Prêt entre particuliers : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/00110

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Prêt entre particuliers : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/00110

10 janvier 2023
Cour d’appel de Lyon
RG
21/00110

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 21/00110 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NKR5

[I]

C/

Etablissement Public DEPARTEMENT DU RHONE

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Pole social du TJ de LYON

du 27 Novembre 2020

RG : 18/07931

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE D (PS)

ARRÊT DU 10 JANVIER 2023

APPELANT :

[M] [I]

né le 06 Novembre 1953 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Sabah DEBBAH de la SELARL JURIS LAW & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIME:

DEPARTEMENT DU RHONE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Allocataire : Mme [I], née [W]

Dispensée de comparaître

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 04 Octobre 2022

Présidée par Thierry GAUTHIER, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

– Nathalie PALLE, présidente

– Thierry GAUTHIER, conseiller

– Vincent CASTELLI, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Janvier 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie PALLE, Présidente, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [I], née [W], est hébergée depuis le 18 janvier 2013 dans un établissement habilité à recevoir les bénéficiaires de l’aide sociale.

Par décision du 6 septembre 2016, le président du conseil départemental du Rhône a accordé le renouvellement du bénéfice de l’aide sociale aux personnes âgées, visant à prendre en charge partiellement le tarif dépendance, pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018 et fixé à 450 euros la participation mensuelle de M. [M] [I], son fils (le fils de l’allocataire) et obligé alimentaire.

Sur recours de celui-ci devant la commission départementale d’aide sociale, celle-ci, par décision du 27 mars 2017, a ramené le montant de cette participation à la somme de 200 euros, du 1er janvier 2016 au 30 septembre 2016 et 250 euros, du 1er octobre 2016 au 31 décembre 2018.

Cette décision n’a pas fait l’objet d’un recours juridictionnel.

Par décision du 26 novembre 2018, le président du conseil départemental a renouvelé l’aide sociale bénéficiant à Mme [I], pour la période du 1er octobre 2018 au 31 décembre 2021, et fixé le montant de la participation de son fils à la somme de 530 euros.

Le fils de l’allocataire a saisi le 5 décembre 2018 la commission départementale d’aide sociale d’une contestation de cette décision. Cette commission ayant été supprimée depuis le 1er janvier 2019, le dossier a été transmis au pôle social du tribunal de grande instance puis tribunal judiciaire de Lyon, afin qu’il soit statué sur ce litige.

Par jugement du 27 novembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon a déclaré le recours du fils de l’allocataire recevable mais mal fondé.

Par déclaration au greffe effectuée par RPVJ le 6 janvier 2021, le fils de l’allocataire a relevé appel de cette décision.

Dans ses conclusions déposées le 5 novembre 2021, le fils de l’allocataire demande à la cour de :

– le déclarer recevable et bien fondé en son appel ;

– infirmer le jugement attaqué en ce qu’il rejeté sa demande en réduction du montant de sa participation et confirmé la décision du président du conseil départemental du Rhône du 26 novembre 2018 ;

statuant à nouveau,

– fixer le montant de sa participation mensuelle à la somme de :

– 250 euros par mois pour la période du 1er octobre 2019 au 31 mai 2021 ;

– 200 euros pour la période du 1er juin 2021 au 31 décembre 2021 ;

– débouter le département du Rhône de ses demandes plus amples ou contraires ;

– condamner le département du Rhône à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, avec distraction au profit de son avocat, sur son affirmation de droit.

Le fils de l’allocataire fait valoir que :

– la participation mise à sa charge est excessive au regard de ses ressources et charges courantes ;

– ses ressources, composées de sa retraite et d’une activité de travailleur indépendant, en sa qualité de gérant de société, s’élevaient en 2018 à 4 010,27 euros par mois ;

– ses charges s’élèvent à 2 688,24 euros par mois ;

– il ne perçoit plus de revenus pour ses fonctions de gérant de société, laquelle a été radiée le 8 juin 2021, et ne perçoit plus que ses retraites.

Dans ses écritures reçues le 12 janvier 2022, le département du Rhône, dispensé de comparaître à sa demande, sollicite de la cour qu’elle rejette les prétentions du fils de la bénéficiaire.

Il fait valoir que :

– la bénéficiaire dispose de 1 337,34 euros de revenus mensuels, dont 1203,61 euros peuvent être affectés à ses frais de séjour, le solde mensuel restant à régler à l’établissement s’élevant à 1 052,21 euros ;

– en 2018, le fils de la bénéficiaire percevait des revenus mensuels de 4 435,27 euros et n’avait pas de charges déductibles ;

– le fils de l’allocataire n’a pas justifié en première instance de ses revenus pour l’année 2018, ne produisant que ses revenus pour l’année 2017 ;

– lors du renouvellement de la demande d’aide sociale, la décision du 2 décembre 2021 a fixé la participation du fils de la bénéficiaire à 235 euros pour la période du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2024 ;

– seules les charges afférentes aux loyers, aux remboursement de prêts immobiliers relatifs à la résidence principale ainsi que les pensions alimentaires versées pour l’éducation et l’entretien des enfants sont retenues à titre de charges déductibles pour le calcul de l’obligation alimentaire, les charges courants étant forfaitairement inclues, de sorte que le prêt souscrit pour effectuer des travaux de rénovation ne peut être pris en compte dans le calcul de sa capacité contributive ;

– les frais du contrat d’assurance obsèques, pris en charge par le fils de la bénéficiaire, relèvent de la solidarité familiale ;

– les charges mensuelles ne s’élèvent pas à 2 668,24 euros, aucune charge ne pouvant être retenue dans le calcul de sa capacité contributive.

