Présomption d’innocence : 11 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/02244

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Présomption d’innocence : 11 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/02244
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MINUTE N° 23/217

Copie exécutoire à :

– Me Noémie BRUNNER

– Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS

– Me Laurence FRICK

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 11 Avril 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/02244 – N° Portalis DBVW-V-B7G-H3LB

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 mai 2022 par le juge de l’exécution de Schiltigheim

APPELANTE :

S.A.S. AUTOMOBILES [L] GROUP prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Noémie BRUNNER, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Caroline MAINBERGER, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

INTIMÉS :

Maître [J] [O]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Arnaud HOUSSAIN, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

S.C.P. THIERRY RIEGER & [J] [O] ASSOCIES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Arnaud HOUSSAIN, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

Association CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 3] GUTENBERG devenue CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 3] CATHEDRALE, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Laurence FRICK, avocat au barreau de COLMAR, avocat postulant, et Me Serge PAULUS, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 janvier 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

La Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg, ci-avant dénommée la banque, a apporté à la société Cars 67, dont le gérant était Monsieur [X] [H], les concours financiers suivants :

-prêt professionnel du 16 juillet 2016 d’un montant de 50 000 € dont l’objet est le financement et la trésorerie,

-prêt du 12 janvier 2017 d’un montant de 196 000 € en vue de l’acquisition d’un véhicule Rolls-Royce, pour la location,

-prêt du 13 juin 2017 d’un montant de 110 000 € ayant pour objet l’acquisition d’un véhicule Mercédes,

-prêt du 6 janvier 2017 d’un montant de 110 000 € en vue de l’acquisition d’un véhicule Rolls-Royce,

-prêt par acte notarié reçu par Maître [J] [O]  du 11 avril 2019 d’un montant de 253 000 € en vue de l’acquisition d’un véhicule Lamborghini, véhicule de démonstration.

Parallèlement, la banque a, par acte notarié reçu par Maître [J] [O] en date du 29 mars 2019, consenti à la société Automobiles [L] Group , dont le gérant est Monsieur [L] [H], un prêt professionnel d’un montant de 800 000 € en vue de la reprise d’un fonds de commerce.

Par acte du 9 octobre 2019, la société Cars 67 a fait l’objet d’une transmission universelle de patrimoine au profit de la société Automobiles [L] Group.

Le 17 juillet 2020, la société Automobiles [L] Group a bénéficié d’un prêt garanti par l’État d’un montant de 200 000 €.

Par décision en date du 15 décembre 2020, le conseil d’administration de la Fédération du Crédit mutuel centre Est Europe a placé la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg sous administration provisoire pendant six mois avec effet immédiat et a mis fin au mandat de ses président, administrateurs ou conseillers.

Par courrier recommandé en date du 19 février 2021, la banque a notifié à la société Automobiles [L] Group la déchéance du terme avec effet immédiat du prêt notarié souscrit le 11 avril 2019 en se prévalant de la clause d’exigibilité immédiate prévue au contrat qui prévoyait que le prêteur pouvait, sous certaines conditions, se prévaloir de la déchéance du terme en cas de vente ou de disparition du bien financé sans notification préalable au prêteur. Elle a mis en demeure la société de payer la somme de 235 884,13 € en principal dans un délai de 48 heures.

Se prévalant en outre des conditions générales des crédits, stipulant que l’exigibilité immédiate d’un prêt entraîne celle de tous les autres prêts souscrits par l’emprunteur, elle a, par courrier du 30 mars 2021, notifié à la société Automobiles [L] Group, la déchéance du terme de l’ensemble des autres crédits souscrits, avec effet immédiat et a mis en demeure cette société de lui payer la somme de 1 214 790,23 €, à parfaire.

Faute de règlement, que ce soit du débiteur principal ou des cautions, la banque a, les 24 et 25 février 2021, fait pratiquer entre ses propres mains, une saisie conservatoire des sommes qu’elle détient pour le compte de la société Automobiles [L] Group, en exécution de l’acte notarié du 11 avril 2019, contenant soumission à l’exécution forcée immédiate et revêtu de la formule exécutoire, en garantie de sa créance pour un montant en principal de 235 884,13 €.

Ces saisies conservatoire de créances ont été dénoncées à la société Automobiles [L] Group le 1er mars 2021, date à laquelle a été signifiée à cette société copie de l’acte notarié exécutoire.

Par actes d’huissier du 3 mars 2021, la banque a fait signifier entre ses propres mains deux actes de conversion des saisies conservatoires de créances pratiquées, avec demandes de paiement de la somme principale de 235 884,13 €.

Ces actes de conversion ont été signifiés à la société Automobiles [L] Group le 5 mars 2021.

