recours amiable de l’URSSAF qui a rejeté le recours par décision du 28 février 2019.

Par requête du 24 mai 2018, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Loiret en contestation de la décision implicite de la commission de recours amiable rejetant la contestation des redressements portant sur les produits bancaires proposés aux salariés, les redressements relatifs à des dépenses figurant dans les frais généraux et la majoration pour absence de mise en conformité.

Par jugement du 1er octobre 2020, le Pôle social du tribunal judiciaire d’Orléans a :

– débouté la Caisse d’épargne Loire Centre de sa demande au titre d’une perte de chance ;

– infirmé la décision de la commission de recours amiable du 28 février 2019 en ce qui concerne les frais de restauration et la majoration de 10 % ;

– confirmé la décision de la commission de recours amiable du 28 février 2019 pour le surplus ;

– condamné la Caisse d’épargne Loire Centre à payer à l’URSSAF la somme de 804 031 euros ;

– condamné la Caisse d’épargne Loire Centre aux dépens.

La Caisse d’épargne Loire Centre a relevé appel de ce jugement le 30 octobre 2020. L’URSSAF a également interjeté appel, par déclaration du 31 octobre 2020, en ce qu’il a infirmé la décision de la commission de recours amiable en ce qui concerne les frais de restauration et la majoration de 10 %. La jonction des deux instances a été ordonnée le 14 décembre 2021.

Dans ses conclusions visées par le greffe le 18 octobre 2022 et soutenues oralement à l’audience du même jour, la Caisse d’épargne Loire Centre demande à la Cour de :

– la déclarer recevable en son appel ;

– infirmer le jugement l’ayant déboutée de sa demande au titre d’une perte de chance ;

Et statuant à nouveau,

– constater que le défaut de réponse systématique de la commission de recours amiable de l’URSSAF du Centre à ses recours génère un préjudice ;

– condamner l’URSSAF du Centre à lui verser la somme de 70 018 euros au visa des dispositions des articles 1240 et 1241 du code civil ;

– infirmer partiellement le jugement concernant les redressements contestés sur le fond et annuler lesdits redressements ;

A titre subsidiaire,

– les ramener aux montants justifiés qu’aura recalculé l’URSSAF du Centre ;

– et dans cette hypothèse, ordonner à l’URSSAF du Centre de faire application de l’article L. 242-1-3 du code de la sécurité sociale ;

– pour le surplus, confirmer le jugement entrepris ;

– condamner l’URSSAF du Centre à lui verser la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner l’URSSAF du Centre aux entiers dépens.

Dans ses conclusions visées par le greffe le 18 octobre 2022 et soutenues oralement à l’audience du même jour, l’URSSAF Centre Val de Loire demande à la Cour de :

– confirmer la décision du tribunal d’Orléans du 1er octobre 2020 ;

– confirmer la décision de la commission de recours amiable du 28 février 2019 ;

– condamner à titre reconventionnel la société [7] au règlement de l’entier redressement soit 891 960 euros objet de la mise en demeure du 27 décembre 2019 ;

– rejeter toutes les demandes de la société.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

SUR CE

Sur la demande indemnitaire de la Caisse d’épargne Loire Centre :

La Caisse d’épargne Loire Centre soutient que la commission de recours amiable de l’URSSAF ne s’est jamais prononcée concernant ses recours formés en avril 2008, juillet 2012, janvier 2014 et février 2018, jusqu’à ce qu’elle forme une demande de réparation du préjudice qu’elle estimait subir du fait de cette anomalie de la procédure pré-contentieuse ; que si l’obligation de saisir de façon motivée la commission de recours amiable de l’URSSAF, avant d’avoir accès au tribunal, constitue une limitation au principe de libre accès à un juge, cette limitation se révèle légitime dans la mesure où la procédure pré-contentieuse peut permettre, par un échange contradictoire, de limiter les contentieux de sécurité sociale ; que toutefois, l’application faite de cette règle est en contradiction avec le principe prévu par l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, dès lors que la saisine de la commission de recours amiable par un justiciable se révèle systématiquement vaine, puisqu’elle n’entraîne aucun échange ni aucune décision ; que le défaut de réponse de la commission de recours amiable de l’URSSAF concernant ses recours déposés auprès d’elle constitue donc une atteinte disproportionnée au droit du cotisant d’avoir accès à un juge ; que le fait de rendre obligatoire la saisine de la commission de recours amiable avant de pouvoir exercer un recours contentieux constitue un obstacle quant à l’accès au juge ; que le jugement ne s’est absolument pas prononcé sur la légitimité de l’obligation de saisir la commission de recours amiable lorsque celle-ci refuse systématiquement de se prononcer ; que les refus persistants et réitérés de la commission de recours amiable de l’URSSAF constituent également un abus de droit ; que l’absence de toute décision et de toute réponse de la commission de recours amiable est susceptible de rendre encore plus complexe la procédure de contestation, en cas de saisine du tribunal sur décision implicite de rejet ;

que si elle devait attendre une décision explicite de la commission de recours amiable pour saisir le tribunal, et dans la mesure où la saisine de la commission ne suspend pas le délai dont dispose l’URSSAF pour entamer les poursuites, une contrainte serait inévitablement délivrée sous trois ans ; que la contestation du redressement devrait alors être effectuée sous la forme d’une opposition à contrainte, mais le délai pour saisir le tribunal ne serait plus que de 15 jours ; que son préjudice réside tout d’abord dans les frais irrépétibles et frais de conseil qu’elle a dû à de nombreuses reprises engager ; que surtout ce préjudice réside dans une perte de chance de voir la contestation du redressement s’éteindre grâce à la décision motivée de la commission de recours amiable, qu’il convient d’estimer à 10 % du montant de la mise en demeure, soit 89 196 euros.

