Présomption d’innocence : 2 mars 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/04412

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Présomption d’innocence : 2 mars 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/04412
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B

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ARRÊT DU : 2 MARS 2023

SÉCURITÉ SOCIALE

N° RG 20/04412 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LY7V

CPAM DE LA GIRONDE

c/

Monsieur [D] [C]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d’huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 octobre 2020 (R.G. n°18/00296) par le Pôle social du TJ de BORDEAUX, suivant déclarations d’appel des 13 et 26 novembre 2020.Jonction par mention au dossier du dossier 20/4636 au RG 20/4412

APPELANTE et intimé sur RG 20/4636

CPAM DE LA GIRONDE agissant en la personne de son directeur, M. [L] [R], domiciliée en cette qualité audit siège social [Adresse 2]

représentée par Me Françoise PILLET de la SELARL COULAUD-PILLET, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ et appelant sur RG 20/4636

Monsieur [D] [C]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me ECHALIER substituant Me Thibaud VIDAL de la SELEURL VIDAL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 07 décembre 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule Menu, présidente,

Madame Sophie Masson, conseillère,

Madame Sophie Lésineau, conseillère,

qui en ont délibéré.

greffière lors des débats : Mme Sylvaine Déchamps,

greffière du prononcé: Mme Evelyne Gombaud

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Le délibéré a été prorogé en raison de la charge de travail de la cour.

EXPOSE DU LITIGE

La facturation de M. [C], infirmier libéral, a fait l’objet d’un contrôle par la caisse primaire d’assurance maladie de la Gironde (la caisse) portant sur la période de soins du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016.

Le 13 juillet 2017, la caisse, ayant conclu à l’existence d’anomalies de facturation, a notifié un reversement de prestations indues à M. [C] pour un montant de 83 269,96 euros.

Le 30 août 2017, M. [C] a saisi la commission de recours amiable de la caisse aux fins de contestation de cette notification d’indu.

Par décision du 4 décembre 2017 notifiée le 11 décembre 2017, la commission de recours amiable de l’Urssaf a rejeté le recours de M. [C].

Le 22 décembre 2017, la caisse a notifié à M. [C] l’application d’une pénalité financière d’un montant de 7 000 euros.

Les 9 et 12 février 2018, M. [C] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde aux fins de contestation de la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable du 4 décembre 2017 ainsi que de la décision du 22 décembre 2017 émanant de la caisse.

Par jugement du 23 octobre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux a :

– ordonné la jonction des recours,

– validé la notification d’indu adressée par la caisse à M. [C] le 13 juillet 2017 pour un montant de 83 269,69 euros,

– condamné M. [C] à payer à la caisse la somme de 83 269,96 euros au titre des anomalies de facturation constatées sur la période de soins du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016, avec intérêts au taux légal,

– dit n’y avoir lieu de condamner M. [C] au paiement d’éventuels frais de signification et d’exécution,

– annulé la pénalité financière notifiée par la caisse à M. [C] le 22 décembre 2017 pour un montant de 7 000 euros,

– condamné M. [C] au paiement des entiers dépens,

– débouté M. [C] de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Par déclaration du 27 octobre 2020, la caisse a relevé appel de ce jugement.

Par décision du 23 novembre 2020, M. [C] a relevé appel de ce jugement.

Par décision du 25 mars 2021, le magistrat chargé d’instruire les affaires a joint les deux recours sous le RG 20/04412.

Aux termes de ses dernières conclusions, en date du 19 septembre 2022, la caisse sollicite de la Cour qu’elle:

– confirme le jugement déféré en ce qu’il a condamné M. [C] à lui payer l’intégralité de l’indu,

– infirme le jugement déféré en ce qu’il a annulé la pénalité financière à hauteur de 7 000 euros,

– valide la pénalité financière,

– déboute M. [C] de ses demandes ,

– le condamne au paiement des sommes suivantes :

– 83 269,96 euros, outre les intérêts de droit, des éventuels frais de signification et d’exécution,

– 7 000 euros, outre les intérêts de droit, des éventuels frais de signification et d’exécution,

– 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

La caisse fait valoir :

S’agissant de la régularité de la procédure,

– que le contrôle dont a fait l’objet M. [C] relève de l’article L 224-14 du code de la sécurité sociale, dispensant que l’agent en charge de ce contrôle soit agréé ou assermenté ;