Par assignation délivrée le 10 mars 2021, la société Automobiles [L] Group a saisi le juge de l’exécution près le tribunal de proximité de Schiltigheim d’une demande dirigée contre la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg aux fins de voir, à titre principal, ordonner la mainlevée des saisies conservatoires de créances pratiquées sur le compte bancaire de la société.

Parallèlement, par assignation distincte du 19 mars 2021, la société Automobiles [L] Group a saisi le juge de l’exécution de ce tribunal d’une action dirigée contre la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg afin de voir dire que l’acte de prêt reçu par Maître [J] [O] en date du 11 avril 2019 ne s’analyse pas en un titre exécutoire au sens de l’article L 111-3 du code des procédures civiles d’exécution et voir ordonner en conséquence la mainlevée de l’intégralité des mesures d’exécution forcée pratiquées contre elle sur le fondement de l’acte de prêt irrégulier et, subsidiairement, voir dire que les saisies conservatoires des 24 et 25 février 2021 sont irrégulières pour avoir été diligentées en violation des dispositions de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution et sont inutiles et/ou abusives et voir ordonner en conséquence la mainlevée des actes de conversion des saisies conservatoires en saisie-attribution et voir en tout état de cause condamner la banque au paiement d’une somme de 15 000 € en réparation de son préjudice moral et financier au titre de l’abus de saisie outre 3 500 € au titre des frais irrépétibles.

Les deux instances ont été jointes et par assignation délivrée le 1er avril 2021, la banque a appelé en intervention forcée la SCP Thierry Rieger et [J] [O], notaires associés.

Par décision en date du 24 mai 2022, le juge de l’exécution ainsi saisi a :

-rejeté la demande de la société Automobiles [L] Group aux fins de réouverture des débats,

-déclaré irrecevable la contestation de la société Automobiles [L] Group des saisies conservatoires de créances initiales des 24 et 25 février 2021, régulièrement converties en saisies attributions en date du 3 mars 2021,

-débouté cette société de l’ensemble de ses demandes tendant à voir déclarer nuls ou abusifs les actes de conversion en saisie-attribution du 3 mars 2021, de mainlevées desdites saisies-attribution et prétentions indemnitaires à ce titre,

-condamné la société Automobiles [L] Group à payer à la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg une indemnité d’un montant de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

-débouté la Scp Thierry Rieger et [J] [O], notaires associés, de sa demande au titre des frais irrépétibles,

-constaté l’exécution provisoire,

-condamné la société Automobiles [L] Group aux entiers frais et dépens.

Cette décision a été notifiée à la société Automobiles [L] Group en date du 27 mai 2022 et elle en a interjeté appel suivant déclaration en date du 6 juin 2022.

L’affaire a été fixée à bref délai en application de 1’article 905 du code de procédure civile.

Par dernières écritures notifiés le 9 septembre 2022, la société Automobiles [L] Group conclut ainsi que suit :

Vu les articles L 111-7, L121-2, R523-9 du code des procédures civiles d’exécution, 700 du code de procédure civile et la jurisprudence citée ;

Sur l’appel principal,

-déclarer l’appel recevable,

-déclarer l’appel bien fondé,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré irrecevable la contestation des saisies conservatoires de créances initiales, régulièrement converties en saisies attribution, en ce qu’il l’a déboutée de toutes ses demandes et l’a condamnée aux dépens et au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, statuant à nouveau sur ces points,

-déclarer la demande de la société Automobiles [L] Group recevable et bien-fondée,

A titre principal,

-juger que l’acte de prêt reçu par Maître [J] [O] en date du 11 avril 2019 ne s’analyse pas en un titre exécutoire au sens de l’article L 111-3 du code des procédures civiles d’exécution,

En conséquence,

-ordonner la mainlevée de l’intégralité des mesures d’exécution forcée pratiquées par la Caisse de Crédit mutuel à son encontre, sur le fondement de l’acte de prêt reçu par Maître [J] [O] en date du 11 avril 2019,

A titre subsidiaire,

-déclarer les saisies conservatoire pratiquées par la Caisse de Crédit mutuel selon procès-verbaux de saisie conservatoire des 24 février 2021 et 25 février 2021 irrégulières et diligentées en violation des dispositions de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution,

En conséquence,

-ordonner la mainlevée des actes de conversion des saisies conservatoires en saisies-attribution, selon les actes de conversion signifiés aux tiers saisi le 5 mars 2021 et dénoncés à la société Automobiles [L] Group le 5 mars 2021,

À titre infiniment subsidiaire,

-déclarer inutiles, frustratoires et abusives les mesures conservatoires et leurs actes de conversion,

En conséquence,

-ordonner la mainlevée des actes de conversion des saisies conservatoires en saisies-attribution,

