Prêt entre particuliers : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/01695

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Prêt entre particuliers : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/01695

10 janvier 2023
Cour d’appel de Besançon
RG
21/01695

ARRÊT N°

DR/FA

COUR D’APPEL DE BESANÇON

– 172 501 116 00013 –

ARRÊT DU 10 JANVIER 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Défaut

Audience publique du 08 novembre 2022

N° de rôle : N° RG 21/01695 – N° Portalis DBVG-V-B7F-ENSB

S/appel d’une décision du TRIBUNAL DE PROXIMITE DE PONTARLIER en date du 07 juin 2021 [RG N° 11-21-0007]

Code affaire : 53B Prêt – Demande en remboursement du prêt

S.A. YOUNITED C/ [D] [R], [M] [T] épouse [R]

PARTIES EN CAUSE :

S.A. YOUNITED Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié de droit au dit siège, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 517 586 376

Sise [Adresse 2]

Représentée par Me Valérie GIACOMONI de la SCP MAYER-BLONDEAU GIACOMONI DICHAMP MARTINVAL, avocat au barreau de BESANCON

APPELANTE

ET :

Monsieur [D] [R]

de nationalité française, demeurant [Adresse 1]

Madame [M] [T] épouse [R]

de nationalité française, demeurant [Adresse 1]

Non représentés

INTIMÉS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE, conseiller et Dominique RUBEY, vice président placé.

GREFFIER : Madame Fabienne ARNOUX, Greffier.

Lors du délibéré :

Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre,

ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE, conseiller et Dominique RUBEY, vice président placé, magistrat rédacteur.

L’affaire, plaidée à l’audience du 08 novembre 2022 a été mise en délibéré au 10 janvier 2023. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Faits, procédure et prétentions des parties

Par exploit d’huissier en date du 12 février 2021, la SA Younited a fait assigner M. [D] [R] et Mme [M] [R], née [T], (les époux [R]), devant le tribunal de proximité de Pontarlier, aux fins d’obtenir condamnation solidaire au paiement du solde d’un prêt personnel.

Par jugement avant-dire-droit, rendu par mention au dossier, en date du 12 avril 2021, le tribunal a invité les parties à présenter leurs observations sur les moyens soulevés d’office, tirés de l’application des dispositions d’ordre public des nouveaux articles issus de l’ordonnance n°2016-201 du 14 mai 2016, à savoir L.312-12, L.312-14, L.312-16, L.312-17, L.312-18, L.312-19, L.312-57, L.312-66, L.312-68, L.312-28, L.312-29, L.312-31, L.312-43, L312-85, L.312-88, L.312-92, L.312-93, L.341-1 et R.312-35 du code de la consommation (motifs de déchéance du droit aux intérêts ou de forclusion).

Par jugement du 7 juin 2021, le tribunal de proximité de Pontarlier, statuant en qualité de juge des contentieux de la protection, a :

– déclaré la SA Younited recevable à agir en paiement au titre de l’offre de crédit personnel en date du 24 août 2017,

– dit la SA Younited déchue du droit aux intérêts conventionnels,

– condamné solidairement en conséquence, les époux [R] à payer à la SA Younited la somme de 27 890,92 euros au titre du prêt personnel, arrêtée au 19 août 2020, avec intérêts au taux légal, à compter du 12 février 2021,

– rejeté la demande de capitalisation des intérêts,

– débouté la SA Younited du surplus de ses prétentions,

– rappelé l’exécution provisoire du présent jugement,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum les époux [R] à régler les dépens de l’instance.

Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré que’:

– l’action était recevable pour avoir été introduite moins de deux ans après le premier incident de paiement non régularisé,

– la SA Younited ne justifiait pas avoir fourni aux emprunteurs les explications exigées permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé était adapté à leurs besoins et à leur situation financière, ni ne justifiait avoir mis en garde les emprunteurs sur les caractéristiques essentielles du crédit proposé et sur les conséquences qu’il pouvait avoir sur leur situation financière, même en cas d’impayé et devait être pour cette raison déchue du droit aux intérêts,

– la SA Younited ayant été déchue de son droit aux intérêts, le débiteur n’était tenu qu’au remboursement du seul capital, après déduction des versements déjà effectués et des intérêts réglés à tort et il ne saurait lui être accordé une indemnisation au titre de la clause pénale,

– en l’absence de convention prévoyant l’anatocisme, il y avait lieu de rejeter la demande de capitalisation du droit à intérêts formuler par l’établissement prêteur.

Par déclaration parvenue au greffe le 15 septembre 2021, la SA Younited a interjeté appel du jugement en ce qu’il a :

– dit que la SA Younited est déchue de son droit aux intérêts conventionnels,

– condamné solidairement en conséquence les époux [R] à payer à la SA Younited la somme de 27 890,92 euros, arrêtée au 19 août 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2021, au titre du prêt personnel,

– rejeté la demande de capitalisation annuelle des intérêts,

– débouté la SA Younited du surplus de ses prétentions,

– rejetant ainsi partiellement les demandes de la SA Younited qui tendaient à voir condamner les époux [R] à lui payer la somme de 35 834,66 euros, avec intérêts au taux contractuel de 4,60% l’an à compter de la mise en demeure du 27 juin 2019 avec capitalisation des intérêts, outre condamnation à la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Selon ses dernières conclusions transmises le 8 novembre 2021, elle conclut à son infirmation en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels, minoré ainsi la créance de la SA Younited et rejeté les demandes de capitalisation des intérêts, d’article 700 du code de procédure civile et demande à la cour, statuant à nouveau de :

Vu les articles 1103 et suivants du code civil,

Vu les articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation.