– que ce contrôle ne nécessite pas d’autorisation allégée auprès de la Cnil ;

– que la consultation du SIAM ne porte aucune atteinte aux garanties prévues par la loi informatique et libertés, les données collectées par ce système et les raisonnements mis en oeuvre permettant seulement de déceler des anomalies et étant intégralement retranscrits dans le tableau récapitulatif annexé à la notification d’indu ;

– qu’elle a respecté le principe du contradictoire en adressant plusieurs courriers à M. [C], l’a même contacté téléphoniquement et lui a adressé par mail toutes les pièces afin que ce dernier puisse faire part de ses observations ;

– qu’elle a suffisamment motivé la notification de l’indu qui rappelle toutes les conditions posées par le code de la sécurité sociale. ;

S’agissant de la notification et du bien fondé de l’indu et de la pénalité finanicère,

– que M. [C] reconnaît l’erreur de facturation correspondant à la double facturation ;

– que pour les autres chefs, il appartient à M. [C] de démontrer que ces facturations respectent la réglementation ce dont il ne justifie pas en produisant des prescriptions médicales établies postérieurement au contrôle ;

– qu’ elle a respecté les délais prévus pour la saisine de la commission de pénalités financières, pour demander l’avis du directeur général de l’Uncam ainsi que pour notifier la pénalité financière ;

– que Mme [Y] a bien délégation de signature pour signer les courriers contestés;

– que, s’agissant d’une sanction administrative sans qu’il y ait à démontrer une intention frauduleuse, le montant de la pénalité a été fixé au plus juste et n’est pas disproportionné au regard de la matérialité des faits.

Aux termes de ses dernières conclusions, en date du 24 juin 2022, M. [C] sollicite de la cour qu’elle :

– infirme le jugement déféré en ce qu’il a validé la notification d’indu, a condamné M. [C] au paiement de l’indu ainsi qu’aux dépens et rejeté sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– confirme le jugement déféré en ce qu’il a annulé la pénalité financière,

– annule la procédure de contrôle d’activité,

– annule la notification d’indu litigieuse,

– rejette les demandes et prétentions de la caisse ,

– condamne la caisse à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.

M. [C] fait valoir :

S’agissant de la régularité de la procédure,

– qu’il n’a pas été mis en mesure de présenter utilement ses observations dans un cadre contradictoire en ce qu’il n’a pas eu connaissance des dispositions normatives dont la violation lui était reprochée ;

– que la caisse ne rapporte pas la preuve qui lui incombe en application des dispositions de la loi n° 78-17 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, de première part que les agents qui ont extrait les données la concernant par la mise en oeuvre du système de traitement automatisé des données SIAM disposaient d’une habilitation à cette fin, de deuxième part que les agents auxquels lesdites données ont été transmises étaient agréés et assermentés tel que prévu aux dispositions de l’article L.144-10 du code de la sécurité sociale, de dernière part d’avoir lorsqu’elle a adressé la requête SIAM informé le comité paritaire local de sa motivation, de sa mise en route et de ses résultats ;

S’agissant de la notification et du bien fondé de l’indu et de la pénalité finanicère,

– que la notification de l’indu est insuffisanmment motivée ;

– qu’il incombe à la caisse la charge de la preuve du paiement des actes litigieux et la matérialité des griefs qu’elle lui impute ;

– que, concernant la pénalité financière, les décisions portant pénalité financière sont des sanctions ayant le caractère de punition ; que la présomption d’innocence doit prévaloir et qu’il appartient à la caisse de démontrer les griefs reprochés ;

– que la notification des griefs reçue n’était pas accompagnée de la liste précise et identifiable des actes litigieux ni de toute autre pièce lui permettant de présenter des observations et de solliciter un entretien dans un cadre contradictoire ;

– qu’il n’a pas pu formuler des observations au regard de difficultés rencontrées durant la phase d’instruction ;

-qu’enfin, la caisse n’apporte la preuve ni de la date de réception du courrier de saisine par la commission ni de la notification de la décision à son encontre ni de la saisine dans les délais du directeur général de l’UNCAM pour avis avant l’édiction de la pénalité financière, ni de la compétence de l’auteur de la pénalité financière.