En toute hypothèse,

-condamner la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg à lui payer la somme de 15 000 € au titre du préjudice causé par cette mesure sur le fondement des dispositions des articles L 121-2 du code des procédures civiles d’exécution,

-débouter la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg de l’intégralité de ses demandes,

-condamner la même à lui payer la somme de 3 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance,

-condamner la Caisse de Crédit mutuel aux dépens de première instance,

Sur l’appel incident de la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg

-déclarer l’appel incident sans objet,

-le rejeter,

Sur l’appel incident de la SCP Rieger-[O] et Maître [J] [O]

-déclarer l’appel incident mal fondé,

-le rejeter

En tout état de cause,

-débouter la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg ainsi que la SCP Rieger-[O] et Maître [J] [O] de l’intégralité de leurs demandes,

-condamner la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg aux dépens d’appel et à lui payer la somme de 3 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel.

Au soutien de son appel, la société Automobiles [L] Group énonce, en préambule, qu’elle fait, comme une vingtaine de sociétés dont Monsieur [H] est dirigeant ou associé, l’objet d’un acharnement incompréhensible de la part de la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg suite à des modifications récemment intervenues dans la composition des membres du conseil d’administration et que la juridiction interrégionale spécialisée de Nancy a été saisie d’une enquête pénale visant l’ensemble des protagonistes du litige et impliquant notamment Maître [J] [O] , notaire ainsi que Monsieur [V] [O], son père, président délégué de la Caisse de crédit mutuel, Monsieur [T] [D], ancien directeur de la Caisse de crédit mutuel ainsi que Monsieur [E] [P], courtier en prêts immobiliers, l’ensemble des protagonistes étant mis en examen dans le cadre de cette procédure pénale.

Elle fait ensuite essentiellement valoir  :

-sur la validité du titre exécutoire  : qu’ en vertu de l’article 2 du décret du 26 novembre 1971, les notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels leurs parents en ligne directe sont parties ou qui contiennent quelques dispositions en leur faveur. Or, Monsieur [V] [O], membre du conseil d’administration de la Caisse de Crédit mutuel et président délégué au sein de ce conseil est en réalité le président de fait du conseil d’administration de la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg. Ainsi son fils, M° [J] [O], notaire, avait

interdiction de recevoir l’acte de prêt du 11 avril 2019. Cet acte de prêt ne peut ainsi constituer un titre exécutoire et ne vaut que comme écrit sous signature privée ;

-sur l’irrégularité des saisies conservatoires : que la contestation de la saisie conservatoire n’étant enfermée dans aucun délai légal, elle est parfaitement recevable en sa contestation, nonobstant la conversion des saisies  ; que la saisie conservatoire du 24 février 2021 porte sur un compte numéro 216 734 01 dont la société Automobiles [L] Group n’est pas titulaire ; qu’elle n’a pas été destinataire d’un acte de dénonciation de la saisie conservatoire de son compte n° 216 743 01 pour un montant de 100 320,56 €, qu’il n’existe pas de circonstances menaçant le recouvrement de la créance dès lors qu’ elle s’est toujours acquittée de ses obligations de paiement des échéances du prêt et que la banque dispose de nombreuses garanties ; de même que la banque n’a subi aucune perte financière du fait que le bien financé a été vendu alors qu’il est normal, dans le cadre d’une activité de négoce de voitures, d’observer des flux de stocks ; que le risque d’insolvabilité n’est pas caractérisé alors même que l’étude prévisionnelle de l’année 2021 se révèle très positive ; qu’au surplus, la banque, qui ne dispose pas d’un pouvoir discrétionnaire pour apprécier les conditions de déchéance du terme, n’a pas mis en ‘uvre de bonne foi la clause de déchéance du terme de sorte que les saisies conservatoires sont abusives ;

-sur le caractère inutile, frustratoire et abusif de la conversion des saisies conservatoires en saisie-attribution : que la banque a abusé de son droit en faisant pratiquer des mesures conservatoires quelques jours seulement après la notification de la déchéance du terme, de sorte qu’elle a été privée de toute possibilité de formuler ses observations quant au bien-fondé de cette déchéance, de proposer un éventuel échéancier de paiement ou la constitution d’une garantie ; qu’elle s’est toujours acquittée de ses obligations de remboursement ; que par ailleurs, la banque dispose de nombreuses garanties dont chacune porte sur un montant excédant le montant global de sa prétendue créance ; que la banque a procédé à la conversion des saisies conservatoires en saisies-attribution en violation de son obligation légale d’avertir aussitôt le débiteur ; que le laps de temps très court écoulé entre les saisies conservatoires et leur conversion, à savoir 48 heures, démontre que la saisie conservatoire était dépourvue de tout intérêt  ; qu’enfin, la banque ne peut pas lui faire payer les erreurs commises dans la gestion interne de ses services, qui ont conduit à des licenciements pour avoir notamment accordé des crédits en méconnaissance des règles prudentielles en vigueur et de manière non conforme aux règles des dispensateurs de crédit, ce qui a été jugé par le tribunal administratif de Strasbourg dans un jugement en date du 6 décembre 2021,

-sur le préjudice subi : que du fait de la mise en ‘uvre par la banque des mesures d’exécution abusives elle se trouve dans l’impossibilité de faire face à ses propres engagements (fournisseurs, salariés, bailleur…).