L’URSSAF fait valoir que les décisions de la commission de recours amiable étant susceptibles de recours devant le tribunal, juridiction indépendante et impartiale, la procédure suivie devant la commission de recours amiable ne méconnaît pas les exigences découlant de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales auxquelles elle n’est pas soumise ; qu’en l’espèce, la décision de la commission de recours amiable ne souffre d’aucune irrégularité de forme, et elle a parfaitement permis au cotisant de saisir le tribunal ; qu’il n’y a donc aucune faute de l’organisme et aucun préjudice de perte de chance ne saurait être alloué à la requérante ; que par ailleurs, la commission de recours amiable a rendu une décision le 28 février 2019 ; qu’elle n’a violé aucun droit du cotisant et a parfaitement respecté ses obligations.

En application de l’article 1382 du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 pour les recours engagés devant la commission de recours amiable avant le 1er octobre 2016, et de l’article 1240 du code civil pour les recours engagés postérieurement, il incombe à celui qui se prévaut d’un dommage d’établir la faute délictuelle de celui qui l’aurait causé.

Il résulte de l’article R.142-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable que les réclamations relevant de l’article L. 142-1 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d’administration de chaque organisme.

L’article R. 142-6 du code de la sécurité sociale prévoit que lorsque la décision du conseil d’administration ou de la commission n’a pas été portée à la connaissance du requérant dans le délai d’un mois, l’intéressé peut considérer sa demande comme rejetée et se pourvoir devant le tribunal des affaires de sécurité sociale.

La Cour européenne des droits de l’homme a posé comme principe que le droit d’accès au juge ‘peut donner lieu à des limitations implicitement admises car il appelle de par sa nature même une réglementation par l’État, (…) qui peut varier dans le temps et dans l’espace en fonction des besoins et des ressources de la communauté et des individus’ (CEDH, 28 mai 1985, n° 8225/78, Ashingdane c/ Royaume-Uni), et les États jouissent d’une marge d’appréciation dans l’élaboration de cette réglementation. Les limitations instaurées ne doivent néanmoins pas restreindre ‘l’accès ouvert à l’individu d’une manière telle que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même’ (CEDH, 22 octobre 1996, n° 22083/93, 22095/93, Stubbings et a. c/ Royaume-Uni).

En l’espèce, la cotisante se prévaut d’une atteinte excessive au droit d’accès au juge, résidant non dans la nécessité de saisir préalablement une commission de recours amiable, mais dans le caractère vain de cette saisine en l’absence de décision de ladite commission en réponse à ses recours.

Cependant, la cotisante ayant toujours eu la faculté de saisir le tribunal, en application des dispositions de l’article R. 142-6 du code de la sécurité sociale, nonobstant l’absence de décision de la commission de recours amiable de l’URSSAF dans le délai d’un mois à compter de sa réclamation, elle n’établit pas avoir été entravée de manière disproportionnée dans son droit d’accéder à une juridiction indépendante et impartiale.

En l’espèce, la Caisse d’épargne Loire Centre a saisi le tribunal compétent en l’absence de décision de la commission de recours amiable dans le délai d’un mois, et celle-ci s’est prononcée en cours d’instance par décision du 28 février 2019. S’agissant des recours précédents pour lesquels la commission de recours amiable ne s’est pas prononcée, la cotisante a pu contester les redressements opérés par l’URSSAF en justice, de sorte que le dommage allégué résultant d’une atteinte disproportionnée au droit d’accès au juge est inexistant.

S’agissant de l’abus de droit allégué, il ne peut être considéré que le défaut de réponse ou la réponse tardive de la commission de recours amiable de l’URSSAF aux requêtes de la Caisse d’épargne Loire Centre, qui n’a pas pu nuire au droit de saisir le tribunal d’une contestation, constituerait une faute de l’organisme, étant en outre relevé que les chefs de redressement portent sur une quantité importante de données, la lettre d’observations du 12 octobre 2017 comportant 114 pages.

Au surplus, le préjudice de perte de chance allégué par la Caisse d’épargne nécessite la preuve que l’absence de décision ou la décision tardive de la commission de recours amiable lui a fait perdre une chance d’une éventualité favorable qui n’est pas établie dès lors qu’elle a toujours pu accéder à une juridiction qui statue en fait et en droit, à l’issue d’un débat contradictoire, et prononce des décisions susceptibles de voies de recours.

La demande indemnitaire formée par la Caisse d’épargne Loire Centre doit donc être rejetée et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le chef de redressement n° 1 : avantages relatifs aux cartes bancaires à tarif préférentiel

La Caisse d’épargne Loire Centre indique qu’afin d’évaluer si certains salariés bénéficiaient d’une remise supérieure à 30 % par rapport aux tarifs appliqués pour les clients, l’URSSAF lui a demandé de lui communiquer pour chacune des années contrôlées le relevé annuel des frais bancaires ; que pour établir ensuite la comparaison avec le prix public des cartes bancaires, les inspecteurs chargés du recouvrement se sont fondés exclusivement sur le guide tarifaire de la clientèle fixant les tarifs applicables au 1er janvier de chacune des années, sans demander d’autres documents concernant par exemple des opérations exceptionnelles proposées aux clients au cours de l’année pendant des périodes limitées ;

que la jurisprudence concernant l’exclusion des offres promotionnelles de la recherche du tarif le plus bas pratiqué dans l’année n’est pas pertinente, car elle conduirait à estimer que le salarié qui doit renouveler sa carte bancaire pendant la période d’application de tarifs promotionnels doit être contraint de payer plus cher que les clients souscrivant le même service à la même période ; qu’il n’est pas possible que les règles d’évaluation des avantages en nature soumis à cotisations conduisent à facturer aux salariés de l’entreprise plus cher qu’aux clients, afin de ne pas être soumis aux cotisations sociales, car dans ce cas il n’existe même plus d’avantage en nature ; que les inspecteurs chargés du recouvrement n’ont pas vérifié ni exploité l’intégralité des documents qui leur avait été fournis alors que ces pièces apportaient la preuve que l’avantage en nature accordé remplit les conditions pour ne pas être assujetti aux cotisations sociales ; que toutes les informations nécessaires à constater et calculer un éventuel redressement ont été fournies, à l’URSSAF, sur sa demande, mais celle-ci n’a pas pris le soin de rechercher les opérations qui pouvaient le cas échéant donner lieu à redressement et s’est contentée au vu de quelques exemples de redresser l’intégralité des relevés annuels de frais bancaires en présumant l’existence d’avantages en nature ; qu’il y a donc lieu d’annuler ce chef de redressement quitte à ce que l’URSSAF effectue le cas échéant un calcul réel des redressements, en fonction des informations qui sont à sa disposition.