L’affaire a été fixée à l’audience du 7 décembre 2022, pour être plaidée.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées et oralement reprises.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LA REGULARITE DE LA PROCEDURE

Sur le respect des dispositions des articles 4.1 et 6.1.1 de la Charte du contrôle de l’activité des professionnels de santé par l’Assurance-Maladie

Les dispositions de la Charte du contrôle de l’activité des professionnels de santé par l’Assurance- Maladie, dont les articles 1. 1 et 1.2 habilitent la caisse d’assurance maladie à procéder au contrôle de l’activité des professionnels de santé en matière de respect des dispositions des textes juridiques en vigueur hors suspicion de fraude et de contrôle ponctuel d’une facture, d’une demande de remboursement ou d’un accord préalable de prise en charge, singulièrement de la conformité de la facturation aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur et prévoient que le contrôle peut aboutir à l’engagement d’une action en récupération d’un indû, sont applicables à la vérification litigieuse, s’agissant de l’examen des factures et des ordonnances adressées par la société à la caisse aux fins de paiement.

L’article 4.1 dispose ‘ L’Assurance Maladie s’engage à ce que les moyens déployés aussi bien par les caisses que par le Service du contrôle médical respectent des principes éthiques tels que la règle de l’égalité de traitement des acteurs contrôlés sur l’ensemble du territoire, la présomption d’innocence, le secret professionnel, le secret médical partagé pour le service du contrôlemédical, le principe du contradictoire, les droits de la défense.’

Suivant les dispositions de l’article 6.1.1, le directeur de la caisse partage, avant toute notification d’indus et/ou engagement d’une procédure contentieuse, avec le professionnel de santé les résultats motivés du contrôle de son activité et lui indique qu’il dispose d’un délai d’un mois pour demander à être entendu ou pour présenter des observations écrites. Dans les trois mois à compter, en l’absence d’entretien, de l’expiration du délai d’un mois suivant la notification des résultats du contrôle, le directeur ou son représentant adresse au professionnel de santé contrôlé, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, un courrier lui précisant : la période sur laquelle a porté le contrôle, les manquements maintenus à la suite des observations écrites ou orales présentées, les suites envisagées au contrôle. A défaut, la caisse est réputée avoir renoncé à poursuivre le professionnel de santé contrôlé.

En l’espèce, la caisse démontre qu’après lui avoir envoyé trois courriers de demandes d’observations les 6 mars, 7 avril et 5 mai 2017, elle a sur le constat qu’ils n’avaient pas été distribués contacté M. [C] téléphoniquement le 27 avril 2017 puis par courriel le 12 mai 2017 afin de lui adresser tant les courriers précédemment envoyés que les tableaux correspondants à chaque assuré contrôlé afin qu’il puisse faire valoir ses observations et lui retourner des pièces complémentaires dans un délai d’un mois.

Il n’est pas discutable, à la lecture des échanges de courriels, que M. [C] a bien reçu les tableaux querellés en ce que dans son courriel du 12 juin, il sollicite un délai supplémentaire pour répondre à la caisse au motifs de devoir étudier des ‘documents compressés faisant plusieurs centaines de feuilles A4 et évoquant la situation de nombreux patients’. Ce dernier a donc bien été mis en mesure de connaître la nature et la cause des anomalies reprochées au regard de la précision des tableaux communiqués par la caisse qui détaillent le matricule assuré, le nom et prénom du bénéficiaire, la date de la prescription et son numéro, la date des soins, le numéro de facture, la date de mandatement, la nature des actes facturés et ceux justifiés, le montant précis de l’indu et la raison de l’anomalie.

Au surplus, il n’est pas contesté que M. [C] a adressé le 18 juin 2017 par courrier des fichiers comprenant les listings des facturations, des fiches plannings ainsi que des prescriptions et des démarches de soins infirmiers. Il a donc bien été à même de présenter ses observations dans un cadre contradictoire, dans le respect de la Charte du contrôle de l’activité des professionnels de santé par l’Assurance- Maladie

Enfin, la caisse a adressé à M. [C] le 13 juillet 2017 la notification de reversement d’indu et le 11 septembre 2017 un courrier d’engagement de procédure de pénalité financière satisfaisant ainsi aux dispositions de l’article 6.1.1 de la charte sus-mentionnée de sorte que les développements de l’intéressé tenant à l’absence d’information sur les suites données au contrôle sont inopérants.

Il s’ensuit que le moyen tiré de la violation du principe du contradictoire et des droits de la défense soulevé par l’intéressé n’est pas fondé.