Par dernières écritures notifiées le 4 novembre 2022, la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3]  Cathédrale  conclut, au visa des articles L 111-3, L 111-7, L 121-2, R211-1 du code des procédures civiles d’exécution, de l’article 700 du code de procédure civile et de la jurisprudence citée, à la confirmation de la décision entreprise sauf en ce qu’elle a implicitement rejeté la demande de déclarer le jugement opposable à Maître [J] [O] et la Scp Rieger et [O] et demande à la cour, statuant à nouveau de :

-déclarer l’appel incident recevable et bien fondé,

-déclarer le jugement du 24 mai 2022 opposable à la Scp Rieger et [O],

-réserver les droits de la Caisse de crédit mutuel à saisir le juge compétent pour rechercher la responsabilité de la Scp Rieger et [O],

En tout état de cause,

-déclarer l’arrêt à intervenir opposable à Maître [J] [O] et à la Scp Rieger et [O],

-débouter la société Automobiles [L] Group de l’ensemble de ses demandes,

-la condamner aux entiers dépens de l’instance et à lui payer la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

En préambule, la partie intimée énonce qu’elle est victime, y compris en son sein, d’une vaste fraude commise à son préjudice, qui s’est révélée à la fin de l’année 2020, et se réfère de ce chef à un communiqué de la juridiction interrégionale spécialisée de Nancy, dans un communiqué publié dans un journal local le 8 janvier 2021, faisant état d’une enquête ouverte « pour escroqueries en bande organisée sur les circonstances dans lesquelles de nombreux crédits ont été accordés par la Caisse locale de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg à plusieurs dizaines de sociétés civiles crées par des membres de quelques familles d’origine étrangère, en vue de l’acquisition de biens immobiliers ».

Elle fait essentiellement valoir que :

-sur la validité du titre exécutoire : que Monsieur [V] [O], père de Maître [J] [O], notaire, n’est pas intervenu à l’acte de prêt puisque le pouvoir conféré à la préposée de l’étude notariale pour signer l’acte pour le compte de la banque a été régularisé par son ex-directeur Monsieur [T] [D] et son président Monsieur [R] [A] ; qu’au surplus, l’acte ne contient aucune disposition en faveur de Monsieur [V] [O],

-sur la validité des actes de conversion : l’acte de conversion entraînant attribution immédiate des fonds saisis conservatoirement, le débiteur saisi ne peut plus contester la régularité de la saisie conservatoire postérieurement à la signification de l’acte de conversion,

-à titre subsidiaire sur la validité des saisies conservatoires des 24 et 25 février 2021 : l’erreur matérielle affectant l’acte de saisie du 24 février 2021 en ce qu’il est visé un compte-courant professionnel numéro 2016 734 01 alors qu’il s’agissait en réalité du compte 216 743 01 n’affecte en aucun cas la validité de la saisie alors que la société Automobiles [L] Group n’est titulaire que d’un seul compte ouvert dans les livres de la Caisse de crédit mutuel et en tout état de cause, il n’est pas prouvé le grief justifiant l’annulation de la mesure conservatoire. L’acte de dénonciation est également affecté d’une erreur matérielle qui n’emporte pas de conséquences. Les circonstances menaçant le recouvrement de la créance seraient justifiées par le comportement de Monsieur [H],

-sur l’absence de caractère abusif des saisies conservatoires : le comportement de Monsieur [H] a donné à voir qu’il n’avait pas l’intention de régler la créance de sorte que la banque a estimé nécessaire de protéger ses chances de recouvrement, même si les échéances de remboursement du prêt avaient toujours été remboursées et qu’elle disposait d’autres garanties. Elle a agi dans le cadre des stipulations contractuelles, et non de mauvaise foi, pour prononcer la déchéance du terme et la société Automobiles [L] Group ne peut se prévaloir de sa propre turpitude alors qu’il résulte d’un arrêt de la chambre de l’instruction de Nancy que [L] [H] avait largement bénéficié de la fraude mise en ‘uvre par les dirigeants de la banque.

