Prêt entre particuliers : 12 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/04288

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Prêt entre particuliers : 12 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/04288

12 avril 2023
Cour d’appel de Colmar
RG
21/04288

EP/KG

MINUTE N° 23/374

Copie exécutoire

aux avocats

Copie à Pôle emploi

Grand Est

le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

ARRET DU 12 AVRIL 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/04288

N° Portalis DBVW-V-B7F-HV4G

Décision déférée à la Cour : 10 Septembre 2021 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE COLMAR

APPELANTE :

S.A.R.L. MULTI SERVICES ROUTIER (M.S.R.)

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Anne CROVISIER, avocat à la Cour

INTIME :

Monsieur [F] [B]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Harold CHARPENTIER, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. PALLIERES, Conseiller rapporteur, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

– signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [F] [B] a été embauché par la Sarl Multi Services Routier en qualité de directeur technico-commercial, selon contrat de travail à durée indéterminée du 9 mars 2015 à effet au 10 mars.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 juin 2020, la Sarl Multi Services Routier a précisé à Monsieur [F] [B] les règles en matière de remboursement de frais alors que l’employeur avait relevé que le salarié avait demandé le remboursement de frais pour des périodes de chômage partiel et de congés du mois d’avril 2020.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 juillet 2020, la Sarl Multi Services Routier a convoqué Monsieur [F] [B] à un entretien préalable à une mesure éventuelle de licenciement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 août 2020, la Sarl Multi Services Routier a notifié à Monsieur [F] [B] son licenciement pour faute grave.

Par requête du 21 novembre 2019, Monsieur [F] [B] a saisi le Conseil de prud’hommes de Colmar de demandes de remboursement de frais de déplacement, de rappel de salaire au titre d’une prime de 13ème mois, d’indemnisation pour défaut de paiement d’éléments de salaire ou frais de déplacement ou de retard de paiement.

En cours d’instance, il a également contesté son licenciement et sollicité des indemnisations à ce titre.

Par jugement du 10 septembre 2021, le Conseil de prud’hommes a :

– dit que le licenciement repose sur une faute grave,

– condamné la Sarl Multi Services Routier à payer à Monsieur [F] [B] les sommes suivantes :

* 27 459, 96 euros, au titre du remboursement de frais de déplacement, avec intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2019,

* 1 500 euros, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le défaut ou les retards de remboursement des frais de déplacement, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

* 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et les dépens

– condamné Monsieur [F] [B] à payer à la Sarl Multi Services Routier la somme de 1 134, 57 euros, au titre du remboursement des frais de déplacement indûment versés pour la période du 1er au 30 avril 2020,

– ordonné la compensation des sommes,

– débouté Monsieur [F] [B] du surplus de ses demandes,

– débouté la Sarl Multi Services Routier de ses autres demandes.

Par déclaration du 5 octobre 2021, la Sarl Multi Services Routier a interjeté appel du jugement précité limité aux dispositions la condamnant et rejetant une partie de sa demande reconventionnelle, outre sa demande au titre des frais irrépétibles.

Par écritures transmises par voie électronique le 12 mai 2022, la Sarl Multi Services Routier sollicite l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a fait droit aux demandes du salarié relatives aux frais professionnels et à l’article 700 du code de procédure civile, et en ce qu’il a limité le montant de la demande reconventionnelle de la société Msr, et que la Cour statuant, à nouveau, :

– déboute Monsieur [F] [B] de l’intégralité de ses demandes,

– condamne Monsieur [F] [B] à lui payer les sommes de :

* 8 249,02 euros, au titre de remboursement de frais indûment payés, avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,

* 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et les dépens.

Elle demande, en outre, le rejet de l’appel incident.

Par écritures transmises par voie électronique le 27 mai 2022, Monsieur [F] [B], qui a formé un appel incident, sollicite l’infirmation du jugement entrepris, en ce qu’il a :

– dit que le licenciement reposait sur une faute grave et l’a débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement abusif ainsi que de ses demandes en paiement de l’indemnité de licenciement et d’une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis,

– limité à 1 500 euros le montant des dommages et intérêts alloués en réparation du préjudice ayant résulté du défaut de remboursement des frais professionnels et de paiement tardif des primes de 13ème mois,

– fait droit à la demande reconventionnelle de la Société MSR,

et que la Cour, statuant à nouveau :

– condamne la Sarl Multi Services Routier à lui payer les sommes suivantes :

* 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le paiement partiel et tardif des remboursements de frais de déplacement et des primes de 13ème mois,

* 27 783 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

* 13 891 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct,

* 7 871,88 euros nets à titre d’indemnité de licenciement,

* 15 280,72 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, y compris les congés payés y afférent,

le tout avec intérêts au taux légal à compter de la demande, subsidiairement à compter de l’arrêt à intervenir,

* 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et les dépens.