L’URSSAF explique qu’une circulaire ministérielle DSS/SDFSS/5B/N°2003/07 du 7 janvier 2003 a institué une tolérance en excluant certains produits ou services fournis aux salariés de l’assiette sociale ; qu’ainsi, les fournitures de produits et services réalisés par l’entreprise à des conditions préférentielles ne constituent pas des avantages en nature dès lors que les réductions tarifaires n’excèdent pas 30 % du prix de vente public normal, toutes taxes comprises ; qu’il appartient à l’employeur qui se prévaut de l’application de cette tolérance administrative d’apporter l’intégralité des éléments probants afin de la voir appliquer ; que les documents fournis par la société font ressortir que des remises tarifaires supérieurs à 30 % sont régulièrement accordées aux salariés, avec un niveau de remise non uniforme ; qu’il est établi que le prix retenu en référence ne doit pas tenir compte des offres promotionnelles, et il doit être fait référence au prix le plus bas pratiqué, accessible à l’ensemble de la clientèle, et non à une catégorie spécifique de clients ; que la société n’a pas fourni les justificatifs nécessaires prouvant la véracité desdits tarifs minorés appliqués.

En application de l’alinéa 1 de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable, tout avantage en argent ou en nature alloué en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations.

Il incombe à l’employeur d’apporter la preuve que l’avantage en nature accordé à ses salariés remplit les conditions pour ne pas être assujetti aux cotisations sociales. Aux termes de l’article 6 de l’arrêté du 10 décembre 2002, le montant des avantages en nature est déterminé dans tous les cas d’après la valeur réelle.

Les parties conviennent qu’au regard de la circulaire interministérielle du 7 janvier 2003, il existe une tolérance administrative justifiant l’exonération pour les fournitures de produits et services réalisés par l’entreprise à des conditions préférentielles dès lors que leurs réductions tarifaires n’excèdent pas 30 % du prix de vente public normal, toutes taxes comprises.

Afin de vérifier si les avantages consentis sont soumis ou non à cotisations, doit être retenue comme base de comparaison l’offre proposée au grand public au cours d’une année, à l’exclusion de toute offre promotionnelle, par définition limitée dans le temps ou s’adressant à un public déterminé, ainsi que l’a d’ailleurs jugé la Cour de cassation (2ème Civ., 25 juin 2009, pourvoi n° 08-17.156).

En l’espèce, il résulte de la lettre d’observations que les inspecteurs ont consulté les relevés annuels de frais des salariés bénéficiant d’avantages bancaires pour les années 2014, 2015 et 2016 et les plaquettes tarifaires clients pour les mêmes années et la comparaison de ces documents a révélé que des salariés bénéficiaient de remises tarifaires supérieures à 30 % sur une grande majorité de produits, avec un niveau de remise qui n’est pas uniforme.

La cotisante illustre ses moyens avec les exemples retenus dans la lettre d’observations qui démontreraient selon elle l’absence d’examen des pièces communiquées à l’URSSAF.

La lettre d’observations mentionne ainsi que pour M. et Mme [P], la comparaison des avantages consentis avec les tarifs clients fait ressortir un niveau de remise de 56,49 %, et la cotisante ne démontre pas que cette comparaison serait erronée au regard des tarifs clients. La [7] a indiqué que la tarification appliquée tient compte d’une offre promotionnelle réalisée au 16 au 28 novembre 2015, dénommée ‘La carte aux étoiles’, et dans sa réponse aux observations de la cotisante, l’inspecteur a constaté que la comparaison avec ce tarif promotionnel établissait un taux de remise inférieur à 30 % tout en relevant qu’il n’était pas produit le justificatif de souscription de la carte bancaire au cours de cette opération promotionnelle.

Nonobstant les observations de l’inspecteur sur le défaut de production du justificatif de souscription, dépourvues de pertinence au regard des règles précitées, la [7] n’établit pas que les avantages consentis à M. et Mme [P] ne dépassaient pas 30 % de remise au regard des tarifs habituels pratiqués à la clientèle hors offres promotionnelles.

S’agissant de Mme [D], il a été relevé par l’inspecteur un taux de remise de 50 % au titre de l’année 2016 au titre des frais prélèvement impayé. La [7] explique que Mme [D], retraitée de l’entreprise, détient une offre d’accompagnement de la clientèle en situation de fragilité financière, qui est une offre client et non une offre réservée aux salariés ou ex-salariés de l’entreprise, qui prévoit un plafonnement spécifique des commissions d’intervention prévu à l’article R. 312-4-2 du code monétaire et financier ainsi que l’application du demi-tarif sur les frais de rejets de prélèvement.

Il est constant que l’assiette de cotisations sociales comprend les avantages en nature accordés aux anciens salariés en raison de leur appartenance passée à l’entreprise, ainsi que l’a jugé la Cour de cassation (Civ. 2ème, 17 septembre 2009, pourvoi n° 08-12.071). Dès lors, la [7] ne peut se contenter d’alléguer que l’avantage accordé à Mme [D] ne résulte que de la souscription d’une offre ouverte à tout client et non de sa qualité d’ancienne salariée, sans produire de justificatif afférent. En conséquence, l’allégation de la société n’est pas démontrée.

S’agissant de M. [L], les inspecteurs ont constaté que les avantages consentis à ce salarié en 2016 correspondaient à un taux de remise de 32,22 % par rapport au tarif clientèle pratiqué. Suite aux observations de la cotisante selon lesquelles sur 16 opérations de retrait d’espèces, une seule avait été facturée avec un rabais supérieur à 30 %, les inspecteurs ont admis que la tarification de certains retraits bancaires effectués au sein de l’Union européenne respectaient la limite de 30 %, tout en indiquant que d’autres sont supérieures à la limite autorisée et ont indiqué :

‘En conséquence, il convient d’annuler le redressement concernant les opérations respectant la réduction tarifaire de 30 % du prix public et de maintenir celles dépassant la limite précitée.