Par dernières écritures notifiées le 27 décembre 2022, Maître [J] [O] et la SCP Rieger et [O] associés ont demandé à la cour de :

Statuant sur l’appel principal,

-rejeter l’appel principal de la société Automobiles [L] Group et confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la contestation du procès-verbal d’indisponibilité du certificat d’immatriculation de 13 véhicules lui appartenant auprès de

l’autorité préfectorale du 23 avril 2021, établi pour le compte de la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg, en tant qu’elle est fondée sur l’allégation que l’acte de prêt du 29 mars 2019, reçu par Maître [J] [O], agissant en qualité de notaire associé à la SCP, ne vaudrait pas titre exécutoire,

Statuant sur l’appel incident formé par la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg,

-dire l’appel incident sans objet,

En conséquence,

– le rejeter,

Statuant sur l’appel incident formé par Maître [J] [O] et la Scp Rieger-[O],

-déclarer recevable et bien-fondé cet appel incident,

En conséquence,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté l’office notarial de sa demande au titre des frais irrépétibles de conseil,

Et statuant à nouveau de ce chef,

-condamner la société Automobiles [L] Group au paiement d’une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

En tout état de cause,

-condamner la partie succombante en appel au paiement d’une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de l’instance d’appel.

Au soutien, ils font essentiellement valoir que le père de Maître [J] [O], qui n’était que membre du conseil d’administration et bénéficiait d’un titre purement honorifique de président délégué de ce conseil, n’est nullement intervenu à l’acte pour représenter directement ou indirectement la Caisse de crédit mutuel ; que le contrat de crédit ne prévoyait aucune stipulation en sa faveur ; que l’allégation suivant laquelle Monsieur [V] [O] est en réalité le président de fait du conseil d’administration de la Caisse de Crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg n’est nullement établie ; qu’en tout état de cause, un dirigeant de fait ne saurait être assimilé à un représentant légal au regard de l’article 2 du décret 71-941 du 26 novembre 1971 ; que la production aux débats d’un extrait de l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Nancy du 10 mars 2022 se heurte au principe du secret de l’instruction et enfreint le

principe de la présomption d’innocence, alors même qu’une telle décision n’a pas autorité de chose jugée ; qu’il en résulte que la banque dispose bien d’un titre exécutoire.

La société Automobiles [L] Group a transmis à la cour en date du 23 mars 2023 une note en délibéré accompagnée d’une pièce nouvelle.

Tant la Caisse de crédit mutuel que la SCP Thierry Rieger et [J] [O] ont demandé à la cour d’écarter cette note en délibéré.

MOTIFS

Vu les dernières écritures des parties ci-dessus spécifiées et auxquelles il est référé pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, en application de l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu les pièces régulièrement communiquées ;

Sur la recevabilité de la note en délibéré

L’article 445 du code de procédure civile dispose qu’après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations, si ce n’est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444.

Dès lors, la note en délibéré accompagnée d’une pièce nouvelle, déposée par la société appelante en cours de délibéré, doit être déclarée irrecevable.

Sur la validité du titre exécutoire

En vertu de l’article L111-2 du code des procédures civiles d’exécution, le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution.

Aux termes des dispositions de l’article L111-3 du même code, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires.

En l’espèce, il convient de préciser que :

-M° [J] [O], notaire, a , le 11 avril 2019, reçu un acte de prêt, portant soumission par l’emprunteur à l’exécution forcée, conclu entre l’association Caisse de Crédit Mutuel [Localité 3] Gutenberg d’une part et la société Cars 67 d’autre part, prêt d’un montant de 253 000 € destiné à financer l’acquisition d’un véhicule de démonstration Lamborgini Urus, remboursable en 120 men- sualités de 2 371,78 € l’une.

-cet acte authentique prévoyait, au chapitre « déchéance du terme du crédit pour autres motifs» (autres que ceux tenant à l’inexécution des engagements par l’emprunteur) que le prêteur pourra sur simple notification prononcer la déchéance du terme du crédit et exiger le remboursement immédiat de toutes sommes restant dues au titre du crédit si l’un des événements listés ci-après remet en cause la situation financière de l’emprunteur au vu de laquelle le crédit a été octroyé :…. cession, vente, échange, donation, apport en totalité ou en partie, ou disparition du bien financier ou donné en garantie, sans notification préalable de l’événement au prêteur,

– Monsieur [H], responsable légal de la société Automobiles [L] Group, a parfaitement reconnu avoir vendu le véhicule Lamborghini financé par le contrat de prêt litigieux sans en avoir informé la banque et sans avoir affecté le produit de la vente au remboursement du crédit ,

-le 17 février 2021, la banque a notifié à la société Automobiles [L] Group, venant aux droits de la société Cars 67, la déchéance du terme et l’exigibilité immédiate des sommes restant dues au titre du contrat de prêt du 11 avril 2019 en se prévalant de l’absence de notification de la vente du véhicule financé et le défaut d’affectation du produit de la vente au remboursement du crédit. Il convient en préambule de relever que l’appelante ne remet expressément en cause le caractère exécutoire de l’acte notarié du 11 avril 2019 qu’en tant qu’auraient été méconnues les dispositions de l’article 2 du décret 71-941du 26 novembre 1971.