Sur l’agrément et l’assermentation au titre de l’article L. 114-10 du code de la sécurité sociale

En application de l’article L. 224-14 du code de la sécurité sociale, les caisses nationales mentionnées aux articles L. 221-2, L. 222-4 et L. 223-2 mettent en oeuvre ou coordonnent des actions de contrôle sur le service des prestations afin de détecter les fraudes et les comportements abusifs. Elles peuvent à ce titre utiliser des traitements automatisés des données relatives au service des prestations. Elles peuvent requérir la participation de leurs organismes régionaux et locaux à ces actions.

Les dispositions de l’article L. 114-10 du code précité, dans leur rédaction issue de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011, qui habilitent les directeurs des organismes de sécurité sociale à confier à des agents assermentés et agréés dans les conditions fixées par voie réglementaire, ainsi qu’à des praticiens conseils et auditeurs assermentés et agréés dans les mêmes conditions, le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l’attribution des prestations et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, ne sont pas applicables aux contrôles de l’observation des règles de tarification et de facturation des actes, prestations, produits, fournitures et frais par les professionnels de santé, les établissements de santé et les prestataires et fournisseurs, qui obéissent exclusivement aux dispositions de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale et aux dispositions réglementaires prises pour leur application.

La vérification litigieuse à laquelle la caisse a procédé ne relevant ni de l’attribution des prestations ni de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles mais de l’étude des factures et des ordonnances adressées par M. [C] à la caisse aux fins de prise en charge relevant de l’article L 224-14 du code de la sécurité sociale, il s’ensuit que le moyen tiré d’un défaut d’agrément ou d’assermentation soulevé par l’intéressé n’est pas fondé.

Sur la régularité du recours au système informationnel de l’assurance maladie (Siam)

La mise en oeuvre des traitements de données à caractère personnel par les organismes gestionnaires des régimes obligatoires de base de l’assurance maladie lors des contrôles de l’observation des règles de tarification et de facturation des actes, prestations, produits, fournitures et frais par les professionnels de santé, les établissements de santé et les prestataires et fournisseurs opérés en application de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, obéit aux seules dispositions des articles L. 161-29, R. 161-31 et R. 161-32 du code de la sécurité sociale et du décret n° 2015-389 du 3 avril 2015 autorisant les traitements automatisés de données à caractère personnel et les échanges d’informations mis en oeuvre par les organismes gestionnaires des régimes obligatoires de base de l’assurance maladie pour l’accomplissement de leurs missions en matière de lutte contre les fautes, abus et fraudes.

Il résulte en outre de la combinaison des article L 161-29, R 161-31 et R 161-32 du code de la sécurité sociale, 1er et 3 du décret n°2015-389 du 3 avril 2015, dont la finalité est la lutte contre les fautes, abus et fraudes des professionnels de santé, notamment, d’une part, qu’ont accès aux systèmes de traitement de données à caractère personnel, les agents intervenant dans la prise en charge des assurés, individuellement habilités par le directeur de l’organisme d’assurance maladie auquel ils appartiennent, et, d’autre part, qu’il n’est pas exigé de l’organisme chargé du contrôle, lorsqu’il met en oeuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel dans le cadre d’un contrôle administratif de facturation auprès d’un professionnel de santé, qu’il saisisse la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) d’une demande d’avis allégée prévue par la délibération de cette commission n°88-31 du 22 mars 1988, ni qu’il justifie auprès du professionnel de santé contrôlé, de l’enregistrement des critères et raisonnement sur lesquels est fondé ce contrôle.

Ces dispositions n’imposent pas à l’organisme social de saisir la CNIL d’une demande d’avis allégée prévue par la délibération de cette Commission n° 88-31 du 22 mars 1988, ni de justifier auprès du professionnel de santé contrôlé, de l’enregistrement des critères et raisonnement sur lesquels est fondé ce contrôle ainsi que d’une information du comité médical paritaire local.

Il en résulte que l’irrégularité du contrôle tirée du défaut d’information du comité paritaire local et de l’absence de demande d’avis allégé de la CNIL n’est pas établie.

Aux termes de l’article R161-32, ‘Les organismes chargés de la gestion d’un régime obligatoire d’assurance maladie sont tenus de prendre toutes les dispositions nécessaires aux fins de préserver, notamment dans le cadre du traitement mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 161-29, la confidentialité des données transmises et traitées aux termes de cet article, et en particulier pour limiter aux seuls personnels habilités l’accès direct aux données médicales relatives aux assurés ou à leurs ayants droit. A cette fin, les directeurs des organismes mentionnés à l’alinéa précédent veillent au respect des dispositions de l’acte autorisant le traitement automatisé, ainsi que des règles limitant l’accès direct aux données médicales des personnels placés sous leur autorité. (…)’ .