Il vous appartiendra de fournir le détail des opérations pouvant être annulées selon les dispositions énoncées ci-dessus’.

L’URSSAF indique que la [7] n’a pas produit le détail des opérations devant être annulées. Or, les inspecteurs ayant admis l’annulation du redressement des opérations respectant la limite de 30 %, suite aux observations de la société qui ne faisait que se référer à l’annexe 3 de la lettre d’observations comportant les avantages en nature relevés par l’URSSAF, celle-ci était en possession de tous les éléments pour revoir le calcul du redressement de l’année. À défaut d’avoir procédé à la réévaluation à la baisse du redressement dont elle avait admis partiellement son mal-fondé, il convient d’annuler le redressement de ce chef mais pour la seule année 2016 concernée, soit la somme de 49 499 euros.

Le chef de redressement n° 1 sera donc validé à hauteur de 69 771 euros.

Sur le chef de redressement n° 3 : avantages relatifs aux prêts à taux préférentiel

La Caisse d’épargne Loire Centre fait valoir que l’URSSAF a vérifié le taux des prêts immobiliers et prêts à la consommation accordés aux salariés afin de s’assurer que le rabais qui leur était consenti n’était pas supérieur à 30 %, en comparant les taux appliqués aux collaborateurs et les taux issus des fichiers taux agents qui lui avaient été communiqués ; que ce fichier taux agents correspondrait aux taux moyens de sortie des prêts accordés à la clientèle particuliers du mois M-1, minorés de 30 %; que ce faisant, l’URSSAF n’a pas respecté les termes de la circulaire DSS du 19 août 2005 qui prescrit que la comparaison du prix consenti aux salariés soit faite avec le prix clients TTC le plus bas pratiqué dans l’année pour la vente du même produit ; que la comparaison doit donc s’effectuer par rapport à un taux client qui sera identique pour l’année entière, et non par rapport à un taux moyen de sortie des prêts accordés par nature et par type de durée à la clientèle particuliers du mois M-1 minoré de 30 % ; que le chef de redressement incriminé doit donc être annulé.

L’URSSAF réplique qu’il a été constaté que les salariés de la Caisse d’épargne Loire Centre bénéficient de prêts accordés à des taux préférentiels ; qu’il a été demandé à l’entreprise de fournir les fichiers reprenant l’ensemble des salariés ayant contracté des prêts immobiliers et des prêts à la consommation ; qu’afin de pouvoir effectuer une comparaison, la société a également transmis les fichiers ‘taux agents’ notifiant le barème des taux de prêts aux collaborateurs de l’entreprise ayant plus de 6 mois d’ancienneté ;

que les documents communiqués permettent d’établir que le taux appliqué au salarié est déterminé en minorant de 30 % le taux moyen de sortie des prêts accordés par nature et par type de durée à la clientèle particuliers du mois M-1 ; que l’accord d’entreprise du 23 mars 2012 prévoit que les frais de dossiers associés à l’octroi d’un prêt immobilier ou d’un prêt personnel à un salarié seront calculés sur la base du taux moyen de l’année précédente appliqués aux prêts à la clientèle particuliers minorés de 30 % et que les frais de dossier seront plafonnés à hauteur de 70 % du plafond prévu à la clientèle ; que le taux moyen est donc une notion figurant dans l’accord d’entreprise donc une notion de référence pour apprécier l’avantage en nature.

Ce chef de redressement a trait à la tolérance administrative de 30 % de remise concernant les avantages consentis aux salariés au titre des taux de prêts, au regard des taux pratiqués à la clientèle.

Il résulte de l’article R. 243-59 II, du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, que les employeurs sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle tout document et de permettre l’accès à tous supports d’information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l’exercice du contrôle.

Il résulte de la lettre d’observations qu’afin de pouvoir procéder à une comparaison des taux clients et des taux consentis aux salariés, la Caisse d’épargne Loire Centre a transmis les fichiers ‘taux agents’ comportant le barème des taux de prêts aux collaborateurs ayant plus de 6 mois d’ancienneté, dont il se déduit que le taux appliqué au salarié est déterminé comme suit :

‘Les taux appliqués aux prêts immobiliers ‘spécial agent’ pour l’acquisition ou la réalisation de travaux dans le cadre de la résidence principale, aux prêts personnels et aux prêts étudiants, correspond au taux moyen de sortie des prêts accordés par nature et par type de durée à la clientèle particuliers du mois M-1 minoré de 30 %’.

L’URSSAF a alors procédé à une comparaison entre les taux appliqués au collaborateur et les taux issus des fichiers ‘taux agent’ et a relevé des remises supérieures à 30 %.

La Caisse d’épargne Loire Centre qui a elle-même communiqué les fichiers ‘taux agents’ à l’URSSAF aux fins de comparaison, ne peut valablement soutenir que celle-ci n’était pas fondée sur le taux moyen de prêt accordé à la clientèle, alors qu’il lui appartenait, en application de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale précité, de fournir à l’organisme les éléments nécessaires à la vérification de l’application de la tolérance administrative d’exclusion de l’assiette de cotisations des réductions tarifaires accordées à ses salariés.

En conséquence, ce chef de redressement doit être validé.

