12 avril 2023
Cour d’appel d’Amiens
RG n°
22/00280
ARRET
N°
S.A. MY MONEY BANK (ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE GE SOVAC, GE CAPITAL BANK PUIS GE MONEY BANK)
C/
[C]
[W]
OG
COUR D’APPEL D’AMIENS
CHAMBRE ÉCONOMIQUE
ARRET DU 12 AVRIL 2023
N° RG 22/00280 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IKKY
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE COMPIEGNE EN DATE DU 20 NOVEMBRE 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
S.A. MY MONEY BANK (ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE GE SOVAC, GE CAPITAL BANK PUIS GE MONEY BANK) prise en la personne de ses représentant légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 3],
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Florence GACQUER CARON, avocat au barreau d’AMIENS, vestiaire : 65
ET :
INTIMES
Monsieur [V] [C]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Non représenté, non comparant
Madame [M] [W]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Non représentée, non comparante
DEBATS :
A l’audience publique du 31 Janvier 2023 devant Mme Odile GREVIN, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 12 Avril 2023.
GREFFIER : Mme Sophie TRENCART, adjointe administrative faisant fonction.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Odile GREVIN en a rendu compte à la Cour composée de :
Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,
Mme Françoise LEROY-RICHARD Conseillère,
et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 12 Avril 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Sophie TRENCART, faisant fonction de Greffier.
DECISION
Suivant offre préalable acceptée le 31 décembre 2015 la société My Money Bank anciennement GE Money Bank a consenti à M. [V] [C] et Mme [M] [W] un prêt personnel d’un montant de 38938,94 euros remboursable en 144 mensualités de 376,37 euros au taux effectif global annuel de 7,60% et au taux nominal de 5,82 % .
Se prévalant de mensualités impayées à compter du 12 octobre 2020, la société My Money Bank a adressé aux emprunteurs une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 mars 2021 puis leur a notifié la déchéance du terme par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 8 mai 2021.
Dans le cadre d’une procédure de surendettement Mme [W] a bénéficié d’un moratoire de 24 mois par décision du 12 mai 2021.
Par acte d’huissier en date du 19 juillet 2021 la société My Money Bank a fait assigner M. [C] et Mme [W] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Compiègne aux fins de les voir solidairement condamnés au paiement de la somme de 30551,01 euros augmentée des intérêts au taux contractuel à compter du 7 mai 2021 au titre du prêt.
Par jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Compiègne en date du 20 novembre 2021, son action a été déclarée recevable, il a été rappelé que la procédure de surendettement conservait ses pleins effets et sa primauté sur la décision sauf à devenir caduque, la déchéance du droit aux intérêts a été prononcée et les emprunteurs ont été condamnés solidairement au paiement de la somme de 18620,22 euros avec intérêts au taux légal à compter de la décision et enfin des délais de paiement ont été octroyés aux débiteurs autorisés à se libérer de la dette par des versements mensuels de 250 euros . Il a été dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile et les emprunteurs ont été condamnés aux entiers dépens.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 20 janvier 2022, la société My Money Bank a interjeté appel de cette décision des chefs du prononcé de la déchéance du droit aux intérêts du montant de la condamnation, de l’octroi des délais et du chef des frais irrépétibles.
Aux termes de ses conclusions remises la société My Money Bank demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et statuant de nouveau de condamner les emprunteurs à lui payer la somme de 30551,01 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5,80 % à compter du 7 mai 2021, d’ordonner la capitalisation des intérêts échus pour une année entière , l’exécution provisoire de la décision et de condamner M. [C] et Mme [W] au paiement de la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens.
La déclaration d’appel a été signifiée à la personne de M. [C] par acte d’huissier en date du 9 mars 2022 et a été signifiée à Mme [W] par acte d’huissier remis en l’étude le 9 mars 2022.
Les conclusions de l’appelante leur ont été signifiées selon les mêmes modalités par acte en date du 12 avril 2022.
M.[C] et Mme [W] n’ont pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 1er décembre 2022.