– condamner solidairement les époux [R] à payer à la SA Younited la somme de 35 834,66 euros, au titre du prêt n°4081653, avec intérêts au taux contractuel de 4,60 % l’an à compter de la mise en demeure du 27 juin 2019 et, à titre subsidiaire, à compter de l’assignation,

– ordonner la capitalisation annuelle des intérêts, conformément à l’article 1343-2 du code civil.

En tout état de cause,

– condamner solidairement les époux [R] à payer à la SA Younited la somme de 1’200’euros, au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement les époux [R] aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2022 et l’affaire, appelée à l’audience du 8 novembre 2022 suivant, a été mise en délibéré au 10 janvier 2023.

Pour l’exposé complet des moyens de l’appelant, la cour se réfère à ses dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Les intimés, auxquels la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées par actes du 17 novembre 2021 remis à l’étude de l’huissier de justice, n’ont pas constitué avocat.

En application de l’article 473 du code de procédure civile, le présent arrêt est rendu par défaut.

Motifs de la décision

– Sur le devoir d’explication et la déchéance du droit aux intérêts

Aux termes des articles L.312-12 et suivant du code de la consommation, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, sous forme d’une fiche d’informations, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement. Le prêteur ou l’intermédiaire de crédit fournit à l’emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, notamment à partir des informations contenues dans la fiche mentionnée à l’article’L. 312-12. Il attire l’attention de l’emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement. Ces informations sont données, le cas échéant, sur la base des préférences exprimées par l’emprunteur.

Aux termes de l’article L.341-1 du code de la consommation, le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles’L. 312-18,’L. 312-21,’L. 312-28, L. 312-29,’L. 312-43’ainsi que, pour les opérations de découvert en compte, par les articles’L. 312-85 à L. 312-87’et’L. 312-92, est déchu du droit aux intérêts.

La SA Younited fait valoir que’:

– le tribunal a prononcé d’office la déchéance du droit aux intérêts, alors même qu’il avait été versé aux débats l’ensemble des pièces justifiant de ce que les dispositions du code de la consommation avaient été dûment respectées.

– sur le devoir d’explication, le code de la consommation prévoit exclusivement la transmission d’une fiche d’information pré-contractuelle européenne normalisée, permettant aux consommateurs de comparer les offres de prêt.

– le code de la consommation est un texte dérogatoire du droit commun ne pouvant faire l’objet d’une interprétation extensive, mais au contraire d’une application restrictive. Dès lors, aucun autre document, que ceux versés aux débats, n’étant exigé par le code de la consommation, il ne saurait y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts.

En l’espèce, la SA Younited verse aux débats l’offre de prêt signée le 18 septembre 2017, outre le fichier attestant de la réalité de la signature électronique dudit prêt, la fiche de dialogue, les éléments d’identité et de solvabilité des emprunteurs, la liasse contractuelle contenant la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées (FIPEN) et la notice d’assurance, outre la preuve de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) et le tableau d’amortissement.

L’offre de prêt comporte, en sa première page et de manière particulièrement apparente, un paragraphe intitulé avertissement indiquant notamment que ledit prêt aura un impact sur la situation financière des emprunteurs en cas de non remboursement. Par ailleurs, sur cette même page, l’emprunteur, par sa signature, reconnaît qu’il a reçu l’information lui permettant de déterminer si le crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, outre la réception de la FIPEN en matière de crédit au consommateurs et ce, préalablement à la conclusion du contrat de crédit.

De même, l’ensemble des éléments permettant l’analyse de la solvabilité des emprunteurs sont répertoriés et le fichier de preuve inhérent à la signature électronique atteste de la communication de la FIPEN et des autres documents à chacun des époux [R], tels que les caractéristiques du crédit, les éléments d’identité, la notice d’assurance et la consultation du FICP.

Dès lors, il est établit que la SA Younited répond à l’ensemble des exigences du code de la consommation, préalablement à la souscription du crédit sollicité par les époux [R].

De sorte que le prêteur ne saurait encourir la déchéance du droit aux intérêts puisqu’il apparaît que l’ensemble des éléments, susceptibles d’être sanctionnés par ladite déchéance, en cas d’absence, est communiqué ou réalisé antérieurement au déblocage des fonds, ainsi qu’en atteste le fichier attestant des signatures électroniques émanant d’un organisme indépendant.

En considération de l’absence de cause de déchéance du droit aux intérêts, le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit que la SA Younited déchue du droit aux intérêts conventionnels et en conséquence, il y aura lieu de condamner solidairement les époux [R] à payer à la SA Younited la somme de 35 834,66 euros, au titre du prêt n°4081653 avec intérêts au taux contractuel de 4,60 % l’an à compter de la mise en demeure du 27 juin 2019.

– Sur la capitalisation annuelle des intérêts

Aux termes de l’article L 312-74 du code de la consommation, la capitalisation des intérêts est soumise aux’dispositions de l’article 1343-2 du code civil.

Aux termes de l’article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise.

Il sera fait droit à la demande sur ce point.

Par ces motifs,

La cour, statuant par défaut, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :

Infirme, dans les limites de l’appel, le jugement rendu entre les parties le 7 juin 2021 par le tribunal de proximité de Pontarlier, statuant en qualité de juge des contentieux de la protection ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne solidairement les époux [R] à payer à la SA Younited la somme de 35 834,66 euros, au titre du prêt n°4081653, avec intérêts au taux contractuel de 4,60 % l’an à compter de la mise en demeure du 27 juin 2019′;

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil ;

Condamne in solidum M. [D] [R] et Mme [M] [R], née [T], aux dépens d’appel.

Et, vu l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [D] [R] et Mme [M] [R], née [T], à payer 1’200’euros à la SA Younited.

Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de la première chambre civile et commerciale de la cour, magistrat ayant participé au délibéré et de Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,

 


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