Sur le chef de redressement n° 4 : avantages relatifs aux frais de rachat de prêts

La Caisse d’épargne Loire Centre explique que lorsqu’un client solde un prêt de façon anticipée afin d’en souscrire un nouveau avec la même banque, il est pratiqué une exonération des indemnités de remboursement anticipé ; que l’URSSAF a procédé à la réintégration dans l’assiette des cotisations de l’ensemble des indemnités de remboursements anticipés dont les salariés avaient pu être exonérés au titre des années 2014, 2015 et 2016, en utilisant un fichier qu’elle lui avait demandé de constituer comportant des informations concernant les crédits consentis aux salariés, ainsi que le montant des remboursements anticipés ; qu’à aucun moment l’URSSAF n’a procédé au recoupement de ces informations avec celles qui lui avaient été communiquées au titre des frais de dossiers sur les prêts immobiliers et à la consommation souscrits pendant la période contrôlée ; que ce simple recoupement aurait permis de constater quels étaient les salariés qui avaient été exonérés d’indemnités de remboursement anticipé, car ils avaient conclu un nouveau prêt auprès de la [7] ; qu’il s’agit donc d’un renversement de la charge de la preuve, l’URSSAF s’étant contentée de redresser un montant global sans rechercher dans quels cas l’avantage devait être ou non assujetti aux cotisations de sécurité sociale ; que chaque caisse d’épargne est indépendante des autres et applique sa propre doctrine et ses propres tarifs, de sorte que le site Internet de la caisse nationale ne lui est pas ‘opposable’.

L’URSSAF affirme que les éléments fournis par la société ne comportant pas d’éléments concrets sur les frais de rachats demandés au client, il a été effectué la vérification en prenant en compte la tarification ‘client’ sur le site internet de la [7] ; que ces éléments ont permis de réaliser une comparaison entre les frais appliqués aux clients et ceux appliqués aux collaborateurs, ceci faisant ressortir que, pour l’immense majorité des cas, aucun frais n’est appliqué aux salariés ; que cet avantage en espèce n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation par la société, une régularisation a donc été opérée, soit un montant de 278 945 euros ; que c’est à bon droit que les inspecteurs du recouvrement ont pris en compte les plaquettes tarifaires qui constituent le prix public par définition, dès lors que ces tarifs correspondent à ceux consentis à l’ensemble de la clientèle, et non à un nombre restreint de clients dans des conditions parfaitement discrétionnaires.

Ce chef de redressement a trait à la tolérance administrative de 30 % de remise concernant les avantages consentis aux salariés au titre de l’exonération des indemnités de remboursement anticipé de prêts souscrits auprès de la Caisse d’épargne Loire Centre.

Ayant relevé que des salariés de la Caisse d’épargne Loire Centre avaient bénéficié de l’exonération de l’indemnité de remboursement anticipé de prêts, l’URSSAF a dû procéder à la comparaison de cet avantage avec l’exonération pratiquée aux clients de la banque.

L’URSSAF disposait bien des fichiers relatifs aux prêts souscrits par les salariés de la banque de sorte qu’il ne peut lui être reproché de ne pas en avoir tenu compte. En revanche, l’URSSAF ne disposait pas du second terme de comparaison pour déterminer le respect de la tolérance administrative, à savoir l’exonération d’indemnité de remboursement anticipée pratiquée auprès des clients de la banque, celle-ci se contentant de se référer à une pratique commerciale courante dans le milieu bancaire.

La lettre d’observations mentionne ainsi que les plaquettes tarifaires clients de la Caisse d’épargne Loire Centre stipulent s’agissant des frais de remboursement anticipé : ‘se renseigner en agence’. En l’absence d’éléments fournis par la société sur les frais de rachats demandés aux clients, l’URSSAF a procédé à la comparaison en prenant en compte la tarification clients publiée sur internet faisant état d’un coût de remboursement anticipé correspondant à 6 mois d’intérêts avec un plafonnement à 3 % du capital restant dû à la date de rachat du prêt. Cette comparaison a révélé que dans la grande majorité des cas, aucun frais n’est appliqué aux salariés, ce qui constituait un avantage en espèces soumis à cotisations.

C’est donc à raison que les inspecteurs ont considéré que l’argumentation de la Caisse d’épargne Loire Centre « repose sur une pratique commerciale qui ne permet pas l’évaluation mathématique du rabais consenti au salarié. En effet, aucun élément comptable n’a été fourni par vos soins permettant le contrôle de la réduction accordée au salarié ».

La Caisse d’épargne Loire Centre ne justifie pas, en effet, avoir communiqué à l’URSSAF des éléments de comparaison tirés des exonérations d’indemnité de remboursement anticipé pratiquées auprès des clients de la banque, de sorte qu’elle ne peut reprocher à l’organisme de s’être procuré des éléments de tarification publics des frais de remboursement anticipé sur un site internet de la [7].

La Caisse d’épargne Loire Centre n’a donc pas fourni à l’URSSAF les éléments nécessaires à la vérification de l’application de la tolérance administrative d’exclusion de l’assiette de cotisations des exonérations des indemnités de remboursement anticipées accordées à ses salariés.

En conséquence, ce chef de redressement doit être validé.

Sur le chef de redressement n° 5 : avantages relatifs aux frais de renégociation de prêts

La Caisse d’épargne Loire Centre explique que lorsqu’un emprunteur renégocie les conditions de son prêt, il est établi un avenant au contrat de prêt initial qui entraîne le paiement de frais administratifs par le client ; que les mêmes règles sont appliquées lorsque le client est un salarié de la banque mais l’avenant est alors facturé avec une remise de 30 % ; qu’il suffisait à l’URSSAF de comparer les frais de renégociation des prêts figurant dans le fichier qu’elle lui a communiqué et les brochures commerciales fournies au début du contrôle ; que l’URSSAF affirme donc à tort qu’elle n’aurait pas été en mesure de fournir des éléments de comparaison clients permettant d’évaluer l’éventuel avantage perçu par le salarié ; que si l’URSSAF entend justifier la taxation forfaitaire à laquelle elle s’est livrée sur ce chef de redressement, il lui appartient d’apporter la preuve, ce qu’elle ne fait pas, que le tarif des frais d’avenant facturés aux clients ne figurait pas dans les documents qui lui ont été communiqués, et plus particulièrement dans les plaquettes tarifaires clients qu’elle reconnaît avoir reçues ; qu’à défaut, la procédure de taxation forfaitaire se révèle injustifiée et le chef de redressement doit être annulé dans son intégralité ; que les inspecteurs chargés du contrôle ont confondu les notions de rachat d’un prêt et de renégociation d’un prêt.