Si elle remet en cause, dans le cadre de la discussion concernant la contestation des saisies conservatoires, notamment en faisant valoir l’absence de menace sur le recouvrement, le caractère bien fondé du prononcé de la déchéance du terme par la banque, en faisant valoir essentiellement que la banque a agi de mauvaise foi et de façon discrétionnaire en prononçant la déchéance du terme, que sa situation financière ne s’est pas trouvée dégradée par la vente du véhicule financé, qu’elle a toujours respecté les échéances de remboursement et que la banque disposait de garanties suffisantes, elle n’en tire aucune conséquence juridique quant à l’existence d’un titre exécutoire.

En effet, comme devant le premier juge, l’appelante, pour conclure à l’inexistence d’un titre exécutoire et solliciter en conséquence la mainlevée des mesures d’exécution forcée pratiquées, invoque exclusivement la violation des dispositions de l’article 2 du décret 71-941du 26 novembre 1971 qui prévoient que les notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels leurs parents ou alliés, en ligne directe, à tous les degrés, et en ligne collatérale jusqu’au degré d’oncle ou de neveu inclusivement, sont parties, ou qui contiennent quelque disposition en leur faveur.

Elle fait valoir que les relations de famille existant entre le notaire instrumentaire et le président délégué de la Caisse de crédit mutuel et membre influent du conseil d’administration, interdisaient au premier nommé de recevoir le contrat de crédit litigieux.

Il ressort en l’espèce des productions que Monsieur [V] [O], père de [J] [O], a assumé la présidence du conseil d’administration de la Caisse de crédit mutuel durant plus de trente ans ; que par arrêt en date du 31 octobre 2012, la Cour de cassation, première chambre civile, a confirmé un arrêt de la cour d’appel de Colmar qui avait considéré que ne valait pas titre exécutoire un acte de prêt reçu par Maître [J] [O] alors que Monsieur [V] [O], son père, était intervenu à l’acte en tant que président du conseil d’administration de la CCM dont il était le représentant légal ; que le mandat de président du conseil d’administration de Monsieur [V] [O] a ensuite pris fin, celui-ci demeurant membre du conseil d’administration et ayant reçu le titre de président délégué, le plaçant dans l’organigramme de la banque au deuxième rang, devant le vice président du conseil d’administration.

Pour autant, il est constant que le contrat de prêt notarié litigieux du 11 avril 2019, reçu par M° [J] [O], a été conclu entre, d’une part, la société Cars 67, aux droits de laquelle est la société Automobiles [L] Group, et, d’autre part, la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg, représentée à l’acte par Mademoiselle [N] [B], notaire assistante, en vertu d’une délégation de pouvoir délivrée par Monsieur [T] [D], directeur et par Monsieur [R] [A], président du conseil d’administration.

Monsieur [V] [O], père du notaire instrumentaire, n’est pas intervenu à l’acte litigieux et n’aurait pu y intervenir comme n’ayant pas, en sa qualité de président délégué voire d’administrateur, pouvoir de représentation et d’engagement de la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg, association coopérative à responsabilité limitée.

Pour étayer son allégation suivant laquelle Monsieur [V] [O] était en réalité le président de fait de la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg, Monsieur [A], président, n’étant en réalité qu’un « homme de paille », la société Automobiles [L] Group se réfère essentiellement à un certain nombre de courriers adressés aux sociétés du « groupe [H] », tous cosignés par Monsieur [V] [O] et surtout à un arrêt rendu par la chambre de l’instruction de Nancy en date du 10 mars 2022, statuant sur un appel interjeté à l’encontre d’une décision du juge des libertés et de la détention ayant placé Monsieur [J] [O] sous contrôle judiciaire, dont elle produit un extrait.

Cet arrêt intervient dans le cadre d’une vaste enquête pénale ouverte des chefs d’abus de confiance et blanchiment dans laquelle sont notamment mis en examen Monsieur [L] [H] et Messieurs [O] père et fils.

L’extrait produit dudit arrêt énonce que malgré avertissement délivré par la Cour de cassation le 31 octobre 2012, Monsieur [V] [O] et Monsieur [J] [O] auraient continué d”uvrer de concert pour favoriser l’obtention de prêts pour le compte de la communauté d’intérêts existant autour de Monsieur [L] [H], Monsieur [V] [O] étant en réalité le président de fait du conseil d’administration aux dires de Monsieur [T] [D] et de Monsieur [E] [P].