SUR CE
Sur le prononcé de la déchéance du terme
Le premier juge a prononcé la déchéance du terme en retenant qu’en application des articles L 312-16 et L 341-2 du code de la consommation le prêteur qui se devait de justifier de la consultation du fichier des incidents de paiement ne pouvait l’établir en ne produisant qu’un document du 22 décembre 2015 ne mentionnant pas le motif de la consultation.
La société My Money Bank soutient que le texte applicable à l’époque de la conclusion du contrat était l’article L 311-19 du code de la consommation selon lequel le prêteur se devait de vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations et de consulter le fichier prévu à l’article L333-4 du code de la consommation.
Elle fait valoir qu’elle produit le justificatif de la consultation du FICP qui comporte les noms et dates de naissance des emprunteurs à la suite d’une consultation du 30 avril 2015 pour un contrat du 5 mai 2015.
Elle conteste le prononcé de la déchéance totale du droit aux intérêts cette sanction n’étant pas proportionnée, aucun préjudice n’étant démontré et les emprunteurs ne démontrant pas la perte de chance de ne pas contracter résultant d’un vice du consentement affectant l’offre de prêt.
En application de l’article L 311-9 du code de la consommation en sa version applicable au jour de la conclusion du contrat le preneur est tenu avant la conclusion du contrat de prêt de vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations et ainsi consulter le fichier prévu à l’article L 333-4 dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L333-5 du même code.
Il appartient à la banque de justifier de la consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers ( FICP)
La difficulté pratique est que, jusqu’à l’arrêté du 17 février 2020, modifiant celui du 26 octobre 2010, il n’était pas prévu que la Banque de France puisse délivrer une attestation de consultation à l’issue d’une consultation par un organisme prêteur.
Il appartenait dès lors au prêteur de produire un document permettant que le juge s’assure de la présence d’un support durable établissant la réalité de cette consultation, son motif et son résultat, ainsi que le prévoit l’article 13 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au FICP.
Concrètement le document écrit sous forme d’un bordereau informatique devait faire apparaître a minima le jour de cette consultation et en vue de la souscription de quel crédit, la date de naissance et les cinq premières lettres du nom de l’emprunteur, le motif de la consultation et le résultat négatif ou non trouvé.
En l’espèce la société My Money Bank produit une fiche de consultation en date du 22 décembre 2015 donc contemporaine de la conclusion du contrat de prêt et portant la date de naissance et les cinq premières lettres du nom des emprunteurs mais aucune référence au motif de la consultation ou au prêt pour lequel la consultation est effectuée.
Il convient dès lors de confirmer la décision entreprise s’agissant d’un manquement à une obligation essentielle du prêteur qui est de s’assurer de la solvabilité des emprunteurs.
Sur les délais accordés
Il convient de relever que les délais accordés aux emprunteurs excédaient manifestement ce que permet l’article 1343-5 du code civil et que malgré ces délais accordés notamment pour M. [C] dès lors que Mme [W] bénéficie d’un moratoire courant jusqu’en mai 2023 dans le cadre d’un plan de surendettement, il n’est justifié d’aucun versement alors même que le jugement entrepris était assorti de l’exécution provisoire.
Dans l’ignorance de la situation actuelle des emprunteurs il convient d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a accordé des délais tout en rappelant que Mme [W] bénéficie d’un moratoire.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il convient de condamner la société My Moeny Bank qui succombe à titre principal en son appel aux entiers dépens d’appel et de la débouter de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur l’exécution provisoire
Le présent arrêt prononcé par la cour en dernier ressort ne peut être assorti de l’exécution provisoire.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement par arrêt rendu par défaut et par mise à disposition de la décision au greffe,
Confirme le jugement entrepris excepté sur les délais accordés.
Statuant à nouveau sur le chef infirmé,
Déboute M. [C] et Mme [W] de leur demande d’échelonnement du paiement de leur dette;
Rappelle que Mme [W] bénéficie d’un moratoire de 24 mois dans le cadre d’un plan de surendetement;
Y ajoutant,
Condamne la société My Money Bank aux entiers dépens d’appel ;
Déboute la société My Money Bank de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,