L’URSSAF indique que l’entreprise n’a pas été en mesure de fournir des éléments de comparaison client permettant d’évaluer l’éventuel avantage perçu par les salariés au titre de la renégociation des prêts, de sorte qu’il n’a pas été possible de vérifier si la tolérance de 30 % a bien été respectée ; qu’à défaut d’élément probant, l’assiette de la régularisation a été fixée forfaitairement dans les conditions décrites en application de l’article R. 243-59-4 du code de la sécurité sociale, soit une régularisation totale d’un montant de 43 490 euros ; que si la société a produit des éléments en fin de contrôle, en l’absence d’éléments pour l’année 2014 et afin d’être plus favorable au cotisant, il a été fait une moyenne des années 2015 et 2016 afin de déterminer un redressement au plus juste ; qu’au regard des éléments, la tarification de 175 euros concerne un avenant simple du contrat, alors qu’il a été constaté deux autres lignes de facturation : avenant complexe du contrat d’un coût de 2 360 euros et les frais de réaménagement interne ; qu’au regard des éléments transmis, il est impossible de rapprocher la tarification de 122,50 euros facturés au collaborateur de l’opération réalisée et ainsi d’effectuer une comparaison probante, alors que la limite de 30 % n’est pas respectée concernant un avenant complexe.

Il résulte de la lettre d’observations que dans le cadre d’une renégociation de prêt, l’emprunteur salarié négocie auprès de l’établissement financier un avenant au contrat de prêt initial et des frais de dossier lui sont facturés visant à couvrir le coût de l’avenant, mais que les inspecteurs ont fait une confusion avec les frais de remboursement anticipé visés au point n° 4 du redressement, dès lors qu’ils font référence aux frais de remboursement anticipé mentionnés dans les plaquettes tarifaires.

La lettre d’observations mentionne expressément que les inspecteurs ont consulté les plaquettes tarifaires clients pour les années 2014, 2015 et 2016, et la [7] a rappelé dans son courrier d’observations du 15 novembre 2017 que les brochures commerciales remises mentionnent le coût des frais d’avenant simple du contrat qui sont facturés aux clients à hauteur de 175 euros, montant constant sur toute la période.

Dans leur courrier de réponse aux observations de la société, les inspecteurs de l’URSSAF ont admis que le montant tarifé aux collaborateurs dans le fichier qui leur avait été communiqué s’élève à 122,50 euros soit 175 euros – 30 %, mais ont précisé que ces brochures faisaient également référence à des frais relatifs à un avenant complexe du contrat (transfert de prêt sur un autre objet, avenant combinatoire) d’un montant de 360 euros et à des frais de réaménagement interne pour lesquels la brochure invitait les clients à se renseigner en agence.

Or, à aucun moment la lettre d’observations ne mentionnait que les avantages consentis aux salariés de la [7] portaient également sur les avenants complexes ou des frais de réaménagement complexe, dès lors qu’elle ne vise que les frais de renégociation de prêt visant à couvrir les frais d’établissement d’un avenant simple.

Il est établi que la Caisse d’épargne Loire Centre a fourni les plaquettes tarifaires pour les années 2014, 2015 et 2016, au cours desquelles les frais de renégociation de prêt étaient de 175 euros et que les frais facturés à ses salariés bénéficiaient d’une remise qui n’excédait pas 30 % par rapport à ce prix public sur l’ensemble de la période.

Le redressement opéré par l’URSSAF de ce chef de redressement pour la somme de 43 490 euros n’est donc pas fondé et sera annulé.

Sur le chef de redressement n° 9 : erreur matérielle de report ou de totalisation

La Caisse d’épargne Loire Centre considère que l’écart constaté entre le livre de paie 2015 et les quelque 200 déclarations annuelles adressées à l’URSSAF, résulte tout simplement de l’oubli par celle-ci dans son total d’un ou peut-être deux établissements ; que l’erreur matérielle est donc celle de l’URSSAF et il suffirait que celle-ci indique le nombre de DAS qu’elle a additionnées au titre de 2015, afin de contrôler si cela correspond au nombre d’agences figurant sur la lettre d’observations ; que le tribunal a rejeté son argumentation au motif qu’il lui appartiendrait de démontrer l’existence d’un oubli de l’URSSAF, renversant ainsi la charge de la preuve.

L’URSSAF réplique que l’examen des documents comptables consultés fait apparaître une divergence avec les déclarations adressées ; que cette divergence est réintégrée dans l’assiette des cotisations et contributions ; que l’employeur n’a pas été en mesure lors du contrôle de justifier les écarts constatés lors de la vérification ; que le rapprochement entre la DADS et le cumul des cotisations de sécurité sociale déclaré en code type 100, a déjà été fiabilisé lors du contrôle et n’est pas à l’origine de la régularisation litigieuse ; qu’en effet, l’écart non expliqué porte sur les bases sécurité sociale relevées sur les documents de paie établis par la société et les bases déclarées auprès des services de l’URSSAF que ce soit au moyen des bordereaux mensuels ou des déclarations sociales nominatives (DSN) ; qu’il conviendra donc de confirmer le redressement évalué sur ce point à un montant de 12 685 euros.

Le redressement porte sur l’écart constaté lors des rapprochements effectués entre documents de paie annuels de l’employeur et les déclarations annuelles adressées à l’URSSAF pour la seule année 2015.

La Caisse d’épargne Loire Centre n’établissant pas que l’écart constaté par l’URSSAF entre les documents de paie et les déclarations annuelles n’existe pas, le redressement réintégrant dans l’assiette de cotisations sociales la différence relevée, ne peut qu’être validé.