Or, la société Automobiles [L] Group, tout comme la banque au demeurant, qui ne peut en outre en aucun cas se prévaloir d’une communication régulière à sa personne de l’arrêt de la chambre de l’instruction de Nancy alors qu’aux termes de l’article 114 du code de procédure pénale, seules les copies des rapports d’expertise peuvent être communiquées par les parties ou leurs avocats à des tiers pour les besoins de la défense, ne pouvait pas produire, au demeurant de manière tronquée, ledit arrêt, rendu dans le cadre d’une information judiciaire en cours, dans la présente instance civile.

Il ne peut donc être tenu compte, dans la présente instance, des énonciations de l’arrêt de la chambre de l’instruction de Nancy, qui ne sont au demeurant en rien revêtues de l’autorité de chose jugée quant à la matérialité des faits pour lesquels Messieurs [O] père et fils sont mis en examen.

Au final, force est de constater que la cour ne dispose pas des éléments d’appréciation nécessaires et suffisants pour retenir que Monsieur [V] [O] était dirigeant de fait de la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg et que Maître [J] [O] aurait, de ce fait, instrumenté en méconnaissance de l’interdiction prévue par le texte précité.

Enfin, il n’est pas justifié que l’acte litigieux aurait contenu des dispositions en faveur de Monsieur [V] [O], l’allégation suivant laquelle celui-ci, en sa qualité de président délégué et membre du conseil d’administration, aurait profité du prêt litigieux au travers du bénéfice qu’en aurait retiré la banque, n’apparaissant pas à cet égard pertinente.

Il résulte de l’ensemble de ces énonciations que la société Automobiles [L] Group échoue dans sa contestation de la validité du titre exécutoire pour méconnaissance des dispositions de l’article 2 du décret 71-941du 26 novembre 1971.

Sur la contestation des saisies conservatoires et la demande subséquente en mainlevée des actes de conversion des dites saisies conservatoires en saisie-attribution

Il résulte des articles L523-2 et R. 523-7 du code des procédures civiles d’exécution que, lorsque la saisie conservatoire porte sur une créance, le créancier, muni d’un titre exécutoire constatant l’existence de sa créance peut en demander le paiement et que cette demande emporte attribution immédiate de la créance et convertit la mesure conservatoire de créance en saisie-attribution.

L’appelante persiste à hauteur d’appel à contester les saisies conservatoires des 24 et 25 février 2021 au regard des dispositions de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution et à solliciter pour ce motif la mainlevée des actes de conversion de ces saisies conservatoires en saisie-attribution.

Or, c’est par une juste application de la règle de droit et de la jurisprudence qui en résulte et par des motifs pertinents que la cour adopte, que le juge de l’exécution a énoncé que la conversion d’une saisie conservatoire de créance en saisie-attribution fait obstacle à toute contestation de la saisie conservatoire initiale, si ce n’est en conséquence de l’irrégularité des actes de conversion en saisie-attribution ( cf 2° Civ 5 février 2009, Com 2 mars 2010 , 2° Civ 12 octobre 2006 et 28 juin 2018 ).

En l’espèce, les actes de conversion des saisies conservatoires des 24 et 25 février 2021 sont régulièrement intervenus le 3 mars 2021 et n’ont fait l’objet d’aucune contestation à titre principal, leur mainlevée n’étant sollicitée qu’en conséquence de l’irrégularité prétendue des saisies conservatoires au regard des dispositions de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution.

Il en résulte que la société Automobiles [L] Group n’est pas recevable à contester la régularité des saisies conservatoires des 24 et 25 février 2021 et qu’elle doit être déboutée de sa demande, formée en conséquence de l’irrégularité prétendue des dites saisies conservatoires, en mainlevée des actes de conversion des saisies conservatoires en saisie-attribution.

La décision déférée sera confirmée de ce chef.

Sur la demande visant à voir déclarer abusives et inutiles les mesures conservatoires et les actes de conversions et obtenir consécutivement la mainlevée des actes de conversion

En vertu de l’article L111-7 du code des procédures civiles d’exécution, le créancier a le choix des mesures propres à assurer l’exécution ou la conservation de sa créance. L’exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation.

En application de l’article L121-2 du code des procédures civile d’exécution, le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages intérêts en cas d’abus de saisie.

En l’espèce, il a déjà été dit pour droit que la conversion des saisies conservatoires en saisie-attribution fait obstacle à toute contestation des saisies conservatoires dont il ne peut plus être jugé qu’elles auraient eu un caractère abusif.

La société Automobiles [L] Group ne démontre pas qu’en mettant en ‘uvre les saisies attribution litigieuses, la banque aurait abusé de son droit en tant que créancier. Contrairement à ce qu’elle soutient, la banque n’avait nullement l’obligation de lui signifier immédiatement les actes de conversion. En effet, aux termes de l’article R523-8 du code des procédures civiles d’exécution, la copie de l’acte de conversion est signifiée au débiteur, sans que le texte ne prévoit un délai particulier et c’est à partir de cette signification que court le délai de quinze jours ouvert au débiteur pour contester l’acte de conversion.