Selon l’article 1er du décret n° 2015-389 du 3 avril 2015, pour l’application des dispositions du chapitre IV ter du titre I et du livre I et de la première partie du code de la sécurité sociale relatives au contrôle et à la lutte contre la fraude ainsi que des articles L. 224-14 et L. 315-1 du code de la sécurité sociale et des articles L. 723-2 et L. 723-11 du code rural et de la pêche maritime, les organismes gestionnaires des régimes obligatoires de base de l’assurance maladie sont autorisés à mettre en oeuvre des traitements de données à caractère personnel dont la finalité est la lutte contre la fraude interne et les fautes, abus et fraudes des assurés (…), professionnels et établissements de santé (…), ou toute autre personne physique ou morale autorisée à réaliser des actes de prévention, de diagnostic et de soins, à réaliser une prestation de service ou des analyses de biologie médicale ou à délivrer des produits ou dispositifs médicaux, et à cet effet :

1° Effectuer les opérations nécessaires au calcul des indus et des sanctions et à suivre et analyser des situations administratives, des prestations versées, des soins produits et des biens délivrés ;

2° Elaborer une typologie des risques de fautes, abus et fraudes permettant de mieux cibler les dossiers à contrôler ;(…)

7° Suivre les signalements de suspicions de fautes, abus et fraudes afin de diligenter les contrôles, mener les investigations et, le cas échéant, d’engager des actions contentieuses ou des mesures d’accompagnement ;

8° Suivre les actions contentieuses et les actions de prévention et de lutte contre les fautes, abus et fraudes (…).

Selon l’article 3 du même décret, ont accès aux données des traitements mentionnés à l’article 2 pour leur enregistrement et leur gestion et à raison de leurs attributions respectives et dans la limite du besoin d’en connaître les agents intervenant dans la prise en charge des assurés, individuellement habilités par le directeur de l’organisme d’assurance maladie auquel ils appartiennent; sont destinataires des données mentionnées à l’article 2 strictement nécessaires à l’exercice de leurs missions, dans la limite du besoin d’en connaître, les personnels des partenaires personnes morales mentionnés au 1° du II de l’article 2, habilités par l’autorité responsable de ces partenaires; seuls les organismes autorisés à utiliser le numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques ou un numéro identifiant d’attente comme identifiant des usagers peuvent en être destinataires.

Il résulte de la combinaison de ces textes, dont la finalité est la lutte contre les fautes, abus et fraudes des professionnels de santé, notamment, qu’ont accès aux systèmes de traitements de données à caractère personnel, les agents intervenant dans la prise en charge des assurés, individuellement habilités par le directeur de l’organisme d’assurance maladie auquel ils appartiennent, et, que sont destinataires des données des traitements mentionnés à l’article 1 strictement nécessaires à l’exercice de leurs missions et dans la limite du besoin d’en connaître, notamment les agents de l’Etat ou des organismes de protection sociale mentionnés à l’article L. 114-16-3 du code de sécurité sociale.

L’habilitation susmentionnée procèdant des modalités d’organisation mises en ‘uvre par les organismes de sécurité sociale pour préserver un accès sélectif au SIAM, l’agent qui procède dans le cadre de ses fonctions à la mise en ‘uvre de ce système est présumé disposer de cette habilitation.

Le moyen tiré de l’absence présumée d’habilitation des agents ayant extrait les données nominatives issues du SIAM n’est pas fondé.

Les agents des caisse en charge du contrôle de facturation, étant conduits dans le cadre de leur mission à consulter les donnéees relatives à la prise en charge des assurés, il s’en déduit qu’ils relèvent de la catégorie des agents ayant accés aux systèmes de traitements de données à caractère personnel. Le moyen tiré de l’absence d’élément justifiant de leur appartenance à la direction n’est en conséquence pas fondé.

Il s’ensuit que le contrôle litigieux est parfaitement régulier.

SUR LA NOTIFICATION D’INDU

Selon l’article R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale, issu des dispositions du décret n° 2006-1591 du 13 décembre 2006, la notification de l’indu prévu par les dispositions de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale doit faire l’objet d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, qui précise notamment la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à remboursement.