Sur le chef de redressement n° 14 : frais de repas versés hors situation de déplacement

L’URSSAF soutient que l’examen des grands livres de la comptabilité a mis en évidence que la Caisse d’épargne Loire Centre rembourse et prend en charge des frais de restauration  ; qu’aucun document n’a été transmis par l’entreprise lors des opérations de contrôle et il a été constaté des dépenses liées aux frais de restauration à proximité du lieu habituel de travail ; que des repas ayant été pris à proximité immédiate du lieu de travail habituel, la situation de déplacement professionnel n’est nullement caractérisée pour les salariés concernés ayant béné cié des frais de restauration invoqués par la société ; que la société ne produit aucun élément justificatif de nature à prouver que les frais en question ont la nature de frais d’entreprise susceptibles d’être exonérés de l’assiette sociale.

La Caisse d’épargne Loire Centre répond que l’URSSAF n’a pas pris en compte les règles de tenue de comptabilité qui lui sont applicables, car elle n’est pas assujettie à la TVA pour l’ensemble des opérations qu’elle réalise ; que les dépenses passées en frais généraux ne correspondent ni au montant HT des factures, ni à leur montant TTC, mais à un montant intermédiaire, déduction faite d’une partie seulement de la TVA récupérable, ce qui a conduit les inspecteurs chargés du recouvrement à estimer que la dépense figurant en comptabilité n’était pas justifiée par une facture si bien qu’elle devait faire l’objet d’un redressement ; que les inspecteurs chargés du contrôle ignoraient totalement les règles applicables en matière de TVA et de tenue de comptabilité auxquelles elle est soumise et ont tout simplement réintégré dans l’assiette des cotisations un certain nombre de frais qu’ils ont estimé non justifiés, car ils étaient enregistrés pour un montant HT récupérable, et non pour le montant HT ou TTC figurant sur les factures ; que si la cour devait infirmer sur ce point le jugement de première instance, elle ne pourrait toutefois que maintenir l’annulation du redressement fondé sur une erreur de l’URSSAF ; que sur le fond, l’URSSAF a réintégré dans l’assiette des cotisations des frais de repas pris en commun par des salariés qui étaient en situation de formation, au motif qu’il ne s’agirait pas de situations de déplacement, alors que l’examen des feuilles de présence montre clairement non seulement que les participants ne travaillaient pas au siège à [Localité 9], mais également qu’ils venaient d’autres villes ; que les salariés en question étaient donc bel et bien en déplacement, et la prise en charge directe de leurs frais professionnels ne pouvait recevoir la qualification d’avantage en nature.

Aux termes de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à la cause, tout avantage en nature ou en espèces versé en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations à l’exclusion des sommes représentatives de frais professionnels dans les conditions et limites fixées par l’arrêté du 20 décembre 2002.

Ce n’est que si l’employeur respecte les textes qui sont applicables au paiement des frais professionnels qu’il peut bénéficier d’exonérations sur les sommes ainsi versées à ce titre et, à l’inverse, s’il verse des sommes au titre de tels frais sans observer les dispositions légales qui en régissent le paiement, l’intégralité des sommes ainsi payées aux salariés est soumise à cotisations.

L’article 3 de l’arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale dispose que les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet, dans la limite d’un forfait. Ainsi, lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel hors des locaux de l’entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu’il est contraint de prendre son repas à l’extérieur, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas le seuil fixé par les textes.

Il appartient à l’employeur d’apporter la preuve que l’avantage en nature accordé à ses salariés remplit les conditions pour ne pas être assujetti aux cotisations sociales, ainsi que l’a d’ailleurs jugé la Cour de cassation (Civ. 2ème, 25 juin 2009, pourvoi n° 08-17.156).

La lettre d’observations mentionne notamment :

‘L’examen des grands livres de la comptabilité a mis en évidence que la Caisse d’épargne Loire Centre rembourse et prend en charge des frais de restauration. […]

Les écritures comptables correspondant à des frais de restauration ont fait l’objet de demandes complémentaires par mail le 4 août 2017 sollicitant :

– la liste des personnes participantes,

– tout document précisant la raison professionnelle de l’événement.

Aucun document n’a été transmis par l’entreprise.

[‘]

De plus, il a été constaté des dépenses liées aux frais de restauration à proximité du lieu habituel de travail. [‘]

Il s’agit de déjeuners entre salariés d’une même agence, d’agences avoisinantes ou du siège administratif.

L’invitation entre salariés d’un même établissement ne peut être considérée comme une réception lorsqu’aucune personne extérieure n’est présente.

Cette situation revient, pour l’employeur, à prendre en charge les frais de restauration de plusieurs salariés qui ne sont pas en situation de déplacement’.

Le redressement, aux termes de la lettre d’observations, n’est pas fondé sur l’absence de facture, dont il est allégué qu’elle reposerait sur une mauvaise compréhension par les inspecteurs des règles de comptabilité, mais sur l’absence de justification des conditions d’exonération des frais de restauration prévues par l’article 3 de l’arrêté du 10 décembre 2002, car les inspecteurs ont reproché à la société l’absence de communication de la liste des personnes participantes et du caractère professionnel de l’évènement. Le moyen tiré de la méconnaissance des règles applicables en matière de TVA est donc inopérant.

En cause d’appel, la Caisse d’épargne Loire Centre produit des feuilles d’émargement de présence de salariés à des journées de formation se déroulant à [Localité 8] (37), pour lesquels la société a pris en charge les frais de restauration. Si le caractère professionnel du déplacement des salariés figurant sur ces listes est établi, il ne peut se déduire de la seule mention de leur agence de provenance que ces salariés se trouvaient, compte tenu de leurs conditions de travail, empêchés de regagner leur résidence habituelle, laquelle n’est pas précisée dans les pièces versées aux débats.

La Caisse d’épargne Loire Centre ne justifie donc pas que l’avantage en nature accordé à ses salariés remplit les conditions pour ne pas être assujetti aux cotisations sociales au regard des dispositions de l’arrêté du 10 décembre 2002.

En conséquence, ce chef de redressement d’un montant de 57 137 euros sera validé et le jugement sera infirmé en ce qu’il l’a annulé et infirmé la décision de la commission de recours amiable sur ce point.