*

Conformément aux dispositions de l’article 446-1 du code de procédure civile, les parties ont oralement soutenu à l’audience les écritures qu’elles ont déposées au greffe ou fait viser par le greffier lors de l’audience de plaidoirie et qu’elles indiquent maintenir, sans rien y ajouter ou retrancher.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux écritures ci-dessus visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera rappelé qu’il résulte des articles L. 134-3, 2° et L. 132-6 du code de l’action sociale et des familles ainsi que de l’article L. 211-16 du code de l’organisation judiciaire, dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, que sont transférés à la juridiction judiciaire les recours des obligés alimentaires contestant les décisions prises par l’Etat ou le département pour obtenir le remboursement des sommes avancées par la collectivité au titre de l’aide sociale, les recours contre les décisions à l’admission à l’aide sociale continuant, en revanche, de relever de la juridiction administrative même en présence d’obligés alimentaires.

L’article 205 du code civil dispose que les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin.

Ces aliments, ainsi que le prévoit l’article 208, ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit.

Depuis le 6 mars 2007, l’article L. 132-6 du code de l’action sociale et des familles, auquel renvoie l’article L. 134-3 susvisé, dispose :

« Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais.

(…)

La proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l’obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. La décision fait également l’objet d’une révision lorsque les débiteurs d’aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu’elle avait prévus. »

La décision dont appel a statué sur la pertinence de l’évaluation des capacités individuelles de l’obligé alimentaire à laquelle a procédé le président du département, pour fixer la proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques au postulant à l’aide sociale.

Il convient au demeurant de rappeler que L. 311-1 du code de l’organisation judiciaire reconnaît à la cour d’appel, sous réserve des compétences attribuées à d’autres juridictions, des décisions judiciaires, civiles et pénales, rendues en premier ressort, et que l’article L. 311-15 du même code prévoit que des cours d’appel spécialement désignées, telle la présente cour, connaissent des recours rendues par les juridictions mentionnées à l’article L. 211-16, soit les pôles sociaux des tribunaux judiciaires, dans les conditions prévues par le code de l’action sociale et des familles et le code de la sécurité sociale.

En l’espèce, en ce qui concerne le montant des revenus du fils de l’allocataire, il y a lieu de constater, contrairement à ce que soutient la caisse, qu’il ne ressort pas de l’avis d’imposition 2019 sur les revenus 2018 (pièce n° 7 de l’appelant) que le fils de l’allocataire ait perçu durant cette année des revenus de capitaux mobiliers, de sorte que ses revenus mensuels pour cette année, s’élèvent, comme il le soutient, à la somme de 4 010,27 euros.

Le fils de l’allocataire soutient qu’il supporte 2 684,30 euros de charges mensuelles.

Toutefois, il convient de relever que, parmi les charges qu’il invoque, le fils de l’allocataire compte le montant du remboursement mensuel d’emprunts, à hauteur de 1 270,07 euros. Dans ce montant figure une échéance mensuelle de 875,08 euros, qui correspond au prêt personnel dont il justifie (pièce n° 9 de l’appelant), d’un montant de 45 000 euros, souscrit le 26 mars 2020.

Ce prêt est manifestement postérieur à l’appréciation de sa situation par le président du département et ne peut être pris en compte.

Pour la période postérieure à sa souscription, ce prêt ne pourrait être pris en compte dans les charges que si le fils de l’allocataire justifiait de sa nécessité au regard de l’habitation pour l’entretien de laquelle il soutient l’avoir souscrit, ce qui ne résulte pas des pièces qu’il produit.

Ce prêt ne peut dès lors être pris en compte dans les charges, lors de la décision contestée comme après sa souscription.

Il est de même, pour les mêmes raisons, des échéances de prêt de 257,79 et 137,22 euros dont le fils de l’allocataire se prévaut dans le calcul de ses charges (pièce n° 8 de l’appelant), étant en outre relevé qu’il ne produit aucun justificatif, notamment, les contrats de prêts correspondants.

Par ailleurs, si l’appelant justifie de la radiation, le 8 juin 2021, de la société dont il était gérant, il ne démontre pas que c’était cette société qui lui versait une rémunération mensuelle de 2 000 euros et, surtout, ne justifie pas de son avis d’imposition pour les revenus de 2021, ce qui aurait permis d’établir à tout le moins l’état de ses revenus pour cette même année.

Dès lors, l’appelant n’établit pas, ce qui lui incombe, la réalité des charges supplémentaires qu’il invoque et, dès lors, que l’appréciation du président du département résultant de la décision litigieuse, ayant déterminé le montant de l’aide sociale en fonction de la capacité contributive de l’appelant, était erronée.

Dès lors, le jugement attaqué sera confirmé.

L’appelant, qui perd en cette instance, en supportera les dépens.

Au vu de l’équité, la demande de l’appelant fondée au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Met les dépens d’appel à la charge de M. [M] [I].

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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