En l’espèce, la notification du 13 juillet 2017 mentionne le fondement (notification de reversement de prestations indues – articles L.133- 4 et R.133-9-1 du code de la sécurité sociale), la période des soins concernée par le contrôle (du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016) , le montant des sommes réclamées (83 269,96 euros), les sept types d’anomalies relevées et comporte en annexe des tableaux sur support CD-ROM, dont il n’est pas discuté qu’ils en font partie intégrante, récapitulant pour chaque patient, en s’appuyant sur leur matricule, les anomalies relevées, la ou les dates de prescription et les dates des soins, le numéro de facture, la date et le montant du paiement, les actes facturés et les actes justifiés, permettant ainsi à M. [C] de connaître la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que les dates des versements donnant lieu à répétition. Ce dernier, qui a d’ailleurs pu faire valoir ses observations devant la commission de recours amiable, ayant ainsi été mis en mesure de comprendre les motifs des réclamations dès la réception de la notification, ses développements tenant à l’absence d’énoncé précis des griefs et de démonstration, à l’absence d’une motivation suffisante, à l’absence de mention pour chaque type d’anomalie des dispositions législatives et réglementaires sont inopérants.

M. [C] ne peut donc pas utilement se prévaloir d’une irrégularité à ce titre.

SUR LE BIEN FONDE DE L’INDU

Selon l’article 1315 du code civil dans sa version applicable au présent litige, auquel ne déroge pas l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

En l’espèce, la caisse, par la production du tableau récapitulatif, annexé au courrier du 13 juillet 2017, récapitulant pour chaque patient en s’appuyant sur leur matricule les anomalies relevées, la ou les dates de prescription et les dates des soins, le numéro de facture, la date et le montant du paiement, les actes facturés et les actes justifiés, rapporte la preuve qui lui incombe du non respect par M. [C] des règles de tarification et du montant correspondant.

Ce dernier qui se contente de reprocher à la caisse de ne pas justifier des actes sur lesquels elle se fonde et de ne pas rapporter la preuve des réglements dont elle poursuit le recouvrement, ne produit ce faisant aucun élément propre à remettre en cause le bien fondé de l’indû.

En conséquence de ce qui précède, il convient de valider la notification pour son entier montant et faisant droit à la demande en paiement de la caisse de condamner M. [C] au paiement de la somme de 83 269,96 euros. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

SUR LA PENALITE FINANCIERE

En vertu de l’article R. 147-2 du code de la sécurité sociale, ‘lorsqu’il a connaissance de faits susceptibles de faire l’objet de la pénalité financière mentionnée à l’article L. 114-17-1, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles adresse à la personne physique ou morale en cause la notification prévue à cet article par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l’engagement de la procédure mentionnée à l’article L. 315-1, la notification ne peut intervenir qu’à l’issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu’elle dispose d’un délai d’un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites. […]

A l’issue du délai d’un mois à compter de la notification ou après audition de la personne en cause, si celle-ci intervient postérieurement à l’expiration de ce délai, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut : […]

3° Soit, dans un délai de quinze jours, saisir la commission mentionnée au V de l’article L. 114-17-1 et lui communiquer les griefs et, s’ils existent, les observations écrites de la personne en cause ou le procès-verbal de l’audition. Il en informe simultanément cette personne et lui indique qu’elle aura la possibilité, si elle le souhaite, d’être entendue par la commission.

II.-Après que le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou son représentant, accompagné le cas échéant par un représentant du service du contrôle médical ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, a présenté ses observations, et après avoir entendu, le cas échéant, la personne en cause, la commission rend un avis motivé, portant notamment sur la matérialité et la gravité des faits reprochés, la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité ou de chacune des pénalités susceptible d’être appliquée.

La commission doit adresser son avis au directeur de l’organisme local ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles ainsi qu’à la personne en cause dans un délai maximum de deux mois à compter de sa saisine. Ce délai peut être augmenté d’une durée ne pouvant excéder un mois si la commission estime qu’un complément d’information est nécessaire. Si la commission ne s’est pas prononcée au terme du délai qui lui est imparti, l’avis est réputé rendu.

Lors des auditions mentionnées au présent article, la personne en cause peut se faire assister ou se faire représenter par la personne de son choix.