Une ordonnance de clôture de l’instruction a été rendue le 16 décembre 2022.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère aux conclusions susvisées pour plus amples exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS

I. Sur le licenciement pour faute grave

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

La charge de l’administration de la preuve de la faute grave repose sur l’employeur (dans le même sens, notamment, Cass. Soc 20 mars 2019, n° 17-22.068).

En l’espèce, il est reproché au salarié, dans la lettre de licenciement qui fixe les débats :

– une absence de correspondance entre le kilométrage indiqué sur les demandes de remboursement de frais kilométriques et le kilométrage réel exécuté à des fins professionnelles, qui ne peut résulter d’une simple erreur,

– la mise en compte de frais kilométriques professionnels pendant une période de congés au mois d’avril 2010,

– le défaut de respect des consignes sur le remboursement des frais kilométriques rappelés dans un avertissement du 10 juin 2020, suite à la demande de remboursement de frais kilométriques relatives à une période de congés payés du mois d’avril 2020,

– une demande de remboursement de frais kilométriques au titre du mois de juin 2020 injustifiable au regard du rapport journalier présenté avec une différence de 2 272 kms ou 1 144, 05 euros.

A titre liminaire, il convient de préciser, comme le fait le salarié, que les faits du mois d’avril 2020, s’ils peuvent être rappelés dans la lettre de licenciement, ne peuvent, toutefois, justifiés, en eux-mêmes, ledit licenciement, dès lors que l’employeur précise que ces faits ont déjà été sanctionnés par un avertissement par lettre du 10 juin 2020.

Pour le surplus, l’employeur produit :

– des notes de frais de déplacement, édités par le salarié, pour les mois de janvier à juillet 2020 inclus, présentant des annotations manuscrites apposées par une personne

non identifiée.

– des itinéraires, dont il est un fait constant, qu’ils proviennent du site  » Mappy « ,

– un procès-verbal de constat établi le 25 octobre 2021 par Me [K] [G], huissier de justice à [Localité 5], effectuant une comparaison des kilométrages en fonction du site  » Mappy  » avec les notes de frais de déplacement des mois de juillet, septembre, octobre, novembre 2019, octobre 2018 et avril 2020.

Si l’employeur a omis de produire les rapports journaliers, concernant les notes de frais des mois de janvier à juillet 2020, hormis avril 2020, le salarié produit, notamment, des rapports, notamment, intitulés  » fiche de visite « .

Les fiches de visites du mois de juin 2020 permettent de relever que le salarié, :

– avant la réception de l’avertissement du 10 juin 2020, effectuait des fiches avec des informations laconiques (heure, sans précision de départ ou d’arrivée ;  rendez vous, pour certains, sans mention de la personne physique ou moral visitée ; nom de la ville),

– à compter du 16 juin 2020, remplissait un modèle intitulé  » fiche de visite « , mentionnant, notamment, les heures de départ, d’arrivée, le kilométrage de départ et d’arrivée.

Il résulte de la comparaison de ces fiches de visites, des notes de frais et des relevés d’itinéraire Mappy que les notes de frais du mois de juin comportent de nombreuses erreurs, ainsi, pour :

– le 16 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans la note, 190 kms, Mappy faisant état d’un kilométrage total de 103, 60 kms (l’employeur ayant omis le retour Anneau du Rhin-[Localité 1]),

– le 17 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note, 170 kms, Mappy faisant état d’un kilométrage total de 81, 90 kms,

– le 19 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note,

542 kms, Mappy faisant état d’un kilométrage total de 427, 80 kms (l’employeur s’étant trompé dans l’itinéraire pour son calcul aboutissant à 350 kms),

– le 22 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note, 272 kms, Mappy faisant état d’un kilométrage total de 161, 90 kms (l’employeur ayant omis le retour à [Localité 1] dans son calcul aboutissant à 145 kms),

– le 23 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note, 227 kms, Mappy faisant état d’un kilométrage total de 120, 50 kms (l’employeur ayant omis également le retour à [Localité 1]),

– le 24 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note, 203 kms, alors que Mappy fait apparaître un kilométrage total de 98 kms,

– le 26 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note, 247 kms, alors que Mappy fait apparaître un kilométrage total de 136 kms (l’employeur reconnaît, néanmoins, 188 kms),

– le 29 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note, 366 kms, alors que Mappy fait apparaître un kilométrage total de 228, 60 kms (l’employeur ayant omis le retour à [Localité 1] dans son calcul, mais reconnaissant, néanmoins, dans les mentions manuscrites sur la note,

266 kms),

– le 30 juin 2020, Monsieur [F] [B] met en compte, dans sa note, 243 kms, alors que Mappy fait apparaître un kilométrage total de 202, 20 kms (avec le retour de [Localité 6] à [Localité 1]).