Sur la majoration pour absence de mise en conformité

L’URSSAF soutient qu’en application de l’article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale, le montant du redressement de cotisations et contributions de sécurité sociale mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle de l’organisme de recouvrement est majoré de 10 % en cas de constat d’absence de mise en conformité lorsque l’employeur n’a pas pris en compte les observations notifiées lors d’un précédent contrôle ; que les textes régissant l’application des majorations de redressement pour absence de mise en conformité ne distinguent pas selon que les observations ont fait l’objet ou non de contestations dans le cadre de précédents contrôles ; qu’elle ne fait donc qu’appliquer les dispositions législatives et réglementaires en vigueur, ne faisant pas de distinction là où la loi ne distingue pas ; que les majorations de redressement ne font pas obstacle au droit à contestation ; qu’un précédent dossier a fait l’objet d’un désistement sur un point de forme d’irrégularité de la mise en demeure.

La Caisse d’épargne Loire Centre indique que seules les observations de la lettre d’observations du 10 septembre 2013 peuvent constituer le fondement d’une majoration pour absence de mise en conformité ; que le redressement objet de la lettre d’observations du 10 septembre 2013, a fait l’objet d’un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d’Orléans qui a, par jugement du 30 janvier 2018, annulé purement et simplement la mise en demeure émise ; que cette décision est devenue définitive, l’URSSAF s’étant désistée de l’appel qu’elle avait formé ; que l’URSSAF ne peut donc lui reprocher une absence de mise en conformité à la position qu’elle avait alors adoptée dans la lettre d’observations de 2013.

L’article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale, dans sa version alors applicable, dispose que le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle réalisé en application de l’article L. 243-7 est majoré de 10 % en cas de constat d’absence de mise en conformité.

L’article R. 243-18-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version alors applicable, prévoit que la majoration prévue à l’article L. 243-7-6 est appliquée si les observations effectuées à l’occasion d’un précédent contrôle ont été notifiées moins de cinq ans avant la date de notification des nouvelles observations constatant le manquement aux mêmes obligations.

La lettre d’observations du 12 octobre 2017 a relevé une absence de mise en conformité de la Caisse d’épargne Loire Centre, concernant quatre chefs de redressements n° 1, 3, 11 et 13, au regard du contrôle portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, et ayant donné lieu à la lettre d’observations du 10 septembre 2013.

Ce précédent redressement a donné lieu à un recours devant une juridiction de sécurité sociale qui s’est prononcé par un jugement du 30 janvier 2018 non produit aux débats, qui a prononcé la nullité de la mise en demeure notifiée par l’URSSAF.

La Caisse d’épargne Loire Centre n’établissant pas que les chefs redressés ayant donné lieu à la lettre d’observations du 10 septembre 2013 avaient été annulés pour des motifs touchant au fond, elle ne peut se prévaloir de l’absence d’observations fondant la majoration pour défaut de mise en conformité.

La majoration de 10 % prévue à l’article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale doit donc s’appliquer et le jugement sera infirmé en ce qu’il a infirmé la décision de la commission de recours amiable sur ce point.

Compte tenu de l’annulation partielle du chef de redressement n° 1, la majoration de 10 % s’élève pour celui-ci à la somme de 6 977 euros arrondie à l’euro près (69 771 x 10 %).

Sur la demande en paiement :

Au regard de ce qui précède et du montant de la mise en demeure en principal, la somme due par la Caisse d’épargne Loire Centre à l’URSSAF doit être déterminée comme suit :

– principal : 755 810 – (49 499 + 43 490) = 662 821 euros

– majoration de 10 % : 32 581 – 11 927 + 6 977= 27 631 euros

Soit un total de 690 452 euros.

La Caisse d’épargne Loire Centre sera donc condamnée à payer à l’URSSAF la somme totale de 690 452 euros outre les majorations de retard afférentes. Le jugement sera donc réformé en ce qu’il a condamné la société au paiement de la somme de 804 031 euros.

Sur les demandes accessoires :

L’article L. 242-1-3 du code de la sécurité sociale dispose que lorsqu’un redressement de cotisations sociales opéré par les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 ou L. 752-4 a une incidence sur les droits des salariés au titre de l’assurance vieillesse, ces organismes transmettent les informations nécessaires aux caisses mentionnées à l’article L. 215-1, afin que ces dernières procèdent à la rectification des droits des salariés concernés.

Cette disposition ne concernant que les rapports entre l’URSSAF et les caisses qui y sont visées, et n’ayant aucune incidence sur le redressement opéré, la Caisse d’épargne Loire Centre sera déboutée de sa demande tendant à ce qu’il soit ordonné à l’URSSAF de faire application de ces dispositions.

Compte-tenu de la solution donnée au litige, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la Caisse d’épargne Loire Centre aux dépens. Il convient également de la condamner aux dépens d’appel et de la débouter de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

Infirme le jugement du 1er octobre 2020 du Pôle social du tribunal judiciaire d’Orléans en ce qu’il a :

– infirmé la décision de la commission de recours amiable du 28 février 2019 en ce qui concerne les frais de restauration et la majoration de 10 %,

– confirmé la décision de la commission de recours amiable du 28 février 2019 pour le surplus,

– condamné la Caisse d’épargne Loire Centre à payer à l’URSSAF la somme de 804 031 euros,

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Annule partiellement le chef de redressement n° 1 pour l’année 2016, correspondant à la somme de 49 499 euros ;

Annule le chef de redressement n° 5 correspondant à la somme de 43 490 euros ;

Valide le redressement opéré pour le surplus des chefs de redressement critiqués ;

Dit que la majoration de 10 % prévue à l’article L. 243-7-6 du code de la sécurité sociale est due par la Caisse d’épargne Loire Centre ;

Condamne la Caisse d’épargne Loire Centre à payer à l’URSSAF Centre Val de Loire la somme de 690 452 euros outre les majorations de retard afférentes ;

Déboute la Caisse d’épargne Loire Centre du surplus de ses demandes ;

Condamne la Caisse d’épargne Loire Centre aux entiers dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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