La société Automobiles [L] Group est mal fondée à soutenir qu’elle a été privée du droit de formuler ses observations quant au bien-fondé de la déchéance du terme alors qu’elle avait la faculté au contraire de contester le bien-fondé du prononcé de la déchéance du terme dans le cadre de la contestation des mesures de conversion en remettant en cause, à ce titre, l’existence d’un titre exécutoire fondant les mesures de conversion, ce qu’elle n’a pas fait, ainsi qu’il a été déjà énoncé supra.

Par ailleurs, la circonstance que le prêt était remboursé est sans incidence sur le caractère prétendument abusif des actes de conversion.

Si le prêt litigieux était en effet, comme le soutient l’appelante, assorti d’un certain nombre de garanties, à savoir le cautionnement solidaire de Monsieur [L] [H] et de la SCI [L] pour un montant de 303 600 € avec affectation hypothécaire d’un bien appartenant à cette société à Hoenheim, il n’en demeure pas moins qu’il n’est pas justifié du patrimoine réel de Monsieur [H] et que l’inscription hypothécaire sur l’immeuble appartenant à la Sci [L], dont il est le gérant, n’intervient qu’en cinquième rang.

Il ne peut donc être admis que les mesures d’exécution pratiquées sur le compte bancaire de la société Automobiles [L] Group, et qui se sont révélées fructueuses, auraient excédé ce qui se révèle nécessaire pour obtenir paiement de la créance dont se prévaut la banque, dont il n’est pas établi que le but aurait été de nuire aux intérêts de l’emprunteur.

En vertu de l’article L511-2 du code des procédures civiles d’exécution, le créancier muni d’un titre exécutoire peut faire procéder à une saisie conservatoire et dans ce cas, une autorisation

préalable du juge n’est pas nécessaire.

Dans la présente espèce, la banque a donc pu légalement mettre en ‘uvre les saisies conservatoires querellées.

La société Automobiles [L] Group fait valoir que le délai de 48 heures qui se serait écoulé entre les procès-verbaux de saisie conservatoire et les actes de conversion établirait le caractère inutile de la signification des procès-verbaux de saisie conservatoire.

Cependant, force est de constater que les procès-verbaux de saisie conservatoire ont été signifiés les 24 et 25 février 2021 alors que les actes de conversion sont en date du 3 mars 2021.

C’est ainsi en définitive par une juste analyse des faits de la cause et par des motifs pertinents que la cour adopte que le juge de l’exécution a rejeté les prétentions de la société Automobiles [L] Group au titre du caractère prétendument inutile, frustratoire et abusif des actes de conversion des saisies conservatoires en saisie-attribution, en mainlevées desdits actes de conversion et prétentions indemnitaires à ce titre.

La décision déférée sera donc confirmée.

Sur la demande de la banque tendant à voir déclarer l’arrêt opposable à Maître [J] [O] et l’étude Rieger-[O]

Cette demande apparaît dépourvue d’objet dès lors que Maître [J] [O] et l’étude de notaires Rieger-[O] ont été intimés et sont donc parties à la procédure.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Les dispositions du jugement déféré seront confirmées quant à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens étant observé qu’il ne saurait être fait droit à la demande de Maître [J] [O] et de l’étude Rieger-[O] dirigée à l’encontre de la société Automobiles [L] Group au titre des dispositions de l’article 700 pour les frais irrépétibles de première instance dans la mesure où les demandeurs ont été attraits en la procédure par la banque et non pas par la société Automobiles [L] Group.

Partie perdante à hauteur d’appel, la société Automobiles [L] Group sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche, elle sera condamnée à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à la banque la somme de 1 000 € et à la Scp Rieger-[O] et M° [J] [O] la somme de 1 000 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

statuant publiquement et contradictoirement,

DÉCLARE irrecevable la note en délibéré accompagnée d’une pièce nouvelle déposée par l’appelante le 23 mars 2023, en cours de délibéré,

CONFIRME la décision déférée,

Et y ajoutant,

DECLARE sans objet la demande de la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg, devenue Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Cathedrale, de voir déclarer le présent arrêt opposable à la société civile professionnelle Rieger-[O] et [J] [O],

DEBOUTE la société Automobiles [L] Group de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Automobiles [L] Group à payer sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Gutenberg, devenue Caisse de crédit mutuel [Localité 3] Cathedrale, la somme de 1 000 € et à la société civile professionnelle Rieger-[O] et [J] [O] la somme de 1 000 €,

CONDAMNE la société Automobiles [L] Group aux dépens d’appel.

La Greffière La Présidente

 


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