Même en retenant une marge d’erreur qui pourrait correspondre à des contournements ou changements d’itinéraire, en raison de difficultés de circulation sur la route, il résulte des motifs supra que, de manière répétée, le salarié a facturé, pour le mois de juin 2020, à son employeur, des frais kilométriques non conformes à la réalité.

L’employeur rapporte également la preuve, par la production des notes de frais de déplacement et les itinéraires Mappy que les kilométrages facturés par le salarié, au titre du mois de juillet 2020, ne sont pas conformes à la réalité.

Monsieur [F] [B] avait fait l’objet d’un avertissement, selon lettre du 10 juin 2020, suite à la demande de remboursement de frais kilométriques pendant des périodes des congés, et de chômage partiel, au cours desquels le salarié ne justifie d’aucun déplacement de nature professionnelle.

Pour autant, Monsieur [F] [B] n’a pas hésité à poursuivre son comportement fautif en sollicitant de l’employeur le remboursement de frais kilométriques indus, démontrant, ainsi, le caractère volontaire de la présentation de notes de frais de déplacement erronées.

Constitue une faute grave le fait pour un salarié de présenter des notes de frais de déplacement volontairement erronées pour tenter d’obtenir un remboursement indu de frais, un tel comportement rendant impossible la poursuite des relations contractuelles.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a retenu l’existence d’une faute grave et en ce qu’il a rejeté les demandes de dommages et intérêts pour licenciement abusif, d’indemnité de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis.

II. Sur les dommages et intérêts pour préjudice distinct

Le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation pour préjudice moral pour procédé vexatoire dans les circonstances de la rupture et atteinte à son honneur, et la probité, car la rupture ne comporte aucun caractère vexatoire, le salarié ne pouvant invoquer sa propre turpitude alors qu’il a volontairement produit des notes de frais de déplacement professionnel erronées en gonflant le kilométrage réalisé.

III. Sur le paiement d’un solde au titre du remboursement des frais de déplacement

Selon l’article 12 du contrat de travail, l’entreprise s’engage à rembourser les frais d’utilisation du véhicule personnel de Monsieur [F] [B], pour ses déplacements professionnels, sur la base du barème fiscal en vigueur’  » Pour les besoins de contrôle fiscal de cette forme d’indemnisation, le salarié s’engage à fournir de façon hebdomadaire un rapport détaillé sur ses déplacements, ses frais lui seront alors remboursés sur la base de ce compte rendu « .

Les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur, doivent être remboursés sans qu’ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu’il n’ait été contractuellement prévu qu’il en conserverait la charge moyennant le versement d’une somme fixée à l’avance de manière forfaitaire et à la condition, d’une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés, et, d’autre part, que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au Smic.

Monsieur [F] [B] produit :

– un récapitulatif de sommes versées et prétendument dues depuis le mois de décembre 2016 jusqu’au mois d’août 2020,

– les notes de frais de déplacement du mois de décembre 2016 à octobre 2019, précisant pour chaque jour les destinations et parcours,

– la note de frais de déplacement du mois de décembre 2019, renvoyant à des rapports journaliers, avec des rapports, incomplets et uniquement pour les 27, 28 et 30 décembre, indiquant les destinations,

– les notes de frais de déplacement des mois de janvier 2020 à août 2020, avec jusqu’au 16 juin 2020 les anciens rapports incomplets, et à partir du 16 juin, des fiches de visite.

L’employeur ne conteste pas la réalité des déplacements mis en compte, à savoir les destinations, mais le kilométrage réel dont il a été demandé le remboursement sur la base des frais kilométriques, et invoque ne pas avoir eu les rapports détaillés sur les déplacements tels que prévus au contrat de travail.

Il appartient donc à l’employeur de rapporter la preuve que le kilométrage facturé ne serait pas conforme à la réalité, en l’absence de contestation de la réalité des déplacements, alors qu’à aucun moment, avant sa réponse à la lettre du conseil de Monsieur [F] [B] du 18 octobre 2019, et, ce, malgré les lettres, recommandées avec accusé de réception, de Monsieur [F] [B] des 4 août 2017, 13 octobre 2017, 8 janvier 2018, 6 août 2018, 1er février 2019, et 29 août 2019, l’employeur n’a attiré l’attention du salarié sur le caractère incomplet des documents produits comme justificatifs des déplacements professionnels, étant relevé que lesdits rapports sont prévus, contractuellement, à des fins fiscales.

Le procès-verbal de constat, établi le 25 octobre 2021 par Me [K] [G], huissier de justice à [Localité 5], prouve, sur les dates retenues, une différence de kilométrage importante entre ce qui a été sollicité, par le salarié, au titre du remboursement de frais, et les kilométrages issus du site Mappy, et, ce, pour les mois de juillet, septembre, octobre, novembre 2019, octobre 2018 et avril 2020.