III.-A compter de la réception de l’avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut : […]

2° Soit décider de poursuivre la procédure, auquel cas il dispose d’un délai de quinze jours pour saisir le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie d’une demande d’avis conforme, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, en précisant les éléments prévus dans la notification mentionnée au I et le montant de la pénalité envisagée. A défaut de saisine dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée.

Le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie ou son représentant dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de la demande pour formuler son avis. Il le transmet au directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Si le directeur général ne s’est pas prononcé dans ce délai, son avis est réputé favorable. […]

Si l’avis du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie est favorable, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles dispose d’un délai de quinze jours pour notifier la pénalité à la personne en cause par une décision motivée et par tout moyen permettant de rapporter la preuve de la date de réception. Il en adresse une copie à la commission à titre d’information. A défaut de notification dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée. ‘

M. [C] conteste le respect par la caisse des diverses étapes prescriptes par l’article R. 147-2 sus-mentionné.

Force est de contaster que :

– la caisse a adressé à M. [C] le courrier d’engagement de la procédure des pénalités financières le 11 septembre 2017, courrier détaillant les anomalies relevées de façon précise, visant les dispositions réglementaires et législatives correspondantes, en rappelant le courrier du 13 juillet 2017 de notification de reversement d’indu ainsi que la somme réclamée

– le délai d’un mois imparti au professionnel de santé pour présenter des observations ou solliciter son audition, indiqué distinctement dans le courrier, débutant à compter de la notification du courrier, en l’espèce le 13 septembre 2017 date de présentation du pli à M. [C], peu important qu’il ne soit pas allé le retirer, a bien été respecté en ce que la saisine de la commission des pénalités, le 27 octobre 2017 est intervenue à l’issue de ce délai

– la caisse a avisé M. [C] par courrier recommandé du 27 octobre 2017, distribué le 30 octobre 2017, qu’elle saisissait la commission des pénalités et qu’il y était convoqué le 15 novembre 2017 afin de se prononcer sur son dossier, sans qu’il soit besoin de justifier plus en avant la régularité de la saisine de la commission

– il résulte d’ailleurs de l’avis rendu par la commission que M. [C] s’est présenté devant elle et a pu formuler ses observations, dans le respect du principe du contradictoire

– l’avis rendu étant selon les dispositions de l’article R. 147-2 précité adressé au professionnel de santé par la commission, les développements de M. [C] tenant à l’absence de notification par la caisse sont inopérants

– toutefois, la caisse ne rapportant la preuve qu’elle a saisi le directeur général de l’Union Nationale dans les formes et délais prévus à l’article R. 147-2 précité, la fiche de synthèse Avis DG Uncam qu’elle produit qui ne mentionne ni la date de saisine ni la date de sa réception n’y suppléant pas, la procédure est réputée abandonnée

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions annulant la pénalité financière notifiée à M. [C] le 22 décembre 2017.

SUR LES AUTRES DEMANDES

Le jugement déféré mérite confirmation dans ses dispositions qui condamnent M. [C] aux dépens.

M. [C], qui succombe devant la Cour, est tenu aux dépens d’appel au paiement desquels il sera condamné en même temps qu’il sera débouté de sa demande au titre de ses frais irrépétibles.

L’équité commande de ne pas laisser à la caisse la charge de ses frais irrépétibles. En application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, M. [C] sera condamné à lui payer la somme de 500 euros.

Il n’y a pas lieu de se prononcer actuellement sur les frais d’exécution forcée d’une décision dont l’exposé reste purement hypothétique et qui sont réglementés par l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution qui prévoit la possibilité qu’ils restent à la charge du créancier lorsqu’il est manifeste qu’ils n’étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés, étant rappelé qu’en tout état de cause, le titre servant de fondement à des poursuites permet le recouvrement des frais d’exécution forcée.

En l’absence de signification, il n’y a pas lieu à condamnation à ce titre.

Le jugement déféré sera confirmé de ces chefs.

PAR CES MOTIFS

La Cour

CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions

Y ajoutant

CONDAMNE Monsieur [D] [C] aux dépens d’appel; en conséquence le DEBOUTE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE Monsieur [D] [C] à payer à la caisse primaire d’assurance maladie de la Gironde la somme de 500 euros en remboursement de ses frais irrépétibles

Signé par Marie-Paule Menu, présidente et par Evelyne Gombaud, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

E.Gombaud M.P. Menu

 


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