Monsieur [F] [B] ne saurait écarter la force probante de ce document, dès lors qu’il est établi sur la base de ses propres déclarations dans les notes produites à l’employeur, et que le salarié ne rapporte pas la preuve d’autres déplacements nécessités par son activité professionnelle et pour le compte de l’employeur.

Sur la base des documents précités produits, de la mise en compte indue par le salarié d’une somme de 1 114, 37 euros (apparaissant dans le tableau page 7 des écritures de l’employeur) au titre des frais du mois d’avril 2020, et au regard des motifs relatifs à la marge d’erreur, précitée, tenant compte des conditions de circulation, la Cour est en mesure de chiffrer le remboursement de frais à la somme de 18 885, 88 euros, au 12 août 2020.

En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé sur l’action en paiement du remboursement des frais kilométriques et l’employeur sera condamné au paiement de la somme précitée.

IV. Sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par les paiements partiels et tardifs des remboursements de frais de déplacement et primes de 13ème mois

En application de l’article 1231-6 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l’intérêt moratoire.

Monsieur [F] [B] rapporte la preuve du défaut de remboursement régulier de ses frais de déplacement depuis décembre 2016 et de paiement du 13ème mois, payable en 2 fois.

Selon jugement du 23 avril 2019 du tribunal d’instance de Guebwiller, :

– la déchéance du terme de 2 prêts a été prononcée le 24 juillet 2017 pour un prêt auto consenti, à Monsieur [B], par la S.a. Bnp Paribas le 27 septembre 2011, et pour un prêt personnel consenti, par la même banque, le 11 mai 2013.

– les échéances mensuelles desdits prêts s’élevaient à 927, 73 euros et 653, 44 euros.

Or, au regard du défaut partiel de remboursement des frais de déplacement et du retard important de paiement du 13ème mois (1/2 de 2016 payée en octobre 2019), Monsieur [F] [B] justifie d’un préjudice, distinct de celui indemnisé par les intérêts moratoires des créances, à savoir une perte de chance de pouvoir régler les échéances des prêts en leur temps, et d’éviter les résiliations desdits prêts et les suites procédurales en recouvrement, nonobstant le fait que les demandes de la banque aient été rejetées après prononcé de la déchéance du terme par le juge d’instance.

Le Conseil de prud’hommes a fait une juste évaluation du préjudice, en l’espèce de la perte de chance, en fixant ce dernier à la somme de 1 500 euros.

En conséquence, le jugement sera confirmé sauf à préciser qu’il s’agit de l’indemnisation d’une perte de chance.

V. Sur la demande reconventionnelle en répétition d’indu

L’employeur sollicite le remboursement de la somme de 8 249, 02 euros au titre d’un prétendu trop versé correspondant aux remboursements de frais kilométriques pour la période de janvier à juillet inclus 2020.

Le Conseil de prud’hommes a fait droit à cette demande dans la limite de 1 134, 37 euros.

Toutefois, le jugement entrepris doit être infirmé, dès lors que la somme de 1 114, 37 euros (et non 1 134, 37), apparaissant dans le tableau de l’employeur comme correspondant à la somme indue au titre du mois d’avril 2020, n’a pas été indûment payée par l’employeur.

Il n’y a pas de versement indu, dès lors que les sommes versées par l’employeur, au cours de l’année 2020, s’imputaient sur les sommes réellement dues et sur l’arriéré au 31 décembre 2019.

En conséquence, la demande reconventionnelle, en répétition d’un indu, sera rejetée.

VI. Sur les demandes annexes

En application de l’article 696 du code de procédure civile, chaque partie succombant, chacune conservera la charge de ses propres dépens d’appel.

Pour le même motif, l’équité commande qu’il n’y ait pas condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles à hauteur d’appel.

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 10 septembre 2021 du Conseil de prud’hommes de Colmar SAUF en ses dispositions relatives :

– au remboursement de frais de déplacement professionnel,

– à la demande reconventionnelle en répétition d’un indu pour la période du 1er au 30 avril 2020,

– à la compensation de créances ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la Sarl Multi Services Routier (Msr) à payer à Monsieur [F] [B] la somme de 18 885, 88 euros (dix huit mille huit cent quatre vingt cinq euros et quatre vingt huit centimes), à titre de solde de remboursement des frais de déplacement au 12 août 2020 ;

DEBOUTE la Sarl Multi Services Routier (Msr) de sa demande reconventionnelle en répétition d’un indu ;

DEBOUTE Monsieur [F] [B] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la Sarl Multi Services Routier (Msr) de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE chaque partie à supporter ses propres dépens d’appel.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 12 avril 2023, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine Thomas, Greffier.

Le Greffier, Le Président,

 


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